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Décisions

CA Paris, Pôle 5 ch. 5-7, 3 novembre 2009, n° ECEC0926337X

PARIS

Arrêt

PARTIES

Demandeur :

Compagnie française de transport interurbain (SA)

Défendeur :

Président de l'Autorité de concurrence, Ministre de l'Economie, de l'Industrie et de l'Emploi

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Fossier

Conseillers :

M. Remenieras, Mme Jourdier

Avoué :

SCP Monin-d'Auriac de Brons

Avocats :

Me Vogel, Selas Vogel & Vogel

CA Paris n° ECEC0926337X

3 novembre 2009

Aux termes de l'article 29 de la loi d'orientation sur le transport intérieur (LOTI) n° 82-1153 du 30 décembre 1982, les services publics réguliers de transports routiers non urbains de personnes sont organisés par les départements ou, par délégation, par des entreprises avec lesquelles le département conclut des conventions. Ces services font en principe l'objet d'un plan départemental établi par le conseil général après avis des communes intéressées.

En outre, les départements disposent d'une compétence étendue pour organiser à leur niveau le transport scolaire mais peuvent la déléguer en partie à des communes, des groupements de communes ou des syndicats mixtes. Le conseil général est alors qualifié d'organisateur de premier rang tandis que la ou les autorités délégataires sont désignés comme organisateurs secondaires.

La loi n° 93-122 du 29 janvier 1993 relative à la prévention de la corruption et à la transparence de la vie économique et des procédures publiques, dite "loi Sapin", impose des obligations de mise en concurrence aux collectivités lorsqu'elles décident de déléguer à une entreprise un service de transport routier de voyageurs, qu'il soit "régulier" ou spécialisé dans le ramassage scolaire.

A l'époque des faits, le secteur des transports routiers non urbains de personnes était dominé, au plan national, par trois grands groupes de transport, Transdev, Connex et Keolis. Ce dernier groupe n'est toutefois pas présent en Haute-Savoie, département touché par les pratiques poursuivies, où opère en revanche, une entreprise indépendante de ces trois groupes, l'entreprise Cars Philibert.

Le groupe Connex, devenu Veolia Transport en 2006, dépend lui-même du groupe multiservices Veolia Environnement, anciennement dénommé Vivendi Environnement. Constitué, au plan national, d'une centaine de sociétés qui exploitent notamment des réseaux urbains et interurbains de transport routier de voyageurs, Connex opère en Haute-Savoie par l'intermédiaire de la société Compagnie française de transports interurbains (ci-après CFTI), établie à Nanterre, qui dispose d'un établissement secondaire "Autocars Frossard", constitué en 1997 à la suite de la reprise du fonds de commerce de la société Autocars Frossard.

En ce qui concerne l'organisation du transport scolaire par car en Haute-Savoie, le Conseil général de ce département a décidé d'assurer en principe lui-même le lancement de la procédure d'appel à la concurrence et le choix des entreprises, tout en déléguant aux syndicats de communes ou communautés de communes concernés, soit en l'occurrence les communautés de communes du canton d'Alby-sur-Chéran, du pays de Fillière, du pays de Faverges et le syndicat mixte de Frangy, le suivi de l'exécution du marché et le versement de la rémunération correspondante. C'est dans ces conditions que le secteur géographique correspondant au domaine de compétence de chaque organisateur secondaire a fait l'objet d'un appel d'offres concernant un ou plusieurs lots, réunissant eux-mêmes un ou plusieurs circuits spéciaux de transport scolaire 375 circuits scolaires ont ainsi fait l'objet d'un appel d'offres en 2002 et 2003 en Haute-Savoie.

Par ailleurs, la ville d'Annecy lance elle-même des appels d'offres pour le transport urbain de voyageurs. De 1999 à 2003, la ville d'Annecy et le Conseil général de Haute-Savoie ont publié des appels d'offres en vue du renouvellement d'une partie des contrats de transport routier de voyageurs, notamment de ramassage scolaire, en vigueur dans le département.

Par lettre enregistrée le 26 novembre 2004 sous le numéro 04/0091 F, le ministre de l'Economie, des Finances et de l'Industrie a saisi le Conseil de la concurrence de pratiques mises en œuvre en 2001 et en 2002 à l'occasion d'appels d'offres de la ville d'Annecy et du Conseil général de Haute-Savoie pour le transport par autocar.

C'est dans ces conditions, qu'après enquête, des griefs d'infraction aux dispositions de l'article L. 420-1 du Code de commerce ont été notifiés.

Un premier grief a été notifié aux sociétés CFTI et Autocars Frossard, Voyages Crolard et Transdev Alpes pour avoir, courant décembre 2001, en tout cas depuis temps non couvert par la prescription, dans le cadre du marché intermédiaire de la ville d'Annecy, mis en œuvre une entente anticoncurrentielle en échangeant des informations sur leurs offres pour laisser le marché à l'une d'elles et d'avoir ainsi empêché le jeu de la concurrence sur ce marché.

Un second grief a été notifié aux sociétés Autocars Grillet, Transports Francony, Albanais Voyages, Voyages Grillet, Savoies Tourisme, Cars Philibert, CFTI et Autocars Frossard, Voyages Dunand, Voyages Crolard, Transdev Alpes, Autocars Hélène Fossorier, SABA, Seyssel Cars, pour avoir, courant 2002, en tout cas depuis temps non couvert par la prescription, dans le cadre de deux appels d'offres lancés successivement par le Conseil général de Haute-Savoie pour le renouvellement partiel des entreprises attributaires des circuits spéciaux et des circuits spéciaux scolaires, mis en œuvre une entente anticoncurrentielle pour se répartir les marchés, en échangeant des informations sur leurs offres avant leur dépôt et avoir ainsi empêché, restreint et faussé le jeu de la concurrence sur ces marchés en faisant obstacle à la fixation des prix par le libre jeu du marché et en favorisant artificiellement leur hausse.

Les sociétés Transdev Alpes, Voyages Dunand et Voyages Crolard ainsi que la société Cars Philibert ont décidé de ne pas contester les griefs. Elles ont en conséquence sollicité le bénéfice des dispositions du III de l'article L. 462-2 du Code de commerce. La mise en œuvre de ces dispositions a fait l'objet de deux procès-verbaux établis par le rapporteur général adjoint du conseil qui ont été signés par les représentants de ces sociétés. Elles ont ensuite présenté des observations portant sur la gravité des pratiques et le cas échéant sur leur réitération ainsi que sur le dommage à l'économie.

Par une décision 08-D-33 du 16 décembre 2008 le Conseil a notamment dit qu'il était établi que la société CFTL avait enfreint les dispositions de l'article L. 420-1 du Code de commerce et lui a infligé une sanction pécuniaire de 700 000 euro.

LA COUR,

Vu le recours en annulation et subsidiairement en réformation déposé au greffe de la cour le 22 janvier 2009 par la société CFTI;

Vu le mémoire déposé le 20 février 2009 par la société CFTI à l'appui de son recours, soutenu par son mémoire en réplique, déposé le 22 juillet 2009;

Vu les observations écrites du Conseil du 25 mai 2009;

Vu les observations écrites du ministre chargé de l'Economie du 27 mai 2009;

Vu les observations écrites du Ministère public du 9 septembre 2009 mises à la disposition des parties à l'audience, et tendant toutes au rejet du recours;

Le Conseil de la requérante, les représentants du Conseil de la concurrence et du ministre chargé de l'Economie ainsi que le Ministère public ayant été entendus lors de l'audience publique du 15 septembre 2009 et la requérante ayant été mise en mesure de répliquer;

Sur ce,

Sur le fond

Considérant s'agissant en premier lieu de l'entente relative au marché intermédiaire de la ville d'Annecy (grief n° 1), que cette commune a publié un appel d'offres ouvert concernant l'organisation de transports réguliers de voyageurs dans les zones urbaines de l'agglomération pour les années 2002, 2003 et 2004;

Que ce marché, qui comprenait la desserte d'équipements sportifs et culturels et de communes périphériques à partir d'établissements scolaires et d'autre équipements sportifs et culturels, comportait un seul lot d'un montant annuel estimé à 99 095 euro ; qu'il prenait la suite d'un marché triennal (1999-2001) présentant les mêmes caractéristiques et dont le titulaire était l'entreprise Autocars Frossard;

Que, le 9 novembre 2001, la commission d'appel d'offres a déclaré la consultation infructueuse après examen du rapport d'analyse des offres qui faisait état, par rapport au marché antérieur, d'augmentations particulièrement importantes des prix unitaires figurant dans le bordereau émanant du groupement Autocars Frossard Voyages Crolard, seul candidat recevable compte tenu de la capacité d'exploitation requise par la collectivité territoriale;

Que, dans ces conditions, la ville a décidé le 27 décembre 2001 de relancer le marché par un second appel d'offres qui présentait des caractéristiques sensiblement différentes de l'appel d'offres initial et qui comprenait deux lots;

Que la commission d'appel d'offres a attribué le lot n° 1 à l'entreprise Autocars Frossard, qui a déclaré comme sous-traitant les Voyages Crolard et le lot n° 2 au groupement Autocars Frossard/Voyages Crolard.

Que, compte tenu du délai de mise en œuvre de la procédure du second appel d'offres, la ville d'Annecy a toutefois, dans l'intervalle, passé un marché intermédiaire pour les mois de janvier et février 2002 afin d'assurer la continuité du service jusqu'à la date de mise en œuvre du nouveau marché fixée au 1er mars 2002;

Que seules les entreprises Voyages Crolard et Autocars Frossard, par ailleurs potentiellement en compétition pour l'obtention du marché triennal, ont été contactées par la ville d'Annecy pour présenter une offre chiffrée correspondant à cette prestation;

Que c'est ainsi que, le 5 décembre 2001, la direction générale des services opérationnels de la ville d'Annecy a fait parvenir aux deux entreprises concernées les courriers par lesquels elle demandait à chacune d'elles de faire une proposition chiffrée pour assurer les prestations durant ces deux mois;

Que Voyages Crolard, qui n'était pas titulaire du marché a, dans un premier temps, proposé le 10 décembre 2001 une offre financièrement plus compétitive que celle des Autocars Frossard, ce qui a conduit la mairie d'Annecy à la retenir pour la quasi-totalité des circuits;

Que cependant, dans un second temps, M. Domenge, attaché commercial des Voyages Crolard, a envoyé le 18 décembre 2001 aux services de la mairie d'Annecy une télécopie les informant que son offre du 10 décembre 2001 était affectée d'une erreur en ce que les prix mentionnés devaient s'entendre comme des prix "hors taxes" et non "toutes taxes comprises";

Qu'il en est résulté que la proposition concurrente des Autocars Frossard, qui correspondait à l'offre précédemment présentée par le groupement Autocars Frossard/Voyages Crolard dans le cadre du marché pluriannuel est, de ce fait, devenue moins-disante et que c'est dans ces conditions que, par courrier du 18 décembre 2001, la ville a alors indiqué aux Voyages Crolard que, du fait de cette erreur, son offre n'était pas retenue;

Considérant que l'enquête a révélé l'existence

- d'une part, sur la lettre de la ville d'Annecy du 5 décembre 2001, également retrouvée chez Voyages Crolard, de mentions portées par M. Domenge et M. Pecchi, directeur de Voyages Crolard, définissant les prix de l'offre commune faite dans le cadre du marché pluriannuel et celui de l'offre de Voyages Crolard, plus élevée;

- d'une part, sur une télécopie adressée le 18 décembre 2001 par la mairie d'Annecy aux Voyages Crolard par laquelle elle lui indiquait que son offre n'était pas retenue, d'une mention manuscrite rajoutée ainsi libellée: "Monsieur Domenge, vous pouvez rassurer Frossard" avec une date : "22.12.2001" et la signature de M. Pecchi;

Considérant, s'agissant en second lieu de l'entente relative aux consultations de 2002 (grief n° 2 : lots de la communauté de communes du canton de Rumilly, Albanais 1 et 2 et du site de Seysse), que deux appels d'offres ouverts ont été lancés successivement par le Conseil général de Haute-Savoie pour le renouvellement partiel des entreprises attributaires des circuits spéciaux de transports scolaires - le 30 mai 2002 pour 28 lots représentant 135 circuits spéciaux et le 3 juin 2002 pour 14 lots représentant 105 circuits - et qu'à l'issue de ces deux appels d'offres, le Conseil général a attribué 40 lots à des entreprises de transport de voyageurs avant le début de l'année scolaire;

Considérant que CFTI conteste l'existence de la concertation qui lui est imputée avec l'entreprise Voyages Crolard au titre du marché intermédiaire de la ville d'Annecy (grief n° 1), en faisant valoir que la lettre du 5 décembre 2001 ainsi que la mention "Monsieur Domenge ..." sur lesquelles le Conseil s'était fondé pour retenir que la pratique était caractérisée devaient être "remis en perspective" et faire l'objet d'une autre analyse que les Voyages Crolard qui, dès l'origine, n'avaient pas l'intention d'emporter le marché, et cela en dehors de tout accord avec les Autocars Frossard, ont en effet expliqué qu'ils avaient élaboré une offre de prix de type "carte de visite" en prenant comme référence les prix figurant dans l'offre commune précédemment déposée dans le cadre de la réponse à l'appel d'offres pluriannuel par le groupement Frossard/Crolard et en optant délibérément dès l'origine pour des prix supérieurs à l'offre commune; qu'au surplus, les Voyages Crolard ont rectifié leur offre dans des circonstances indéterminées, rien ne permettant non plus de démontrer l'existence d'un accord à ce sujet avec les Autocars Frossard; que la mention "Monsieur Domergue..." peut s'expliquer par le fait que lés Voyages Crolard ne souhaitant pas remporter le marché, étant partenaire des Autocars Frossard, ils voulaient l'informer a posteriori, après le dépôt des offres, que tel n'était pas le cas, et qu'elle ne permet pas pour autant d'établir une concertation préalable des deux entreprises;

Qu'en ce qui concerne ensuite le grief n° 2, après voir exposé que la stratégie commerciale des Autocars Frossard, notamment dans le secteur de Rumilly, établie par l'évolution de ses parts de marché en volume et en valeur à l'occasion de l'appel d'offres de 2002 est incompatible avec l'entente qui lui est imputée, la société CFTI soutient:

- tout d'abord, que la réunion à laquelle M. Morel, dirigeant des Autocars Frossard, a reconnu avoir participé à Saint-Ours, en présence de plusieurs autre entrepreneurs de transport, n'avait pas d'objet anticoncurrentiel et n'a abouti à aucun accord; que le Conseil général de Haute-Savoie ayant à l'occasion des appels d'offres de 2002 modifié les lignes de transport existantes, les petits transporteurs avaient éprouvé des difficultés pour comprendre la nouvelle organisation des circuits, caractérisée par des lots d'un volume plus important, et par suite pour envisager de répondre seuls aux appels d'offres, ce qui les avaient conduits à envisager la constitution de groupements ; que la "précipitation" dans l'organisation des appels d'offres ainsi qu'une modification substantielle de la consistance des services faisant l'objet des appels d'offres par rapport à la situation antérieure ont conduit les entreprises à échanger des informations publiques pour leur permettre de mieux définir la consistance des lots ainsi nouvellement constitués ; qu'enfin, cette réunion n'a abouti à aucun accord puisque l'idée de la constitution d'un groupement a été abandonnée;

- ensuite, que M. Morel n'a participé qu'à une seule réunion avec d'autres entreprises de transport alors que des réunions en comité plus restreint ont eu lieu par la suite au cours desquelles des accords, qu'ils soient ou non qualifiables d'ententes, ont pu être trouvés;

- enfin que la décision n'a pas établi la preuve d'une entente ou d'une répartition des lots imputables aux Autocars Frossard:

* qu'en effet, en ce qui concerne les lots de la communauté de commune de Rumilly, les notes manuscrites de M. Chirat des cars Philibert retenues par le Conseil pour établir l'existence de l'entente ne sont pas probantes, dès lors notamment que les mentions concernant les Autocars Frossard sont inexactes ; qu'à le supposer avéré, un partagé des lots sur les secteurs de Rumilly ne pourrait de toute façon leur être imputé dès lors qu'ils ne figurent pas dans la liste des entreprises qui, selon la notification de griefs, se seraient entendues pour se partager les lots du secteur de Rumilly, que pour les lots où apparaît leur nom, le Conseil n'a retenu aucune entente et que rien ne permet non plus d'affirmer que les Autocars Frossard ont été au courant de la répartition des marchés qui a pu être opérée, à la supposer établie, ou de la constitution de groupements ; qu'à l'opposé, tout permet de penser qu'elle a été réalisée lors de réunions ultérieures à la seule réunion à laquelle M. Morel a assisté et que les offres qu'il a déposées, notamment sur le lot 02-0004, ont contrarié le plan arrêté;

* en ce qui concerne les lots d'Albanais 1 et 2 et du site de Seyssel, les Autocars Frossard sont totalement étrangers au grief d'entente qui n'a été imputé qu'à Albanais Voyages et Seyssel Cars ; qu'il n'existe en effet aucun lien entre les secteurs concernés et les réunions de Saint-Ours, et que des discussions entre les entreprises d'Albanais Voyages et Seyssel Cars pour la constitution du groupement qui étaient intervenues auparavant se sont poursuivies de manière autonome;

Mais considérant que, comme l'a utilement rappelé le Conseil, en matière de marchés publics ou privés sur appel d'offres, une entente anticoncurrentielle peut prendre la forme, notamment d'une coordination des offres ou d'échanges d'informations entre entreprises antérieures à la date où le résultat de l'appel d'offres est connu ou peut l'être, qu'il s'agisse de l'existence de compétiteurs, de leur nom, de leur importance, de leur absence d'intérêt pour le marché considéré, ou des prix qu'ils envisagent de proposer;

Que la preuve de l'existence de telles pratiques qui sont de nature à limiter l'indépendance des offres, condition normale du jeu de la concurrence, peut résulter en particulier d'un faisceau d'indices constitué par le rapprochement de diverses pièces recueillies au cours de l'instruction, même si chacune de ces pièces prise isolément n'a pas un caractère suffisamment probant;

Qu'il en résulte que tout échange d'information préalablement au dépôt des offres est anticoncurrentiel s'il est de nature à diminuer l'incertitude où toutes les entreprises doivent se trouver placées, relativement au comportement de leur concurrentes, cette incertitude étant en effet la seule contrainte de nature à pousser des opérateurs concurrents à faire le maximum d'efforts en terme de qualité et de prix pour obtenir le marché et qu'à l'inverse, toute limitation de cette incertitude affaiblit la concurrence entre les offreurs et pénalise l'acheteur public, obligé à payer un prix plus élevé que celui qui aurait résulté d'une concurrence non faussée;

En ce qui concerne le grief n° 1

Considérant qu'il est vrai que M. More, dirigeant de l'établissement Autocars Frossard a indiqué aux enquêteurs:

"Pour ce qui concerne les mentions manuscrites portées sur le courrier de la ville d'Annecy du 18/12/2001 que vous me présentez, je pense que notre service commercial a dû prendre contact avec les services de la ville d'Annecy pour connaître la réponse du marché intermédiaire et apprendre que nous n'étions pas retenus. Etant partenaire sur ce dossier avec Crolard, nous avons pris l'attache de leurs services pour savoir s'ils avaient d'autres informations, ils ont donc appelé la mairie d'Annecy et au cours de la conversation, il est apparu qu'il y avait une confusion dans l'interprétation des prix de l'offre. Le terme "rassurer" correspond sans doute au fait que Crolard n'avait pas eu sur ce marché un comportement autre que celui d'un partenaire à un groupement";

Que ces déclarations sont toutefois démenties par celles du représentant des Voyages Crolard, M. Pecchi qui, concernant la mention manuscrite "Monsieur Domenge ...", a indiqué le 20 mars 2002 aux enquêteurs:

"(...) Il s'agissait de rassurer Frossard sur le fait que nos relations de partenariat engagées pour la réponse commune à l'appel d'offre de la mairie d'Annecy de l'automne, c'était bien lui qui obtiendrait le marché intermédiaire de janvier et février, dans la mesure où celui-ci se situait dans le prolongement pour une courte durée du marché à bons de commandes des années 99, 2000 et 2001 (...) Sur les mentions manuscrites figurant sur la télécopie de la mairie d'Annecy reçue le 5 décembre 2001 (...) Il précise qu'il est évident que dans la mesure où Crolard ne souhaitait pas obtenir ce marché intermédiaire pour les mois de janvier et février, les prix ont été fixés à un niveau légèrement supérieur à l'offre commune" ;

Qu'analysées à la lumière de ces dernières déclarations, les annotations portées sur la lettre du 5 décembre 2001 ainsi que sur la télécopie du 18 décembre 2001 constituent des indices suffisants permettant d'établir que la réponse à la demande de la ville d'Annecy a bien été faite en concertation entre les deux entreprises sollicitées qui s'étaient mis d'accord afin que le marché intermédiaire soit remporté par les Autocars Frossard;

Qu'en effet, les chiffres et les annotations portées sur la lettre de la mairie d'Annecy du 5 décembre 2001 révèlent bien la volonté de l'entreprise Crolard de communiquer à la ville d'Annecy, pour le marché considéré, des prix supérieurs à ceux proposés par les Autocars Frossard;

Que, dans ces conditions, la prise de contact qui est intervenue lorsque les représentants de cet établissement ont appris qu'il n'était pas retenu, ne peut avoir d'autre raison que la surprise créée par le résultat obtenu au regard de ce qui avait été décidé entre les deux concurrents;

Que cela explique qu'à la suite de ce contact, les Voyages Crolard vont aussitôt signaler leur "erreur" à la ville d'Annecy de façon à respecter l'accord pris avec leur concurrent, auquel ils peuvent alors indiquer que le problème est réglé ("Monsieur Domenge, vous pouvez rassurer Frossard"), puisque le marché ne leur est pas attribué;

Considérant, dès lors, que c'est par des appréciations pertinentes, que la cour fait siennes, que le Conseil a constaté que des indices suffisants permettaient de démontrer qu'une entente anticoncurrentielle avait été conclue entre les entreprises Autocars Frossard et Voyages Crolard afin de laisser les Autocars Frossard emporter le marché intermédiaire;

En ce qui concerne le grief n° 2:

Considérant qu'il ressort du dossier que, préalablement aux deux appels d'offres lancés par le Conseil général de Haute-Savoie, plusieurs représentants d'entreprises de transport de voyageurs intervenant en Haute-Savoie, dont M. Mord, dirigeant de l'établissement Autocars Frossard, ont participé à une ou plusieurs réunions préparatoires à l'élaboration des offres de chacun d'eux;

Or considérant qu'une entreprise doit s'abstenir de participer à toute prise de contact directe ou indirecte, ayant pour objet ou pour effet d'influencer le comportement sur le marché d'un concurrent actuel ou potentiel ou de dévoiler à un tel concurrent le comportement que l'on envisage de tenir soi-même sur le marché;

Qu'en cas de tenue de réunions informelles auxquelles participent à leur propre initiative des entreprises concurrentes, l'entreprise dont un responsable est convié à une telle réunion doit soit refuser d'y participer soit si la bonne foi du participant est surprise, se distancier sans délai et publiquement du mécanisme anticoncurrentiel dont la réunion est le support;

Qu'en effet, une participation, même passive, suffit à conforter le mécanisme de l'entente en ce qu'elle renseigne l'ensemble des participants sur le comportement commercial que les autres acteurs du marché ont décidé d'adopter alors que la concurrence exige à l'opposé que les compétiteurs décident de leur comportement de manière autonome;

Considérant qu'en l'espèce, il ressort de l'enquête que les représentants des entreprises mises en cause ont tous reconnu leur participation à l'une au moins des réunions organisées au cours des mois de mai et juin 2002 dans les locaux de l'entreprise Autocars Grillet à Saint-Ours et ont précisé que ces réunions ont eu lieu avant la remise des offres qui devait avoir lieu avant le 30 mai 2002 pour la première consultation et le 3 juin pour la seconde;

Qu'il résulte des déclarations précises et concordantes des participants à ces réunions (points 49 à 57 de la décision) que concernant les secteurs géographiques de Rumilly, d'Albanais 1 et 2 et du site de Seyssel au titre desquels une entente est, selon la notification de griefs, imputée à CFTI (Autocars Frossard), qu'elles avaient pour finalité, tout d'abord, de faire le point sur la répartition actuelle et de s'accorder pour que chacun retrouve soit ses circuits, soit un volume d'activité équivalent, ensuite, d'envisager la constitution d'un groupement de tous les transporteurs pour répondre à l'appel d'offres et, enfin, d'harmoniser les tarifs;

Que, s'agissant plus précisément des tarifs, l'un des participants, M. Janeriat (entreprise Savoie Tourisme), a déclaré:

" J'ai participé effectivement à au moins deux réunions qui se sont déroulées chez Grillet à Saint-Ours, selon mes souvenirs quelque temps avant la date de dépôt des plis pour la première consultation de l'appel d'offres passé en 2002, certainement courant mai 2002. L'objet était de garder les circuits que nous exploitions avec un niveau de prix élevé sur Rumilly et Albanais (...)";

Qu'un autre participant, M. Moreno (entreprise Saba), a indiqué:

"J'ai participé aux réunions qui se sont tenues à Saint-Ours (...) dans les locaux de la société Grillet. Il y a eu trois réunions. Au cours de ces réunions, les participants ont essayé de déterminer les niveaux de prix pour répondre aux appels d'offres. Savoie Tourisme voulait obtenir que tout le monde augmente ses tarifs pour parvenir à des prix de journée de 250 euro";

Qu'il en résulte que les réunions précitées avaient bien un objet anticoncurrentiel puisque les participants ont entendu se répartir les lots du marché passé par le Conseil général dans les secteurs géographiques de Rumilly, d'Albanais 1 et 2 et du site de Seyssel afin que chaque entreprise retrouve soit les circuits qu'elle assurait antérieurement, soit un volume d'activités équivalent, peu important que tons les objectifs envisagés n'aient pas été atteints;

Que, dès lors, la participation à l'une de ces réunions qui avaient pour thème la répartition du marché de renouvellement des circuits spéciaux de transport scolaire, suffit à établir l'accord de volonté à l'entente de chacun des participants, dont M. Morel, représentant des Autocars Frossard;

Que celui-ci, s'il déclare avoir manifesté son désaccord à la constitution d'un groupement, ne s'est pas pour autant distancié sans délai et publiquement du mécanisme anticoncurrentiel qui était mis au point;

Qu'au surplus, contrairement à ce que soutient la requérante, le fait de ne pas avoir obtenu le ou les circuits prévus dans le cadre de l'entente est sans incidence sur l'accord de volonté anticoncurrentiel;

Considérant, s'agissant plus spécialement de la répartition des lots de la communauté de communes du canton de Rumilly et Albanais, que l'entreprise Cars Philibert a fourni un document comportant diverses annotations (point 61 de la décision) établi par un participant aux réunions, M. Chirat, qui le commente ainsi:

" (...) Les éléments manuscrits qui y figurent concernent les lots du canton de Rumilly avant l'attribution desquels il y a eu une réunion de transporteurs chez Grillet à Saint-Ours à laquelle j'ai participé. (...) Les indications portées d'une manière manuscrite sur la page 2 du document ont été rédigées par moi-même en relation avec les informations qui ont été données au cours de la réunion qui s'est déroulée chez Grillet. Ces mentions ont été portées sur ce document soit entre les deux réunions, soit à l'issue de la seconde";

Que ce document, exactement analysé par le Conseil (points 61 à 72 de la décision), confirme l'objet anticoncurrentiel des réunions qui ont été évoquées et le fait qu'elles ont effectivement donné lieu à des échanges visant à une répartition des lots en faisant apparaître un résumé des alliances projetées;

Que la circonstance que, dans certains cas, ces alliances ont été modifiées, dans la mesure où le résultat définitif s'en écarte pour certains lots, tout comme l'absence de soumission des Autocars Frossard, sont cependant sans incidence sur l'existence, dans son principe, de l'accord de volonté anticoncurrentiel;

Que la reconnaissance par M. Morel de n'avoir participé qu'à l'une de ces réunions à objet anticoncurrentiel suffit cependant à caractériser, dans les circonstances de l'espèce, leur participation à une infraction aux dispositions de l'article L. 420-1 du Code de commerce;

Considérant, dès lors, que c'est par des appréciations pertinentes, que la cour fait siennes, que le Conseil a retenu que le grief n° 2 était établi en ce qui concerne les Autocars Frossard pour les secteurs de la communauté de communes du canton de Rumilly, d'Albanais 1 et 2 et du site de Seyssel;

Sur la responsabilité de CFTI

Considérant que les Autocars Frossard, simple établissement secondaire de CFTI se trouvant dans la dépendance des organes centraux de cette société pour la définition d'une stratégie commerciale, industrielle, technique et financière et étant, par surcroît, dépourvu de la personnalité morale, ne peut être considéré comme une entreprise distincte de la requérante au sens du droit de la concurrence;

Que, dès lors, c'est à juste titre que le Conseil a décidé que la société CFTI devait répondre des griefs notifiés aux Autocars Frossard comme à elle-même;

Sur la sanction

Considérant que la requérante sollicite la réduction de la sanction pécuniaire qui lui a été infligée en faisant valoir:

- tout d'abord, que son établissement n'a pas joué de rôle actif en ce qui concerne la principale infraction, dès lors que son représentant s'est borné à participer de manière passive à une réunion où une prétendue entente aurait été nouée à l'initiative d'autres entreprises et à leur bénéfice;

- ensuite, que le principe de proportionnalité des peines doit conduire à constater que les pratiques poursuivies sont imputables à un établissement jouissant d'une complète autonomie commerciale, technique et économique et qu'elles ont été mises en œuvre par son dirigeant sans intervention du siège; qu'au surplus, elle est la seule entreprise mise en cause ayant des activités sur l'ensemble du territoire à travers des établissements locaux alors que les autres sont soit des entreprises indépendantes locales, soit des filiales d'un grand groupe ayant recours à des sociétés juridiquement distinctes pour exercer localement leur activité; que cela conduit ainsi "mécaniquement" à une sanction plus élevée que celles qui ont été infligées aux autres entreprises mises en cause, filiales de groupes dont seul le chiffre d'affaires réalisé localement a été pris en compte, alors qu'en ce qui la concerne c'est le chiffre d'affaires réalisé au plan national qui a servi de base au calcul de la sanction et non les recettes d'exploitation des Autocars Frossard, alors que les entreprises doivent être sanctionnées sur la base de la valeur des services réalisés en relation directe ou indirecte avec l'infraction;

- enfin, que le Conseil n'a pas non plus fait une correcte application des critères de la sanction fixés par l'article L. 462-4 du Code de commerce, dès lors:

* que s'agissant des appels d'offres organisés par le Conseil général de Haute-Savoie, c'est à tort que le Conseil a estimé que les pratiques qui auraient été mises en œuvre dans le cadre des réunions de Saint-Ours étaient graves et avaient causé un dommage à l'économie; qu'en effet, l'entente alléguée, ponctuelle et limitée, n'a été la source d'aucun préjudice pour le maître d'ouvrage et qu'au surplus, la sanction prononcée est disproportionnée au regard du rôle mineur joué par les Autocars Frossard dans l'entente que le Conseil n'a pas examiné la responsabilité personnelle des Autocars Frossard dans l'entente et n'a pas procédé à une réelle individualisation des sanctions et une appréciation correcte du degré de gravité de leur comportement : n'ayant joué qu'un rôle passif et n'ayant ni déposé d'offre de couverture ni bénéficié de l'attribution de lots pour le secteur de Rumilly ou ceux d'Albanais, CPTI aurait dû se voir infliger une sanction moins importante que les leaders et bénéficiaires de la pratique;

* que s'agissant de la consultation organisée par la ville d'Annecy, seule une sanction d'un montant limité aurait dû être prononcée, dès lors que l'entente n'a eu qu'un caractère très ponctuel, que les prix proposés par les Autocars Frossard correspondaient à des prix de marché et qu'au surplus les circonstances dans lesquelles la consultation avait été lancée par la ville d'Annecy étaient très particulières, s'agissant d'une procédure informelle n'incluant que deux entreprises qui avaient répondu en groupement dans le cadre de l'appel d'offres qu'elle venait d'organiser;

Considérant, en ce qui concerne la détermination des sanctions par le Conseil, que l'article L. 464-2 du Code de commerce dispose:

" Les sanctions pécuniaires sont proportionnées à la gravité des faits reprochés, à l'importance du dommage causé à l'économie, à la situation de l'organisme ou de l'entreprise sanctionnée ou du groupe auquel l'entreprise appartient et à l'éventuelle réitération de pratiques prohibées (...). Elles sont déterminées individuellement pour chaque entreprise ou organisme sanctionné et de façon motivée pour chaque sanction. (...) Le montant maximum de la sanction est, pour une entreprise, de 10 % du montant du chiffre d'affaires mondial hors taxes le plus élevé réalisé au cours d'un des exercices clos depuis l'exercice précédant celui au cours duquel les pratiques ont été mises en œuvre. Si les comptes de l'entreprise concernée ont été consolidés ou combinés en vertu des textes applicables à sa forme sociale, le chiffre d'affaires pris en compte est celui figurant dans les comptes consolidés ou combinés de l'entreprise consolidante ou combinante";

Considérant, tout d'abord, que contrairement à ce que soutient la requérante, le Conseil a parfaitement caractérisé la gravité des pratiques dénoncées;

Qu'en effet, concernant le marché intermédiaire de la ville d'Annecy, le Conseil a justement relevé que les sociétés Voyages Crolard et CFTI, par l'intermédiaire de son établissement Autocars Frossard, n'ont pas hésité à s'entendre pour répondre à ce marché, pourtant de faible importance et passé pour une durée de deux mois, en observant de surcroît que la passation de ce marché avait été rendu nécessaire du fait que les entreprises concernées avaient proposé des augmentations de prix particulièrement importantes pour le renouvellement du marché de transports réguliers prévu pour trois ans, de sorte que le premier appel d'offres avait été déclaré infructueux;

Que, concernant les deux consultations organisées par le Conseil général en 2002, la décision constate que onze sociétés de transport de voyageurs ont participé à différentes réunions afin de répartir entre elles les lots de circuits scolaires au mépris des appels d'offres organisés par le Conseil général destinés à faire prévaloir la concurrence pour l'attribution de ces marchés;

Que la décision entreprise énonce à juste titre que les ententes poursuivies, qui faussent, voire suppriment, la concurrence dans l'attribution de marchés publics de transport particulièrement sensibles aux évolutions techniques et économiques, témoignent d'une forte résistance à la volonté des collectivités locales de faire jouer la concurrence pour obtenir un service de transports notamment scolaires au meilleur prix et que, même si, en l'espèce, elles ont été constatées sur des marchés de faible amplitude, elles présentent eu soi un caractère de particulière gravité;

Qu'au surplus, de tels agissements, qui sont de nature à tromper les organismes publics quant à l'existence ou à l'intensité de la concurrence à l'occasion d'appels d'offres sont intrinsèquement graves, notamment au regard du risque de banalisation et d'entraînement qui peut en résulter;

Considérant, ensuite, que contrairement à ce que soutient la requérante, le Conseil a suffisamment justifié l'importance du dommage à l'économie qui ne se réduit pas au préjudice éventuellement subi par le maître de l'ouvrage, et s'apprécie en fonction de la perturbation générale apportée au fonctionnement normal des marchés par les pratiques en cause;

Qu'en l'espèce, selon les données énumérées par le Conseil (points 137 et 138 de la décision) et non contestées par la requérante sur l'ordre de grandeur des marchés publics affectés:

- le marché intermédiaire de la ville d'Annecy a été attribué pour un montant d'environ 38 000 euro (calcul fait à partir du prix proposé à la relance du marché triennal en supposant le service assuré toute l'année) ou d'environ 50 000 euro (calcul fait sur la même base, mais en supposant le service assuré seulement en période scolaire);

- que les communautés de communes du canton de Rumilly, d'Albanais 1 et 2 et du site de Seyssel affectés par les pratiques ont pour leur part été attribués pour un montant global triennal d'environ 6 millions d'euro, étant observé que, pour ces lots, il n'y a pas lieu de préciser l'importance de chacun puisqu'il a été établi que la concertation réalisée à l'occasion des réunions de Saint-Ours a porté sur une répartition de l'ensemble de ces lots;

Que c'est encore avec raison que le Conseil relève qu'une concurrence faussée par des ententes de répartition de marchés, des offres de couverture et des échanges d'informations sur les prix proposés entraîne nécessairement une pression moindre sur les entreprises pour qu'elles fassent des efforts de prix;

Considérant, enfin, s'agissant de la situation particulière de la requérante, que c'est par des appréciations pertinentes, que la cour fait siennes, que le Conseil a décidé:

- que la société CFTI devait être sanctionnée pour la participation de son établissement secondaire les Autocars Frossard à l'entente relative au marché intermédiaire de la ville d'Annecy et à l'entente mise en œuvre pour la réponse aux consultations du Conseil général de Haute-Savoie en 2002 en ce qui concerne les secteurs de la communauté de communes du canton de Rumilly, d'Albanais 1 et 2 et du site de Seyssel;

- qu'en application du I de l'article L. 462-2 du Code de commerce, le montant maximum de la sanction que peut prononcer le Conseil à l'encontre de CFTI est de 10 % du montant du chiffre d'affaires mondial hors taxes le plus élevé réalisé au cours d'un des exercices clos depuis l'exercice précédant celui au cours duquel les pratiques ont été mises en œuvre soit, en l'occurrence, 3 milliard d'euro compte tenu du chiffre d'affaires consolidé de Veolia Environnement s'élevant à 32,628 milliards d'euro en 2007, le Conseil ayant de surcroît utilement rappelé que, pour sa part, CFTI avait réalisé un chiffre d'affaires de 74 565 045 euro durant l'exercice 2007, dernier exercice clos;

- qu'en fonction des éléments généraux et individuels constatés précédemment, il convenait de lui infliger une sanction pécuniaire de 700 000 euro;

Que, contrairement à ce que soutient la requérante, le Conseil n'était pas tenu par surcroît en vertu de l'article L. 464-2 du Code de commerce, au titre de la détermination individuelle de la sanction, de justifier également celle-ci au regard d'une comparaison opérée avec les sanctions dont il a frappé les autres entreprises poursuivies, étant au demeurant observé que les sociétés Transdev Alpes, Voyages Dunand et Voyages Crolard ainsi que la société Cars Philibert, qui avaient décidé de ne pas contester les griefs et sollicité l'application des dispositions du III de l'article L. 462-2 du Code de commerce ont bénéficié d'une réduction de la sanction ;

Qu'en ce qui concerne le montant maximum du chiffre d'affaires devant être pris en considération pour le calcul de la sanction, il résulte de l'article L. 464-2 du Code de commerce qu'aucune distinction ne doit être opérée quant aux branches d'activité de l'entreprise, et qu'on ne saurait dès lors restreindre, comme le prétend CFTI, le chiffre d'affaires de référence à une catégorie de clientèle déterminée;

Qu'au surplus, la requérante n'est pas fondée à solliciter une réduction du montant de la sanction en invoquant le fait qu'à la différence de certaines entreprises sanctionnées elle répond pour sa part, dans des conditions qu'elle estime défavorables, de pratiques mises en œuvre par un établissement secondaire, alors qu'il s'agit de l'organisation interne du groupe librement fixée par ses dirigeants;

Considérant qu'en l'état de l'ensemble des éléments d'appréciation généraux et individuels ci-dessus indiqués, la sanction pécuniaire infligée à la société CFTI est proportionnée à la gravité des faits reprochés, à l'importance du dommage causé à l'économie et à la situation de l'entreprise sanctionnée, notamment de son comportement;

Que le recours sera rejeté;

Par ces motifs, Rejette le recours, Condamne la société Compagnie française de transports interurbains aux dépens.