Cass. soc., 6 mai 2009, n° 07-44.641
COUR DE CASSATION
Arrêt
Rejet
PARTIES
Demandeur :
Gayon (SAS)
Défendeur :
Guarino
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Blatman (faisant fonction)
Rapporteur :
M. Gosselin
Avocat général :
M. Allix
Avocats :
Me Hémery, SCP Gatineau, Fattaccini
LA COUR : - Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 6 septembre 2007), que M. Guarino a été engagé en qualité de VRP exclusif par la société Gayon à compter du 2 juin 1983 ; qu'il a pris acte de la rupture de son contrat de travail le 30 août 2000 en reprochant à son employeur des dysfonctionnements qui lui étaient préjudiciables professionnellement et financièrement ainsi qu'une modification unilatérale de son contrat de travail concernant sa rémunération ; que, licencié le 2 octobre 2000, il a saisi la juridiction prud'homale, notamment, d'une demande de rappel de commissions sur la base du système antérieur à la majoration de 3 % du prix d'achat de chaque produit vendu et d'une demande d'indemnités pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ; que la société a demandé reconventionnellement le paiement d'une indemnité compensatrice de préavis ;
Sur le premier moyen : - Attendu que la société fait grief à l'arrêt de l'avoir condamnée à verser au salarié une somme à titre de rappel de commissions, alors, selon le moyen, que le contrat de travail de M. Guarino fixait entre 0,5 % et 6 % le taux des commissions auquel celui-ci pouvait prétendre en fonction du taux de marque pratiqué, mais ne définissait pas le mode de calcul du taux de marque, puisque, s'agissant du rapport entre les ventes et le coût des ventes, sa détermination dépend de la politique commerciale de la société et ne relève pas du domaine des contrats de travail ; qu'en retenant que la société Gayon était redevable d'un solde de commissions en raison de l'inclusion de frais de stockage de 3 % dans le coût des ventes, ce qui avait eu une incidence sur le taux de marque et sur la rémunération de M. Guarino, au motif que l'employeur ne justifiait pas avoir porté cette revalorisation à la connaissance de son salarié, quand il résultait des constatations du rapport entériné par la cour que les commissions perçues par M. Guarino avaient toujours été calculées conformément aux taux définis par le contrat de travail, la cour d'appel a violé l'article 1134 du Code civil ;
Mais attendu qu'ayant constaté que l'employeur avait majoré de 3 % le prix d'achat de la marchandise, ce qui était de nature, en modifiant le taux de marque des produits, à réduire le montant des commissions que le salarié devait percevoir, la cour d'appel, a pu décider que ce changement du prix des produits constituait une modification du contrat de travail du salarié qui nécessitait son accord pour être mise en œuvre ; que le moyen n'est pas fondé ;
Sur le deuxième moyen : - Attendu que la société fait grief à l'arrêt d'avoir dit que la prise d'acte de la rupture du contrat de travail produisait les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse, alors, selon le moyen : 1°) que lorsqu'un salarié prend acte de la rupture de son contrat de travail en raison de faits qu'il reproche à son employeur, cette rupture produit les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse si les faits invoqués la justifiaient ou d'une démission dans le cas contraire ; qu'en retenant, pour estimer que la prise d'acte de la rupture de son contrat de travail par M. Guarino produisait les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse, que les "conditions de travail difficiles et la perte de certains clients ont nécessairement eu une incidence sur sa rémunération", quand il résultait de ses constatations qu'un seul client, la serrurerie Ernest, avait déclaré le 25 juillet 2000 son intention de ne plus passer de commande à la société Gayon, ce qui ne pouvait avoir eu aucune incidence concrète sur la rémunération de M. Guarino puisqu'il a quitté la société un mois plus tard, la cour d'appel a violé les articles L. 122-4, L. 122-13 et L. 122-14-3 du Code du travail ; 2°) que la société Gayon soutenait (conclusions p. 9 et 10) que le contrat de travail de M. Guarino ne fixait que le taux des commissions auquel celui-ci pouvait prétendre en fonction du taux de marque pratiqué, que les commissions avaient toujours été calculées conformément aux stipulations contractuelles, mais que le contrat ne comportait aucun engagement de la société quant à la définition du taux de marque, puisque sa détermination dépend de la politique commerciale de la société et ne relève pas du domaine des contrats de travail, ce dont la société Gayon déduisait l'absence de toute modification des conditions de rémunération de M. Guarino lorsqu'elle avait majoré le prix d'achat des produits de 3 % de frais de stockage ; qu'en retenant, pour estimer que la prise d'acte de la rupture de son contrat de travail par M. Guarino produisait les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse, que la société Gayon avait modifié les conditions de sa rémunération en agissant sans son accord sur le taux de marque servant de base à la détermination du taux de commission du salarié, sans répondre au moyen démontrant que, faute de détermination contractuelle du taux de marque, sa modification ne nécessitait pas l'accord du salarié ni ne modifiait le contrat de travail, la cour d'appel a violé l'article 455 du Code de procédure civile ;
Mais attendu que la cour d'appel, qui a relevé que les conditions de travail difficiles et la perte de certains clients imputables à l'employeur, de même que la majoration du prix d'achat qu'il avait décidée, avaient eu une incidence sur la rémunération du salarié, a estimé que la rupture du contrat de travail était justifiée ce dont il se déduisait que la prise d'acte de la rupture produisait les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse ; que le moyen n'est pas fondé ;
Par ces motifs, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur le troisième moyen qui ne serait pas de nature à permettre l'admission du pourvoi : Rejette le pourvoi.