CJCE, 4e ch., 3 septembre 2009, n° C-535/06 P
COUR DE JUSTICE DES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES
Arrêt
PARTIES
Demandeur :
Moser Baer India Ltd
Défendeur :
Conseil de l'Union européenne, Commission des Communautés européennes, Committee of European CD-R and DVD+/-R Manufacturers (CECMA)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président de chambre :
M. Lenaerts
Avocat général :
Mme Trstenjak
Juges :
Mme Silva de Lapuerta, MM. Juhász, Arestis (rapporteur)
Avocats :
Mes Adamantopoulos, Berrisch
LA COUR (quatrième chambre),
1 Par son pourvoi, Moser Baer India Ltd demande l'annulation de l'arrêt du Tribunal de première instance des Communautés européennes du 4 octobre 2006, Moser Baer India/Conseil (T-300-03, Rec. p. II-3911, ci-après l'"arrêt attaqué"), par lequel celui-ci a rejeté son recours tendant à l'annulation du règlement (CE) n° 960-2003 du Conseil, du 2 juin 2003, instituant un droit compensateur définitif sur les importations de disques compacts pour l'enregistrement originaires de l'Inde (JO L 138, p. 1, ci-après le "règlement litigieux"), en ce qu'il s'applique à la requérante.
Le cadre juridique
2 Le règlement (CE) n° 2026-97 du Conseil, du 6 octobre 1997, relatif à la défense contre les importations qui font l'objet de subventions de la part de pays non membres de la Communauté européenne (JO L 288, p. 1, ci-après le "règlement de base"), régit les procédures antisubventions.
3 L'article 5 du règlement de base dispose:
"Calcul du montant de la subvention passible de mesures compensatoires
Le montant de la subvention passible de mesures compensatoires est, aux fins du présent règlement, calculé en termes d'avantage conféré au bénéficiaire tel que constaté et déterminé pour la période d'enquête. [...]"
4 L'article 7, paragraphe 3, du règlement de base, qui comporte des dispositions générales concernant ledit calcul, prévoit:
"Lorsque la subvention peut être mise en rapport avec l'acquisition, présente ou future, d'actifs immobilisés, le montant de la subvention passible de mesures compensatoires est calculé en étalant cette dernière sur une période correspondant à la durée d'amortissement normale de ces biens dans l'industrie concernée. [...]"
5 L'article 8 du règlement de base énonce:
"Détermination du préjudice
[...]
2. La détermination de l'existence d'un préjudice se fonde sur des éléments de preuve positifs et comporte un examen objectif à la fois:
a) du volume des importations faisant l'objet de subventions et de l'effet de ces importations sur les prix des produits similaires sur le marché de la Communauté
et
b) de l'incidence de ces importations sur l'industrie communautaire.
3. En ce qui concerne le volume des importations faisant l'objet de subventions, on examinera s'il y a eu augmentation notable des importations faisant l'objet de subventions soit en quantités absolues, soit par rapport à la production ou à la consommation dans la Communauté. En ce qui concerne l'effet des importations faisant l'objet de subventions sur les prix, on examinera s'il y a eu, pour les importations faisant l'objet de subventions sur les prix, [...] sous-cotation notable du prix par rapport au prix d'un produit similaire de l'industrie communautaire ou si ces importations ont, d'une autre manière, pour effet de déprimer sensiblement les prix ou d'empêcher dans une mesure notable des hausses de prix qui, sans cela, se seraient produites. Un seul ni même plusieurs de ces facteurs ne constituent nécessairement une base de jugement déterminante.
[...]
5. L'examen de l'incidence des importations faisant l'objet de subventions sur l'industrie communautaire concernée comporte une évaluation de tous les facteurs et indices économiques pertinents qui influent sur la situation de cette industrie, y compris le fait pour une industrie de ne pas encore avoir surmonté entièrement les effets de pratiques passées de subventionnement ou de dumping, l'importance du montant de la subvention passible de mesures compensatoires, la diminution effective et potentielle des ventes, des bénéfices, de la production, de la part de marché, de la productivité, du rendement des investissements ou de l'utilisation des capacités; les facteurs qui influent sur les prix dans la Communauté, les effets négatifs, effectifs et potentiels, sur les flux de liquidités, les stocks, l'emploi, les salaires, la croissance, l'aptitude à mobiliser les capitaux ou les investissements et, dans le cas de l'agriculture, l'utilisation accrue des programmes de soutien des pouvoirs publics. Cette liste n'est pas exhaustive et un seul, ni même plusieurs de ces facteurs ne constituent nécessairement une base de jugement déterminante.
6. Il doit être démontré à l'aide de tous les éléments de preuve pertinents présentés en relation avec le paragraphe 2 que les importations faisant l'objet de subventions causent un préjudice au sens du présent règlement. En l'occurrence, cela implique la démonstration que le volume et/ou le prix visés au paragraphe 3 ont un impact sur l'industrie communautaire au sens du paragraphe 5 et que cet impact est tel qu'on peut le considérer comme important.
7. Les facteurs connus, autres que les importations faisant l'objet de subventions, qui causent simultanément un préjudice à l'industrie communautaire sont aussi examinés de manière à ce que le préjudice causé par ces autres facteurs ne soit pas attribué aux importations faisant l'objet de subventions au sens du paragraphe 6. Les facteurs qui peuvent être considérés comme pertinents à cet égard comprennent le volume et le prix des importations ne faisant pas l'objet de subventions, la contraction de la demande ou les modifications de la configuration de la consommation, les pratiques commerciales restrictives des producteurs de pays tiers et communautaires et la concurrence entre ces mêmes producteurs, l'évolution des techniques ainsi que les résultats à l'exportation et la productivité de l'industrie communautaire.
[...]"
6 En vertu de l'article 15, paragraphe 1, troisième phrase, du règlement de base, le montant d'un droit compensateur ne doit pas excéder le montant établi des subventions passibles de mesures compensatoires et il doit être inférieur si ce montant inférieur est suffisant pour éliminer le préjudice causé à l'industrie communautaire.
7 L'article 28 du règlement de base dispose:
"Défaut de coopération
1. Lorsqu'une partie intéressée refuse l'accès aux informations nécessaires ou ne les fournit pas dans le délai prévu par le présent règlement ou fait obstacle de façon significative à l'enquête, des conclusions préliminaires ou finales, positives ou négatives peuvent être établies sur la base des données disponibles. S'il est constaté qu'une partie intéressée a fourni un renseignement faux ou trompeur, ce renseignement n'est pas pris en considération et il peut être fait usage des faits disponibles. Les parties concernées doivent normalement être informées des conséquences d'un refus de coopération.
[...]
3. Lorsque les informations présentées par une partie intéressée ne sont pas les meilleures à tous égards, elles ne sont pas pour autant ignorées, à condition que les insuffisances éventuelles ne rendent pas excessivement difficile l'établissement de conclusions raisonnablement correctes, que les informations soient fournies en temps utile, qu'elles soient contrôlables et que la partie ait agi au mieux de ses possibilités.
4. Si des éléments de preuve ou des renseignements ne sont pas acceptés, la partie qui les a communiqués est informée immédiatement des raisons de leur rejet et il lui est donné la possibilité de fournir des explications complémentaires dans le délai fixé. Si ces explications ne sont pas jugées satisfaisantes, les raisons du rejet des éléments de preuve ou des renseignements en question sont communiquées et indiquées dans les conclusions rendues publiques.
5. Si les conclusions, y compris celles qui concernent le montant de la subvention passible de mesures compensatoires, sont fondées sur les dispositions du paragraphe 1, notamment sur les renseignements fournis dans la plainte, ces renseignements, lorsque cela est possible et compte tenu du délai imparti pour l'enquête, sont vérifiés par référence à d'autres sources indépendantes disponibles, telles que les listes de prix publiées, les statistiques d'importation officielles et les relevés douaniers ou par référence aux renseignements obtenus d'autres parties concernées au cours de l'enquête.
6. Si une partie intéressée ne coopère pas ou ne coopère que partiellement et que, de ce fait, des renseignements pertinents ne sont pas communiqués, il peut en résulter pour ladite partie une situation moins favorable que si elle avait coopéré."
Les faits à l'origine du litige
8 Les faits à l'origine du litige sont exposés aux points 8 à 14 de l'arrêt attaqué comme suit:
"8 La requérante est une société établie en Inde, fabriquant diverses formes de supports de mémoire et notamment des disques compacts pour l'enregistrement (ci-après les 'CD-R').
9 Le 17 mai 2002, la Commission [des Communautés européennes], à la suite d'une plainte déposée par le Committee of European CD-R Manufacturers (CECMA), a ouvert une enquête antisubventions sur les importations de CD-R provenant de l'Inde (JO C 116, p. 4).
10 Par lettre du 4 mars 2003, la Commission a exposé à la requérante les éléments de fait et les considérations essentiels sur la base desquels il était envisagé de proposer la fixation de droits compensateurs définitifs. La subvention constatée par la Commission consistait en une exemption des droits de douane sur les biens d'équipement importés par la requérante. Dans le calcul du montant de la subvention, celle-ci a été étalée, en application de l'article 7, paragraphe 3, du règlement de base, sur une période de trois ans. L'exposé prévoyait l'imposition d'un droit compensateur de 10 %.
11 Par deux lettres du 19 mars 2003, la requérante a répondu audit exposé, en contestant, d'une part, la méthode utilisée pour calculer le montant de la subvention et, d'autre part, l'existence et les causes du préjudice.
12 Par deux lettres du 9 avril 2003, la Commission a, d'une part, rejeté les arguments de la requérante relatifs à l'existence d'un préjudice et d'un lien de causalité et, d'autre part, envoyé à la requérante un exposé additionnel contenant un nouveau calcul du montant de la subvention, dans lequel celle-ci a été étalée sur une période de 4,2 ans. L'exposé additionnel prévoyait l'imposition d'un droit compensateur de 7,3 %.
13 Par lettre du 14 avril 2003, la requérante a contesté le nouveau calcul du montant de la subvention. La Commission a adressé à la requérante, par lettre du 5 mai 2003, des explications complémentaires sur ce calcul. La requérante a répondu à cette lettre, le 9 mai 2003, en apportant des observations complémentaires.
14 Sur proposition de la Commission, arrêtée le 20 mai 2003, le Conseil [de l'Union européenne] a adopté le règlement [litigieux]. Ce règlement imposait un droit compensateur définitif de 7,3 % sur les importations de CD-R provenant de l'Inde."
Le recours devant le Tribunal et l'arrêt attaqué
9 Par requête déposée au greffe du Tribunal le 29 août 2003, la requérante a demandé l'annulation du règlement litigieux en soulevant cinq moyens, concernant, d'une part, la détermination, dans le cadre du calcul du montant de la subvention, de la durée d'amortissement normale des actifs importés et, d'autre part, l'appréciation du préjudice et du lien de causalité.
10 Par ordonnance du Tribunal du 23 janvier 2004, la Commission a été admise à intervenir au soutien des conclusions du Conseil.
11 Par ordonnance du Tribunal du 18 avril 2005, le Committee of European CD-R Manufacturers (CECMA), devenu le Committee of European CD-R and DVD+/- R Manufacturers (CECMA), a été admis à intervenir au soutien des conclusions du Conseil.
12 Le Conseil, soutenu par la Commission et le CECMA, a conclu au rejet du recours et à la condamnation de la requérante aux dépens.
13 Aux points 27 à 116 de l'arrêt attaqué, le Tribunal a rejeté le premier moyen, tiré d'une violation des articles 5, 7, paragraphe 3, et 11, paragraphe 1, du règlement de base, et d'une erreur manifeste dans l'appréciation de la durée d'amortissement normale des actifs. Ce moyen était divisé en deux branches concernant, d'une part, l'appréciation des éléments relatifs à la durée d'amortissement et, d'autre part, l'appréciation de la durée d'amortissement normale des actifs, la seconde branche étant elle-même divisée en cinq griefs relatifs au classement des actifs dans la catégorie des moules, au défaut de prise en compte des informations découlant des états comptables de la requérante, à la prise en compte de la rentabilité et des investissements de la requérante, à l'emploi de la méthode d'amortissement dégressif et au caractère prétendument arbitraire des calculs.
14 Le Tribunal a notamment constaté, aux points 73 à 79 de l'arrêt attaqué, s'agissant du défaut de prise en compte des informations découlant des états comptables de la requérante, qui constitue le deuxième grief de la seconde branche du premier moyen, ce qui suit:
"73 Enfin, la requérante allègue que le classement des actifs dans la catégorie des moules ne concernait pas l'ensemble des actifs en cause, fait qu'elle aurait signalé à la Commission par lettre du 14 avril 2003.
74 Le Conseil rétorque à cette allégation que les informations présentées à son appui n'étaient pas cohérentes avec d'autres éléments obtenus lors de l'enquête et que, dès lors, ladite allégation n'a pas pu être prise en compte.
75 Il ressort des éléments présentés par les parties en réponse à la question écrite posée par le Tribunal que, à l'appui de l'allégation dont il s'agit, la requérante a fait référence aux informations découlant de sa déclaration fiscale pour la période d'enquête. Il est constant que la valeur des actifs inscrite dans cette déclaration ne correspond pas à leur valeur retenue pour calculer la subvention. Le Conseil indique que les institutions n'ont pas été en mesure, sur la base de ces seuls éléments, de confronter l'allégation en cause aux autres informations vérifiées dans le cadre de l'enquête.
76 La requérante soutient néanmoins que la différence de valeurs qui en résulte, explicable par l'ajout des coûts de transport et d'installation, n'empêchait pas les institutions communautaires de remarquer que la modification du classement ne concernait pas l'ensemble des actifs importés.
77 Le Conseil a précisé, à cet égard, que les institutions communautaires n'avaient pas pu estimer la valeur exacte des actifs classés dans la catégorie des moules, car, d'une part, la requérante n'avait pas expliqué les critères du classement de ses actifs dans la déclaration fiscale et, d'autre part, elle n'avait pas fourni la liste complète et vérifiable de ces actifs. En l'absence de ces éléments, les institutions communautaires n'auraient pas pu vérifier les chiffres présentés par la requérante à l'appui de son allégation.
78 Au vu de ces dernières indications, que la requérante n'a pas remises en cause devant le Tribunal, il y a lieu de considérer que celle-ci n'a pas présenté aux institutions communautaires d'éléments qui leur auraient permis de vérifier l'exactitude de son allégation et, éventuellement, de prendre en compte la partie des actifs concernée qui n'aurait pas été classée dans la catégorie des moules. Dès lors, elle ne saurait, par cette seule allégation, contester l'appréciation opérée dans le règlement [litigieux].
79 Par conséquent, le Conseil a pu, sans méconnaître l'article 7, paragraphe 3, du règlement de base, considérer que les actifs en cause, classés comme des moules à des fins fiscales, auraient dû être également pris en compte comme telles aux fins de l'appréciation de leur durée d'amortissement en matière comptable et que, dès lors, il n'était pas approprié de fonder cette appréciation sur les informations figurant dans les états comptables de la requérante. En outre, la requérante n'a pas démontré l'existence d'un défaut de motivation à cet égard."
15 Le Tribunal a également écarté le troisième moyen, tiré d'une erreur manifeste d'appréciation et d'une violation de l'article 8, paragraphes 2 et 6, du règlement de base, en ce qui concerne l'examen des éléments relatifs à la détermination du préjudice et du lien de causalité.
16 Le Tribunal a constaté, aux points 193 à 196 de l'arrêt attaqué, à propos de l'appréciation du niveau des stocks:
"193 Dans le cadre du présent grief, la requérante soutient que l'appréciation de l'évolution des stocks de l'industrie communautaire est manifestement erronée. Elle ne discute pas les données chiffrées s'y rapportant, figurant au [quatre-vingtième considérant] du règlement [litigieux]. Elle relève néanmoins que le Conseil n'aurait pu conclure au [cent troisième considérant] du règlement [litigieux], sur la base de ces données, que l'indicateur des stocks s'était fortement détérioré au cours de la période considérée.
194 Il convient de rappeler que la période considérée en l'espèce s'étalait de l'année 1998 à la fin de la période d'enquête. Il ressort des données non contestées par la requérante que, durant toute cette période, les stocks de l'industrie communautaire ont augmenté de manière significative.
195 À cet égard, la requérante n'a pas démontré que l'amélioration de l'indicateur relatif aux stocks exprimé en pourcentage de production à partir de l'année 2000 aurait été de nature à renverser la tendance négative constatée sur l'ensemble de la période considérée. En effet, il ressort du [quatre-vingtième considérant] du règlement [litigieux] que les stocks sont restés à des taux élevés durant toute la période considérée, augmentant en termes absolus vers la fin de 2001, ce qui coïncidait donc avec l'augmentation du volume des importations, et représentant, en termes relatifs, un taux élevé, de 15 %, de la production au cours de la période d'enquête.
196 Le présent grief est donc dénué de fondement."
17 Aux points 201 à 207 de l'arrêt attaqué, le Tribunal a estimé à propos de l'appréciation des prix des importations:
"201 L'appréciation des niveaux de prix des importations constituait, en l'espèce, l'élément essentiel fondant la conclusion d'une sous-cotation des prix communautaires et, ainsi, de l'existence du préjudice. Les institutions communautaires ont analysé cet indicateur, aux [cinquante-huitième à soixante-quatrième considérants] du règlement [litigieux], sur la base des données d'Eurostat, ainsi que sur celle des chiffres fournis par la requérante.
202 En ce qui concerne les données d'Eurostat, les institutions ont conclu, à titre principal, qu'il y avait eu une baisse de prix importante, de 59 %, entre 2000 et la fin de la période d'enquête. La requérante conteste la prise en compte des données relatives à l'année 2000, arguant de ce que les importations étaient encore insignifiantes. Or, cet argument a déjà été examiné et rejeté aux points 170 à 175 ci-dessus.
203 Quant à l'analyse des chiffres fournis par la requérante, il convient de rappeler qu'elle a conduit à des résultats très comparables à ceux fondés sur les données d'Eurostat, à savoir une baisse des prix de 54 %. La requérante soutient néanmoins que la présentation de ces chiffres est inexacte.
204 Il ressort du tableau figurant au [soixante-deuxième considérant] du règlement [litigieux] que le pourcentage de 54 % se rapporte à l'évolution des prix entre les deux exercices budgétaires de la requérante. À supposer même que le [soixante-troisième considérant] ne soit pas suffisamment précis lorsqu'il indique que ce pourcentage concerne l'évolution entre 2000 et la période d'enquête, cette imprécision ne constituerait pas non plus une erreur. Il ressort clairement du tableau qui précède le considérant en question qu'il s'agit de l'évolution entre l'exercice budgétaire 2000 et la période d'enquête. La requérante n'a donc pas démontré que les chiffres qu'elle avait fournis auraient été présentés de manière inexacte.
205 En outre, même si les données fournies par la requérante se rapportent à la période débutant le 1er avril 1999, tandis que les données d'Eurostat intéressent la période commençant le 1er janvier 2000, ce seul fait ne conduit pas à rendre inexacte la constatation du Conseil, selon laquelle les chiffres d'Eurostat et ceux de la requérante démontrent des tendances concordantes. Or, la requérante n'indique pas que la prise en compte d'une autre date de départ pour ses données aurait pu conduire à des conclusions différentes en ce qui concerne les prix des importations.
206 Par conséquent, la requérante n'a pas démontré l'existence d'une erreur factuelle ou d'une erreur manifeste d'appréciation s'agissant de l'analyse des prix des importations.
207 Le présent grief doit donc être rejeté comme non fondé."
18 Enfin, le Tribunal a, aux points 260 à 279 de l'arrêt attaqué, écarté le cinquième moyen, tiré d'une violation de l'article 8, paragraphes 6 et 7, du règlement de base, en ce qui concerne l'examen des effets d'un comportement anticoncurrentiel d'un titulaire de brevets en considérant ce qui suit:
"260 Selon une jurisprudence constante, lors de la détermination du préjudice, les institutions communautaires ont l'obligation d'examiner si le préjudice qu'elles entendent retenir découle effectivement des importations qui ont fait l'objet d'un dumping ou de subventions et d'écarter tout préjudice découlant d'autres facteurs, et notamment celui qui aurait sa cause dans un comportement anticoncurrentiel impliquant les producteurs communautaires (arrêts [de la Cour du 11 juin 1992,] Extramet Industrie-Conseil, [C-358-89, Rec. p. I-3813], point 16, et [du Tribunal du 19 septembre 2001,] Mukand e.a./Conseil, [T-58-99, Rec. p. II-2521], points 39 et 40).
261 En l'espèce, il ressort du dossier que l'industrie communautaire plaignante a fait valoir, dans un mémoire du 7 janvier 2003, qu'une société titulaire de brevets portant sur les CD-R abusait de sa position dominante en facturant des redevances excessives et qu'un producteur européen s'était retiré du marché à la suite d'un litige avec cette société. L'industrie a fait cette observation pour contrer l'allégation de la requérante, selon laquelle le degré de soutien de la plainte, au sens de l'article 10, paragraphe 8, du règlement de base, avait décru au-dessous du seuil exigé pour la poursuite de la procédure. La requérante a formulé la même observation, au cours de l'enquête, faisant valoir que les effets du comportement anticoncurrentiel allégué, consistant en la fixation de redevances excessives, constituaient un facteur à examiner dans le cadre de la détermination du préjudice.
262 Dans le cadre du présent moyen, la requérante soutient que le Conseil a omis d'examiner ce facteur, en se bornant à constater, au [cent trente-cinquième considérant] du règlement [litigieux], que l'allégation en cause n'a été confirmée par aucune décision formelle résultant d'une enquête des autorités chargées de la concurrence.
263 Il convient d'observer, à cet égard, qu'il ne résulte pas du [cent trente-cinquième considérant] du règlement [litigieux] que les institutions communautaires ont effectivement examiné la question de savoir si le préjudice retenu ne découlait pas du comportement anticoncurrentiel allégué.
264 Si ce considérant ne suffit donc pas pour écarter les effets du facteur invoqué par la requérante, il convient d'observer que la question de savoir si le Conseil n'a pas omis de prendre en compte lesdits effets doit néanmoins être examinée par rapport à l'ensemble du raisonnement adopté dans le cadre du règlement [litigieux] (voir, en ce sens, arrêt [du Tribunal du 14 juillet 1995,] Koyo Seiko-Conseil, [T-166-94, Rec. p. II-2129], point 79).
265 Or, le Conseil fait valoir qu'il a pris en compte ce facteur au [cent trente-quatrième considérant] du règlement [litigieux]. Il ressort dudit considérant que le Conseil a examiné, de manière générale, les effets du paiement des redevances découlant des brevets, en constatant que ce facteur n'était pas de nature à briser le lien de causalité en l'espèce. Le Conseil soutient que, par cette constatation, il a également répondu à l'allégation selon laquelle ces redevances étaient excessives et constituaient un comportement anticoncurrentiel.
266 À cet égard, si les [cent trente-quatrième et cent trente-cinquième considérants] figurent sous des sous-titres différents, à savoir 'Redevances' et 'Autres facteurs', il ressort des arguments des parties qu'ils concernent tous les deux, néanmoins, le même élément du dossier relatif au paiement de redevances. En outre, ces deux considérants se suivent, de sorte que leur lecture conjointe est commandée par la structure du règlement [litigieux].
267 Il convient donc de prendre en compte les constatations effectuées au [cent trente-quatrième considérant] pour examiner si le Conseil a écarté le préjudice éventuel découlant du comportement anticoncurrentiel invoqué par la requérante.
268 En premier lieu, la requérante conteste la pertinence desdites constatations, faisant valoir que les institutions auraient dû évaluer les effets des redevances de façon précise pour conclure que, même en l'absence de redevances excessives, l'industrie communautaire aurait subi un préjudice.
269 Il convient de relever, à cet égard, que, pour écarter les effets découlant d'un facteur externe, les institutions communautaires sont tenues d'examiner si lesdits effets ont été de nature à rompre le lien de causalité entre les importations en cause et le préjudice causé à l'industrie communautaire [...]. Or, cet examen n'implique pas nécessairement une détermination des effets précis du facteur en cause. Il suffit que les institutions communautaires constatent que, en dépit d'un tel facteur externe, le préjudice causé par les importations en cause a été important.
270 En l'espèce, le Conseil a relevé que les importations indiennes avaient causé un préjudice important à l'industrie communautaire, résultant notamment d'une sous-cotation des prix communautaires. Il a expliqué que, même si les redevances avaient eu une influence négative sur les profits de l'industrie communautaire, ce facteur, affectant tous les producteurs du marché, était déjà présent en 1999, avant que les importations ne soient devenues importantes. L'évolution négative de la situation des producteurs communautaires à partir de l'année 1999 ne pouvait donc être imputée à ce facteur. Au vu de ces éléments, il n'était pas déraisonnable que le Conseil considérât que le paiement de redevances n'avait pu avoir d'incidence sur le préjudice causé par les importations subventionnées.
271 Le Conseil affirme, à juste titre, que l'examen de la question de savoir si les redevances ont été excessives à cause d'un comportement anticoncurrentiel d'un propriétaire de brevets ne saurait, en tout état de cause, conduire à remettre en cause sa conclusion mentionnée au point ci-dessus.
272 Il convient d'observer également que, à la différence des situations prévalant dans les affaires ayant donné lieu aux arrêts Extramet [Industrie-Conseil] et Mukand e.a./Conseil, précités, la pratique anticoncurrentielle ici alléguée n'est pas imputable au comportement des producteurs communautaires. Pour apprécier les effets de ce facteur en l'espèce, les institutions communautaires n'étaient donc pas tenues d'examiner si l'industrie communautaire n'avait pas elle-même contribué au préjudice subi.
273 En deuxième lieu, la requérante soutient, en invoquant l'arrêt Mukand e.a./Conseil, précité, que le préjudice, déterminé par la sous-cotation des prix, n'a pas été correctement évalué, si les prix communautaires étaient artificiellement élevés du fait des redevances excessives.
274 Il convient de rappeler que les circonstances de l'affaire qui ont donné lieu à l'arrêt Mukand e.a./Conseil, précité, concernaient un comportement affectant les prix communautaires, mais pas ceux à l'importation. Or, en l'espèce, le Conseil a constaté que les redevances en cause devaient être acquittées par tous les producteurs, y compris la requérante. La requérante n'a pas contesté cette donnée de fait.
275 Ainsi, le Conseil a pu estimer, au [cent trente-quatrième considérant] du règlement [litigieux], que le facteur externe en cause n'était pas susceptible d'expliquer la différence entre les prix communautaires et les prix indiens et que, dès lors, il était sans influence sur les éléments pris en compte pour calculer le niveau de sous-cotation. Même à supposer que les redevances aient été excessives du fait d'un comportement anticoncurrentiel, ce facteur n'est pas susceptible d'affecter cette appréciation.
276 Au vu de ces éléments, il y a lieu de considérer que la requérante n'a pas démontré que le Conseil avait omis d'écarter, dans l'appréciation du préjudice, les effets découlant d'un prétendu comportement anticoncurrentiel.
277 Dans ces conditions, il n'est pas nécessaire de se prononcer sur l'admissibilité de l'élément de fait présenté par la requérante dans la réplique, à savoir le communiqué de presse de la Commission, du 3 août 2003, faisant état d'une enquête relative à l'application des articles 81 CE et 82 CE à un accord standard concernant les brevets portant sur certains types de CD. En effet, il ressort des arguments de la requérante que cet élément a été présenté pour étayer sa thèse selon laquelle le facteur en cause était connu des institutions communautaires. En revanche, elle n'a pas expliqué en quoi ledit communiqué pouvait venir au soutien de l'argument selon lequel ce facteur était de nature à rompre le lien de causalité en l'espèce.
278 Dès lors, le cinquième moyen ne saurait être accueilli.
279 Il résulte de tout ce qui précède qu'il y a lieu de rejeter le recours dans son ensemble. En conséquence, il n'est pas besoin de se prononcer sur les conclusions formulées par le Conseil à titre subsidiaire."
19 Par l'arrêt attaqué, le Tribunal a rejeté le recours.
Les conclusions des parties
20 Par son pourvoi, Moser Baer India Ltd demande à la Cour:
- d'annuler l'arrêt attaqué;
- de faire droit à ses conclusions de première instance, à savoir annuler le règlement litigieux en ce qu'il s'applique à elle, et
- de condamner le Conseil aux dépens exposés par elle dans le cadre du présent pourvoi ainsi qu'en première instance.
21 Le Conseil et la Commission demandent à la Cour de:
- rejeter le pourvoi, et
- condamner la requérante aux dépens des deux instances.
Sur le pourvoi
22 À l'appui de son pourvoi, la requérante invoque trois moyens, tirés, en premier lieu, d'une infraction aux principes de cohérence et d'enquête diligente en ce qui concerne la motivation de l'arrêt attaqué figurant aux points 73 à 79 de celui-ci, en deuxième lieu, d'une erreur manifeste d'appréciation du Tribunal concernant les aspects de l'enquête relatifs au préjudice, mentionnés aux points 193 à 196 et 201 à 206 de l'arrêt attaqué, et, en troisième lieu, d'un défaut de prise en compte de l'attribution du préjudice à d'autres facteurs au sens de l'article 8, paragraphe 7, du règlement de base, en ce qui concerne la constatation, aux points 260 à 278 de l'arrêt attaqué, de l'existence d'un préjudice.
Sur la recevabilité du pourvoi
23 Par lettre du 6 juin 2008, le Conseil a informé la Cour de l'adoption du règlement (CE) n° 1293-2007, du 30 octobre 2007, abrogeant les droits antidumping institués par le règlement (CE) n° 1050-2002 sur les importations de disques compacts pour l'enregistrement originaires de Taïwan et autorisant leur remboursement ou leur remise et abrogeant les droits compensateurs institués par le règlement (CE) n° 960-2003 sur les importations de disques compacts pour l'enregistrement originaires de l'Inde, autorisant leur remboursement ou leur remise et clôturant la procédure les concernant (JO L 288, p. 17). À la lumière de l'adoption du règlement n° 1293-2007, le Conseil soutient qu'il n'y a plus lieu de statuer dans la présente affaire.
24 Il convient de rappeler que la Cour peut soulever d'office le défaut d'intérêt d'une partie à introduire ou à poursuivre un pourvoi, en raison d'un fait postérieur à l'arrêt du Tribunal de nature à enlever à celui-ci son caractère préjudiciable pour le demandeur au pourvoi, et déclarer le pourvoi irrecevable ou sans objet pour ce motif. En effet, l'existence d'un intérêt à agir du requérant suppose que le pourvoi soit susceptible, par son résultat, de procurer un bénéfice à la partie qui l'a intenté (voir arrêt du 19 octobre 1995, Rendo e.a./Commission, C-19-93 P, Rec. p. I-3319, point 13, ainsi que ordonnance du 8 avril 2008, Saint-Gobain Glass Deutschland/Commission, C-503-07 P, Rec. p. I-2217, point 48).
25 En l'occurrence, il y a toutefois lieu de relever que l'intérêt de la requérante à obtenir l'annulation de l'arrêt attaqué et, indirectement, du règlement litigieux ne saurait être nié au motif que ce dernier ne produit plus d'effet pour l'avenir. En effet, une telle annulation est susceptible, par elle-même, d'avoir des conséquences juridiques, notamment en évitant le renouvellement d'une pratique irrégulière de la part des institutions communautaires (voir, en ce sens, arrêt du 24 juin 1986, AKZO Chemie et AKZO Chemie UK/Commission, 53-85, Rec. p. 1965, point 21).
26 Au demeurant, ainsi que Mme l'avocat général l'a relevé au point 37 de ses conclusions, le règlement litigieux n'a pas été intégralement abrogé et continue à produire des effets pour les droits compensateurs qui ont été perçus jusqu'au 4 novembre 2006.
27 Dans ces conditions, la Cour n'est pas en mesure de constater que le pourvoi a perdu son objet.
Sur le fond
Sur le premier moyen
28 Par son premier moyen, la requérante soutient que le Tribunal n'a pas respecté, comme il se doit, les principes de cohérence et d'enquête diligente lorsqu'il a estimé que les institutions communautaires avaient agi légalement en traitant tous ses actifs comme des actifs reclassés en moules, bénéficiant de la subvention en cause soumise à un étalement sur une période d'amortissement de 4,2 ans.
29 Le Conseil soutient que ce moyen est irrecevable du fait que la requérante tendrait à remettre en cause des constats factuels faits par le Tribunal et à soumettre à la Cour un nouveau moyen, qu'elle n'a pas présenté en première instance, à savoir une violation des principes de cohérence et de bonne administration concernant le classement des actifs dans la catégorie des moules.
30 La Commission fait valoir que ce moyen est irrecevable, car il tend à amener la Cour à réexaminer les constatations factuelles du Tribunal sans qu'il y ait d'indication d'une dénaturation des éléments de preuve par ce dernier.
31 À cet égard, il y a lieu de rappeler que, selon une jurisprudence constante, il résulte des articles 225 CE et 58, premier alinéa, du statut de la Cour de justice que le Tribunal est seul compétent, d'une part, pour constater les faits, sauf dans le cas où l'inexactitude matérielle de ses constatations résulterait des pièces du dossier qui lui ont été soumises, et, d'autre part, pour apprécier ces faits. Lorsque le Tribunal a constaté ou apprécié les faits, la Cour est compétente pour exercer, en vertu de l'article 225 CE, un contrôle sur la qualification juridique de ces faits et les conséquences de droit qui en ont été tirées par le Tribunal (voir, notamment, arrêts du 6 avril 2006, General Motors/Commission, C-551-03 P, Rec. p. I-3173, point 51; du 22 mai 2008, Evonik Degussa/Commission, C-266-06 P, point 72, ainsi que du 18 décembre 2008, Coop de France bétail et viande e.a./Commission, C-101-07 P et C-110-07 P, point 58).
32 Ainsi, la Cour n'est pas compétente pour constater les faits ni, en principe, pour examiner les preuves que le Tribunal a retenues à l'appui de ces faits. En effet, dès lors que ces preuves ont été obtenues régulièrement, que les principes généraux du droit ainsi que les règles de procédure applicables en matière de charge et d'administration de la preuve ont été respectés, il appartient au seul Tribunal d'apprécier la valeur qu'il convient d'attribuer aux éléments qui lui ont été soumis. Cette appréciation ne constitue donc pas, sous réserve du cas de la dénaturation de ces éléments, une question de droit soumise, comme telle, au contrôle de la Cour (voir, notamment, arrêts précités General Motors/Commission, point 52; Evonik Degussa/Commission, point 73, ainsi que Coop de France bétail et viande e.a./Commission, point 59).
33 Il importe, par ailleurs, de rappeler qu'une dénaturation doit apparaître de façon manifeste des pièces du dossier, sans qu'il soit nécessaire de procéder à une nouvelle appréciation des faits et des preuves (voir, notamment, arrêts précités General Motors/Commission, point 54; Evonik Degussa/Commission, point 74, ainsi que Coop de France bétail et viande e.a./Commission, point 60).
34 En revanche, la question de savoir si le Tribunal a pu, à bon droit, conclure desdits faits que les institutions communautaires n'ont manqué ni à leur devoir de diligence ni à leur obligation de motivation constitue une question de droit soumise au contrôle de la Cour dans le cadre d'un pourvoi (voir arrêts du 20 novembre 1997, Commission-V, C-188-96 P, Rec. p. I-6561, point 24; du 28 juin 2005, Dansk Rørindustri e.a./Commission, C-189-02 P, C-202-02 P, C-205-02 P à C-208-02 P et C-213-02 P, Rec. p. I-5425, point 453, ainsi que du 6 novembre 2008, Pays-Bas/Commission, C-405-07 P, non encore publié au Recueil, point 44).
35 En l'espèce, la requérante reproche, tout d'abord, au Tribunal d'avoir méconnu les principes de cohérence et d'enquête diligente en n'identifiant aucune règle de droit ou de procédure afin d'affirmer que le Conseil avait le droit de prendre en compte tous les actifs classés dans la catégorie des moules aux fins de l'application de la période d'amortissement de 4,2 ans. Ce faisant, la requérante entend mettre en cause la manière dont le Tribunal a apprécié son allégation, mentionnée au point 73 de l'arrêt attaqué, selon laquelle le classement des actifs dans la catégorie des moules ne concernait pas l'ensemble des actifs en cause.
36 À cet égard, il résulte de l'arrêt attaqué, notamment des points 75 et 78 de celui-ci, que le Tribunal a pris en compte l'allégation de la requérante ainsi que les éléments présentés par les parties en réponse à la question écrite concernant le classement des actifs dans la catégorie des moules et a conclu que la requérante n'avait pas présenté aux institutions communautaires d'éléments qui leur auraient permis de vérifier l'exactitude de son allégation et que, par conséquent, l'appréciation opérée dans le règlement litigieux ne pouvait être contestée.
37 L'argument tiré d'un manquement du Tribunal aux principes de cohérence et d'enquête diligente doit, par conséquent, être rejeté comme non fondé.
38 Dans la mesure où la requérante vise également à mettre en cause l'appréciation des faits effectuée par le Tribunal en contestant essentiellement le fait que les éléments retenus aux points 75, 77 et 78 de l'arrêt attaqué suffisent à démontrer que les institutions communautaires n'avaient pas pu estimer la valeur exacte des actifs classés dans la catégorie des moules, cet argument doit être déclaré irrecevable, puisque cette démarche tend à obtenir un réexamen d'appréciations factuelles pour lequel la Cour n'est pas compétente dans le cadre d'un pourvoi.
39 Par ailleurs, la requérante soutient, d'une part, que, en l'absence des éléments nécessaires au calcul du montant de la subvention passible de mesures compensatoires, les institutions communautaires auraient dû invoquer explicitement l'article 28 du règlement de base. Elle affirme, d'autre part, que, en réponse à une question écrite posée par le Tribunal, elle a démontré que, sur le fondement des informations avancées par les institutions communautaires et des données figurant en annexe de la déclaration fiscale et exposant le calcul de l'amortissement, les institutions communautaires savaient ou auraient dû facilement savoir que la proportion des actifs qui n'avaient pas été classés ou reclassés en moules s'élevait à au moins 23 % de tous les actifs importés.
40 À cet égard, il importe de relever que des moyens nouveaux, non contenus dans le recours, ne peuvent pas être présentés lors du pourvoi, ainsi qu'il découle des articles 113, paragraphe 2, et 116, paragraphe 1, du règlement de procédure (voir arrêts du 19 juin 1992, V.-Parlement, C-18-91 P, Rec. p. I-3997, point 21, et du 23 novembre 2000, British Steel/Commission, C-1-98 P, Rec. p. I-10349, point 47).
41 Or, en l'occurrence, ce n'est que devant la Cour que la requérante a, pour la première fois, invoqué une violation de l'article 28 du règlement de base liée au fait que les informations découlant de sa déclaration fiscale n'ont pas été suffisamment prises en compte aux fins de constater que tous les actifs subventionnés n'avaient pas été reclassés dans la catégorie des moules. Il convient, dès lors, de constater que cet argument est nouveau et, partant, irrecevable dans le cadre du présent pourvoi.
42 S'agissant de l'argument tiré de la preuve apportée par la requérante de la prétendue connaissance, par les institutions communautaires, de la proportion d'actifs subventionnés non reclassés dans la catégorie des moules, force est de constater qu'il tend à obtenir une nouvelle appréciation des faits, laquelle, en l'absence d'allégation de dénaturation, échappe à la compétence de la Cour dans le cadre d'un pourvoi.
43 Il s'ensuit donc que le premier moyen doit être rejeté dans son intégralité.
Sur le deuxième moyen
44 La requérante soutient que le Tribunal a commis une erreur manifeste d'appréciation des faits retenus lors de la détermination du préjudice. Ce deuxième moyen comporte deux branches concernant, d'une part, l'appréciation erronée du niveau des importations de CD-R en provenance de l'Inde et, d'autre part, l'appréciation erronée du niveau des stocks de l'industrie communautaire en tant qu'indication du préjudice.
- Sur la première branche
45 S'agissant de l'appréciation erronée du niveau des importations de CD-R en provenance de l'Inde, la requérante soulève trois arguments. Premièrement, celle-ci conteste la conclusion du Tribunal selon laquelle les institutions communautaires ont correctement rejeté son allégation selon laquelle, pour des petites quantités, la formule statistique appliquée pour les données d'Eurostat n'était pas fiable. Ces données auraient consisté en un "Code CN" composé de CD-R ainsi que d'autres produits de type similaire et auraient été basées sur une formule développée par l'industrie communautaire des CD-R. En outre, la requérante étant la seule exportatrice indienne de CD-R vers l'Union européenne, ses propres données auraient été la seule source fiable pour déterminer les volumes et les valeurs d'importation.
46 Deuxièmement, la requérante considère que le constat des institutions communautaires, confirmé par le Tribunal, selon lequel les données d'Eurostat et ses propres données financières ont conduit à des résultats très comparables est erroné. En effet, selon les données de la requérante, en 2000, le prix de ses exportations aurait augmenté jusqu'à la fin de la période d'enquête. Or, ce constat ne correspondrait pas aux données d'Eurostat lesquelles indiqueraient une baisse des prix de 59 %.
47 Troisièmement, la requérante soutient qu'elle a toujours contesté le fait que, concernant les niveaux des prix à l'importation, le Conseil avait procédé à des comparaisons pertinentes et affirme qu'une autre date pour la période d'enquête aurait clairement conduit les institutions communautaires à une conclusion différente. La conclusion tirée par le Tribunal selon laquelle la requérante n'affirme pas que la prise en compte d'une autre date de départ pour ses données aurait pu conduire à des conclusions différentes en ce qui concerne les prix des importations indiennes de CD-R serait donc inexacte.
48 Selon le Conseil, soutenu par la Commission, par la première branche de son deuxième moyen, la requérante conteste les constatations par lesquelles le Tribunal a confirmé l'exactitude des faits énoncés dans le règlement litigieux. Il en découle que cette branche du deuxième moyen devrait être déclarée irrecevable.
49 Il convient de rappeler que, selon une jurisprudence constante, il résulte des articles 225 CE, 58, premier alinéa, du statut de la Cour de justice et 112, paragraphe 1, sous c), du règlement de procédure de cette dernière qu'un pourvoi doit indiquer de façon précise les éléments critiqués de l'arrêt dont l'annulation est demandée ainsi que les arguments juridiques qui soutiennent de manière spécifique cette demande (voir, notamment, arrêts du 3 mars 2005, Biegi Nahrungsmittel et Commonfood/Commission, C-499-03 P, Rec. p. I-1751, point 37; du 26 octobre 2006, Koninklijke Coöperatie Cosun/Commission, C-68-05 P, Rec. p. I-10367, point 54, ainsi que ordonnance du 15 mai 2007, Ricosmos/Commission, C-420-05 P, point 64).
50 Par conséquent, un pourvoi qui se limite à répéter ou à reproduire textuellement les moyens et les arguments qui ont été présentés devant le Tribunal, y compris ceux qui étaient fondés sur des faits expressément rejetés par cette juridiction, ne répond pas aux exigences de motivation résultant des dispositions mentionnées au point précédent (voir, notamment, arrêts précités Biegi Nahrungsmittel et Commonfood/Commission, point 38, et Koninklijke Coöperatie Cosun/Commission, point 54, ainsi que ordonnance Ricosmos/Commission, précitée, point 71). En effet, un tel pourvoi constitue en réalité une demande visant à obtenir un simple réexamen de la requête présentée devant le Tribunal, ce qui échappe à la compétence de la Cour (arrêts du 4 juillet 2000, Bergaderm et Goupil/Commission, C-352-98 P, Rec. p. I-5291, point 35, ainsi que du 30 septembre 2003, Eurocoton e.a./Conseil, C-76-01 P, Rec. p. I-10091, point 47).
51 Dans le cadre de l'examen du premier grief du troisième moyen, le Tribunal s'est prononcé, aux points 142 à 190 de l'arrêt attaqué, sur l'argument de la requérante, cité au point 145 de cet arrêt, selon lequel les données d'Eurostat pour les années 1998 à 2000 n'étaient pas fiables à cause du "Code CN" qui comprendrait plusieurs produits autres que les CD-R. La quantité de ces autres produits serait indiquée en tonnes, de sorte que, pour estimer le nombre de CD-R importés, il aurait été nécessaire, selon la requérante, d'appliquer une formule mathématique aux données d'Eurostat. Toutefois, toujours selon la requérante, les quantités étant très faibles, une telle formule ne serait pas statistiquement fiable. À cet égard, le Tribunal a conclu, au point 171 du même arrêt, que la requérante n'a présenté aucun élément de preuve à l'appui de son allégation selon laquelle la formule statistique appliquée aux données d'Eurostat pour établir les données en cause ne serait pas fiable pour de petites quantités.
52 Aux points 201 à 206 de l'arrêt attaqué, le Tribunal se limite à apprécier des niveaux de prix des importations dans le cadre du troisième grief du troisième moyen soulevé devant lui. Par ce troisième grief, en première instance, la requérante a soutenu, en premier lieu, que, en concluant à la baisse des prix des importations, les institutions communautaires se sont fondées sur les données relatives aux années 1998 à 2000, qui n'étaient ni pertinentes ni fiables. En deuxième lieu, la requérante a fait valoir que le fait que les prix à l'importation ont été également analysés sur la base des chiffres fournis par elle n'ajouterait rien à cet égard, car les données en cause auraient été présentées par les institutions communautaires d'une manière inadéquate.
53 Le Tribunal a constaté, au point 203 de l'arrêt attaqué, que l'analyse des chiffres fournis par la requérante a conduit à des résultats très comparables à ceux fondés sur les données d'Eurostat, à savoir une baisse des prix de 54 %. À l'appui de cette constatation, rejetant l'allégation de la requérante selon laquelle la présentation de ces chiffres est inexacte, le Tribunal fait référence aux soixante et unième et soixante-deuxième considérants du règlement litigieux dans lesquels les institutions communautaires ont comparé les données d'Eurostat avec les chiffres fournis par la requérante et sont parvenues à des conclusions similaires pour la période concernée.
54 Dans ces conditions, force est de constater que les premier et deuxième arguments de la première branche du deuxième moyen doivent être déclarés irrecevables, ceux-ci constituant en réalité une demande de réexamen d'appréciations factuelles sans précision d'erreur de droit dont serait entaché l'arrêt attaqué.
55 S'agissant du troisième argument de la première branche du deuxième moyen, la requérante relève qu'elle a toujours fait valoir qu'une autre date pour la période d'enquête aurait clairement conduit les institutions communautaires à une conclusion différente. Ainsi, au point 101 de sa requête de première instance, elle a indiqué que le fait que, dans le règlement litigieux, le Conseil ait procédé à des comparaisons concernant les niveaux de prix d'importation non pertinentes est révélateur de l'absence d'objectivité des institutions communautaires ou, subsidiairement, de l'existence d'une erreur d'appréciation manifeste des tendances des prix des importations indiennes.
56 Le Conseil soutient que ledit point de la requête de première instance fait référence non pas aux chiffres de la requérante, mais à ceux qui ont été collectés par les institutions communautaires. Dès lors, à supposer même que cette référence de la requérante à sa requête de première instance contienne un argument étayant la thèse selon laquelle la prise en compte d'une autre date de départ pour les données fournies par la requérante conduirait à des conclusions différentes, cet élément ne donnerait pas raison à la requérante, puisque les termes "ses données" figurant au point 205 de l'arrêt attaqué ne renvoient pas aux chiffres de la requérante.
57 Le Tribunal a constaté, au point 205 de l'arrêt attaqué, que même si les données fournies par la requérante se rapportent à la période débutant le 1er avril 1999, tandis que les données d'Eurostat intéressent la période commençant le 1er janvier 2000, ce seul fait ne conduit pas à rendre inexacte la constatation du Conseil, selon laquelle les chiffres d'Eurostat et ceux de la requérante démontrent des tendances concordantes. Il a conclu que la requérante n'a pas indiqué que la prise en compte d'une autre date de départ pour ses données aurait pu conduire à des conclusions différentes en ce qui concerne les prix des importations. Par conséquent, le Tribunal a estimé que la requérante n'avait pas démontré l'existence d'une erreur factuelle ou d'une erreur manifeste d'appréciation s'agissant de l'analyse des prix des importations.
58 S'agissant de ladite analyse, la requérante a contesté, en première instance, la date choisie pour la période d'enquête et des comparaisons effectuées concernant les niveaux de prix d'importation. Les conclusions du Tribunal, à cet égard, figurent respectivement aux points 170 à 178 et 201 à 207 de l'arrêt attaqué. En revanche, la requérante n'a pas soulevé, en première instance, l'argument concernant le point de départ chronologique du traitement des données qu'elle-même a communiquées aux institutions communautaires. Ainsi que Mme l'avocat général l'a relevé au point 110 de ses conclusions, cet argument est, dès lors, nouveau et, partant, irrecevable dans le cadre du pourvoi, et il ne saurait être reproché au Tribunal d'avoir entaché l'arrêt attaqué d'une omission à statuer.
59 Il y a donc lieu de rejeter le troisième argument de la première branche du deuxième moyen comme étant irrecevable.
- Sur la seconde branche
60 Par la seconde branche du deuxième moyen, la requérante soutient que le Tribunal a commis une erreur en confirmant la constatation du Conseil figurant au cent troisième considérant du règlement litigieux, selon laquelle les stocks de l'industrie communautaire se sont fortement détériorés. La requérante rappelle qu'elle n'a pas contesté les données relatives aux stocks reprises dans ce règlement au motif qu'elles sont issues des informations confidentielles fournies par les producteurs communautaires. Elle souligne, en revanche, qu'elle avait toujours été opposée aux conclusions dudit règlement selon lesquelles l'évolution des stocks indiquait un préjudice causé à l'industrie communautaire.
61 La requérante soutient que, entre l'année 1998 et la période d'enquête, la production de l'industrie communautaire avait augmenté de 432 % et cependant le niveau des stocks a diminué entre l'année 2000 et ladite période. La constatation du Tribunal selon laquelle les stocks ont augmenté en termes absolus vers la fin de l'année 2001 serait entachée d'une erreur manifeste d'appréciation, car il aurait omis de prendre en compte l'augmentation considérable de la production de l'industrie communautaire et le fait que l'amélioration temporaire du niveau des stocks a coïncidé avec l'entrée sur le marché des importations indiennes.
62 À cet égard, le Conseil, soutenu par la Commission, estime que la requérante se borne à contester l'appréciation des faits par le Tribunal concernant l'exactitude des données énoncées dans le règlement litigieux. Le Conseil ajoute que la constatation du Tribunal concernant l'augmentation des stocks en termes absolus est factuellement correcte. Selon le Conseil, l'augmentation des stocks en termes absolus a été si massive qu'elle a également entraîné une augmentation de près de 60 % en termes relatifs entre l'année 1998 et la fin de la période d'enquête (de 9,2 % à 14,6 %), en dépit de l'augmentation de la production de l'industrie communautaire.
63 Il ressort des points 193 à 195 de l'arrêt attaqué que le Tribunal a conclu, en premier lieu, que la requérante ne discute pas les données chiffrées figurant au quatre-vingtième considérant du règlement litigieux. En deuxième lieu, il a affirmé que, selon les données non contestées par la requérante, pendant toute la période allant de l'année 1998 à la fin de la période d'enquête, les stocks de l'industrie communautaire ont augmenté de manière significative. En troisième lieu, il a conclu que la requérante n'a pas démontré que l'amélioration de l'indicateur relatif aux stocks exprimé en pourcentage de production à partir de l'année 2000 aurait été de nature à renverser la tendance négative constatée sur l'ensemble de la période considérée.
64 Dans la mesure où la requérante vise à mettre en cause ces appréciations des faits effectuées par le Tribunal, il convient de rappeler que, selon la jurisprudence citée au point 33 du présent arrêt, une dénaturation doit apparaître de façon manifeste des pièces du dossier, sans qu'il soit nécessaire de procéder à une nouvelle appréciation des faits et des preuves. En l'espèce, la requérante allègue que l'interprétation, faite par le Tribunal, des diverses données qu'elle cite est entachée d'une inexactitude matérielle et d'une dénaturation des éléments de preuve en se référant aux stocks en chiffres absolus.
65 Toutefois, ainsi que Mme l'avocat général l'a relevé au point 127 de ses conclusions, le fait que le Tribunal ait fait état d'une augmentation des stocks en termes absolus ne saurait être considéré comme une dénaturation des éléments de preuve. En effet, ainsi qu'il ressort du point 195 de l'arrêt attaqué, le Tribunal a également pris en considération le fait que, aux termes du règlement litigieux, l'appréciation du Conseil était aussi fondée sur une appréciation de l'évolution des stocks en termes relatifs. Quant à l'argument de la requérante selon lequel l'amélioration temporaire du niveau des stocks a coïncidé avec l'entrée sur le marché des importations indiennes, il constitue un argument factuel nouveau, irrecevable dans le cadre du pourvoi.
66 L'argument de la requérante selon lequel la conclusion du Tribunal, au point 195 de l'arrêt attaqué, relative aux niveaux de stocks est une interprétation innovante qui n'est pas étayée par le règlement litigieux, doit également être rejeté. En effet, il ressort clairement du quatre-vingtième considérant du règlement litigieux que les stocks, exprimés en pourcentage de la production de CD-R, ont atteint le taux élevé de 15 % pendant la période d'enquête.
67 Eu égard à ce qui précède, la seconde branche du deuxième moyen est irrecevable.
68 Dans ces conditions, le deuxième moyen doit être rejeté dans son intégralité comme irrecevable.
Sur le troisième moyen
69 La requérante soutient que l'évaluation du préjudice, qui est distincte de la question du lien de causalité, concerne les résultats de l'industrie communautaire en elle-même et que l'article 8, paragraphe 7, du règlement de base impose que cette évaluation ne soit pas affectée par les effets d'autres facteurs. À cet égard, la requérante considère que le Tribunal a commis une erreur d'appréciation en jugeant que l'évaluation du préjudice concerne uniquement la différence entre les prix communautaires et les prix à l'importation. Or, cette question concernerait l'analyse relevant de la détermination du lien de causalité.
70 Selon la requérante, le Tribunal n'a pas pris en compte l'impact des redevances excessives lors de la détermination du préjudice subi par l'industrie communautaire. La requérante indique que des droits d'auteur excessifs, constituant un abus de position dominante, auraient eu un effet négatif sur ces résultats. Les institutions communautaires n'auraient pas prouvé que, en l'absence de ces droits excessifs, un préjudice aurait néanmoins été causé et que les marges de calcul du préjudice seraient demeurées les mêmes.
71 La requérante soutient que, au point 272 de l'arrêt attaqué, le Tribunal a affirmé à tort que les arrêts précités Extramet Industrie-Conseil ainsi que Mukand e.a./Conseil portaient sur des cas d'activité anticoncurrentielle de la part des producteurs communautaires eux-mêmes alors que, en l'espèce, la pratique anticoncurrentielle n'est pas imputable aux producteurs communautaires.
72 Selon la requérante, la pertinence de la pratique anticoncurrentielle, telle que celle relevée dans l'affaire ayant donné lieu à l'arrêt Mukand e.a./Conseil, précité, ne résulte pas du fait que l'industrie communautaire de CD-R elle-même était complice d'activité anticoncurrentielle, mais provient du fait que les résultats de cette industrie étaient affectés par celle-ci et les effets de cette activité anticoncurrentielle doivent donc être supprimés afin que les conditions de l'article 8, paragraphe 7, du règlement de base soient remplies.
73 Le Conseil soutient que le troisième moyen est irrecevable et, en tout état de cause, dénué de fondement. Il fait valoir que la requérante ne précise pas quelle conclusion de l'arrêt attaqué elle conteste ni quelle violation d'une règle de droit communautaire elle reproche au Tribunal.
74 Selon le Conseil, il ressort de la jurisprudence constante de la Cour qu'il peut exister un lien de causalité entre les importations faisant l'objet de subventions et le préjudice subi par l'industrie communautaire même si les pertes dues aux importations ne constituent qu'un facteur de préjudice parmi d'autres. L'analyse du lien de causalité doit conduire les institutions communautaires à vérifier que d'autres facteurs de préjudice connus n'ont pas rompu ce lien entre les importations faisant l'objet de subventions et le préjudice constaté. En conséquence, l'incidence des importations faisant l'objet de subventions doit être si minime que le préjudice causé par ces importations ne puisse plus être considéré comme important.
75 Par ailleurs, la critique, faite par la requérante, de l'interprétation donnée par le Tribunal, au point 272 de l'arrêt attaqué, de l'arrêt Mukand e.a./Conseil, précité, serait trompeuse. La requérante dénaturerait le sens de ce point en laissant entendre que le Tribunal n'aurait pas examiné l'argument relatif aux redevances excessives. Or, le Tribunal aurait examiné cet argument, en particulier au point 270 de l'arrêt attaqué.
76 En outre, la requérante n'aurait pas démontré en quoi le Tribunal aurait mal apprécié l'incidence des redevances sur l'industrie communautaire. Le Conseil fait valoir que, aux points 260 à 279 de l'arrêt attaqué, le Tribunal a rejeté l'argument selon lequel le Conseil a omis d'examiner cette incidence et n'a pas jugé nécessaire de déterminer les effets précis de celle-ci.
77 La Commission soulève également l'irrecevabilité de ce moyen. En effet, la requérante tenterait d'obtenir de la Cour une nouvelle appréciation des faits et n'attaquerait pas la constatation principale du Tribunal selon laquelle la pratique anticoncurrentielle ne serait pas imputable aux producteurs communautaires.
78 S'agissant de l'exception d'irrecevabilité soulevée par les institutions communautaires, il convient de rappeler qu'il résulte des dispositions mentionnées et de la jurisprudence citée au point 49 du présent arrêt qu'un pourvoi doit indiquer de façon précise les éléments critiqués de l'arrêt dont l'annulation est demandée ainsi que les arguments juridiques qui soutiennent de manière spécifique cette demande.
79 En l'occurrence, la requérante conteste précisément le point 272 de l'arrêt attaqué, selon lequel la pratique anticoncurrentielle alléguée n'est pas imputable au comportement des producteurs communautaires. Par ce moyen, la requérante indique clairement les éléments de l'arrêt attaqué qu'elle critique et développe une argumentation juridique visant à démontrer que le Tribunal a commis une erreur dans l'appréciation de l'application, par les institutions communautaires, de l'article 8, paragraphe 7, du règlement de base.
80 Il y a lieu, dès lors, de rejeter l'argument d'irrecevabilité tiré de l'absence d'indication précise des éléments critiqués de l'arrêt attaqué.
81 Le Tribunal a constaté, à juste titre, au point 260 de l'arrêt attaqué, que lors de la détermination du préjudice, les institutions communautaires ont l'obligation d'examiner si le préjudice découle effectivement des importations qui ont fait l'objet de subventions et d'écarter tout préjudice découlant d'autres facteurs, et notamment celui qui aurait sa cause dans un comportement anticoncurrentiel impliquant les producteurs communautaires. Ensuite, il admet, au point 263 de l'arrêt attaqué, qu'il ne résulte pas du cent trente-cinquième considérant du règlement litigieux que les institutions communautaires ont effectivement examiné la question de savoir si le préjudice retenu ne découlait pas du comportement anticoncurrentiel allégué.
82 Par conséquent, le Tribunal a examiné, aux points 264 à 272 de l'arrêt attaqué, si le Conseil avait écarté le préjudice éventuel découlant du comportement anticoncurrentiel invoqué par la requérante.
83 S'agissant de l'incidence des redevances sur le lien de causalité, le Tribunal a, au point 269 de l'arrêt attaqué, correctement souligné que les institutions communautaires sont tenues d'examiner si des effets découlant d'un facteur externe ont été de nature à rompre le lien de causalité entre les importations en cause et le préjudice causé à l'industrie communautaire, faisant référence au point 232 de l'arrêt attaqué qui cite la jurisprudence constante à cet effet. Or, il a estimé que cet examen n'implique pas nécessairement une détermination des effets précis du facteur en cause.
84 Le Tribunal a ensuite confirmé, au point 270 de l'arrêt attaqué, la conclusion du Conseil selon laquelle le paiement de redevances n'avait pu avoir d'incidence sur le préjudice causé par les importations subventionnées, étant donné que ces redevances existaient déjà avant que les importations en cause ne soient devenues importantes.
85 Il convient de rappeler que dans le domaine de la politique commerciale commune et, tout particulièrement, en matière de mesures de défense commerciale, les institutions communautaires disposent d'un large pouvoir d'appréciation en raison de la complexité des situations économiques, politiques et juridiques qu'elles doivent examiner (voir arrêts du 27 septembre 2007, Ikea Wholesale, C-351-04, Rec. p. I-7723, point 40 et jurisprudence citée, ainsi que du 28 février 2008, AGST Draht- und Biegetechnik, C-398-05, Rec. p. I-1057, point 33).
86 Il est de jurisprudence constante que la détermination de l'existence d'un préjudice à l'industrie communautaire suppose l'appréciation de situations économiques complexes et le contrôle juridictionnel d'une telle appréciation doit ainsi être limité à la vérification du respect des règles de procédure, de l'exactitude matérielle des faits retenus, de l'absence d'erreur manifeste d'appréciation de ces faits ou de l'absence de détournement de pouvoir. Tel est, notamment, le cas en ce qui concerne la détermination des facteurs qui causent un préjudice à l'industrie communautaire dans le cadre d'une procédure antisubventions (voir arrêt AGST Draht- und Biegetechnik, précité, point 34).
87 Lors de la détermination du préjudice, le Conseil et la Commission ont l'obligation d'examiner si le préjudice qu'ils entendent retenir découle effectivement des importations qui ont fait l'objet de subventions et d'écarter tout préjudice découlant d'autres facteurs et, notamment, celui qui aurait sa cause dans le comportement propre des producteurs communautaires (voir arrêts précités Extramet Industrie-Conseil, point 16, ainsi que AGST Draht- und Biegetechnik, point 35).
88 À cet égard, il appartient aux institutions communautaires de vérifier si les effets de ces autres facteurs n'ont pas été de nature à rompre le lien de causalité entre, d'une part, les importations en cause et, d'autre part, le préjudice subi par l'industrie communautaire. Il leur appartient également de vérifier que le préjudice imputable à ces autres facteurs n'entre pas en ligne de compte dans la détermination du préjudice au sens de l'article 8, paragraphe 7, du règlement de base et que, par conséquent, le droit compensateur imposé n'excède pas ce qui est nécessaire pour éliminer le préjudice causé par les importations faisant l'objet d'une subvention.
89 Il est évident qu'un comportement qui affecte directement les prix des produits fabriqués dans la Communauté, en l'espèce le paiement de redevances, peut être susceptible de remettre en question, en premier lieu, le lien de causalité entre les importations subventionnées et le préjudice (voir, en ce sens, arrêt AGST Draht- und Biegetechnik, précité, points 45 à 54) et, en deuxième lieu, l'évaluation du préjudice subi par l'industrie communautaire en raison de la sous-cotation des prix desdites importations.
90 Selon l'article 8, paragraphe 7, du règlement de base, les facteurs connus, autres que les importations faisant l'objet de subventions, sont aussi examinés de manière à ce que le préjudice causé par ces autres facteurs ne soit pas attribué auxdites importations. Ainsi, l'objectif de cette règle est de ne pas conférer à l'industrie communautaire une protection allant au-delà de ce qui est nécessaire.
91 Toutefois, si les institutions communautaires constatent que, en dépit de tels facteurs, le préjudice causé par les importations faisant l'objet de subventions est important en vertu de l'article 8, paragraphe 1, du règlement de base, le lien de causalité entre les importations subventionnées et le préjudice subi par l'industrie communautaire peut en conséquence être établi. En l'espèce, comme le Tribunal l'a constaté au point 269 de l'arrêt attaqué, aux fins d'établir que le lien de causalité entre les importations subventionnées et le préjudice subi par l'industrie communautaire est maintenu, il suffit que les institutions communautaires constatent que, en dépit du facteur externe, le préjudice des producteurs communautaires était important.
92 À cet égard, le Tribunal a considéré, en premier lieu, au point 270 de l'arrêt attaqué, que le paiement de redevances n'avait pas pu avoir d'incidence sur le préjudice causé par les importations subventionnées, étant donné que ce facteur était présent avant que ces importations soient devenues importantes.
93 En deuxième lieu, le Tribunal a tenu compte, au point 274 de l'arrêt attaqué, du fait que tous les producteurs de CD-R, y compris la requérante, devaient payer les redevances prétendument anticoncurrentielles. Cette pratique anticoncurrentielle alléguée n'était dès lors pas de nature à remettre en cause la conclusion selon laquelle le paiement de redevances n'a pas affecté le préjudice subi par l'industrie communautaire du fait des importations subventionnées, étant donné que ladite pratique a affecté aussi bien les prix communautaires que les prix à l'importation. Ce facteur externe n'était pas susceptible non plus d'avoir une influence sur la différence entre les prix communautaires et les prix des importations en cause. Par conséquent, le Tribunal a conclu à bon droit, au point 275 de l'arrêt attaqué, que le Conseil a pu estimer que même des redevances prétendument excessives ne pouvaient pas influer sur le calcul du niveau de sous-cotation et que la conclusion figurant au cent trente-quatrième considérant du règlement litigieux n'était donc pas déraisonnable.
94 Il en découle que le Tribunal a démontré de façon suffisante que, lors de la détermination du préjudice, les effets des ces facteurs externes étaient distincts et non attribués aux effets dommageables des importations subventionnées.
95 Il y a donc également lieu de rejeter dans son intégralité le troisième moyen comme non fondé.
96 Aucun des moyens soulevés par Moser Baer India Ltd n'ayant été accueilli, le pourvoi doit être rejeté.
Sur les dépens
97 Aux termes de l'article 69, paragraphe 2, du règlement de procédure, applicable à la procédure de pourvoi en vertu de l'article 118 du même règlement, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s'il est conclu en ce sens. Le Conseil ayant conclu à la condamnation de Moser Baer India Ltd et cette dernière ayant succombé en ses moyens, il y a lieu de la condamner aux dépens de la présente instance. Conformément au paragraphe 4 dudit article 69, également applicable à la procédure de pourvoi en vertu dudit article 118, la Commission supporte ses propres dépens.
Par ces motifs, la Cour (quatrième chambre) déclare et arrête:
1) Le pourvoi est rejeté.
2) Moser Baer India Ltd est condamnée aux dépens.
3) La Commission des Communautés européennes supporte ses propres dépens.