CA Toulouse, 2e ch. sect. 1, 11 décembre 2003, n° 02-03497
TOULOUSE
Arrêt
PARTIES
Demandeur :
Acadomia (SA)
Défendeur :
Bac Plus (SARL)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Vergne (faisant fonction)
Conseillers :
MM. Baby, Leclerc d'Orleac
Avoués :
Me de Lamy, SCP Sorel Dessart
Avocats :
Mes Genot-Delbecque, Dublanche
Faits et procédure
La SARL Bac Plus Abos (Bac Plus) exerce depuis 1997 une activité de soutien scolaire à domicile, pour laquelle elle est agréée par la région Midi-Pyrénées. Elle a ouvert deux antennes en 1999 à Montpellier et Bordeaux, en avril 2000 à Nice et envisageait d'ouvrir fin 2000 deux établissements à Lyon et Nantes. Elle dispose dans ce cadre d'agréments qui permettent aux parents de déduire de leur impôt sur le revenu les sommes consacrées à la rémunération des professeurs de leurs enfants, à concurrence du plafond annuel de 45 000 F.
Après l'ouverture à Toulouse d'un établissement par la SA Assistance Internationale Scolaire Acadomia (Acadomia), qui exerce son activité dans le même secteur depuis 16 ans, la SARL Bac Plus a assigné celle-ci en concurrence déloyale le 28 septembre 2000 devant le Tribunal de commerce de Toulouse, exposant qu'en exerçant son activité selon des modalités juridiques (dites de "double mandat") particulières, elle éluderait le paiement de charges sociales, améliorant ainsi son résultat dans des conditions critiquables.
Dans son jugement du 22 juillet 2002 le tribunal, après avoir analysé les dispositions fiscales applicables en l'espèce, a considéré que la société Acadomia, qui ne bénéficiait pas de l'agrément prévu par ces textes, exerçait ses activités de façon illicite et induisait ses clients en erreur sur la possibilité d'obtenir une réduction d'impôt. Analysant ensuite les documents type produits devant lui au titre du "double mandat" invoqué par Acadomia et ses publicités pour le "recrutement" d'enseignants, le tribunal a jugé que ces mandats étaient fictifs, qu'ils consistaient d'ailleurs en l'accomplissement d'actes purement matériels étrangers aux prévisions de l'article 1984 du Code civil, que les contrats de travail prétendument conclus entre enseignants et familles n'étalent pas librement négociés par des personnes libres de leurs choix, et qu'ils étaient révélateurs de l'exercice par Acadomia d'une activité de travail temporaire en dehors du cadre légal de l'article 124-1 du Code du travail, c'est-à-dire d'un prêt de main d'œuvre prohibé. Ajoutant qu'il y avait "présomption d'illégalité également forte" quant à l'application de la TVA, le tribunal a jugé que l'ensemble de ces éléments caractérisaient la concurrence déloyale, qu'il était causé à Bac Plus un "préjudice évident et important", sa "marge brute se (trouvant), à prestations identiques, significativement amputée du fait d'avantages fiscaux et sociaux dont la société Acadomia bénéficie indûment". Rejetant ensuite la demande reconventionnelle d'Acadomia tendant à voir juger illicite l'exercice de son activité par Bac Plus, faute de disposer du statut d'entreprise de travail temporaire, au motif que Bac Plus répliquait qu'elle exerçait son activité tout à tait licitement, et justifiait de l'agrément permettant, aux termes des articles 129-1-1 du Code du travail et 199 sexdecies 1 du Code général des impôts, de bénéficier d'un régime dérogatoire, le tribunal a condamné Acadomia à verser à titre provisionnel une somme de 75 000 euro à valoir sur le montant du préjudice de Bac Plus, dont la détermination était confiée un expert. L'exécution provisoire a été ordonnée, sous réserve de fourniture d'une caution ou garantie à première demande d'un montant de 75 000 euro.
La SA Acadomia a relevé appel de cette décision par déclaration remise le 31 juillet 2002 au greffe de la cour.
Moyens et prétentions des parties
L'appelante précise qu'elle a exécuté le jugement dont appel, en versant la somme prévue de 75 000 euro. Elle indique être une holding, le concept de cours à domicile objet du litige étant exploité essentiellement par une filiale et des franchisés. Il s'agit d'une activité d'assistance aux particuliers à la recherche d'un professeur, assortie de diverses prestations fournies tant aux professeurs (perception des rémunérations, gestion de l'agenda, ...) qu'aux parents (gestion de la paie des professeurs, évaluations et bilans pédagogiques ...). Il y a bien mandat assorti de prestations de services, et les contrats de travail sont conclus directement entre parents et professeurs, alors que Bac Plus est l'employeur des professeurs qu'elle met à disposition des parents.
Le coût pour les parents de la prestation d'Acadomia augmentée du salaire et des charges des professeurs est équivalent au coût de la prestation de Bac Plus, et la marge d'Acadomia est comparable à celle de Bac Plus.
L'agrément qui est nécessaire à Bac Plus pour que ses prestations soient déductibles des impôts des parents ne l'est pas pour Acadomia, les parents étant les employeurs directs des professeurs. Acadomia n'a jamais cherché à faire obtenir aux familles la déductibilité fiscale de ses propres prestations, de sorte que l'article 129-1 du Code du travail est sans application. En pratiquant ainsi, elle a procédé à un choix de gestion parfaitement licite. Elle ne vend pas un service de mise à disposition de personnel, les professeurs n'étant pas ses salariés. L'administration fiscale n'a jamais contesté ce système, non plus que URSSAF, avec qui une convention a été signée le 26 décembre 2002. Le tribunal de commerce, qui n'est pas le juge de l'impôt, ne pouvait remettre en cause cette réalité, non plus que celle des contrats de travail, qui relèvent de l'appréciation des conseils de prud'hommes. Peu importe que la qualification de mandat soit ou non retenue, elle n'a aucune incidence en l'espèce.
Le tribunal de commerce ne pouvait statuer comme il l'a fait en appréciant des situations qui ne sont pas de sa compétence il lui appartenait, le cas échéant, de poser des questions préjudicielles et d'attendre les réponses pour statuer.
La position d'Acadomia est ensuite licite au regard de l'article L. 312-7 du Code du travail, le monopole de placement dont bénéficie l'ANPE ayant été jugé contraire au droit européen, dès lors qu'elle n'est pas en mesure d'assurer certains services de placement, comme en l'espèce celui d'un professeur pour un très petit nombre d'heures, ce qui est à l'origine du succès d'Acadomia.
Acadomia n'enfreint pas davantage les dispositions de l'article L. 124-1 du Code du travail il lui est inapplicable, dès lors qu'elle n'est pas l'employeur des professeurs mis à disposition. Il en est de même en ce qui concerne l'article L. 125-3 du même Code, étant précisé qu'il aurait été de la compétence des juridictions correctionnelles d'apprécier la situation à ce titre, et non de celle du tribunal de commerce.
Elle s'est ensuite toujours normalement acquittée de la TVA, et n'a fait l'objet d'aucune observation de l'administration fiscale à ce titre depuis 10 ans.
Elle demande donc à titre principal à la cour d'infirmer le jugement, de débouter Bac Plus de l'intégralité de ses demandes, d'ordonner le remboursement de la provision versée au titre de l'exécution provisoire, augmentée des intérêts de droit depuis le paiement, d'annuler l'expertise et d'en mettre les frais à la charge de Bac Plus, et, subsidiairement si l'expertise était maintenue, de dire qu'elle devrait être limitée à la seule SA Acadomia, seule en la cause.
A titre reconventionnel, elle maintient sa demande de 35 000 euro de dommages-intérêts pour concurrence déloyale à l'encontre de Bac Plus, qui ne peut, au prétexte qu'elle dispose d'un agrément au titre de l'article 199 sexdecies 1 du Code général des impôts, s'exonérer des dispositions des articles L. 124-1 et 124-8 du Code du travail relatifs aux entreprises de travail temporaire, sauf à commettre des actes de concurrence déloyale.
Elle demande également 60 000 euro de dommages-intérêts pour procédure abusive, au motif que la société Bac Plus sait parfaitement que de nombreuses sociétés du secteur ont changé leur mode de fonctionnement pour adopter celui d'Acadomia, et qu'il existe des discussions à cet égard au sein du syndicat professionnel ; elle a donc cherché à nuire à une société cotée en bourse et à ternir son image auprès des épargnants et de ses clients.
Elle demande enfin 10 000 euro en indemnisation de ses frais irrépétibles.
L'intimée demande à la cour de confirmer le jugement, qui a sanctionné un abus de droit constituant une triple violation des règles du droit social (placement de personnel à titre onéreux), du droit fiscal et du droit pénal, ainsi que des dispositions en matière de sécurité sociale et de concurrence loyale (publicité mensongère quant à l'exonération fiscale, violation des règles protectrices du consommateur, les parents n'étant pas alertés sur les risques de leur position d'employeur et ceux d'un éventuel contrôle fiscal). Contrairement à ses affirmations, Acadomia exerce des prérogatives d'employeur sur les professeurs (recrutement, fixation de la rémunération, affectation).
L'exemple chiffré produit par Acadomia pour démontrer que ses prix et marge sont comparables à ceux des entreprises fonctionnant comme Bac Plus comporte quatre séries d'erreurs, et, une fois celles-ci rectifiées, l'écart est patent en faveur d'Acadomia en termes de coût. Elle produit pour le démontrer un tableau comparatif dont il ressort que pour un même chiffre d'affaires TTC facturé la marge brute varie du simple (pour Bac Plus) au double (pour Acadomia). Pour lutter sur ce plan contre Acadomia, déjà leader du marché, les autres entreprises doivent rogner sur leurs dépenses de publicité, ce qui aggrave leur situation sur le marché, et conduit à un abus de position dominante de la part d'Acadomia.
Admettant qu'elle se développe de 20 à 70 % par an selon les secteurs car elle est un nouvel intervenant sur le marché, Bac Plus se dit freinée dans son développement par les positions acquises par Acadomia et les moyens importants dont celle-ci dispose.
Elle demande donc à la cour de lui allouer 500 000 euro de dommages-intérêts provisionnels, d'ordonner une expertise aux fins de chiffrage du préjudice subi par elle, et demande 7 300 euro en indemnisation de ses frais irrépétibles, et d'ordonner l'exécution provisoire de la décision à intervenir nonobstant appel et sans caution".
Sur quoi
Sur la demande principale de la SARL Bac Plus
La SARL Bac Plus entend faire juger qu'en adoptant un mode de fonctionnement dit "mandataire", différent de celui qu'elle-même a retenu, à savoir le mode " prestataire ", la SA Acadomia commet un abus de droit qui est également une faute constitutive de concurrence déloyale à son encontre.
Elle fonde expressément son action sur l'article L. 420-1 du Code de commerce qui prohibe les pratiques concertées d'entreprises ayant pour objet ou pour effet de fausser la libre concurrence, situation à l'évidence étrangère à l'espèce où le mode d'intervention sur le marché d'une seule société (au moins un seul groupe, la holding SA Acadomia et ses filiales, notamment AIS) est en cause.
Elle ajoute qu'en pratiquant ainsi, la SA Acadomia engage sa responsabilité à son encontre sur le fondement de l'article 1382 du Code civil et lui doit à ce titre réparation du préjudice subi sur Toulouse et le grand Sud-Ouest.
Sur ce dernier fondement, qui apparaît plus pertinent, il appartient à la SARL Bac Plus de démontrer les agissements fautifs de son adversaire, son propre préjudice, et le lien de causalité unissant faute et préjudice.
La SA Acadomia observe qu'elle-même n'exerce qu'une activité de holding, l'activité litigieuse étant le fait de sa filiale AIS et de divers franchisés, absents de la cause. Elle n'en tire cependant aucune conséquence juridique, à l'exception d'un éventuel cantonnement à elle-même des opérations d'expertise, si celles-ci étaient maintenues par la cour.
S'agissant de la faute alléguée, elle consisterait à violer diverses dispositions du Code général des impôts et du Code du travail.
Il est exact, comme l'observe l'appelante, qu'il n'appartient ni au tribunal de commerce ni à la cour en appel de sa décision de statuer en matière fiscale ou sociale, et il conviendrait que la demanderesse, la SARL Bac Plus, rapporte devant ces juridictions la preuve d'un comportement anormal et sanctionné comme tel par les juridictions compétentes pour qu'il puisse en être, le cas échéant, tiré des conséquences en matière de concurrence déloyale.
Rien n'est produit en ce sens, et il suffit d'observer que l'article 199 sexdecies 1 visé par la demanderesse et cité dans son intégralité par le premier juge prévoit deux situations dans lesquelles les personnes assujetties à l'impôt sur le revenu sont en droit d'obtenir une réduction d'impôt égale à 50 % des dépenses effectivement supportées dans la limite de 45 000 ou 90 000 euro par an, selon les dispositions applicables à la date de l'assignation : le contribuable peut déduire soit les sommes versées pour l'emploi d'un salarié travaillant à sa résidence, soit celles versées "aux mêmes fins" à une association ou entreprise agréée. Ainsi, le fait de ne pas disposer d'agrément ne peut être en soi une faute constitutive de concurrence déloyale, dès lors qu'il n'est pas démontré que l'appelante entend faire entrer ses propres prestations à l'assiette de la réduction d'impôt elle affirme au contraire, sans être démentie, que les parents d'élèves qui recourent à ses services sont employeurs des professeurs, et bénéficient donc de la réduction d'impôt sur les seules sommes versées par eux à titre de salaire, situation qui est expressément envisagée par le texte fiscal. Il n'est pas non plus justifié d'une éventuelle remise en cause par l'administration fiscale des déductions fiscales qui ont pu être opérées par les clients de la SA Acadomia, de contrôles subis par les professeurs ayant entraîné des redressements fiscaux ou sociaux, ou d'une éventuelle condamnation par les juridictions compétentes des pratiques de celle-ci dans le cadre de l'article cité du Code général des impôts. De simples attestations de parents ou professeurs mécontents du système mis en place par Acadomia ne suffisent pas à établir la faute : ils démontrent au contraire que la présence concurrente sur le marché de deux modes de fonctionnement différents permet aux déçus de l'un de recourir à l'autre.
Qu'il y ait un risque à être directement employeur et que leur qualité d'employeur soit ou non évidente à la lecture des documents contractuels émis par la SA Acadomia relève ensuite de l'appréciation des seuls parents, et le fait qu'ils aient pu avoir le sentiment d'être trompés sur ce point ne saurait, le cas échéant, constituer une faute qu'à leur égard : la SARL Bac Plus n'est pas recevable à le plaider pour leur compte, s'instituant ainsi leur procureur, au mépris d'un principe bien établi du droit français.
La SARL Bac Plus, société commerciale, ne peut, de façon plus générale, invoquer pour son propre compte les textes protecteurs des consommateurs.
Il est ensuite reproché à la SA Acadomia de procéder à une activité constitutive de démarchage interdit, faute d'avoir la qualité d'entreprise de travail temporaire agréée. Outre que la qualification et la sanction du démarchage relèvent de la juridiction pénale et échappent donc elles aussi à la compétence de la cour dans le cadre de sa saisine actuelle, il sera simplement observé que l'interdiction vise la mise à disposition par une entreprise, dans un but lucratif, de son propre personnel: il conviendrait donc de démontrer préalablement que la SA Acadomia est l'employeur des professeurs en cause, ce que ne fait pas la SARL Bac Plus, demanderesse sur qui pèse la charge de la preuve, et qui ne peut demander à la cour de trancher elle-même cet aspect du litige au vu des présomptions et indices qu'elle avance en ce sens.
Au contraire, la SA Acadomia, qui nie être employeur, rapporte la preuve par la production de leur décisions que des juridictions compétentes en la matière, saisies de tels litiges, ont jugé que les professeurs étaient bien les salariés des parents d'élèves.
De même, la qualification de l'activité de la SA Acadomia au regard de l'article L. 312-7 du Code du travail, texte assorti d'une sanction pénale et qui interdit les bureaux de placement payants ne relève pas de la compétence de la cour, qui n'a pas, a fortiori, à s'interroger sur la pertinence de ce texte au regard du droit européen.
Ainsi, la SARL Bac Plus ne rapporte la preuve d'aucune des violations des divers textes qu'elle invoque, et que la cour n'est pas compétente dans le cadre du dossier pour constater. Elle ne démontre donc pas les fautes qu'aurait pu commettre la SA Acadomia à son encontre du fait des violations alléguées. Par voie de conséquence, elle ne démontre pas que les publicités vantant le "système" Acadomia seraient mensongères.
Quant au fait que la marge commerciale dégagée par la SA Acadomia ne serait pas identique à celle dégagée par la SARL Bac Plus, il est totalement indifférent en l'espèce : Si l'ont peut généralement vérifier que les marges commerciales d'entreprises opérant sur le même marché sont comparables, le jeu concurrentiel consiste précisément à agir sur le taux de cette marge pour évincer les concurrents ou simplement leur résister. De même qu'il n'est pas illégitime de faire, à cette fin varier ses prix à la baisse (en respectant le seuil de la vente à perte) ou à la hausse par un positionnement "haut de gammes, il n'est pas en soi condamnable d'agir à l'inverse sur les coûts, toujours dans le respect des textes impératifs éventuellement applicables : il s'agit là de simples décisions de gestion, qui, dans une économie de marché et de libre entreprise, relèvent de la seule responsabilité des dirigeants de l'entreprise concernée. Le recours dans ce cadre a un "montage juridique" différent de celui généralement appliqué par les concurrents constitue, notamment dans le secteur des prestations de services intellectuels qui est celui où opèrent les parties, un moyen parmi d'autres de pour s'assurer un avantage concurrentiel sur le marché, pourvu que ce montage soit, en cas de discussion, jugé légalement admissible par les autorités et juridictions qui ont compétence pour le faire.
Ainsi, aucune faute constitutive de concurrence déloyale n'est démontrée en l'espèce, ce qui suffirait à réformer le jugement au principal et à débouter la SARL Bac Plus de ses demandes. Il sera en outre observé que celle-ci ne produit aucun élément de nature à laisser penser qu'elle aurait pu subir un préjudice imputable au mode de fonctionnement de la SA Acadomia : créée en 1994, elle justifie d'une forte croissance de son chiffre d'affaires et de résultats bénéficiaires pour 1998 et 1999, époque à laquelle elle procède à l'ouverture de nouvelles agences régionales, exploitant comme les autres entreprises du secteur l'anxiété croissante des parents au sujet de la réussite scolaire de leurs enfants, selon les termes de l'article de presse produit devant la cour.
Elle n'actualise d'ailleurs pas l'information de la cour sur ce plan, limitant la production de ses comptes à ceux de l'exercice clos au 30 juin 1999, alors que quatre exercices ont normalement été clos depuis cette date.
Dès lors, l'expertise destinée à chiffrer son préjudice n'a pas lieu d'être maintenue.
Sur la demande reconventionnelle de la SA Acadomia
Cette demande n'apparaît guère sérieuse, dès lors que la société Bac Plus justifie disposer d'agréments tels que prévus notamment à l'article L. 129-1 du Code du travail, texte pris spécialement aux fins d'organiser les prestations de services à domicile aux particuliers, alors que les entreprises de travail temporaire exercent normalement leur activité au service d'autres entreprises, qui ne peuvent elles-mêmes avoir recours au travail temporaire que dans certaines situations limitativement énumérées par les articles L. 124-1 et suivants du Code du travail.
Le jugement sera donc confirmé de ce chef.
S'agissant des dommages-intérêts sollicités pour procédure abusive, la cour rejettera également la demande : le recours à la voie judiciaire n'est pas illégitime en soi, alors surtout qu'existe au sein de la profession, de l'aveu même des parties, une discussion sur le mode juridique de fonctionnement des entreprises du secteur. L'atteinte à l'image qui en serait résultée auprès des parents et épargnants est par ailleurs simplement affirmée sans être démontrée.
Dès lors, la cour réformera le jugement et déboutera chacune des sociétés de leurs demandes, la SARL Bac Plus étant condamnée de ce fait à restituer la provision perçue en exécution du jugement. La détention de cette somme par l'intimée n'étant pas critiquable jusqu'à la décision de la cour, les intérêts de retard ne pourront courir qu'à compter de la date de celle-ci.
Il apparaît en outre équitable d'allouer à la SA Acadomia une indemnisation de ses frais irrépétibles, qui, compte tenu des circonstances et notamment des opérations d'expertise déjà engagées, sera fixée à 5 000 euro.
Par ces motifs, LA COUR, Statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort, Réforme en toutes ses dispositions le jugement déféré, Déboute la SARL Bac Plus de l'intégralité de ses demandes, Dit n'y avoir lieu à expertise, Ordonne en conséquence le remboursement par la SARL Bac Plus de toutes sommes perçues au titre de l'exécution provisoire du jugement déféré, Dit que ces sommes porteront intérêt au taux légal à compter de la présente décision, Déboute la SA Acadomia de sa demande reconventionnelle en dommages-intérêts, Rejetant toutes autres demandes plus amples ou contraires des parties, Condamne la SARL Bac Plus à payer à la SA Acadomia une somme de 5 000 euro (cinq mille euro) en indemnisation de ses frais irrépétibles, La condamne aux entiers dépens, en ce compris les frais d'expertise éventuellement exposés en exécution du jugement, Maître de Lamy étant en outre autorisé à recouvrer directement ceux dont il aurait fait l'avance sans recevoir provision, par application de l'article 699 du nouveau Code de procédure civile.