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Décisions

CJCE, 3e ch., 23 avril 2009, n° C-425/07 P

COUR DE JUSTICE DES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES

Arrêt

PARTIES

Demandeur :

AEPI Elliniki Etaireia pros Prostasian tis Pnevmatikis Idioktisias AE

Défendeur :

Commission des Communautés européennes

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président de chambre :

M. A. Rosas

Avocat général :

M. Mengozzi

Juges :

MM. Ó Caoimh, Klucka, Lõhmus, Arabadjiev (rapporteur)

Avocat :

Me Asprogerakas Grivas

CJCE n° C-425/07 P

23 avril 2009

LA COUR (troisième chambre),

1 Par son pourvoi, AEPI Elliniki Etaireia pros Prostasian tis Pnevmatikis Idioktisias AE (ci-après "AEPI") demande l'annulation de l'arrêt du Tribunal de première instance des Communautés européennes du 12 juillet 2007, AEPI/Commission (T-229-05, ci-après l'"arrêt attaqué"), par lequel celui-ci a rejeté comme non fondé le recours introduit par AEPI visant à l'annulation de la décision de la Commission SG-Greffe (2005) D/201832, du 18 avril 2005, portant rejet de la plainte déposée par la requérante concernant une infraction alléguée aux articles 81 CE et/ou 82 CE commise par les organismes grecs de gestion collective de droits voisins des droits d'auteur dans le domaine de la musique Erato, Apollon et Grammo (ci-après la "décision litigieuse").

Les antécédents du litige

2 Il ressort des points 1 à 12 de l'arrêt attaqué que les faits à l'origine du litige peuvent être résumés comme suit.

3 La requérante est une société anonyme de droit grec exerçant ses activités dans le secteur de la protection des droits de propriété intellectuelle dans le domaine de la musique en Grèce.

4 Le 3 mars 1993, la République hellénique a adopté la loi 2121-1993 relative aux droits d'auteur, aux droits voisins et aux questions culturelles (FEK A' 25/4.3.1993, ci-après la "loi 2121-1993"). En vertu de l'article 54 de cette loi, les auteurs peuvent confier la gestion ou la protection de leurs droits intellectuels à des organismes de gestion collective, dont l'activité est subordonnée à un agrément délivré par le ministère de la Culture grec. L'article 58 de la même loi énonce que les dispositions dudit article 54 sont applicables par analogie à la gestion et à la protection des droits voisins.

5 La requérante a sollicité un agrément pour l'ensemble des droits d'auteur et des droits voisins dans le domaine de la musique. Le ministère de la Culture grec lui a cependant accordé un agrément limité à la gestion collective des droits d'auteur sur les œuvres musicales.

6 Trois organismes grecs de gestion collective des droits voisins, à savoir Erato, Apollon et Grammo (ci-après les "trois organismes"), ont obtenu un agrément pour la gestion collective des droits voisins, respectivement, des chanteurs interprètes, des musiciens exécutants et des producteurs de supports matériels de sons et/ou d'images.

7 Le 22 mars 2001, la requérante a adressé une plainte à la Commission des Communautés européennes visant la République hellénique ainsi que les trois organismes. Elle a, d'une part, soutenu que ces derniers enfreignaient les articles 81 CE et 82 CE dans la mesure où ils commettaient un abus de position dominante et créaient des ententes ainsi que des pratiques concertées (ci-après, ensemble, les "pratiques dénoncées"), et a, d'autre part, demandé le renvoi de la République hellénique devant la Cour pour infraction à l'article 81 CE, au motif que la loi 2121-1993 permettrait auxdits organismes de se livrer aux pratiques dénoncées.

8 Dans sa plainte, la requérante soulignait que la rémunération des droits voisins avait été fixée à un niveau excessif, qui allait jusqu'à 5 % des recettes brutes des stations de radiodiffusion et des chaînes de télévision grecques. Ce comportement constituerait une violation des articles 81 CE et 82 CE, qui lui causerait un préjudice grave et irréparable, dans la mesure où les entreprises concernées ne seraient pas en mesure de payer ces montants excessifs, privant ainsi la requérante de la perception des redevances qu'elle demande pour les droits d'auteur.

9 Par lettre du 7 décembre 2004, la Commission a scindé la plainte en deux volets pour des motifs juridiques et procéduraux, l'un concernant la République hellénique et l'autre les trois organismes.

10 Le 18 avril 2005, après avoir pris en compte les arguments de la requérante, la Commission a rejeté la plainte concernant les trois organismes par la décision litigieuse, pour défaut d'intérêt communautaire.

11 Les considérations pertinentes sur lesquelles se fonde la décision litigieuse sont libellées comme suit:

"Dans le cas d'espèce, l'infraction alléguée n'est pas de nature à provoquer des dysfonctionnements importants du marché commun étant donné que toutes les parties impliquées ont leur siège en Grèce et n'exercent leurs activités qu'en Grèce. Il n'est pas prévisible que cette situation change, c'est-à-dire que les trois organismes [...] commencent à brève échéance à exercer leurs activités dans d'autres pays, vu la structure des [marchés de] services pour la protection des droits voisins et les difficultés pratiques d'une telle entreprise. En outre, les effets des pratiques allégué[e]s ne se produisent que dans le contexte du marché grec. Les contrats [d']utilisation de musique ne se font qu'avec des stations [de] radio et [de] télévision et d'autres utilisateurs qui se trouvent en Grèce. Les trois organismes [...] ne sont compétents que pour la protection des droits voisins en Grèce et n'ont pas la possibilité pratique d'exercer cette compétence [en] dehors [de] ce pays.

D'autre part, afin d'établir une éventuelle infraction[,] la Commission devrait s'engager dans une enquête complexe sur les conditions prévalant dans le marché en cause et les alternatives disponibles. En premier lieu, vu que, d'une part, la loi grecque (en conformité avec la directive 92-100-CEE [du Conseil, du 19 novembre 1992, relative au droit de location et de prêt et à certains droits voisins du droit d'auteur dans le domaine de la propriété intellectuelle (JO L 346, p. 61)], prévoit qu'une rémunération unique [sera] payée pour tous les droits voisins et que, d'autre part, l'infraction alléguée proviendrait du fait que les trois organismes [...] se présentent en commun aux utilisateurs afin de revendiquer cette rémunération, la Commission devrait établir l'éventuelle existence et [l']efficacité de méthodes pour revendiquer séparément le paiement de la rémunération unique. En deuxième lieu, la Commission [devrait non seulement] démontrer la détention d'une position dominante collective par les trois organismes [...], [mais], selon les arrêts de la Cour [du 13 juillet 1989,] Tournier [(395-87, Rec. p. 2521)], ainsi que Lucazeau [e.a. (110-88, 241-88 et 242-88, Rec. p. 2811), [également] enquêter sur les niveaux relatifs des prix des droits d'auteur et des droits voisins dans tous les pays de l'Union, les bases respectives sur lesquelles ils sont calculés, les critères utilisés et les conditions prévalant dans le marché grec par rapport [aux marchés des] autres pays européens.

En outre, il faut noter que votre société a la possibilité de présenter ses griefs devant les autorités nationales. Notamment[,] elle peut saisir de son cas l'autorité grecque de la concurrence. L'autorité grecque de la concurrence serait[,]par sa connaissance approfondie des conditions du marché national[,] parfaitement en mesure de traiter votre plainte. Le fait que toutes les parties impliquées et tous les utilisateurs de musique concernés ont leur siège et exercent leurs activités dans le marché grec renforce l'importance de la connaissance détaillée des conditions du marché local. D'ailleurs, cette autorité a la compétence d'appliquer les articles [81 CE et 82 CE] du même droit que la Commission [...].

Il faut donc conclure que l'étendue et la complexité des mesures d'investigation requises pour constater si le comportement des trois organismes [...] est ou non en conformité avec les règles du droit communautaire de la concurrence sont disproportionnées par rapport à l'importance très limitée d'une éventuelle infraction [sur] le fonctionnement du marché commun. L'affaire ne présente donc pas le degré d'intérêt communautaire requis pour l'ouverture d'une enquête de la part de la Commission."

12 Enfin, le 20 avril 2005, la Commission a décidé de classer le volet de la plainte concernant le prétendu manquement de la République hellénique. Le recours introduit par AEPI contre cette dernière décision a été rejeté par l'ordonnance du Tribunal du 5 septembre 2006, AEPI/Commission (T-242-05), ayant fait l'objet d'un pourvoi qui a lui-même été rejeté par l'ordonnance de la Cour du 10 juillet 2007, AEPI/ Commission (C-461-06 ?).

Le recours devant le Tribunal et l'arrêt attaqué

13 Dans le cadre de son recours en annulation de la décision litigieuse devant le Tribunal, la requérante a invoqué deux moyens, tirés, respectivement, d'une erreur manifeste d'appréciation de l'intérêt communautaire que présentent les pratiques dénoncées et d'une violation de l'obligation de motivation.

14 S'agissant du premier moyen, le Tribunal a jugé, au point 38 de l'arrêt attaqué, que, en ce qui concerne les pouvoirs de la Commission en matière de traitement des plaintes, l'évaluation de l'intérêt communautaire que présente une plainte en matière de concurrence dépend des circonstances factuelles et juridiques de chaque espèce, qui peuvent différer considérablement d'une affaire à l'autre, et non de critères prédéterminés qui seraient d'application obligatoire. Le Tribunal a ajouté que la Commission est appelée, dans le cadre de sa mission consistant à veiller à l'application des articles 81 CE et 82 CE, à définir ainsi qu'à mettre en œuvre la politique communautaire de la concurrence, et dispose à cet effet d'un pouvoir discrétionnaire dans le traitement desdites plaintes.

15 Le Tribunal a souligné, au point 40 de l'arrêt attaqué, que, pour apprécier l'intérêt communautaire, il appartient à la Commission de mettre en balance l'importance de l'infraction alléguée sur le fonctionnement du marché commun, la probabilité de pouvoir établir son existence ainsi que l'étendue des mesures d'investigation nécessaires, en vue de remplir, dans les meilleures conditions, sa mission de surveillance du respect des articles 81 CE et 82 CE.

16 En l'espèce, le Tribunal a constaté, aux points 45 et 46 de l'arrêt attaqué, que, dans la décision litigieuse, la Commission s'était fondée sur trois motifs pour conclure au défaut d'intérêt communautaire que présentent les pratiques dénoncées, à savoir que ces dernières ne seraient pas de nature à provoquer des dysfonctionnements importants dans le marché commun, que la Commission devrait engager une enquête complexe sur les conditions du marché pour établir l'existence de la prétendue infraction et que la protection des droits ainsi que des intérêts de la requérante pourrait être assurée par les autorités nationales compétentes. Le Tribunal a relevé que, dans le cadre de son recours en annulation de la décision litigieuse, la requérante n'a contesté que le premier de ces motifs.

17 Le Tribunal a ensuite procédé à l'examen de ce premier moyen dans les termes suivants:

"47 En conséquence, il convient de limiter l'analyse du Tribunal aux arguments de la requérante selon lesquels elle conteste l'absence d'atteinte au commerce entre États membres, en faisant valoir que l'imposition de redevances d'un montant excessif pour les droits voisins est une pratique susceptible d'affecter le marché commun au sens des articles 81 CE et 82 CE, même si elle est limitée au territoire grec.

48 À ce propos, la Commission a considéré, premièrement, que toutes les parties impliquées dans l'affaire avaient leur siège et exerçaient leurs activités en Grèce, deuxièmement, qu'il était improbable que les activités des trois organismes [...] puissent s'étendre à d'autres pays et, troisièmement, que les utilisateurs de musique avaient la nationalité grecque et que les trois organismes [...] avaient une compétence limitée au territoire grec.

49 Il convient de relever d'emblée qu'aucun des éléments de fait et de droit avancés par la requérante ne permet de démontrer que les pratiques dénoncées exercent une influence sur les courants d'échanges entre États membres dans un sens qui pourrait nuire à la réalisation des objectifs d'un marché unique. En effet, la requérante se contente d'invoquer les difficultés financières ressenties par les sociétés de gestion des droits d'auteur et par les utilisateurs de musique en Grèce et dans tous les États membres et demeure incapable d'étayer ses affirmations ou, à tout le moins, de présenter des éléments de nature à le faire.

50 S'agissant de l'argument de la requérante selon lequel des dysfonctionnements importants du marché commun découleraient du fait que les droits des créateurs grecs et étrangers sont reversés à des sociétés établies dans l'Union européenne, force est de constater que la compétence des trois organismes [...] est limitée au territoire grec et que, par conséquent, ce sont essentiellement les utilisateurs de musique sur le territoire grec et les créateurs grecs qui subissent les prétendus préjudices découlant des pratiques dénoncées.

51 S'agissant des arguments selon lesquels la Cour aurait déjà jugé que des infractions limitées au territoire d'un État membre étaient susceptibles de constituer une violation des règles de concurrence, il y a lieu de souligner que, dans les affaires ayant donné lieu à ces décisions, l'atteinte au commerce entre États membres découlait soit d'une concertation entre sociétés nationales de gestion de droits d'auteur, qui aurait eu pour effet le refus systématique de l'accès direct à leur répertoire aux utilisateurs étrangers (arrêts Lucazeau e.a., précité, point 17, et Tournier, précité, point 23), soit de l'exclusion de tout concurrent potentiel sur le marché géographique constitué par un État membre (arrêt [du 6 avril 1995,] RTE et ITP/Commission, [C-241-91 P et C-242-91 P, Rec. p. I-743], point 70). En conséquence, les affaires invoquées ne présentent pas de points communs avec la présente affaire.

52 S'agissant d'une prétendue exigence d'uniformité et de proportionnalité entre les États membres en matière de redevances pour les droits voisins, qui serait énoncée par l'arrêt [du 6 février 2003,] SENA [(C-245-00, Rec. p. I-1251)], il convient de relever que, dans cet arrêt (point 34), la Cour s'est, au contraire, prononcée dans le sens d'une absence de définition communautaire de la rémunération équitable et de l'inexistence de raisons objectives justifiant la fixation par le juge communautaire de modalités de détermination d'une telle rémunération.

53 Enfin, s'agissant de l'argument selon lequel la Commission aurait reconnu l'existence d'une infraction aux articles 81 CE et 82 CE, il ressort manifestement du courrier du 10 décembre 2004 et de la décision [litigieuse] qu'il est infondé dès lors que la Commission n'a nullement reconnu l'existence d'une telle infraction.

54 Au vu de ce qui précède, il y a lieu de constater que la requérante n'a produit aucun élément concret établissant l'existence actuelle ou potentielle de dysfonctionnements importants dans le marché commun.

55 Par conséquent, la requérante ne démontre pas que, dans la décision [litigieuse], la Commission a commis une erreur manifeste d'appréciation lorsqu'elle a considéré que les pratiques dénoncées par la requérante produisaient leurs effets dans une large mesure ou même intégralement dans le marché grec, et que, en conséquence, elles n'étaient pas de nature à affecter le commerce entre États membres au sens des articles 81 CE et 82 CE.

56 Le premier moyen doit, par conséquent, être rejeté comme non fondé."

18 S'agissant du second moyen, et en particulier du grief selon lequel la Commission n'avait pas pris position sur l'ensemble des pièces et des arguments présentés, le Tribunal a jugé que celle-ci était seulement tenue d'exposer les considérations juridiques qui revêtaient une importance essentielle pour la prise de décision. Selon le Tribunal, la Commission avait indiqué avec la clarté requise les motifs concrets du rejet de la plainte (points 62 et 63 de l'arrêt attaqué).

19 Partant, le Tribunal a rejeté le recours dans son intégralité.

Les conclusions des parties

20 AEPI conclut à ce que la Cour:

- annule l'arrêt attaqué;

- statue au fond conformément aux conclusions formulées par la requérante dans le cadre de la procédure de première instance ou renvoie l'affaire devant le Tribunal afin qu'il statue à nouveau, et

- condamne la Commission à l'ensemble des dépens.

21 La Commission conclut au rejet du pourvoi et à la condamnation de la requérante aux dépens.

Sur le pourvoi

Sur la recevabilité

22 La Commission conteste la recevabilité du pourvoi, soutenant que tous les moyens de pourvoi recoupent en substance les arguments et les éléments de preuve que la requérante a avancés en première instance sans spécifiquement identifier les erreurs de droit dont serait entaché l'arrêt attaqué.

23 À cet égard, il convient de rappeler que, conformément aux articles 225, paragraphe 1, second alinéa, CE et 58, premier alinéa, du statut de la Cour de justice, le pourvoi est limité aux questions de droit et doit être fondé sur des moyens tirés de l'incompétence du Tribunal, d'irrégularités de procédure devant le Tribunal portant atteinte aux intérêts de la partie requérante ou de la violation du droit communautaire par ce dernier.

24 Il ressort également de la jurisprudence que, dès lors qu'un requérant conteste l'interprétation ou l'application du droit communautaire faite par le Tribunal, les points de droit examinés en première instance peuvent à nouveau être discutés au cours d'un pourvoi. En effet, si un requérant ne pouvait fonder de la sorte son pourvoi sur des moyens et des arguments déjà utilisés devant le Tribunal, la procédure de pourvoi serait privée d'une partie de son sens (voir arrêt du 19 janvier 2006, Comunità montana della Valnerina/Commission, C-240-03 P, Rec. p. I-731, point 107, ainsi que, notamment, ordonnances du 11 novembre 2003, Martinez/Parlement, C-488-01 P, Rec. p. I-13355, point 39, et du 13 juillet 2006, Front national e.a./Parlement et Conseil, C-338-05 P, point 23).

25 En outre, un pourvoi doit indiquer de façon précise les éléments critiqués de l'arrêt dont l'annulation est demandée ainsi que les arguments juridiques qui soutiennent de manière spécifique cette demande (voir arrêt Comunità montana della Valnerina/Commission, précité, point 105, ainsi que, notamment, ordonnances précitées Martinez/Parlement, point 40, et Front national e.a./Parlement et Conseil, point 24).

26 Il y a lieu de constater à cet égard que la requérante a identifié certains points de l'arrêt attaqué, à savoir, notamment, les points 38, 41 à 43, 44 et 54, à l'encontre desquels elle a formulé des arguments juridiques tendant à démontrer que le Tribunal a commis des erreurs de droit.

27 L'exception d'irrecevabilité doit, par conséquent, être écartée.

Sur le fond

28 À l'appui de son pourvoi, la requérante soulève cinq moyens. Le premier moyen est tiré d'un défaut de motivation de l'arrêt attaqué en ce qui concerne le pouvoir discrétionnaire dont dispose la Commission lors de l'examen des plaintes déposées auprès d'elle. Par ses deuxième à quatrième moyens, la requérante soutient en substance que l'arrêt du Tribunal est dénué de fondement et de motivation en ce qui concerne la constatation que le commerce entre États membres n'est pas affecté. Enfin, par son cinquième moyen, la requérante fait valoir que l'arrêt attaqué contient une erreur de droit en ce que l'existence d'un effet, fût-il seulement potentiel, sur le commerce entre États membres suffit à fonder une application des articles 81 CE et 82 CE.

Sur le premier moyen

- Argumentation des parties

29 La requérante invoque un défaut de motivation au point 38 de l'arrêt attaqué, en ce que le Tribunal n'aurait pas examiné si la Commission a respecté, dans la décision litigieuse, les limites du pouvoir discrétionnaire dont elle dispose dans le cadre du traitement des plaintes en matière de concurrence déposées auprès d'elle. En effet, le fait qu'un tel pouvoir lui soit reconnu dans ce cadre ne justifierait pas le rejet du recours, parce que le pouvoir discrétionnaire en question ne pourrait être exercé de manière arbitraire.

30 La Commission rétorque que le Tribunal a motivé de manière précise et complète son appréciation selon laquelle elle a respecté, dans la décision litigieuse, les limites de son pouvoir d'appréciation.

- Appréciation de la Cour

31 Il convient de relever que le Tribunal a considéré, à bon droit, au point 38 de l'arrêt attaqué, que la Commission est appelée à définir et à mettre en œuvre la politique communautaire de la concurrence et dispose à cet effet d'un pouvoir discrétionnaire dans le cadre du traitement des plaintes déposées auprès d'elle (voir, en ce sens, arrêt du 4 mars 1999, Ufex e.a./Commission, C-119-97 P, Rec. p. I-1341, points 88 et 89).

32 Toutefois, il ne saurait en être déduit que le Tribunal a omis d'examiner si la Commission a exercé ce pouvoir dans les limites établies par la jurisprudence.

33 En effet, après avoir rappelé, au point 39 de l'arrêt attaqué, que, selon une jurisprudence constante, lorsque la Commission décide d'accorder des degrés de priorité aux plaintes dont elle est saisie, elle peut arrêter l'ordre dans lequel ces plaintes seront examinées et se référer, en tant que critère de priorité, à l'intérêt communautaire que présente une affaire, le Tribunal a précisé, au point suivant dudit arrêt, que, pour apprécier l'intérêt communautaire, la Commission doit tenir compte des circonstances du cas d'espèce, et notamment des éléments de fait et de droit qui lui sont présentés dans la plainte dont elle est saisie, en mettant en balance l'importance de l'infraction alléguée sur le fonctionnement du marché commun, la probabilité de pouvoir établir son existence et l'étendue des mesures d'investigation nécessaires.

34 À cet égard, le Tribunal a souligné qu'il lui appartient de vérifier, notamment, s'il ressort de la décision litigieuse que la Commission a procédé à une telle mise en balance (point 41 de l'arrêt attaqué).

35 Aux points suivants de l'arrêt attaqué, le Tribunal a précisément effectué une telle vérification.

36 En particulier, le Tribunal a examiné, aux points 46 et suivants dudit arrêt, si la Commission a considéré à bon droit que les pratiques dénoncées n'étaient pas de nature à provoquer des dysfonctionnements importants dans le marché commun afin de conclure au défaut d'intérêt communautaire suffisant à l'instruction d'une plainte par la Commission.

37 Ce faisant, le Tribunal a soumis au contrôle juridictionnel les conditions dans lesquelles la Commission a exercé son pouvoir discrétionnaire.

38 Dans ces conditions, il ne saurait être reproché au Tribunal de ne pas avoir examiné si la Commission a respecté, dans la décision litigieuse, les limites de son pouvoir discrétionnaire lors du traitement des plaintes déposées auprès d'elle. L'arrêt attaqué n'est pas, par conséquent, entaché de défaut de motivation à cet égard.

39 En conséquence, le premier moyen doit être rejeté comme non fondé.

Sur les deuxième à quatrième moyens

- Argumentation des parties

40 Par ses deuxième à quatrième moyens, qu'il convient d'examiner ensemble, la requérante vise les affirmations du Tribunal selon lesquelles, lorsque les effets d'une infraction ne sont ressentis que sur le territoire d'un seul État membre, la Commission serait en droit de rejeter une plainte pour défaut d'intérêt communautaire au motif que cette infraction n'affecterait pas le commerce intracommunautaire.

41 Par ses deuxième et troisième moyens, elle invoque en particulier des erreurs d'appréciation ou un défaut de motivation aux points 41 à 43 de l'arrêt attaqué. En outre, la requérante reproche au Tribunal de s'être fondé, au point 44 de cet arrêt, sur une jurisprudence qui n'aurait aucun rapport avec le droit d'auteur, sans avoir pris en compte une série d'arrêts pertinents qui démontreraient qu'il peut y avoir affectation du commerce intracommunautaire même si l'infraction a lieu exclusivement sur le territoire d'un seul État membre.

42 Dans le cadre de son quatrième moyen, la requérante fait valoir que les articles 81 CE et 82 CE n'excluent pas d'emblée que le commerce intracommunautaire soit affecté si l'infraction a lieu sur le territoire d'un seul État membre. Par ailleurs, elle conteste l'affirmation contenue aux points 49 et 50 de l'arrêt attaqué, selon laquelle elle n'a pas avancé d'éléments de nature à démontrer, d'une part, que les pratiques dénoncées exercent une influence sur les courants d'échanges entre États membres dans un sens qui pourrait nuire à la réalisation des objectifs d'un marché unique et, d'autre part, que ce ne sont pas essentiellement les utilisateurs de musique sur le territoire grec et les créateurs grecs qui subissent les préjudices découlant prétendument des pratiques dénoncées. Elle s'appuie à cet égard, notamment, sur les éléments suivants:

- environ 4 500 entreprises qui auraient utilisé de la musique et auraient acquitté régulièrement les droits d'auteur auraient cessé de diffuser de la musique en raison des prix imposés par les trois organismes en ce qui concerne les droits voisins (5 % pour les droits voisins, pourcentage qu'il conviendrait de comparer avec les 2,2 % demandés par la requérante pour les droits d'auteur). En outre, ainsi que l'aurait affirmé le Monomeles Protodikeio Athinon [tribunal de grande instance à juge unique d'Athènes (Grèce)] dans son jugement n° 5144-2005, la requérante aurait perçu une somme de 5 522 euro par an au titre des droits d'auteur dus pour la musique diffusée dans les avions d'Olympiaki Aeroporia, tandis que les trois organismes auraient demandé à cette compagnie aérienne une somme de 627 563 euro par an au titre des droits voisins dus pour cette même musique, et

- le comportement décrit ci-dessus aurait pour conséquence d'affecter le commerce intracommunautaire dans le domaine des droits d'auteur et des droits voisins parce que 50 % environ de la musique diffusée en Grèce serait de la musique étrangère. Par ailleurs, les auteurs de musique étrangers dont la musique est diffusée en Grèce seraient représentés dans leur ensemble dans cet État membre par la requérante qui percevrait pour leur compte leurs droits dans celui-ci. Ils seraient ainsi privés de recettes importantes en raison des prix exorbitants imposés par les trois organismes.

43 Selon la Commission, il découlerait clairement de la motivation circonstanciée de l'arrêt attaqué que tant le cadre des activités des trois organismes que leurs pratiques n'ont pas suscité le moindre soupçon concernant une influence sensible que ces activités auraient sur le commerce intracommunautaire, contrairement à ce que prétend la requérante.

- Appréciation de la Cour

44 Il y a lieu de rappeler d'emblée que, selon une jurisprudence constante, le Tribunal est seul compétent, d'une part, pour constater les faits, sauf dans le cas où une inexactitude matérielle de ses constatations résulterait des pièces du dossier qui lui ont été soumises, et, d'autre part, pour apprécier ces faits. L'appréciation des faits ne constitue donc pas, sous réserve du cas de la dénaturation des éléments de preuve qui lui ont été soumis, une question de droit soumise, comme telle, au contrôle de la Cour (voir arrêts du 11 février 1999, Antillean Rice Mills e.a./Commission, C-390-95 P, Rec. p. I-769, point 29, ainsi que du 15 juin 2000, Dorsch Consult/Conseil et Commission, C-237-98 P, Rec. p. I-4549, point 35).

45 Par conséquent, les arguments tendant à démontrer l'existence d'une affectation du commerce entre États membres avancés par la requérante, notamment dans le cadre de son quatrième moyen, à savoir le fait qu'elle perçoit en Grèce des droits d'auteur relatifs à l'utilisation de la musique non seulement d'auteurs grecs, mais également d'auteurs établis dans d'autres États membres de l'Union, ainsi que le fait qu'elle procède au versement des droits ainsi perçus, sur la base de conventions de représentation réciproque, à des organismes homologues établis dans d'autres États membres et chargés, comme AEPI, de la gestion collective des droits d'auteur sur les œuvres musicales, ne sauraient prospérer.

46 En premier lieu, ces arguments sont tous d'ordre purement factuel et ne peuvent, par conséquent, être examinés par la Cour dans le cadre d'un pourvoi.

47 En deuxième lieu, la requérante n'a pas reproché au Tribunal d'avoir dénaturé certains éléments de preuve.

48 En troisième lieu, la requérante se borne à contester la constatation du Tribunal selon laquelle elle n'a pas démontré que les pratiques dénoncées sont susceptibles d'affecter le commerce intracommunautaire. Toutefois, les moyens ainsi invoqués s'avèrent en tout état de cause inopérants, étant donné qu'une telle affectation n'entraîne pas en soi des dysfonctionnements importants dans le marché commun. Or, il importe d'observer à cet égard que le Tribunal a rejeté le premier moyen présenté par la requérante à l'appui de son recours en annulation en constatant qu'elle n'avait produit aucun élément concret établissant l'existence actuelle ou potentielle de dysfonctionnements importants dans le marché commun.

49 Il y a lieu de souligner à ce propos que les notions d'affectation du commerce intracommunautaire, d'une part, et de dysfonctionnements importants dans le marché commun, d'autre part, sont deux notions distinctes.

50 S'agissant de la première notion, il ressort du libellé des articles 81 CE et 82 CE que ceux-ci ne sont applicables aux ententes restreignant la concurrence ainsi qu'aux abus de position dominante que si ces ententes et abus sont susceptibles d'affecter le commerce intracommunautaire. L'affectation du commerce entre États membres sert ainsi de critère de délimitation entre le champ d'application du droit communautaire de la concurrence, en particulier les articles 81 CE et 82 CE, et celui du droit national de la concurrence. S'il s'avère que l'infraction alléguée n'est pas susceptible d'affecter le commerce intracommunautaire ou de ne l'affecter autrement que d'une manière insignifiante (voir, en ce sens, arrêts du 23 novembre 2006, Asnef-Equifax et Administración del Estado, C-238-05, Rec. p. I-11125, point 34 et jurisprudence citée, ainsi que du 25 janvier 2007, Dalmine/Commission, C-407-04 P, Rec. p. I-829, point 90 et jurisprudence citée), le droit communautaire de la concurrence et, plus particulièrement, les articles 81 CE et 82 CE ne seront pas d'application.

51 Par ailleurs, il résulte d'une jurisprudence constante que, pour être susceptible d'affecter le commerce entre États membres, un accord entre entreprises doit être tel que, sur la base d'un ensemble d'éléments objectifs de droit ou de fait, il y a lieu d'envisager avec un degré de probabilité suffisant qu'il exerce une influence directe ou indirecte, actuelle ou potentielle, sur les courants d'échanges entre États membres dans un sens qui pourrait nuire à la réalisation des objectifs d'un marché unique entre États membres (voir en ce sens, notamment, arrêt Dalmine/Commission, précité, point 90).

52 Quant à la notion de dysfonctionnements importants dans le marché commun, elle peut constituer l'un des critères d'évaluation de l'existence d'un intérêt communautaire suffisant à l'instruction d'une plainte par la Commission.

53 Ainsi, lorsque la Commission établit l'ordre de priorité de traitement des plaintes dont elle est saisie, elle peut légitimement se référer à l'intérêt communautaire. Dans ce cadre, elle est tenue d'apprécier dans chaque espèce la gravité des atteintes alléguées à la concurrence et la persistance de leurs effets. Cette obligation implique notamment qu'elle tienne compte de la durée et de l'importance des infractions dénoncées ainsi que de leur incidence sur la situation de la concurrence dans la Communauté européenne (arrêt Ufex e.a./Commission, précité, point 93).

54 Par conséquent, dans l'hypothèse où il est conclu à l'existence d'une affectation du commerce intracommunautaire, une plainte portant sur la violation des articles 81 CE et 82 CE sera instruite par la Commission plutôt que par les autorités nationales de la concurrence s'il existe un intérêt communautaire suffisant. Tel pourrait notamment être le cas lorsque l'infraction dénoncée est susceptible de provoquer des dysfonctionnements importants dans le marché commun.

55 S'il est certes vrai, à cet égard, que, dans l'arrêt attaqué, le Tribunal n'a pas distingué de manière nette et précise ces deux notions mais les a confondues, ainsi que l'a relevé M. l'avocat général aux points 40 à 45 de ses conclusions, cette constatation ne saurait toutefois entraîner l'annulation dudit arrêt, dès lors que son dispositif apparaît fondé pour d'autres motifs de droit (voir en ce sens, notamment, arrêts du 9 juin 1992, Lestelle/Commission, C-30-91 P, Rec. p. I-3755, point 28, et du 13 juillet 2000, Salzgitter/Commission, C-210-98 P, Rec. p. I-5843, point 58).

56 En effet, il résulte notamment de la lecture combinée des points 49, 50 et 54 de l'arrêt attaqué que le dispositif de celui-ci apparaît fondé sur des motifs pouvant être résumés dans la constatation, opérée par le Tribunal audit point 54, selon laquelle la requérante n'a produit aucun élément concret établissant l'existence actuelle ou potentielle de dysfonctionnements importants dans le marché commun.

57 Il en découle que, indépendamment des considérations figurant dans l'arrêt attaqué relatives à la question de l'affectation du commerce intracommunautaire au sens des articles 81 CE et 82 CE, le Tribunal a rejeté le recours en raison de l'absence d'éléments concrets établissant l'existence actuelle ou potentielle de dysfonctionnements importants dans le marché commun comme critère d'évaluation de l'existence d'un intérêt communautaire suffisant à l'instruction d'une plainte par la Commission.

58 Dès lors, il ne saurait être soutenu que la confusion caractérisant l'arrêt attaqué, qui, par ailleurs, n'a pas été soulevée par la requérante dans le cadre de son pourvoi, est de nature à empêcher la compréhension des motifs sous-tendant ledit arrêt aux fins de la contestation de la validité de celui-ci ou l'exercice d'un contrôle juridictionnel par la Cour.

59 De même, s'il est vrai que le Tribunal a constaté au point 55 de l'arrêt attaqué que la requérante n'a pas démontré que, dans la décision litigieuse, la Commission avait commis une erreur manifeste d'appréciation lorsqu'elle a considéré que les pratiques dénoncées n'étaient pas de nature à affecter le commerce entre États membres au sens des articles 81 CE et 82 CE, alors que la Commission ne s'est aucunement prononcée sur cette question, il n'en reste pas moins que cette affirmation ne se rapporte pas à la notion de dysfonctionnements importants dans le marché commun.

60 Par ailleurs, eu égard au fait que la Commission n'a pas traité de la question de l'affectation du commerce entre États membres dans la décision litigieuse, il importe d'observer que ladite affirmation du Tribunal n'exclurait donc pas l'application en l'espèce des articles 81 CE et 82 CE par les autorités nationales compétentes.

61 Quant à l'argumentation avancée par la requérante dans le cadre de ses deuxième et troisième moyens, mentionnée au point 41 du présent arrêt, sur la base de différents arrêts de la Cour, force est de constater que la jurisprudence ainsi invoquée n'est pas pertinente en l'espèce.

62 En effet, les arrêts auxquels se réfère la requérante, à savoir ceux du 31 mai 1979, Hugin Kassaregister et Hugin Cash Registers/Commission (22-78, Rec. p. 1869); Tournier, précité; Lucazeau e.a., précité; du 10 décembre 1991, Merci convenzionali porto di Genova (C-179-90, Rec. p. I-5889); du 17 mai 1994, Corsica Ferries (C-18-93, Rec. p. I-1783), ainsi que du 6 avril 1995, RTE et ITP/Commission (C-241-91 P et C-242-91 P, Rec. p. I-743), traitent tous de la notion d'affectation du commerce entre États membres au sens des articles 81 CE et 82 CE.

63 Le seul arrêt cité par la requérante ayant trait à la notion de dysfonctionnements importants dans le marché commun, à savoir l'arrêt du Tribunal du 24 janvier 1995, Tremblay e.a./Commission (T-5-93, Rec. p. II-185), n'est pas non plus pertinent en l'espèce. En effet, il résulte du point 40 de cet arrêt que le Tribunal a annulé une décision de la Commission pour défaut de motivation pour autant que cette décision avait rejeté des plaintes qui dénonçaient un cloisonnement du marché national résultant des contrats de représentation réciproque conclus entre les sociétés de gestion de droits d'auteur des différents États membres. Or, telles ne sont pas les circonstances de l'espèce.

64 Il s'ensuit que les deuxième à quatrième moyens doivent être rejetés.

Sur le cinquième moyen

- Argumentation des parties

65 La requérante conteste l'affirmation figurant au point 54 de l'arrêt attaqué selon laquelle elle n'a produit aucun élément concret établissant l'existence actuelle ou potentielle de dysfonctionnements importants dans le marché commun. Selon la requérante, les articles 81 CE et 82 CE n'exigent pas l'existence d'un dysfonctionnement actuel, un dysfonctionnement potentiel étant suffisant. Elle estime à cet égard, s'appuyant sur certains éléments dont la plupart ont déjà été invoqués dans le cadre du quatrième moyen, que l'affectation potentielle du commerce intracommunautaire est évidente. En conséquence, le Tribunal aurait interprété les articles 81 CE et 82 CE de manière erronée.

66 La Commission rétorque que la requérante procède à une lecture erronée des points 42, 48 à 50, 54 et 55 de l'arrêt attaqué, la référence faite par le Tribunal à l'existence "actuelle ou potentielle" de dysfonctionnements importants dans le marché commun devant être appréciée au regard des éléments de preuve avancés par la requérante.

- Appréciation de la Cour

67 Dans le cadre de son cinquième moyen, la requérante critique l'affirmation du Tribunal, figurant au point 54 de l'arrêt attaqué, selon laquelle elle n'avait produit aucun élément concret établissant l'existence actuelle ou potentielle de dysfonctionnements importants dans le marché commun, tout en se bornant à tenter de démontrer que les pratiques dénoncées affectent potentiellement le commerce intracommunautaire, au sens des articles 81 CE et 82 CE.

68 Or, ainsi qu'il ressort du point 48 du présent arrêt, à supposer même que les pratiques dénoncées affectent potentiellement le commerce intracommunautaire au sens des articles 81 CE et 82 CE, comme le soutient la requérante, une telle affectation n'entraîne pas en soi l'existence potentielle de dysfonctionnements importants dans le marché commun.

69 En conséquence, le cinquième moyen doit être rejeté comme inopérant.

70 Eu égard à ce qui précède, il y a lieu de rejeter le pourvoi dans son ensemble.

Sur les dépens

71 Aux termes de l'article 69, paragraphe 2, du règlement de procédure, rendu applicable à la procédure de pourvoi en vertu de l'article 118 de ce règlement, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s'il est conclu en ce sens. La Commission ayant conclu à la condamnation de la requérante et celle-ci ayant succombé en ses moyens, il y a lieu de la condamner aux dépens.

Par ces motifs, LA COUR (troisième chambre) déclare et arrête:

1) Le pourvoi est rejeté.

2) AEPI Elliniki Etaireia pros Prostasian tis Pnevmatikis Idioktisias AE est condamnée aux dépens.