CA Versailles, 12e ch. sect. 1, 28 mai 2009, n° 08-02378
VERSAILLES
Arrêt
Infirmation partielle
PARTIES
Demandeur :
Wallyn (ès qual.), Sodac
Défendeur :
BMW France (SA)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
Mme Mandel
Conseillers :
Mmes Valantin, Lonne
Avoués :
SCP Jupin & Algrin, SCP Tuset-Chouteau
Avocats :
Mes Bertin, Laigo
Monsieur Scano concessionnaire de plusieurs marques (Mazda, Daewoo et Rover) a fait l'acquisition le 28 juillet 1997 de 100 % des actions de la Société de distribution automobile du Cambrésis (Sodac) concessionnaire de la marque BMW à Cambrai.
Il a été nommé concessionnaire exclusif sur la région de Cambrai et de Saint-Quentin par un contrat de concession qui a été signé le 1er octobre 1997 avec effet au 10 octobre 1997.
Le 12 septembre 2001, la société BMW France (société BMW) a résilié le contrat en application de l'article 11.3 du contrat, avec effet au 12 septembre 2003. Monsieur Scano a répondu que cette résiliation était abusive compte tenu des investissements qu'il avait engagés mais la société BMW France a maintenu sa résiliation (lettre du 15 novembre 2001).
Avisant les dispositions du règlement RCE 1400-2002 définissant les conditions d'exemption des réseaux de distribution automobile en Europe et la prise d'effet différée de ce règlement pour les parties ayant conclu un accord de distribution et en cours d'exécution au 30 septembre 2002 réputé conforme au règlement CE 1475-95, la Sodac a présenté sa candidature afin d'être agréée en qualité de réparateur et de distributeur de la société BMW à l'échéance de son contrat en cours de résiliation.
Elle a été agréée officiellement en qualité de réparateur BMW et Mini par la société BMW le 13 novembre 2003.
L'agrément comme distributeur de ces marques lui a été refusé. Estimant qu'elle avait fait l'objet de pratiques discriminatoires qui l'avaient privée du droit de bénéficier d'une procédure d'agrément transparente et impartiale, la Sodac a assigné la société BMW devant le Tribunal de commerce de Versailles, le 29 septembre 2004, demandant au tribunal sur le fondement des articles L. 420-1 et L. 442-6 du Code de commerce et 1382 du Code civil:
1) de dire que la société BMW avait engagé sa responsabilité en apportant indûment un retard totalement injustifié pour l'agréer en qualité de réparateur officiel au moyen de discriminations et d'agissements déloyaux et de la condamner en conséquence à lui payer en réparation du préjudice causé la somme de 84 493 euro,
2) de dire que la société BMW avait engagé sa responsabilité en refusant de lui communiquer dans un délai raisonnable ses critères de sélection tant qualitatifs que quantitatifs et pour avoir choisi de façon arbitraire un autre candidat sans l'avoir avertie de l'existence de cette candidature. Elle a sollicité que la société BMW soit condamnée à l'agréer en qualité de distributeur officiel BMW et Mini sous astreinte de 100 000 euro par jour de retard et à lui régler sur la base d'une marge brute mensuelle moyenne de 31 698,33 euro, une somme équivalente à la perte de marge subie depuis le 13 septembre 2003 jusqu'à la prise d'effet de son agrément.
A titre subsidiaire, la Sodac a demandé que la société BMW soit condamnée au paiement de la somme de 150 336 euro et de 760 766 euro.
En cours de procédure, elle a fait l'objet d'une procédure de redressement judiciaire (19 mai 2006) convertie en liquidation judiciaire (7 juillet 2006), Maître Wallyn étant désigné comme liquidateur.
Ce dernier n'a pas maintenu la demande d'agrément forcé et a demandé de condamner la société BMW au paiement d'une somme équivalente à deux années de marge brute de la Sodac (826 901 euro) au motif qu'elle était directement à l'origine de la liquidation judiciaire de la Sodac et une autre somme indemnitaire pour le retard mis à agréer la société comme réparateur (84 493 euro correspondant à la perte de marge brute). Enfin il a sollicité que la société BMW verse une indemnisation pour les investissements réalisés non encore amortis.
Il a excipé par ailleurs de l'incompétence territoriale du Tribunal de commerce de Versailles au profit du Tribunal de commerce de Paris sur le fondement d'une clause du contrat, pour statuer sur la demande reconventionnelle de la société BMW.
La société BMW France a conclu au débouté et a sollicité à titre reconventionnel le paiement de la somme de 100 000 euro à titre de dommages-intérêts en réparation du préjudice commercial que lui a causé l'utilisation frauduleuse du sigle BMW et l'usurpation de la qualité de concessionnaire exclusif de la marque BMW outre des dommages-intérêts pour procédure abusive.
Par jugement rendu le 29 juin 2007, le Tribunal de commerce de Versailles a donné acte à Maître Wallyn en sa qualité de liquidateur de la Sodac de ce qu'il reprenait la procédure.
Il lui a donné acte de ce qu'il renonçait à sa demande d'agrément forcé, compte tenu de la mise en liquidation judiciaire de la Sodac et a constaté qu'il n'avait pas formulé d'autres demandes que celles formées par conclusions déposées à l'audience du 2 mars 2007.
Il a condamné la société BMW à lui payer ès qualités la somme de 32 628 euro à titre de dommages-intérêts.
Le tribunal de commerce s'est déclaré territorialement incompétent pour statuer sur les demandes reconventionnelles de la société BMW au profit du Tribunal de commerce de Paris.
Il a débouté la société BMW de sa demande de dommages-intérêts pour procédure abusive et a dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du Code de procédure civile et a mis les dépens à la charge de la société BMW.
Maître Wallyn agissant en sa qualité de liquidateur de la société Sodac a interjeté appel. Il demande sur le fondement des articles L. 420-1 et L. 442-6 du Code de commerce ainsi que 1382 du Code civil, de confirmer le jugement en ce qu'il a retenu le caractère fautif de la société BMW à l'occasion de l'agrément de la Sodac comme réparateur BMW, s'est déclaré incompétent pour statuer sur les demandes reconventionnelles de la société BMW et a rejeté ses demandes de dommages-intérêts pour procédure abusive et en application de l'article 700 du Code de procédure civile.
Mais de l'infirmer pour le surplus, et de :
* condamner la société BMW au paiement de la somme de 84 493 euro pour le préjudice causé par le retard à donner son agrément à la Sodac comme réparateur BMW,
* la dire responsable d'un refus d'agrément fautif en ayant refusé d'examiner la candidature de la Sodac en qualité de distributeur de véhicules neufs BMW sur Cambrai et Saint-Quentin, qu'elle est ainsi à l'origine de la mise en liquidation judiciaire de la Sodac et qu'elle l'a empêchée de pouvoir se maintenir au sein du réseau et ce pendant au moins trois ans (jusqu'au 31 mai 2010) et sollicite en conséquence ès qualités, la condamnation de la société BMW au paiement des sommes de:
- 1 141 149 euro à titre de dommages-intérêts (correspondant à trois années de marge brute moyenne sur l'activité distribution),
- 150 336 euro de dommages-intérêts au titre des investissements non amortis,
- 45 000 euro en application de l'article 700 du Code de procédure civile,
Maître Wallyn reproche à la société BMW d'avoir retardé et entravé sans motif l'agrément de la Sodac en qualité de réparateur BMW et Mini et d'avoir refusé sa candidature en qualité de distributeur de ces deux marques alors qu'elle respectait les critères sélectifs et d'avoir agréé pendant la même période un autre candidat qui ne respectait pas ces conditions.
Il stigmatise le retard mis à communiquer à cette société, la documentation relative aux critères et ensuite le retard imposé pour effectuer un audit pour vérifier sa situation.
Il prétend également que la société Sodac a été l'objet de discriminations par l'imposition de critères de sélection non appliqués par ailleurs aux autres candidats pour obtenir son agrément.
S'agissant du refus d'agrément de la Sodac comme distributeur exclusif, BMW/Mini, Maître Wallyn fait état de:
* discriminations lors de la phase d'information concernant les conditions de mise en place des nouveaux accords de distribution de véhicules neufs,
* un refus d'examen de sa candidature de façon injustifiée,
* une attitude discriminatoire de la société BMW envers la société qui remplissait les critères de sélectivité alors qu'un candidat ne remplissant pas ces conditions a été agréé.
La société BMW conclut à la réformation partielle du jugement en ce qu'il a retenu qu'elle avait eu un comportement fautif lors de la procédure d'agrément de la Sodac en qualité de réparateur agréé et l'a condamnée au paiement de dommages-intérêts. A titre subsidiaire, elle conclut à la confirmation du jugement par substitution de motifs. Elle dénie avoir commis une faute.
Elle soutient que la Sodac avait une situation différente des autres concessionnaires dont les contrats ont été résiliés en application du règlement du 31 juillet 2002, qu'elle n'était pas tenue de lui expédier un courrier daté de juin 2003 relatif au maintien de relations. Elle conteste avoir retardé l'instruction de la candidature à l'agrément de réparateur et surtout avoir eu une attitude discriminatoire. Enfin elle soutient que la Sodac n'a pas subi de préjudice, qu'elle a pu exercer son activité après la fin de son contrat le 13 septembre 2003.
Elle demande de déclarer irrecevable la demande relative à la candidature de la Sodac à l'agrément de réparateur de Mini que Maître Wallyn demande d'ajouter au montant de la condamnation et qui selon elle, avait été abandonnée.
Elle soutient par ailleurs que la cour ne peut que confirmer le jugement en ce qu'il a dit que la candidature de la Sodac à la qualité de distributeur était faite de mauvaise foi. Elle souligne qu'il est tenu compte de cet élément dans les décisions.
Pour illustrer l'existence de cette mauvaise foi, la société BMW fait valoir que les ventes de la Sodac étaient insuffisantes et que ses conditions de vente ne respectaient pas les exigences posées pour la vente de véhicules neufs ; que sa structure financière était fragile; qu'elle avait de nombreux incidents de paiement pour ses véhicules neufs ; qu'elle n'a pas abandonné la vente des véhicules Mazda et Daewoo et a commis des fautes (exemple, le fait d'utiliser le nom ou la marque de la société sans autorisation).
La société BMW conteste également avoir eu une attitude discriminatoire dans le choix du candidat chargé de la distribution de ses véhicules pour la région en faisant remarquer que la candidature de la Sodac était postérieure à la nomination du candidat choisi.
Elle conteste tous les autres reproches (demande d'investissements inutiles, utilisation frauduleuse de son fichier clients, débauchage de son personnel).
Elle met en doute l'existence d'un préjudice et soutient que ce ne pourrait être que la perte d'une chance et que l'indemnisation sollicitée de deux années de marge brute est excessive et conteste que la situation soit à l'origine de la liquidation judiciaire de la Sodac.
Enfin, elle demande de condamner Maître Wallyn au paiement de la somme de 20 000 euro en application de l'article 700 du Code de procédure civile et de mettre à sa charge les dépens de première instance et d'appel.
Sur ce
Sur la demande de rejet des débats des dernières pièces communiquées le jour de l'ordonnance de clôture par la société BMW France sollicité par Maître Wallyn ès qualités:
Considérant que ces pièces sont recevables par principe;
Considérant que la demande de rejet de ces pièces a été formulée par lettre; qu'une telle demande doit être faite par conclusions;
Qu'en conséquence, il ne sera pas fait droit à la demande de rejet des dernières pièces;
Sur la demande d'indemnisation formulée par Maître Wallyn ès qualités au titre de l'attribution de la qualité de réparateur:
Considérant que la Sodac met en cause la lenteur de l'instruction et la discrimination marquée par la société BMW France lors de l'examen de sa candidature en tant que réparateur BMW et Mini qui ont conduit à son agrément deux mois après l'expiration de son contrat de concession qui expirait le 12 septembre 2003 ;
Considérant que par une lettre en date du 1er mars 2003 expédiée avec accusé de réception, la société Sodac avait demandé à la société BMW Group France de lui faire connaître les critères sélectifs qui seront requis pour poursuivre l'activité de réparateur agréé de la marque BMW comme de la marque Mini après le mois de septembre 2003;
Que par une lettre datée du 17 juin 2003, la Sodac a réitéré sa demande en s'étonnant de l'absence de réponse et l'a formulée de nouveau pour les deux marques;
Que la société BMW a accusé réception des deux lettres par un courrier du 27 juin 2003 dans lequel elle a informé la Sodac des modalités retenues pour devenir réparateur agréé, énoncées dans le "contrat de service BMW incluant les standards de services BMW" ; qu'elle expliquait ainsi qu'à réception de l'accord de confidentialité et de plusieurs renseignements ainsi que du paiement d'une somme de 100 euro, elle enverrait à la Sodac les documents lui permettant de postuler:
* un descriptif de la procédure de nomination (guide de nomination du candidat réparateur),
* un contrat d'audit des standards de services applicables dont le prix était à la charge du candidat,
* un spécimen de contrat de service BMW et ses annexes incluant les standards de service BMW,
* des bons de commande de l'outillage et des équipements spécifiques,
* un modèle de lettre de confirmation de candidature;
Considérant que la Sodac a réexpédié l'accord de confidentialité le 31 juillet 2003 et le 8 août suivant la société BMW Group France lui a fait parvenir le dossier;
Considérant que selon une lettre datée du 26 août 2003, la Sodac a bien reçu le 8 août le dossier expédié pour la candidature en tant que réparateur BMW qui ne comportait pas les critères pour la marque Mini ; qu'elle indiquait ne pas régler la somme de 1 794 euro pour l'audit avant d'avoir eu une facture;
Considérant que le 16 septembre 2003 la société BMW a indiqué à la Sodac que son dossier n'était pas complet puisqu'elle n'avait pas établi le chèque pour l'audit et lui a fait parvenir les éléments de constitution du dossier Mini en précisant qu'il pourrait être procédé aux deux audits en même temps;
Que la Sodac a fait parvenir le chèque de paiement pour la candidature BMW par un courrier du 19 septembre 2003; que la société BMW a proposé (lettre du 25 septembre 2003) de procéder aux audits pour les deux candidatures, le 1er octobre 2003;
Que la Sodac a réexpédié le contrat pour audit concernant sa candidature en tant que réparateur agréé Mini le 29 septembre 2003;
Considérant que lors du contrôle effectué le 1er octobre 2003, il s'est avéré que la Sodac ne remplissait pas tous les critères posés pour être agréée réparateur BMW; qu'elle en a été informée le 2 octobre avec l'indication de la nécessité d'un nouvel audit à ses frais ; que la Sodac ayant expédié un nouveau chèque de 1 794 euro le 8 octobre, elle a finalement été agréée le 13 novembre 2003 comme réparateur BMW et réparateur Mini ;
a) Considérant que la société BMW soulève l'irrecevabilité de l'appel de Maître Wallyn en ce qui concerne la demande d'indemnisation de la Sodac au titre de sa candidature en tant que réparateur de la société Mini;
Considérant que dans ses dernières conclusions devant le tribunal (2 mars 2007) la Sodac n'a demandé une indemnisation que pour l'absence d'agrément en qualité de réparateur BMW;
Considérant que si le tribunal de commerce est tenu par les observations faites à l'audience, il ne ressort d'aucune mention du jugement ou note d'audience qu'il a été formulé une demande d'indemnisation au titre de réparateur Mini alors que les premiers juges ont relevé la teneur des conclusions dont ils étaient saisis et qui ne contenaient pas de demande en vue de la qualité de réparateur pour la marque Mini;
Qu'en conséquence, l'appel actuellement poursuivi aux fins d'indemnisation pour le retard d'agrément comme réparateur de Mini, sera déclaré irrecevable;
b) Considérant autrement, s'agissant de la candidature de la Sodac en qualité de réparateur de la société BMW, que selon l'article L. 442-6 I 1er alinéa "Engage la responsabilité de son auteur et l'oblige à réparer le préjudice causé le fait par tout producteur, commerçant, industriel ... de pratiquer à l'égard d'un partenaire économique des modalités discriminatoires et non justifiées par des contreparties réelles en créant de ce fait pour ce partenaire un désavantage ou un avantage dans la concurrence";
Considérant qu'en application du règlement 1400-2002 du 31 juillet 2002 "concernant l'application de l'article 81 paragraphe 3 du traité à des catégories d'accords verticaux et de pratiques concertées dans le secteur automobile" applicable à la situation, la société BMW avait défini des critères de sélection des candidats à la réparation des véhicules de sa marque ; que d'ailleurs la Sodac était informée de cette situation puisqu'elle en a fait la demande à la société BMW;
Considérant que la Sodac met en cause le fait que la société BMW n'a commencé à instruire sa candidature qu'à la fin du mois de juin 2003 et n'a pas répondu immédiatement aux lettres de la Sodac, que sur ce point, elle a elle-même contribué au retard final en n'exécutant pas immédiatement toutes les formalités exigées par BMW notamment en tardant pour régler le paiement du prix de l'audit de sorte qu'elle a contribué à l'allongement du délai d'instruction du dossier;
Considérant que la Sodac critique également l'agrément par BMW de sociétés sans aucun audit préalable ; qu'il ressort en effet d'un rapport de synthèse des audits que la société BMW n'a procédé aux audits des sociétés qu'elle a agréées comme réparateurs que postérieurement à leur agrément;
Que par ailleurs, il ne résulte pas de la lettre du 2 octobre 2003 de la société BMW qui informait la Sodac d'un refus d'agrément au 1er octobre en raison d'insuffisances, que les défauts (pas de distributeur de boissons en salle d'attente, luminosité insuffisante dans l'atelier, extracteur de gaz démonté, nettoyeur de lavage haute pression non utilisable, murs bruts au lieu d'être peints, largeurs des allées secondaires entre les rayonnages de 75 cm au lieu de 85 cm) des locaux de la Sodac présentaient la gravité dont se prévaut la société BMW et que leur état ne lui permettait pas de prétendre à la même situation que les autres sociétés, dont l'audit réalisé ultérieurement révèle qu'elles avaient des insuffisances dans des proportions équivalentes;
Considérant toutefois que la Sodac qui fait état d'un manque à gagner, ne démontre pas avoir subi un préjudice; qu'en effet, elle ne produit que le montant des chiffres d'affaires et des marges brutes des années 2000 à 2002 et ne donne aucun renseignement chiffré, ni bilan pour l'année 2003 ; qu'elle ne verse qu'une attestation de son expert-comptable certifiant l'existence d'un impact sur le chiffre d'affaires du refus de nommer la Sodac comme distributeur, aggravé par la désignation tardive en qualité de réparateur agréé BMW et Mini; que la cessation d'activité n'est même pas établie puisque la société BMW lui a reproché judiciairement d'avoir continué une activité sans autorisation;
Qu'en conséquence, sa demande indemnitaire n'est pas fondée et il convient d'infirmer le jugement sur ce point;
Sur les demandes d'indemnisation formulées par Maitre Wallyn ès qualités au titre de l'attribution de la qualité de distributeur:
Considérant que les prétentions reposent également sur l'application de l'article L. 442-6 du Code de commerce précédemment énoncé;
Considérant que la société BMW qui avait résilié le contrat de la Sodac en raison d'une exécution insatisfaisante de son contrat de concession et non en application du règlement communautaire, n'avait pas d'obligation particulière de communication à la Sodac sur les modalités de postulation à la qualité de distributeur des véhicules de la marque BMW et Mini;
Considérant que la Sodac ne prouve pas avoir demandé avant le 15 septembre 2003 à la société BMW de lui communiquer ses critères pour la vente des véhicules des marques BMW et Mini;
Considérant qu'en application du règlement 1400-2002 du 31 juillet 2002, la société BMW France Group pour la sélection de ses concessionnaires se trouvait tenue de définir une procédure fondée sur des critères objectifs ; que le système retenu a été celui de la distribution sélective quantitative;
Considérant qu'il n'est pas argué de ce que la part de marché de cette société était supérieure à 40 % et ne permettait pas de retenir ce système de sélection;
Considérant que la distribution sélective quantitative exige la définition de critères objectifs de qualité et également de quantité ; que le fournisseur doit les donner à toute personne qui en fait la demande et le refus à l'agrément doit reposer sur des critères précis ; qu'en outre, la sélection quantitative suppose que dans l'hypothèse où un nombre de points de vente dont le nombre aura été précédemment justifié par des éléments objectifs, ne permet pas une admission immédiate, le fournisseur propose au candidat de figurer sur une liste d'attente définie objectivement ;
Considérant en conséquence que la société BMW ne pouvait pas opposer d'emblée, à réception de la demande de la Sodac qui lui avait déclaré son intérêt pour la distribution des véhicules des marques BMW et Mini, qu'elle avait pris des engagements à l'égard d'un distributeur (lettre de la société BMW du 25 septembre 2003);
Considérant que certes le 28 mai 2003, la société BMW avait écrit à la société Bachelet : "Nous vous confirmons notre intérêt pour votre proposition selon les conditions évoquées lors de notre dernière entrevue (loyer, immobilier, durée du bail), différents détails restant dans l'attente de réponses plus précises de votre part, nous vous proposons une réunion de travail nous pourrons ainsi sceller définitivement les termes de notre accord afin que les travaux puissent démarrer au plus vite pour une ouverture prévue au premier semestre 2004"
et le 15 juillet 2003 "moyennant le respect de la condition ci-dessus énoncée et sous réserve que votre société soit en conformité avec les standards de vente et les standards d'après-vente qui vous seront communiqués dans les meilleurs délais et dont une version provisoire vous a été remise lors de notre réunion du 2 mai 2003, nous vous proposons pour ce site un contrat de concession BMW et un contrat de concession Mini.
Cette nomination pourra intervenir dès que ce site sera opérationnel mais en tout état de cause au plus tôt le 1er octobre 2003 et au plus tard le 31 mars 2004";
Que par ailleurs, si la société BMW, pour bénéficier de l'exemption, devait conclure de nouveaux contrats avant le 1er octobre 2003, elle ne peut en tirer un juste motif à son refus opposé à la Sodac qui lui a présenté une demande le 15 septembre 2003;
Qu'elle ne peut pas davantage justifier son attitude par la limitation à un seul distributeur alors qu'elle ne démontre pas avoir défini les critères quantitatifs en l'absence de date certaine des documents produits;
Qu'en conséquence en ne communiquant aucun renseignement sur ses critères de sélection qualitatifs à la Sodac en réponse à sa demande d'informations sur les critères en vue d'être distributeur alors qu'ils se trouvaient définis et en refusant d'emblée la candidature de cette société indépendamment de tout critère quantitatif objectivement défini, la société BMW France a commis une faute;
Considérant toutefois que la transmission des critères n'assurait pas nécessairement à la Sodac d'être agréée et ce même si elle avait déjà été concessionnaire, les concessionnaires en place n'ayant pas vocation à être retenus en priorité;
Qu'il importe peu que la société Bachelet ne remplisse pas lors de sa demande les conditions exigées, ni même en 2004, dans la mesure où il n'était pas interdit à la société BMW d'accorder un délai aux candidats pour leur permettre de respecter les critères qualitatifs, ce qu'elle avait accordé à la société Bachelet; qu'il ressort d'ailleurs de l'audit que la Sodac a fait réaliser elle-même par Socotec Industries qu'elle ne remplissait pas tous les critères (80 % seulement);
Considérant enfin que même si la société Bachelet ne remplissait les conditions ni en 2003 ni en 2004, la Sodac a seulement perdu une chance notamment d'être sur la liste d'attente et d'être retenue;
Que cette chance était d'autant plus réduite que la société BMW fait valoir que cette candidature était faite de mauvaise foi;
Considérant en effet que la société BMW lui avait reproché à de nombreuses reprises en 1999 et en 2000 d'avoir un rythme de vente insuffisant par rapport à la moyenne nationale et locale, en raison notamment de sa dispersion à vendre d'autres marques et de sa mauvaise organisation (absence de PLV de prix de vente, niveau de publicité insuffisant) ; qu'elle lui avait également fait grief de ne pas avoir mis au point un plan d'actions susceptible de redresser la situation commerciale en 1999 et 2000 et encore en 2001; qu'il ressort encore des éléments du dossier que la société BMW avait souligné la fragilité de sa situation financière et la présence de fréquents incidents de paiement;
Considérant enfin que la société Sodac n'avait pas respecté ses engagements envers la société BMW de cesser la vente des voitures Mazda comme il lui avait été demandé; que ces circonstances créaient une situation susceptible de justifier une réponse défavorable lors de l'examen de la demande d'agrément de la Sodac;
Considérant que compte tenu de sa situation financière au moment de la résiliation de son contrat, la Sodac n'est pas fondée à prétendre que sa mise en liquidation judiciaire est due au refus de la société BMW à lui communiquer les critères de sélection de sa distribution quantitative;
Que le préjudice dont la Sodac peut obtenir réparation ne peut être que la perte d'une chance d'exploiter pendant 3 ans la concession (puisque la Sodac a pris elle-même la référence de trois années) ; que compte tenu des éléments produits aux débats, ce préjudice peut être fixé à 50 000 euro;
Considérant que la Sodac n'est pas fondée à obtenir le remboursement du montant des investissements non amortis lors de son précédent contrat alors que la société BMW l'avait particulièrement mise en garde de ce qu'elle n'assumerait pas le remboursement de tels frais (lettre du 20 octobre 2000) ;
Que par ailleurs, il n'est pas démontré que la société BMW a favorisé le débauchage du personnel de la Sodac au profit de la société Bachelet, ni qu'elle a détourné les clients de la Sodac notamment en ayant utilisé son fichier clients;
Qu'en conséquence Maître Wallyn ne peut qu'être débouté de ces chefs d'indemnisation;
Considérant que l'équité commande de laisser à la charge des parties les frais qu'elles ont exposés en appel et qui ne sont pas compris dans les dépens;
Que les dépens d'appel seront supportés par moitié par chacune des parties;
Par ces motifs, LA COUR statuant publiquement et contradictoirement, - déclare irrecevable la demande de rejet sollicitée par Maître Wallyn en sa qualité de liquidateur de la Société de distribution automobile de Cambrésis, - déclare irrecevable l'appel formé aux fins d'indemnisation pour le retard dans l'agrément de la Sodac en qualité de réparateur de la société Mini, - infirme le jugement du chef des demandes d'indemnisation pour les demandes d'agrément en tant que réparateur BMW et de distributeur BMW et Mini et statuant à nouveau, - déboute Maître Wallyn en sa qualité de liquidateur de la Société de distribution automobile de Cambrésis de sa demande tendant à voir indemniser la Sodac par la société BMW pour lui avoir accordé l'agrément de réparateur BMW deux mois après la fin de son contrat de concession, - condamne la société BMW France à payer à Maître Wallyn en sa qualité de liquidateur de la Société de distribution automobile de Cambrésis la somme de 50 000 euro (cinquante mille euro) à titre de dommages-intérêts, - confirme autrement le jugement en ses dispositions non contraires avec le présent arrêt, - ajoutant, - dit que chaque partie conservera à sa charge ses frais exposés en appel non compris dans les dépens, - fait masse des dépens d'appel et les partage par moitié avec droit pour les avoués de la cause de recouvrer directement les dépens dont ils ont fait l'avance sans avoir reçu provision.