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Décisions

CA Paris, Pôle 5 ch. 5, 14 mai 2009, n° 09-03660

PARIS

Arrêt

PARTIES

Demandeur :

France Télécom (SA), Orange Sports (SA)

Défendeur :

Free (SAS), Neuf Cegetel (SA), Ligue de football professionnel, Association nationale des ligues de sport professionnel, SFR (SA), Ministre de l'Economie, de l'Industrie et de l'Emploi

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Deurbergue

Conseillers :

Mmes Le Bail, Mouillard

Avoués :

SCP Grappotte Benetreau Jumel, SCP Duboscq-Pellerin, Mes Olivier, Teytaud

Avocats :

Mes Calvet, Saint-Esteben, Theophile, Bonan, Gunther, Lantourne, Chartier, Freget

CA Paris n° 09-03660

14 mai 2009

La société Free (Free) est un opérateur de communications électroniques, filiale à 100 % du groupe Iliad, qui a été le premier, en 2003, à commercialiser dans les zones dégroupées des offres dites multiservices, dites aussi "Multiplay", ou même "Triple Play" en l'espèce, combinant l'accès à Internet haut débit (ADSL), la téléphonie fixe illimitée par Internet et des services de télévision par ADSL. Elle dispose actuellement d'une base d'abonnés proche de 4 millions qui la place, en qualité de fournisseur d'accès Internet (FAI), en deuxième position en part de marché (25 %) derrière France Télécom.

La société Neuf Cegetel, détenue depuis le 19 juin 2008 par la Société Française de Radiotéléphone (SFR), elle-même filiale à 56 % de Vivendi, qui contrôle également Canal Plus et Vodafone, propose au public une offre d'accès Internet haut débit. Elle aussi a lancé une offre multiservices combinant l'accès à Internet haut débit, la téléphonie fixe, la télévision par ADSL et d'autres services à la carte.

La société France Télécom (France Télécom) est l'opérateur historique de télécommunications en France. Elle commercialise des offres de téléphonie mobile, Internet haut débit et télévision sous la marque Orange, laquelle est devenue depuis 2006 la marque unique du groupe. Elle aussi propose des offres multiservices combinant des services d'accès Internet haut débit, de téléphonie illimitée et de télévision par ADSL. Pour les zones non éligibles à la télévision par ADSL, elle a également mis en place, en juillet 2008, une offre permettant l'accès à des services de télévision numérique par satellite. Depuis 2007, elle s'est lancée dans l'édition de contenus audiovisuels via sa filiale, la société Orange Sports, qui exploite et édite des services de communication audiovisuelle, notamment des émissions de télévision, et en particulier le service Orange Sports Info ainsi que, depuis août 2008, le service Orange Foot, devenu Orange Sports le 10 janvier 2009.

En effet, le 6 février 2008, France Télécom a obtenu, dans le cadre d'un appel à candidatures lancé par la Ligue de football professionnel pour la retransmission des matchs de la ligue 1 de football pour la période 2008/2012, les droits exclusifs sur trois des douze lots pour un montant annuel de 203 millions d'euro, le groupe Canal Plus ayant remporté les neuf autres pour la somme de 465 millions d'euro par an.

La chaine Orange Sports est diffusée à la fois par satellite et sur les réseaux ADSL, sous condition de souscription préalable à un abonnement à l'une des offres Internet haut débit d'Orange. Elle est alors accessible en option payante, à raison de 6 euro par mois.

Estimant que France Télécom et Orange commettent des actes de concurrence déloyale en subordonnant, en violation de l'article L. 122-1 du Code de la consommation, l'abonnement à Orange Foot à la souscription d'un abonnement à Internet haut débit Orange, Free a, après une première tentative infructueuse en référé (ordonnance du président du Tribunal de commerce de Paris, en date du 1er juillet 2008, disant n'y avoir lieu à référé), assigné France Télécom à bref délai, le 30 octobre 2008, pour qu'il lui soit ordonné sous astreinte:

- de cesser de subordonner l'abonnement à Orange Foot à la souscription d'un abonnement à Internet haut débit Orange,

- de diffuser sur son site Internet un communiqué en ce sens,

- d'adresser un courrier à ses abonnés en ce sens,

et demandant une expertise pour apprécier son préjudice commercial ainsi qu'une provision de 5 millions d'euro.

De son côté, la société Neuf Cegetel, qui s'était déjà associée par voie d'intervention volontaire principale à la procédure de référé susmentionnée, a assigné également France Télécom à jour fixe, le 31 octobre 2008, à des fins similaires.

Les affaires ont été jointes.

La Ligue de football professionnel est intervenue volontairement à l'instance au soutien des intérêts de France Télécom et d'Orange Sports, lesquelles se sont opposées aux demandes en réclamant reconventionnellement des dommages et intérêts pour procédure abusive.

Par jugement du 23 février 2009, assorti de l'exécution provisoire, le Tribunal de commerce de Paris a:

- fait injonction à France Télécom, sous astreinte de 50 000 euro par jour de retard pendant 3 mois, à compter du délai d'un mois à compter de la signification du jugement, de cesser de subordonner l'abonnement à Orange Foot à la souscription d'un abonnement Internet haut débit Orange, tout en se réservant le droit de liquider l'astreinte,

- fait injonction à France Télécom de diffuser pendant deux mois un communiqué sur la page d'accueil de son site Internet www.orange.fr. situé au même endroit que les publicités pour son offre Orange Foot, comportant les termes suivants "Par jugement du 23 février 2009, le Tribunal de commerce de Paris a enjoint à la société France Télécom de cesser de subordonner l'accès à sa chaîne Orange Foot à la souscription d'un abonnement Internet haut débit Orange, cette pratique étant constitutive de vente subordonnée interdite par la loi",

- désigné un collège expertal composé de M. Didier Faury, qui le présidera, et M. Jean-Paul Aymar, pour évaluer le quantum du préjudice subi par Free et Neuf Cegetel à partir du nombre d'abonnements à une offre d'accès Internet Orange en même temps qu'à Orange Foot souscrits par désabonnement de Free et Neuf Cegetel et plus généralement du nombre d'abonnements à une offre d'accès Internet Orange souscrits en conséquence de la commercialisation illicite de l'offre Orange Foot et dont Free et Neuf Cegetel ont pu être privées de ce fait,

- débouté Free et Neuf Cegetel de leurs autres demandes de publication,

- débouté France Télécom et Orange Sports, et la Ligue de football professionnel de leurs demandes reconventionnelles,

- condamné France Télécom et Orange Sports à payer à chacune des sociétés Free et Neuf Cegetel la somme de 30 000 euro en application de l'article 700 du Code de procédure civile.

LA COUR,

Vu l'appel de ce jugement interjeté par France Télécom et Orange Sports le 27 février 2009;

Vu l'ordonnance du Premier Président de cette cour, en date du 5 mars 2009, autorisant France Télécom et Orange Sports à assigner à jour fixe pour le 30 avril 2009, à 14 heures

Vu l'ordonnance du Premier Président de cette cour, en date du 31 mars 2009, rejetant la demande de suspension d'exécution provisoire présentée par France Télécom et Orange Sports;

Vu les assignations à jour fixe délivrées respectivement à Free et la Ligue de football professionnel le 11 mars 2009 et à Neuf Cegetel le 23 mars 2009, et les conclusions du 28 avril 2009 par lesquelles France Télécom et Orange Sports soulèvent l'irrecevabilité de la pièce cotée n° 3 de Free et n° 36 de SFR, en ce que sa communication est constitutive de recel de violation du secret professionnel, et poursuivent l'infirmation du jugement et le débouté des demandes de Free et Neuf Cegetel, à qui elles réclament une indemnité de 150 000 euro chacune, en réparation de l'action abusive intentée, et une somme de 30 000 euro, pour chacune d'entre elles, en application de l'article 700 du Code de procédure civile;

Vu les conclusions signifiées le 30 avril 2009 par lesquelles Free soulève l'irrecevabilité de l'intervention volontaire de l'Association nationale des Ligues de Sport Professionnel et du ministre chargé de l'Economie, poursuit la confirmation du jugement en ce qu'il a prononcé des injonctions et retenu le principe de la responsabilité civile de France Télécom et d'Orange Sports à son égard pour concurrence déloyale et, pour le surplus, demande à la cour:

- de lui donner acte de ce qu'elle n'a jamais soutenu que l'application de l'article L. 122-1 du Code de la consommation devait nécessairement conduire France Télécom à la laisser commercialiser la chaîne Orange Sports au sein de ses offres de plan de services,

- d'évoquer l'appréciation du préjudice,

- de juger que l'article L. 122-1 du Code de la consommation n'est pas incompatible avec le droit communautaire,

- de surseoir à statuer et, avant dire droit, de désigner le collège expertal déjà désigné par le Tribunal de commerce de Paris, soit M. Didier Faury, demeurant 140 boulevard Haussmann 75008 Paris, et M. Jean-Paul Aymar, demeurant 5 rue de Castiglione 75001 Paris, experts, avec la mission, tenant compte des travaux déjà effectués à la demande du Tribunal de commerce de Paris, de donner à la cour des éléments pour déterminer le quantum du préjudice subi par elle, à partir du nombre d'abonnements à une offre d'accès Internet Orange en même temps qu'à Orange Sports souscrits par désabonnement de Free et plus généralement du nombre d'abonnements à une offre d'accès Internet Orange souscrits en conséquence de la commercialisation illicite de l'offre Orange Sports dont elle a pu être privée de ce fait, de dire que le collège expertal sera présidé par Monsieur Faury, de fixer à 10 000 euro le montant de la consignation à valoir sur la rémunération du collège expertal, par moitié par Free et Neuf Cegetel, par application des dispositions de l'article 276 du Code de procédure civile, de dire que le rapport de l'expert devra être déposé au greffe dans un délai de 4 mois à compter de la consignation de la provision fixée ci-dessus,

- à tire subsidiaire, de poser une question préjudicielle à la Cour de justice des Communautés européennes afin de déterminer si la directive 2005-29-CE doit être interprétée en ce sens qu'elle s'oppose à une disposition nationale telle que celle de l'article L. 122-1 du Code de la consommation qui interdit les ventes subordonnées d'un vendeur professionnel à un consommateur en fonction des circonstances spécifiques du cas d'espèce et qui portent préjudice au consommateur en raison de leur caractère déloyal,

- en tout état de cause, de rejeter l'intégralité des demandes de France Télécom et Orange Sports à son encontre et notamment les demandes reconventionnelles, de celles de la Ligue de football professionnel et de l'Association nationale des ligues de sport professionnel, enfin de condamner France Télécom, Orange Sports, la Ligue de football professionnel et l'Association nationale des ligues de sport professionnel, chacune, à lui verser une somme de 30 000 euro au titre de l'article 700 du Code de procédure civile;

Vu les conclusions signifiées le 30 avril 2009 par lesquelles SFR, venant aux droits de Neuf Cegetel pour l'avoir absorbée le 31 mars 2009, poursuit la confirmation du jugement et demande à la cour:

- à titre principal, de déclarer l'intervention du ministre chargé de l'Economie irrecevable pour défaut de qualité à agir et défaut de compétence, de constater que l'article L. 122-1 du Code de la consommation est conforme au droit communautaire, que les modalités de commercialisation de la chaîne de télévision Orange Sports, anciennement Orange Foot, sont constitutives d'une vente subordonnée prohibée, que le comportement illicite de France Télécom se double d'actes de concurrence déloyale à son préjudice, de rejeter l'ensemble des demandes de France Télécom et Orange Sports, de la Ligue de football professionnel et de l'ANLSP,

- en conséquence de confirmer le jugement entrepris et, évoquant sur le préjudice subi par elle, de surseoir à statuer sur sa demande de réparation et, avant dire droit sur l'appréciation de ce préjudice, de désigner le collège déjà désigné par le Tribunal de commerce de Paris, soit M. Didier Faury, demeurant 140 boulevard Haussmann 75008 Paris et présidant le collège, et M. Jean-Paul Aymar, demeurant 5 rue de Castiglione 75001 Paris, avec pour mission, tenant compte des travaux déjà effectués à la demande du Tribunal de commerce de Paris, de donner à la cour des éléments pour déterminer le quantum du préjudice subi par elle, à partir du nombre d'abonnements à une offre d'accès Internet Orange en même temps qu'à Orange Sports souscrits par désabonnement de SFR, du nombre d'abonnés à une offre d'accès Internet Orange FAI ayant pu être conservés comme clients par France Télécom du fait de la commercialisation d'Orange Sports et plus généralement du nombre d'abonnements à une offre d'accès Internet Orange souscrits en conséquence de la commercialisation illicite de l'offre Orange Sports et dont elle a pu être privée de ce fait, de fixer à 10 000 euro le montant de la consignation à valoir sur la rémunération des experts par moitié par Free et Neuf Cegetel, de dire que le rapport des experts devra être déposé au greffe dans un délai de 4 mois à compter de la consignation,

- à titre subsidiaire, de surseoir à statuer et de poser la question préjudicielle en interprétation du droit communautaire à la Cour de justice des Communautés européennes, suivante

"Les principes de libre circulation des marchandises et des services de la liberté d'établissement, d'une part, et l'objectif de développement de pratiques commerciales loyales au sein de l'Espace économique européen poursuivis par la Directive, d'autre part, s'opposent-ils au maintien dans la législation française de la prohibition des pratiques de vente subordonnée alors que celle-ci ne détermine pas, par voie législative, les exceptions au principe de prohibition mais laisse au juge le soin d'apprécier si les circonstances de l'espèce permettent de considérer que la vente subordonnée est licite ?",

- en toute hypothèse, de lui donner acte de ce qu'elle ne revendique pas le droit de distribuer commercialement la chaîne Orange Sports, de débouter France Télécom et Orange Sports ainsi que la Ligue de football professionnel et de l'Association nationale des ligues de sport professionnel de toutes leurs demandes, enfin de condamner France Télécom et Orange Sports à lui verser la somme de complémentaire de 50 000 euro au titre de l'article 700 du Code de procédure civile;

Vu les conclusions signifiées le 24 avril 2009 par lesquelles la Ligue de football professionnel demande à la cour de confirmer le jugement en ce qu'il a déclaré son intervention volontaire recevable, de l'infirmer en ses autres dispositions et, statuant à nouveau, de dire l'article L. 122-1 du Code de la consommation inapplicable car contraire à une norme supérieure du droit communautaire, de faire droit aux demandes de France Télécom et Orange Sports, enfin de condamner Free et Neuf Cegetel au paiement de 25 000 euro chacune au titre de l'article 700 du Code de procédure civile;

Vu les conclusions signifiées le 24 avril 2009 par lesquelles l'Association nationale des ligues du sport professionnel (l'ANLSP) demande à la cour, vu l'article 554 du Code de procédure civile, la directive 2005-29-CE du Parlement européen et du Conseil, du 11 mai 2005, relative aux pratiques commerciales déloyales des entreprises vis-à-vis des consommateurs dans le marché intérieur, interprétée par l'arrêt de la CJCE du 23 avril 2009 (aff. C-261-07 et C-299-07), vu le principe de primauté du droit communautaire, vu l'article L. 122-1 du Code de la consommation, de lui donner acte de son intervention en cause d'appel, de confirmer le jugement en ce qu'il a jugé recevable et bien fondée l'intervention volontaire de la Ligue de football professionnel en première instance, d'infirmer le jugement dans toutes ses autres dispositions et de faire droit aux demandes des sociétés France Télécom et Orange Sports et de la Ligue de football professionnel;

Vu les conclusions d'intervention du ministre de l'Economie, en date du 29 avril 2009, par lesquelles ce dernier expose que l'article L. 122-1 du Code de la consommation ne lui paraît pas être la base juridique la plus adaptée pour apporter la réponse appropriée aux préoccupations fondamentales des concurrents d'Orange relatives à la distribution d'Orange Sports, lesquelles touchent à la question de l'exclusivité commerciale, soit au premier chef au droit de la concurrence, précisant qu'il a d'ailleurs saisi l'Autorité de la concurrence d'une demande d'avis à ce sujet ;

Sur ce:

- sur la recevabilité de "l'intervention" du ministre de l'Economie, contestée par Free et SFR

Considérant qu'en vertu de l'article L. 470-5 du Code de commerce, le ministre chargé de l'Economie ou son représentant peut, pour l'application, notamment, de l'article L. 122-1 du Code de la consommation, déposer des conclusions devant les juridictions civiles ou pénales et les développer oralement à l'audience; qu'aux termes des articles 1 et 2 d'un arrêté ministériel du 12 mars 1987 (publié au JO du 13 mars 1987), le ministre peut se faire représenter, pour ce faire, par les chefs de services départementaux de la Concurrence, de la Consommation et de la Répression des Fraudes pour ce qui concerne les affaires traitées par les juridictions du département dans lequel ils exercent leurs attributions, et, en cas d'empêchement de ces derniers, des fonctionnaires désignés par eux, appartenant au cadre A, peuvent les suppléer pour développer oralement à l'audience le conclusions déposées ; qu'il suit de là que la participation à l'instance du ministre, qui a déposé des conclusions écrites signées de Mme Zylbermann, chef du service départemental de la Concurrence, de la Consommation et de la Répression des Fraudes de Paris, lesquelles ont été développées oralement à l'audience par M. Emmanuel Sellier, inspecteur régulièrement désigné à cette fin par Mme Zylbermann le 29 avril 2009, est donc régulière et recevable, peu important en outre qu'il ne formule aucune demande précise dès lors que sa présence aux débats ne revêt pas le caractère d'une intervention au sens des articles 325 et suivants du Code de procédure civile;

- sur la recevabilité de la pièce cotée n° 3 de Free et n° 36 de SFR, contestée par France Télécom et Orange pour violation du secret professionnel

Considérant qu'aucun élément du dossier n'établit que l'avis de l'ARCEP, quand bien même il n'aurait pas encore fait l'objet d'une mesure de publication de la part de cette autorité, soit confidentiel, alors en outre que son existence et son contenu ont déjà été relatés dans la presse (pièce 47 de Free) ; qu'en cet état, et à défaut d'autres éléments, il ne peut être retenu que ce document, dont la cour n'entend pas se servir au demeurant, ait été obtenu dans des conditions illicites ; qu'il n'y a donc pas lieu de l'écarter des débats;

- sur la recevabilité de l'intervention volontaire de l'ANLSP, contestée par Free pour défaut d'intérêt

Considérant que l'ANLSP est une association régie par la loi du 1er juillet 1901 qui réunit différentes ligues de sport professionnel, parmi lesquelles la Ligue de football professionnel, la Ligue nationale de handball, la Ligue nationale de rugby, la Ligue nationale de basket et la Ligue nationale de volley-ball - lesquelles représentent près de 170 clubs professionnels - et qui a pour objet statutaire, notamment, la protection des intérêts généraux des ligues et la promotion du sport professionnel ; qu'elle revendique donc à juste titre un intérêt à intervenir à la présente instance en vue d'obtenir l'infirmation du jugement attaqué qui, selon elle, compromet, d'une part, la continuité d'exploitation des matchs dont les droits sont commercialisés par les ligues de sport professionnel et qui ont été concédés à France Télécom (actuellement la commercialisation de Orange Sports est arrêtée depuis le 24 mars dernier) et, d'autre part, le maintien d'une réelle concurrence sur le marché de l'achat de droits sportifs "dans la mesure où l'intérêt financier et la visibilité de ces mêmes ligues dans les prochaines années en dépendent fortement";

Qu'il suit de là que l'intervention de l'ANLSP, conforme aux dispositions de l'article 554 du Code de procédure civile, est recevable;

- sur le fond

Considérant que France Télécom et Orange Sports soutiennent que l'offre multiservice incluant l'offre Orange Sports constitue un produit unique, excluant de ce fait la qualification de vente subordonnée illicite au sens de l'article L. 122-1 du Code de la consommation, qu'à tout le moins, la commercialisation de l'offre Orange Sports dans le cadre de l'offre multiservices de France Télécom est justifiée par un usage commercial, excluant encore de ce fait la qualification de vente subordonnée illicite au sens de l'article L. 122-1 du Code de la consommation, qu'en tout état de cause, il résulte d'une jurisprudence constante que le droit national doit être interprété de façon telle, quand c'est possible, qu'il soit conforme au droit communautaire, qu'à cet égard, la cour devrait retenir que l'article L. 122-1 du Code de la consommation permet une appréciation au cas par cas, en ce qu'il ne prohibe pas la commercialisation d'un produit unique ou répondant à un usage commercial constant, ce qui est le cas en l'espèce, qu'ainsi, la cour devrait rejeter l'analyse du tribunal qui conduirait inexorablement à constater l'incompatibilité de l'article L. 122-1 du Code de la consommation avec la directive n° 2005-29-CE, ce qu'elle ne ferait qu'à titre infiniment subsidiaire; qu'elles en déduisent qu'elles ne se sont pas rendues coupables d'actes de concurrence déloyale, de sorte que les demandes de Free et SFR doivent être rejetées, et soulignent également l'absence de preuve du lien de causalité et du préjudice prétendument subi du fait de la pratique dénoncée, justifiant l'annulation de l'expertise ordonnée par le jugement;

Considérant que la Ligne de football professionnel et l'ANLSP soulèvent à titre principal l'incompatibilité de l'article L. 122-1 du Code de la consommation avec le droit communautaire, compte tenu de la jurisprudence récente de la Cour de justice des Communautés européennes, et, pour le surplus, se rangent aux observations de France Télécom et Orange quant à l'application de cet article à la pratique en cause;

Considérant que SFR et Free estiment que l'article L. 122-1 du Code de la consommation, en ce qu'il permet une appréciation au cas par cas de la pratique, n'institue pas une interdiction généralisée et ne contrevient donc pas au droit communautaire, selon la jurisprudence en cause ; qu'elles invitent la cour à retenir, au sens de la directive sur les pratiques commerciales déloyales, que la pratique reprochée "altère ou est susceptible d'altérer, de manière significative, du fait de la contrainte, la liberté de choix ou de conduite du consommateur moyen à l'égard d'un produit et, par conséquent, l'amène ou est susceptible de l'amener à prendre une décision commerciale qu'il n'aurait pas prise autrement" ; qu'en particulier, SFR prétend que l'offre de Orange exerce une contrainte sur le consommateur, d'une part, parce qu'elle est trompeuse, le site orange.fr invitant le consommateur à s'abonner pour le prix, modique, de 6 euro par mois, sans l'aviser qu'il devra aussi quitter son FAI s'il en a déjà un et, de toute façon, acquitter le coût de l'abonnement à la fourniture d'accès par Orange, plus élevé que ceux proposés par les concurrents, d'autre part, parce qu'elle est agressive en ce qu'elle impose un changement de fournisseur de télécommunications sans nécessité alors que l'auto-distribution de la chaîne sur des réseaux tiers permettrait de ne pas exercer cette contrainte ; que Free estime également que l'offre d'Orange exerce une contrainte sur le consommateur, atteint dans sa liberté de contracter s'il veut regarder la retransmission des matchs de football de ligue 1 retransmis sur la chaîne Orange Sports exclusivement, puisqu'il est alors obligé, le cas échéant, de résilier l'abonnement ADSL déjà souscrit auprès d'un opérateur concurrent et, de toute façon, de souscrire à l'offre multiservices la plus chère du marché, dont il ne veut pas nécessairement;

Que, pour ce qui est du droit national, elles font valoir que la commercialisation des chaînes de télévision est indépendante de l'offre triple play du FAI, laquelle associe trois services de communications électroniques, Internet, la téléphonie et la télévision, qui sont d'ailleurs accessibles au consommateur séparément, s'il le souhaite, alors que les chaînes peuvent être commercialisées, soit par les FAI, qui jouent alors le rôle de distributeurs de services de communications audiovisuelles, soit par l'éditeur de la chaîne lui-même, en auto-distribution, le FAI agissant alors comme un simple transporteur, à l'instar de ce que fait Télédiffusion de France (TDF) pour la télédiffusion hertzienne ou Astra et Eutelsat lorsqu'elle est effectuée par satellite ; qu'elles ajoutent que, si Orange Sports n'est actuellement accessible que via le FAI Orange, cette situation, qui ne résulte nullement d'une contrainte technique, n'est pas le standard du marché et résulte d'une stratégie commerciale d'Orange ; qu'elle soulignent que cette situation est préjudiciable, tant au consommateur, contraint de résilier son abonnement chez un autre FAI au profit de Orange s'il souhaite voir la retransmission des matchs achetée par Orange Sports, en particulier ceux du samedi soir, et aux autres FAI, qui n'ont pas les moyens d'investir dans les contenus télévisuels de France Télécom, et qui voient ainsi leurs abonnés détournés par le biais d'un comportement illicite, cette pratique étant d'autant plus grave que le marché est mature et que le recrutement de nouveaux clients est difficile, et alors en outre que les trois principaux FAI ont annoncé des investissements importants afin de développer la fibre optique de très haut débit, qui devront être amortis par les abonnements souscrits;

Considérant que l'article L. 122-1 du Code de la consommation, en sa rédaction issue de la loi 2001-1168 du 11 décembre 2001, dispose que "il est interdit de refuser à un consommateur la vente d'un produit ou la prestation d'un service, sauf motif légitime, et de subordonner la vente d'un produit à l'achat d'une quantité imposée ou à l'achat concomitant d'un autre produit ou d'un autre service ainsi que de subordonner la prestation d'un service à celle d'un autre service ou à l'achat d'un produit";

Considérant que le tribunal de commerce a jugé que France Télécom et Orange violent ce texte en subordonnant l'abonnement à la chaîne Orange Sports à la souscription d'un abonnement à Internet haut débit Orange;

Considérant que, par arrêt du 23 avril 2009 (C-261-07 et C-299-07 Total Belgium NV et Galatea BVBA contre Sanoma Magazines Belgium NV), rendu sur renvoi préjudiciel, la Cour de justice des Communautés européennes (la CJCE) a dit pour droit que la directive 2005-29-CE du Parlement européen et du Conseil, du 11 mai 2005, relative aux pratiques commerciales déloyales des entreprises vis-à-vis des consommateurs dans le marché intérieur et modifiant la directive 84-450-CEE du Conseil et les directives 97-7-CE, 98-27-CE et 2002-65-CE du Parlement européen et du Conseil et le règlement (CE) n° 2006-2004 du Parlement européen et du Conseil, doit être interprétée en ce sens qu'elle s'oppose à une réglementation nationale - en l'espèce la loi belge - qui, sauf certaines exceptions et sans tenir compte des circonstances spécifiques du cas d'espèce, interdit toute offre conjointe faite par un vendeur à un consommateur;

Considérant qu'au vu de cette jurisprudence, les quatre parties principales demandent à la cour, non d'écarter la loi nationale comme incompatible avec le droit communautaire, mais de l'interpréter dans un sens qui la rende conforme au droit communautaire;

Considérant qu'il résulte en effet d'une jurisprudence constante de la CJCE depuis l'arrêt du 10 avril 1984 (Von Colson et Kamann, 14-83, Rec. p. 1891, point 26); que l'obligation des États membres, découlant d'une directive, d'atteindre le résultat prévu par celle-ci ainsi que leur devoir, en vertu de l'article 10 du traité instituant la Communauté européenne (TCE), de prendre toutes mesures générales ou particulières propres à assurer l'exécution de cette obligation s'imposent à toutes les autorités des États membres y compris, dans le cadre de leurs compétences, les autorités juridictionnelles (voir, notamment, arrêts du 13 novembre 1990, Marleasing, C-106-89, Rec. p. I-4135, point 8 ; Faccini Dori, précité, point 26 ; du 18 décembre 1997, Inter-Environnement Wallonie, C-129-96, Rec. p. I-7411, point 40, et du 25 février 1999, Carbonari e.a., C-131-97, Rec., p. I-1103, point 48);

Que le devoir des juridictions nationales d'assurer la protection juridique découlant pour les justiciables des dispositions du droit communautaire et de garantir le plein effet de celles-ci s'impose de plus fort lorsque l'Etat membre a déjà pris les dispositions en vue de transposer une directive qui vise à conférer des droits aux particuliers, ce qui laisse présumer, eu égard à l'article 249, alinéa 3, du TCE, qu'ayant utilisé la marge d'appréciation dont il bénéficie en vertu de cette disposition, il a eu l'intention d'exécuter pleinement les obligations découlant de la directive concernée (voir arrêt du 16 décembre 1993, Wagner Miret, C-334-92, Rec. p. I-6911, point 20) ; que tel est cas en l'espèce, la transposition de la directive ayant été opérée essentiellement par la loi n° 2008-776 du 4 août 2008;

Qu'en outre, selon la jurisprudence de la CJCE doivent être considérées comme relevant du champ d'application de la directive, non seulement les dispositions nationales dont l'objectif exprès est de transposer ladite directive, mais également, à compter de la date d'entrée en vigueur de cette directive, les dispositions nationales préexistantes, susceptibles d'assurer la conformité du droit national à celle-ci;

Qu'ainsi, le principe d'interprétation conforme requiert que la cour fasse tout ce qui relève de sa compétence, en prenant en considération l'ensemble des règles du droit national, pour garantir, dans le cadre de l'application de l'article L. 122-1 du Code de la consommation au présent litige, la pleine effectivité de la directive du 11 mai 2005 sur les pratiques commerciales déloyales;

Considérant qu'à cet égard, l'arrêt du 23 avril 2009, même s'il ne concerne pas la loi française, contient les motifs propres à éclairer la cour sur la manière d'interpréter la règle communautaire en cette matière et peut donc être transposé, sans doute réel, au présent litige, sans qu'il soit nécessaire de poser une question préjudicielle ainsi que le requièrent SFR et Free à titre subsidiaire;

Qu'en effet, tout d'abord, aucune des parties ne conteste que les offres en cause constituent des actes commerciaux s'inscrivant dans le cadre de la stratégie commerciale de France Telecom et d'Orange et visant directement à la promotion et à l'écoulement des ventes de ces dernières, constituant à ce titre des pratiques commerciales au sens de l'article 2, sous d), de la directive 2005-29-CE du Parlement européen et du Conseil, du 11 mai 2005, relative aux pratiques commerciales déloyales des entreprises vis-à-vis des consommateurs dans le marché intérieur, et qu'elles relèvent, en conséquence, du champ d'application de celle-ci;

Qu'ensuite, la Cour de justice rappelle:

- que la directive vise à établir, conformément à ses cinquième et sixième considérants ainsi qu'à son article 1er, des règles uniformes relatives aux pratiques commerciales déloyales des entreprises vis-à-vis des consommateurs, afin de contribuer au bon fonctionnement du marché intérieur et d'assurer un niveau élevé de protection de ces derniers, qu'elle procède ainsi à une harmonisation complète desdites règles au niveau communautaire de telle sorte que, comme le prévoit expressément l'article 4, les États membres ne peuvent pas adopter des mesures plus restrictives que celles définies par la directive, même aux fins d'assurer un degré plus élevé de protection des consommateurs,

- qu'en outre, l'article 5 de la directive prévoit l'interdiction des pratiques commerciales déloyales et énonce les critères permettant de déterminer un tel caractère déloyal,

- qu'ainsi, et conformément au paragraphe 2 de cette disposition, une pratique commerciale est déloyale si elle est contraire aux exigences de la diligence professionnelle et altère ou est susceptible d'altérer de manière substantielle le comportement économique du consommateur moyen par rapport au produit,

- que l'article 5, paragraphe 4, définit deux catégories précises de pratiques commerciales déloyales, à savoir les "pratiques trompeuses" et les "pratiques agressives" répondant aux critères spécifiés respectivement aux articles 6 et 7 ainsi que 8 et 9 de la directive,

- qu'en vertu de ces dispositions, de telles pratiques sont interdites lorsque, compte tenu de leurs caractéristiques et du contexte factuel, elles amènent ou sont susceptibles d'amener le consommateur moyen à prendre une décision commerciale qu'il n'aurait pas prise autrement,

- que la directive établit également, à son annexe 1, une liste exhaustive de 31 pratiques commerciales qui, conformément à l'article 5, paragraphe 5, de la directive, sont réputées déloyales "en toutes circonstances", de sorte que, ainsi que le précise expressément le dix-septième considérant de la directive, il s'agit des seules pratiques commerciales qui peuvent être considérées comme déloyales sans faire l'objet d'une évaluation au cas par cas au titre des dispositions des articles 5 à 9 de la directive;

Considérant que l'offre subordonnée ne figure pas parmi les pratiques énumérées à l'annexe 1 et, plus particulièrement, n'entre pas dans les prévisions du point 6 qui vise le fait de " proposer l'achat de produits à un prix indiqué et ensuite de refuser de présenter aux consommateurs l'article ayant fait l'objet de la publicité ou de refuser de prendre des commandes concernant cet article ou de le livrer dans un délai raisonnable ou d'en présenter un échantillon défectueux dans le but de faire la promotion d'un produit différent (amorcer et ferrer) ", ainsi que le prétend à tort SFR, au prix d'une reproduction tronquée de ce texte;

Considérant que, dans une telle hypothèse, la Cour de justice préconise de vérifier, à la lumière du contenu et de l'économie générale des dispositions de la directive, rappelées aux paragraphes précédents, si le texte qui la prohibe, soit l'article L. 122-1 du Code de la consommation, répond aux exigences posées par la directive;

Considérant qu'à l'instar de ce qu'a constaté la Cour de justice dans l'arrêt précité à propos de la loi belge, il doit être relevé que l'article L. 122-1 du Code de la consommation, qui établit le principe de l'interdiction des ventes subordonnées, alors même que de telles pratiques ne sont pas visées à l'annexe I de la directive - laquelle énumère de manière exhaustive les seules pratiques commerciales interdites en toutes circonstances, comme telles dispensées d'un examen au cas par cas - se heurte au régime institué par la directive en ce qu'il prohibe, de manière générale et préventive, les offres subordonnées indépendamment de toute vérification de leur caractère déloyal au regard des critères posés aux articles 5 à 9 de la directive;

Considérant que cette interprétation ne saurait être remise en cause par le fait que la jurisprudence nationale prévoit un certain nombre d'exceptions à la prohibition des offres subordonnées, en particulier lorsque les biens vendus constituent un produit unique ou que - les offres en cause relèvent d'un usage commercial constant, comme le prétendent France Télécom et Orange ; qu'en effet, même si ces assouplissements sont susceptibles de restreindre la portée de l'interdiction des offres subordonnées, il n'en reste pas moins qu'ils ne sauraient, du fait de leur nature limitée et prédéfinie, se substituer à l'analyse, qui doit être nécessairement menée au regard du contexte factuel de chaque espèce, du caractère déloyal d'une pratique commerciale à la lumière des critères énoncés aux article 5 à 9 de la directive;

Considérant qu'à ce stade du raisonnement, il convient de rappeler que c'est aux juridictions nationales que le législateur communautaire a confié la mission d'évaluer le caractère loyal d'une pratique commerciale eu égard aux circonstances de l'espèce et en particulier du point de vue de son influence sur le comportement économique d'un consommateur moyen; que le principe d'interprétation conforme commande donc à la cour de procéder à cette appréciation, conformément aux critères énoncés dans la directive;

Considérant que l'article 5 de la directive précise qu'une pratique commerciale est déloyale si, à la fois, elle est contraire aux exigences de la diligence professionnelle et si elle altère ou est susceptible d'altérer de manière substantielle le comportement économique, par rapport au produit, du consommateur moyen qu'elle touche ou auquel elle s'adresse, en particulier lorsqu'elle est trompeuse au sens des articles 6 et 7, ou agressive au sens des articles 8 et 9;

Considérant que, pour ce qui est du moyen tiré du caractère trompeur de l'offre d'Orange Sports "pour un consommateur d'attention moyenne", invoqué par SFR pour la première fois dans ses ultimes écritures devant la cour, deux jours avant l'audience, en ce que le site Orange.fr mettrait en avant le coût modique de la souscription à la chaîne, en tant qu'option payante, sans attirer son attention sur la nécessité de souscrire un abonnement ADSL chez Orange et sur le coût de cet abonnement, le seul élément soumis à la cour à ce titre, qui se résume à un écran sur lequel, s'affiche la possibilité de souscrire à l'option Orange Foot pour 6 euro par mois, assortie de la précision que "pour profiter de l'option Orange Foot, il est nécessaire d'être client de la télévision d'Orange" (§ 146 et suivants des conclusions du 30 avril 2009), ne permet pas de caractériser une pratique commerciale trompeuse susceptible d'induire en erreur "un consommateur moyen", au sens des articles 6 ou 7 de la directive;

Considérant que, s'agissant de l'offre subordonnée, l'article 8 dispose qu'une pratique commerciale est réputée agressive si, dans son contexte factuel, compte tenu de toutes ses caractéristiques et des circonstances, elle altère ou est susceptible d'altérer de manière significative, du fait du harcèlement, de la contrainte, y compris le recours à la force physique, ou d'une influence injustifiée, la liberté de choix ou de conduite du consommateur moyen à l'égard d'un produit et, par conséquent, l'amène ou est susceptible de l'amener à prendre une décision commerciale qu'il n'aurait pas prise autrement, cependant que l'article 9 précise que les critères à prendre à considération afin de déterminer si une pratique commerciale recourt au harcèlement, à la contrainte, y compris la force physique, ou à une influence injustifiée sont:

a) le moment et l'endroit où la pratique est mise en œuvre, sa nature et sa persistance,

b) le recours à la menace physique ou verbale,

c) l'exploitation en connaissance de cause par le professionnel de tout malheur ou circonstance particulière d'une gravité propre à altérer le jugement du consommateur, dans le but d'influencer la décision du consommateur à l'égard du produit,

d) tout obstacle non contractuel important ou disproportionné imposé par le professionnel lorsque le consommateur souhaite faire valoir ses droits contractuels, et notamment celui de mettre fin au contrat ou de changer de produit ou de fournisseur,

e) toute menace d'action alors que cette action n'est pas légalement possible ;

Considérant, d'abord, que les parties n'invoquent aucun élément précis au soutien de leur affirmation selon laquelle l'offre litigieuse serait contraire à la diligence professionnelle ;

Qu'ensuite, l'analyse de l'offre au regard des critères énumérés à l'article 9 ne conduit pas à retenir qu'elle recourt au harcèlement, à la contrainte, y compris la force physique, ou à une influence injustifiée;

Qu'enfin, et contrairement à ce que prétendent SFR et Free, le seul fait que le consommateur doive souscrire un abonnement ADSL Orange pour obtenir l'accès à la chaîne Orange Sports ne répond pas à la définition de la contrainte énoncée à l'article 8 ; qu'il est constant en effet que, dans le cadre de la concurrence qu'ils se livrent, tous les FAI s'efforcent d'enrichir le contenu de leurs offres pour les rendre plus attractives, par la mise en place de services innovants ou l'acquisition de droits exclusifs sur des contenus audiovisuels, cinématographiques ou sportifs événementiels; qu'ainsi, Free proposait récemment 16 bouquets d'environ 150 chaînes, ayant intégré récemment 28 nouvelles chaînes dont 6 sportives, outre 50 chaînes à l'unité, et SFR, pour sa part offrait 14 bouquets de plus de 150 chaînes et 11 chaînes à l'unité, dont la chaîne brésilienne TV Globo Internacional qui n'est pas accessible autrement en France ; qu'en outre, l'ARCEP a relevé dans un avis du 8 janvier 2008 l'existence d'accords exclusifs, conclus entre Free et le groupe Canal + pour l'accès des abonnés de Free à la plate-forme VoD "Canal Play", ou encore entre Neuf Cegetel et Universal Music pour la fourniture d'une offre de location illimitée de titres dans le cadre du forfait 100 % Neuf Box; qu'il résulte nécessairement de cette configuration du marché, et en particulier de la structure de l'offre, que le consommateur moyen qui s'apprête à souscrire un abonnement ADSL se détermine, précisément, en considération des services qui y sont associés et, partant, des capacités de différenciation de ces dernières par rapport aux offres concurrentes ; que, dans ces conditions, il ne saurait être considéré que le fait que l'accès à la chaîne Orange Sports soit associé exclusivement à l'offre ADSL de Orange altère de façon significative sa liberté de choix à l'égard des offres ADSL, bien au contraire, l'essentiel au sens de la directive étant qu'il soit libre de ne pas y souscrire, ce qui n'est pas contesté en l'espèce;

Considérant que, dans ces conditions, il ne peut être fait grief à France Télécom et Orange d'avoir enfreint l'article L. 122-1 du Code de la consommation, tel qu'interprété à la lumière de la directive 2005-29-CE du Parlement européen et du Conseil, du 11 mai 2005, relative aux pratiques commerciales déloyales des entreprises vis-à-vis des consommateurs dans le marché intérieur; qu'il suit de là que le jugement doit être infirmé en toutes ses dispositions, sauf en ce qu'il déclare la Ligue de football professionnel recevable en son intervention volontaire, et les demandes de Free et SFR rejetées;

Et considérant que, SFR et Free n'ont pas fait de leur droit d'agir en justice un usage fautif; que France Télécom et Orange doivent être déboutées de leur demande de dommages et intérêts présentées sur ce fondement;

Considérant enfin que France Télécom, Orange et la Ligue de football professionnel ont dû exposer des frais non compris dans les dépens qu'il serait inéquitable de laisser en totalité à leur charge ; qu'il y a lieu de leur accorder le bénéfice des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile, dans la mesure qui sera précisée au dispositif;

Par ces motifs, Dit n'y avoir lieu de rejeter les conclusions du ministre chargé de l'Economie, ni d'écarter l'avis de l'ARCEP du 19 mars 2009. Déclare l'ANLSP recevable en son intervention volontaire, Infirme le jugement en toutes ses dispositions, sauf en ce qu'il déclare la Ligue de football professionnel recevable en intervention volontaire, Et statuant à nouveau, Rejette les demandes des sociétés SFR et Free, Rejette la demande de dommages et intérêts pour procédure abusive formée par les sociétés France Télécom et Orange, Condamne, en application de l'article 700 du Code de procédure civile, les sociétés SFR et Free, chacune, à payer à la société France Télécom la somme de 10 000 euro, à la société Orange Foot celle de 10 000 euro et à la Ligue de football professionnel celle de 5 000 euro et rejette leurs demandes, Condamne les sociétés SFR et Free aux dépens de première instance et d'appel et dit que ces derniers pourront être recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile.