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Décisions

Cass. soc., 28 octobre 2009, n° 08-42.772

COUR DE CASSATION

Arrêt

Cassation

PARTIES

Demandeur :

Mercure Brown (SARL)

Défendeur :

Roger

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Trédez (faisant fonction)

Rapporteur :

M. Chollet

Avocat général :

M. Allix

Avocats :

SCP Piwnica, Molinié, SCP Gadiou, Chevallier

Cons. prud'h. Paris, sect. encadr., du 2…

27 avril 2006

LA COUR : - Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 10 avril 2008), que Mme Delorme, épouse Roger, engagée le 4 janvier 1988, en qualité de VRP, par la société Mediac, aux droits de laquelle se trouve la société Mercure Brown, a été en arrêt de travail pour maladie du 4 février 2004 au 7 janvier 2005 ; qu'ayant, à l'issue de deux visites de reprise, été déclarée par le médecin du travail inapte à tout poste dans l'entreprise, la salariée a été licenciée pour inaptitude et refus du poste de reclassement ;

Sur le premier moyen du pourvoi principal de l'employeur : - Attendu que l'employeur fait grief à l'arrêt de l'avoir condamné à payer à la salariée des sommes à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et d'indemnité de préavis, alors, selon le moyen : 1°) que lorsque le salarié refuse le poste de reclassement proposé en application de l'article L. 122-24-4 du Code du travail, il appartient à l'employeur de tirer les conséquences de ce refus soit en formulant de nouvelles propositions soit en procédant au licenciement pour inaptitude physique; qu'en disant la salariée fondée à refuser une modification de son contrat de travail, la cour d'appel s'est déterminée par un motif inopérant dès lors que le licenciement a été prononcé pour inaptitude physique à la suite du refus par l'intéressée d'une proposition de reclassement, et donc pour impossibilité de reclassement, et a, ainsi, violé l'article L. 122-24-4, alinéa 1er, devenu l'article L. 1226-2 du Code du travail; 2°) qu'il incombe à l'employeur de rapporter la preuve de l'impossibilité de reclassement du salarié déclaré inapte par le médecin du travail ; qu'en exigeant de l'employeur qu'il rapporte la preuve que le poste de reclassement qu'il a proposé à la salariée était le seul emploi disponible dans le groupe, la cour d'appel a violé l'article L. 122-24-4, alinéa 1er, devenu L. 1226-2 du Code du travail ; 3°) que les faits postérieurs à la lettre de convocation du salarié à un entretien préalable à son licenciement, peuvent, dès lors qu'ils sont antérieurs à ce dernier, constituer une cause réelle et sérieuse de licenciement ; qu'en retenant que l'employeur avait engagé la procédure de licenciement avant d'avoir reçu la lettre de refus par la salariée de la proposition de reclassement qu'il lui a faite, la cour d'appel a, dès lors que la lettre a été notifiée bien avant le licenciement, violé l'article L. 122-24-4, alinéa 1er, devenu l'article L. 1226-2 du Code du travail ;

Mais attendu que la cour d'appel, qui a relevé que l'employeur, tenu d'une obligation de reclassement dans l'entreprise ou le groupe, n'avait proposé à la salariée qu'un seul poste pour un salaire inférieur au tiers de la rémunération antérieure, a exactement retenu que le salarié était fondé à refuser un tel poste ; qu'ayant par ailleurs constaté l'absence de justification d'une impossibilité de reclassement, elle a légalement justifié sa décision;

Sur le moyen unique du pourvoi incident : - Attendu que la salariée fait grief à l'arrêt de l'avoir déboutée de sa demande en paiement d'une somme à titre d'indemnité de clientèle, alors, selon le moyen : 1°) qu'en s'abstenant de rechercher, ainsi qu'elle y était invitée, si les sommes versées par l'employeur au cours de l'exécution du contrat de travail et qualifiées d'avances sur indemnité de clientèle ne présentaient pas en réalité le caractère d'une rémunération du travail, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 751-9 devenu L. 7313-13 et suivants du Code du travail ; 2°) que, en toute hypothèse, la cour d'appel, qui a relevé que Mme Roger aurait perçu des avances sur indemnité de clientèle de 93 697,02 euro, ne pouvait débouter celle-ci de l'intégralité de sa demande d'indemnité de clientèle, d'un montant de 96 152 euro, sans s'en expliquer, privant ainsi sa décision de base légale au regard de l'article L. 751-9, devenu L. 7313-13 et suivants du Code du travail ;

Mais attendu, d'une part, que la cour d'appel a procédé à la recherche prétendument omise en constatant, après avoir relevé que selon le contrat de travail 2,5 % des commissions étaient versées à titre d'indemnité de clientèle, l'existence d'avances perçues à ce titre;

Attendu, d'autre part, que la cour d'appel a implicitement, mais nécessairement admis que la salariée n'avait pas droit à une indemnité de clientèle supérieure aux avances qu'elle avait perçues; d'où il suit que le moyen n'est pas fondé;

Mais sur le troisième moyen du pourvoi principal : - Vu l'article 14 de l'accord national interprofessionnel du 3 octobre 1975; - Attendu que pour condamner l'employeur à payer à la salariée une somme à titre d'indemnité spéciale de rupture, l'arrêt, après avoir débouté la salariée de sa demande à titre d'indemnité de clientèle, retient que l'indemnité spéciale de rupture peut se cumuler avec les rémunérations accordées en cours de contrat pour le même objet que l'indemnité de clientèle

Qu'en statuant ainsi, alors qu'il résultait de ses constatations que la salariée n'avait pas, conformément aux exigences de l'article 14 de l'accord national interprofessionnel, renoncé au paiement de l'indemnité de clientèle dans le délai de trente jours à compter de l'expiration du contrat de travail, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;

Et attendu que la Cour de cassation est en mesure, en application de l'article 627 du Code de procédure civile, de statuer sans renvoi ;

Par ces motifs, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les deuxième, quatrième et cinquième moyens du pourvoi principal, qui ne seraient pas de nature à permettre l'admission du pourvoi ; Casse et annule, mais seulement en ce qu'il a condamné la société Mercure Brown à payer à Mme Roger la somme de 41 141,94 euro à titre d'indemnité spéciale de rupture, l'arrêt rendu le 10 avril 2008, entre les parties, par la Cour d'appel de Paris.