CA Paris, 25e ch. B, 3 juillet 2009, n° 06-10552
PARIS
Arrêt
Confirmation
PARTIES
Demandeur :
Anaik Descamps (SA)
Défendeur :
Rousseaux Confection (SARL), Frys (Epoux)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Jacomet
Conseillers :
MM. Laurent-Atthalin, Schneider
Avoués :
SCP Mireille Garnier, SCP Grappotte-Benetreau-Jumel
Avocats :
Mes Deschryver, Loubeyre
La cour est saisie de l'appel, déclaré le 15/06/2006, d'un jugement rendu le 29/03/2006 par le Tribunal de commerce de Paris.
L'objet du litige, porte principalement sur la demande de la SARL Rousseaux Confection et des époux Frys, pris en leur qualité de gérant et titulaire de parts, dirigée contre la SA Anaik Descamps en indemnisation du préjudice subi pour avoir mis fin de manière brutale et abusive et sans préavis à une relation commerciale établie depuis trente ans consistant à fabriquer des sacs en tissus pour la SA Hermès dans le cadre d'une relation de sous-traitance de second rang, étant observé que du fait que la totalité de son activité étant réservée à la SA Anaik Descamps, cette rupture des relations contractuelles est à l'origine de la cessation de fait de son activité.
Madame Rousseaux a créé et exploité depuis novembre 1974 un fonds de commerce de confection à façon et dans le cadre de cette activité elle se serait spécialisée dans la fabrication de sacs en toile pour différentes marques et notamment, selon diverses attestations, pour la SA Anaik Descamps ce que confirment divers bons de commandes à en-têtes de cette société émis entre 1990 et 1992 et un tarif annoté de l'année 1990 émanant de cette même société. Ce fonds de commerce a été acquis le 01/09/1974 lorsque s'est constituée la SARL Rousseaux Confection dont Ludovic Frys sera le gérant étant observé que cette société dont l'activité était la conception, la fabrication et la confection de tous articles en textiles, notamment en sous-traitance, a commencé son exploitation le 01/07/1994 et que dès sa constitution, elle a établi une relation commerciale avec la SA Anaik Descamps ainsi qu'il résulte de factures adressées par elle à cette dernière les 13, 27 septembre et 1er octobre 1994. Selon ces documents qu'elle produit quant à l'évolution du chiffre d'affaires qu'elle réalisait avec ses clients, celui réalisé avec la société Anaik Descamps était de l'ordre de 51 % en 1997, 58 % en 1998, 58 % en 1999, étant observé que cette évolution révèle un chiffre d'affaires total en augmentation réelle en 1999, deux autres principaux clients pour les deux dernières années, les sociétés Des Forges et Décathlon et une diminution du nombre de clients qui de 18 en 1997 sera ramené à 10 en 1999. Cette évolution se confirmera en 2000, année au cours de laquelle le chiffre d'affaires global de la SARL Rousseaux Confection est en progression sensible en 2001, 2002, 2003, étant observé que le chiffre d'affaires global de la SARL Rousseaux Confection qui était de l'ordre de 3 000 000 euro en 2000 sera ramené à un montant de l'ordre de 2 200 000 euro pour les deux dernières années supérieur cependant à celui de 1997 tandis que le nombre de clients passera de 6 à 3 et que le pourcentage du chiffre d'affaires réalisé avec la SA Anaik Descamps atteindra successivement 85 % (2001), 98 % (2002) et 99 % en 2003.
Un contrat-cadre de fabrication, négocié entre les parties à partir de 2000 comme le confirme un projet du 14/02/2000, sera conclu le 21/08/2002.
Ce contrat stipulait entre autres dispositions :
- la remise par la SA Anaik Descamps, donneur d'ordre, à la SARL Rousseaux Confection, confectionneur, pour fabrication de certains articles de sa collection (article 1) selon deux commandes par an dans des délais précisés à livrer une fois par semaine (article 2) selon des prix fixés annuellement (article 3), le donneur d'ordre étant garant des composants fournis que le confectionneur devra contrôler à réception et en cours de fabrication (article 4), le confectionneur réalisant pour chaque nouveau modèle un prototype contrôlant la fabrication avant livraison, avisant le donneur d'ordre de toute difficulté de fabrication en arrêtant immédiatement la production qui ne reprendra qu'après concertation, après visite éventuelle sur place du donneur d'ordre, réparant après contrôle chez le client les articles défectueux qui lui sont retournés, et s'engageant à souscrire une police d'assurance le garantissant pour les risques de destruction, de vol pour quelque cause que ce soit de même que pour tous risques de malfaçons et défaut de toutes sortes de produits dont il justifiera à première demande du donneur d'ordre (article 5),
- un droit de propriété intellectuelle de la SA Anaik Descamps pour les modèles originaux qu'elle crée et que le confectionneur ne peut reproduire qu'aux conditions convenues (article 6),
- une résiliation de plein doit sans indemnité pour la partie défaillante pour manquement aux obligations contractuelles auquel il ne sera pas remédié quinze jours après réception d'une LLRAR portant notification de griefs reprochés (article 7),
- en cas de terminaison du contrat, la remise par le confectionneur qui établira un inventaire de tous produits contractuels (article 8),
- l'intransmissibilité à raison du caractère intuitu personae du contrat portant interdiction au confectionneur de transférer ou de sous-traiter les obligations à sa charge sans autorisation écrite préalable du donneur d'ordre (article 9).
Il ressort des correspondances échangées que, dans ce cadre, la SARL Rousseaux Confection fabriquait essentiellement divers modèles de trousses de toilette dont la trousse Deauville et de sacs fourre-tout.
Si, avant la signature de ce contrat, certains reproches avaient été formés contre la SARL Rousseaux Confection quant à la qualité de sa fabrication (29/02, 30/06, 05/07/2000 et 26/03/2001), des lettres et rapports de la SA Anaik Descamps, qui revendique son souci de former son sous-traitant (stage à la formation qualitative du 15/12/2000 au 30/06/2001 évoqué par l'organisme formateur dans une lettre du 15/10/2005 à Anaik Descamps) lui expriment sa satisfaction quant à la belle qualité (18/03/2002), la confection impeccable (09/03/2001), le niveau de qualité atteint (18/03/2001).
A la demande de la SA Anaik Descamps, la SARL Rousseaux Confection faisait parvenir le 25/10/2002 une fiche d'identité la concernant précisant notamment que 100 % de son chiffre d'affaires était réalisé pour Anaik Descamps : Hermès.
Le 23/01/2003, la SA Anaik Descamps adressait à tous les confectionneurs une liste non exhaustive des défauts le plus souvent rencontrés en 2002 tandis que le 24 janvier 2003 se tenait une réunion regroupant fournisseurs et confectionneurs Hermès Anaik Descamps au cours de laquelle étaient examinés les résultats de l'année écoulée et les perspectives pour l'année 2003, de même, le compte-rendu établi par la SA Anaik Descamps d'une réunion du 2002/2003 mettait en évidence les difficultés techniques et le pourcentage important de retour affectant les "pressions" mais ne s'évince de ces documents aucune formulation de reproches à la SARL Rousseaux Confection.
Divers reproches ont en revanche été formulés par la SA Anaik Descamps à l'encontre de la SARL Rousseaux Confection :
- absence d'assurance pour malfaçon (18/03/2003) ce qui conduira la SA Rousseaux Confection à supporter la destruction de 412 sacs Hermès,
- qualité des surpiqûres (lettre du 24/10/2002),
- retards de livraison à partir de mars 2003 de l'ordre de quinze jours (05/05 et 21/05/2003),
- refus en mars 2003 de sacs, même de second choix, par la société Hermès à raison de malfaçons non discutées qui contraindra la SARL Confection Rousseaux, à raison de son défaut d'assurance pour ce risque, à indemniser la SA Hermès par un chèque de 4 766 euro et la SA Anaik Descamps, par lettre du 18/07/2003, à rappeler les défauts jugés inacceptables par la société Hermès et les exigences de qualité à respecter et à demander à la SARL Confection Rousseaux d'y remédier de manière visible,e
- taux de non qualité le plus faible des confectionneurs pour l'année 2003 (lettre du 21/12/2003) avec notamment un taux de retour de 27,65 % pour le mois de juillet 2003 alors qu'à l'exception d'un confectionneur (21 %) tous les autres avaient un taux de retour inférieur à 10 %.
La SARL Rousseaux Confection justifie par des commandes ponctuelles de quatre clients, entre avril et juin 2003, pour des montants compris chacune entre 111 et 538 euro.
Il résulte de divers courriels que courant septembre 2003, la SARL Rousseaux Confection avait indiqué ne pouvoir s'adapter à une baisse d'activité de plus de 20 % (courriel du 02/09/2003 en réponse de la société Anaik Descamps), que le 10/09/2003 informée de la cessation de toute commande, elle avait souhaité une notification officielle, que le 11/09/2002, la SA Anaik Descamps lui faisait parvenir une nouvelle commande pour novembre et décembre 2002 en se référant à la baisse d'activité et à la nécessité de réadapter la commande de son propre client en concluant "en revanche, nous n'avons aucune charge de travail à vous confier après le mois de décembre 2003. Nous sommes réellement désolées des conséquences fâcheuses que cela entraîne".
Répondant au reproche de qualité défectueuse de fabrication et de retard se rapportant à des trousses de toilette, la SARL Rousseaux Confection indiquait le 21/10/93 qu'il serait catastrophique de transférer cette production ailleurs tandis que le 15/12/2003, la SA Anaik Descamps prenait acte du refus de la SARL Rousseaux Confection de démarrer la production des toiles H Légère dont cette dernière soutient qu'il s'agit d'un produit nouveau - décidait de les transférer chez un autre confectionneur et sollicitait la restitution des composants puis indiquait dans une note interne du 21/12/2003 que la SARL Rousseaux Confection n'ayant pu terminer son planning, elle procédait au transfert de l'activité des dernières trousses de toilette ce qu'elle confirmait le 06/01/2004 dans une nouvelle note interne en soulignant la situation difficile provoquée ainsi par la SARL Rousseaux Confection pour ne pas avoir terminé les commandes en cours portant sur ces trousses de toilette. Il résulte par ailleurs de divers courriels et lettres que la SARL Rousseaux Confection avait mis en œuvre le licenciement de son personnel dès le 30/09/2003 (convocation à l'entretien préalable), neuf licenciements étant intervenus en décembre 2003 pour des salariés dont les contrats à durée indéterminée remontaient pour les plus anciens à 1980, 1983,1984 et étaient toujours antérieurs au contrat litigieux du 21/08/2002 et adressé à la SA Anaik Descamps que cette démarche suspendra le 05/12/2003 la liste du matériel à reprendre et à diffuser aux confectionneurs.
Par acte du 05/05/2004, la SARL Rousseaux Confection délivrait l'assignation à l'origine du jugement déféré.
Le tribunal a statué ainsi qu'il suit:
- condamne la SA Anaik Descamps à payer la somme de 112 500 euro à la SARL Rousseaux Confection et déboute cette dernière du surplus de ses demandes,
- déboute les époux Frys de l'ensemble de leurs demandes,
- déboute la SA Anaik Descamps de sa demande de ce qu'il soit donné acte de ce qu'elle se réserve d'engager toute procédure enréparation du préjudice subi par suite de l'arrêt brutal de la production par la SARL Rousseaux Confection alors même que des commandes restaient en cours,
- condamne la SA Anaik Descamps à payer à la SARL Rousseaux Confection la somme de 2 000 euro et à régler les dépens,
- ordonne l'exécution provisoire à charge pour la SARL Rousseaux Confection d'obtenir une caution bancaire.
Au soutien de sa décision, il a notamment retenu que:
- la SA Anaik Descamps n'a pas mis en œuvre la clause de résiliation stipulée pour défaillance d'une partie dans l'exécution de ses obligations dans le contrat de fabrication du 21/09/2002 la liant à la SARL Rousseaux Confection,
- après avoir déploré retards et malfaçons et relevé que la SARL Rousseaux Confection était le plus mal noté de ses confectionneurs, la SA Anaik Descamps l'a avisée le 11/09/2003 d'une baisse d'activité continue qui, si elle permettait de fabriquer en novembre, excluait de lui confier une quelconque charge de travail après le mois de décembre 2003,
- cette rupture de fait des relations ouvre droit au préavis qui est fonction de la durée de ces relations qui est fixée à 9 ans puisque si la SARL Rousseaux Confection se prévaut d'une relation de 30 ans, elle revendiquait dans son assignation sa création en 1994 et le préavis est fixé à 9 mois pour tenir compte du caractère semestriel des collections et de la notification en septembre 2003 d'un arrêt de l'activité en décembre 2003,
- si la SARL Rousseaux Confection revendique une marge brute annuelle de 300 000 euro sur la base d'un chiffre d'affaires en 2002 et 2003 de l'ordre de 381 000 euro et 318 000 euro cette marge ne saurait excéder la somme de 150 000 euro en sorte que l'indemnité de ce chef est fixée à 112 500 euro,
- la SARL Rousseaux Confection ne caractérise pas les préjudices suivants :
* remboursement des pertes (79 371 euro) dès lors que ces pertes résultent des licenciements et ventes de matériel effectués par la SARL Rousseaux Confection, le dernier quadrimestre 2003 en raison de la part quasi-exclusive de son activité de fabrication au profit de la SA Anaik Descamps, que cette dépendance économique résulte des choix des dirigeants de la SARL Rousseaux Confection et que ces pertes ne sont pas imputables à la SA Anaik Descamps,
* perte du gain manqué pendant deux ans (600 000 euro) déjà couverte par l'indemnité de préavis.
Les époux Frys ne sont pas fondés à réclamer leur indemnisation au titre des pertes de capital, dividendes et rémunérations en l'absence d'admission au bénéfice d'une procédure collective de la SARL Rousseaux Confection et du fait que les pertes invoquées sont consécutives aux risques assumés par un chef d'entreprise actionnaire de la société.
La SA Anaik Descamps, qui ne caractérise pas le préjudice résultant de l'arrêt brutal par la SARL Rousseaux Confection de la production alors que des commandes étaient en cours, ce préjudice n'étant pas démontré et découlant de l'absence de commande par la SA Anaik Descamps à la fin de l'année 2003, est déboutée de sa demande de ce chef et il n'y a pas lieu de lui donner acte de ce qu'elle se réserve d'engager toute procédure à ce titre contre la SARL Rousseaux Confection.
La SA Anaik Descamps, appelante au principal, intimée incidemment, demande à la cour de:
- confirmer le jugement en ce qu'il a débouté les époux Frys de leurs demandes,
- l'infirmer sur la condamnation prononcée au titre de l'indemnité de préavis et sur le refus de donner l'acte qu'elle réclamait,
- débouter la SARL Rousseaux Confection et les époux Frys de leurs demandes,
- lui donner acte de ce qu'elle se réserve d'engager toute procédure en réparation du préjudice subi par suite de l'arrêt brutal de la production par la SARL Rousseaux Confection alors que des commandes étaient en cours,
- condamner in solidum la SARL Rousseaux Confection à lui payer une somme de 15 000 euro au titre de l'article 700 du Code de procédure civile et à régler les dépens de première instance et d'appel.
La SARL Rousseaux Confection et les époux Frys, intimés au principal, appelants incidemment, demandent à la cour de:
- porter l'indemnité de préavis au montant de 75 0000 euro,
- dire que la SARL Rousseaux Confection n'encourt aucune responsabilité dans la situation de dépendance économique où elle se trouvait à l'égard de la SA Anaik Descamps que cette dernière a créée,
- condamner la SA Anaik Descamps à payer à la SARL Rousseaux Confections :
* la somme de 78 773,05 euro au titre des pertes subies,
* la somme de 300 000 euro au titre du gain manqué,
- condamner la SA Anaik Descamps à payer aux époux Frys :
* la somme de 7 522,45 euro au titre de la perte du capital,
* la somme de 160 000 euro au titre de la perte de dividendes sur deux ans,
- condamner la SA Anaik Descamps à payer à Ludovic Frys au titre de perte de rémunération la somme de 101 288 euro,
- ordonner le paiement des intérêts à compter de la date d'introduction de la demande du 05/05/2004 et leur capitalisation dans les termes de l'article 1154 du Code civil,
- condamner la SA Anaik Descamps à leur payer à chacun une somme de 15 000 euro au titre de l'article 700 du Code de procédure civile et à régler les dépens de première instance et d'appel.
Sur ce
Considérant que pour critiquer le jugement sur les condamnations prononcées contre elle, la SA Anaik Descamps prétend que :
- elle est, comme la SARL Rousseaux Confection, sous-traitante de la société Hermès pour une activité de fabrication et distribution d'articles de luxe notamment en matière de textile et de maroquinerie mais que ses relations avec la société Hermès s'analysent plutôt en une relation de partenariat dans laquelle elle dédie une partie de son personnel à la production Hermès faisant appel à des façonniers au nombre desquels la SARL Rousseaux Confection pour l'exécution des commandes de la société Hermès, forme et conseille ces façonniers, lesquels sans ces conseils ne sauraient fabriquer correctement les commandes qui lui sont passées, et à cette fin, communique avec eux, par écrit chaque mois, par des rencontres plusieurs fois par mois et démontre par sa commande l'évolution du marché,
- la réunion du 24/01/2003 s'inscrit dans le cadre de la crise mondiale de l'industrie du luxe depuis 2001, la suppression à terme de la vente des sacs en toile qui était l'objet de son activité comme celle de son sous-traitant,
- elle a été amenée à constater de nombreux manquements de la part de la SA Rousseaux Confection:
* défaut d'assurance adaptée à l'occasion des malfaçons affectant le sac Deauville Caban (avril 2003),
* non-respect des délais,
* problème qualité,
* absence d'investissement dans la relation,
* défaut d'information sur la part prépondérante qu'elle prenait dans le chiffe d'affaires de son sous-traitant et absence de diversification de l'activité de ce dernier et d'élargissement de son portefeuille de donneurs d'ordre,
- la SARL Rousseaux Confection a pris l'initiative de la fin des relations contractuelles dès lors que:
* elle n'ignorait pas depuis la réunion de janvier 2003 la spécificité et la fragilité de la situation,
* elle n'a pas su s'adapter à la commande passée en septembre 2003, a indiqué le 15/12/2003 se refuser à démarrer la production des toiles H légères, ne terminait pas les commandes planifiées, ce qu'elle constatait le 22/12/2003 mais choisissait en réalité d'arrêter immédiatement son activité ce que révèle la mise en œuvre dès octobre 2003 du licenciement de son personnel,
* les dispositions de l'article L. 442-6-I-5° du Code de commerce ne peuvent être appliquées à son encontre dès lors que:
* la durée des relations est de dix ans, la SARL Rousseaux Confection, créée en 1994, ne démontrant pas la reprise des engagements antérieurs et les attestations produites étant dénuées de pertinence,
* une relation de sous-traitance de second rang pour un seul produit et eu égard aux commandes variables est exclusive d'une relation établie et stable,
* la brutalité de la rupture n'est pas caractérisée au regard de l'information donnée lors de la réunion de janvier 2003, des efforts faits par elle pour tenir compte de la situation de chaque confectionneur, de la volonté de la SARL Rousseaux Confection de cesser son activité à raison de la perte des aides accordées aux entreprises installées en zone franche,
* la rupture n'est pas abusive de son fait dès lors que :
* de nombreux manquements justifiaient cette rupture sans préavis,
* la situation de dépendance résulte du choix des dirigeants de la SARL Rousseaux Confection, aucun abus de cette dépendance n'étant démontré,
* la spécialisation de l'outil ne résulte pas de ses propres exigences alors qu'elle s'est bornée à transmettre son savoir-faire,
* elle ne pouvait sous-traiter des commandes qu'elle n'avait pas ; l'absence de commande de la société Hermès étant constitutive du fait d'un tiers au sens de l'article 1148 du Code civil ;
Considérant que la SARL Rousseaux Confection réplique que :
- les dispositions de l'article L. 442-6-I-5° du Code de commerce sont applicables, la lettre du 11/09/2003 constituant une rupture brutale et sans préavis dès lors que :
* elle ramenait à 80 % le niveau des commandes pour la saison été 2004 et les supprimait pour la collection hiver 2004,
* cette lettre ne comportait aucun préavis écrit ce que revendique la SA Anaik Descamps elle-même,
* la SA Anaik Descamps ne peut se prévaloir d'aucun fait justificatif dès lors que:
* elle n'a pas mis en œuvre la clause contractuelle de résiliation et que les manquements allégués doivent à cet effet revêtir un caractère suffisant de gravité,
* les défaillances techniques et l'inobservation des délais n'ont pas été suffisamment caractérisés, ceux-ci étant inévitables ce que confirme le contrat en prévoyant une procédure spécifique de réparation tandis que dans les relations antérieures, elles n'ont jamais été sanctionnées,
* elle a justifié d'une assurance adaptée tandis que ce motif n'avait jamais été invoqué pour justifier la rupture, étant observé qu'elle a seule supporté les conséquences du litige Deauville Caban rencontré en 2003,
* aucune situation de force majeure n'a été caractérisée dès lors que cette preuve incombe à la SARL Anaik Descamps, que cette dernière n'a jamais invoqué une baisse de commandes pour justifier la résiliation, qu'elle était fabricant pour de nombreuses autres enseignes, l'évolution du marché était favorable tant au plan général que pour la situation particulière d'Hermès,
* en réalité, la SA Anaik Descamps avait seulement décidé de l'évincer,
* la rupture est abusive à raison de :
* la spécialisation de l'outil de production tenant à la proximité géographique, l'acquisition d'entrepôts, l'investissement dans du matériel adapté, mobilisant la totalité de sa production, ce dont la société Anaik Descamps était informée depuis le 23/10/2002,
* la dépendance technique à l'égard de la société Anaik Descamps au regard des contrôles effectués par cette dernière qui la revendique ce que confirme son site Internet,
* la dépendance juridique au regard des stipulations contractuelles : contrôle, confidentialité, intransmissibilité se rapportant à une activité entièrement dédiée lui interdisant de reprendre sa liberté,
* la dépendance économique, sur les conséquences de laquelle son attention n'avait pas été appelée à raison de la saturation de l'outil de production par les commandes de la société Anaik Descamps, des prix imposés,
* l'absence d'aide, d'accompagnement et de la loyauté dans la rupture, alors qu'elle acceptait d'aider certains confectionneurs sans qu'il puisse lui être opposé de manière inepte et cynique qu'elle a choisi d'arrêter son activité étant précisé qu'elle a poursuivi loyalement l'exécution de commandes en cours, qu'il était légitime qu'elle refuse la fabrication d'un nouveau produit à perte,
- la rupture étant brutale et soudaine - la lettre du 11/09/2003 comportant une cessation immédiate et définitive de toutes relations - n'ayant été précédée d'aucune annonce ni consultation qui ne saurait se déduire de la réunion générale du 24/01/2003 qui confirmait la mobilisation de tous les partenaires dans une phase conjoncturelle d'augmentation du marché en constatant expressément une progression des quantités globales ;
Considérant que, nonobstant les stipulations contractuelles, que dans le cadre d'une relation contractuelle de durée indéterminée, chacune de parties peut y mettre fin sans justifier d'un motif, sauf abus, tandis que selon l'article L. 442-6-I-5° du Code de commerce dans sa rédaction issue de la loi de 2001 "engage la responsabilité de son auteur et l'oblige à réparer le préjudice causé le fait de tout producteur, commerçant, industriel (...) de rompre brutalement, même partiellement, une relation commerciale établie sans préavis écrit tenant compte de la durée de la relation commerciale et respectant la durée minimale de préavis, déterminée, en référence aux usages du commerce, par des accords interprofessionnels (...). Lorsque la relation commerciale porte sur la fourniture de produits sous marque de distributeur, la durée est double de celle qui serait applicable si le produit n'était pas fourni sous marque de distributeur (...). Les dispositions qui précèdent ne font pas obstacle à la faculté de résiliation sans préavis en cas d'inexécution pour l'autre partie de ses obligations ou en cas de force majeure" ;
Considérant qu'il n'est pas utilement contredit et résulte du contrat de fabrication du 21/08/2002 liant les parties que leur relation contractuelle était à durée indéterminée ;
Considérant qu'il est tout aussi constant que la fin des relations contractuelles est intervenue en dehors de la mise en œuvre de la clause contractuelle de résiliation pour défaillance dans l'exécution de ses obligations ;
Considérant que les parties discutent sur le point de savoir si la lettre du 11/09/2003 mettait fin ou non aux relations contractuelles et sur le point de savoir laquelle d'entre elles est à l'origine de la rupture des relations contractuelles ;
Considérant que, en raison de ces termes, excluant toute discussion ou négociation, notifiant une livraison en novembre 2003, dont les parties s'accordent à dire qu'elle constituait une réduction de 80 % par rapport à la situation antérieure et l'absence de toute commande à partir de décembre 2003, la SA Anaik Descamps mettait manifestement fin aux relations contractuelles sans pouvoir utilement soutenir qu'elle entendait maintenir une relation contractuelle pour l'avenir que cette lettre n'invoquait pas et que l'absence de toute commande en décembre 2003 et donc pour la totalité de la collection de l'hiver 2004 excluait alors surtout que la SA Anaik Descamps soutient essentiellement que cette décision était liée à celle de la SA Hermès de supprimer à terme la ligne de fabrication de sacs en toile pour laquelle, elle-même comme la SARL Rousseaux Confection, intervenaient comme sous-traitante ;
Considérant que la comparaison des dates démontre amplement que ce n'est que postérieurement à cette lettre du 11/09/2003 et à la notification qu'elle comportait que la SARL Rousseaux Confection a mis en œuvre les mesures de cessation de son activité de sous-traitance en engageant les procédures de licenciement de son personnel technique dès le mois d'octobre 2003, en refusant en décembre 2003 d'accepter au titre de l'exécution des contrats en cours la fabrication d'un produit nouveau et en procédant en décembre 2003 à la cession de son matériel de fabrication ;
Considérant qu'il s'ensuit que, par la lettre du 11/09/2003, la SA Anaik Descamps a incontestablement pris l'initiative de mettre fin aux relations contractuelles ;
Considérant qu'il est tout aussi manifeste que cette lettre ne comportait aucun préavis puisque la commande résiduelle emportant une livraison en novembre exprimait une rupture partielle immédiate et qu'il ne résulte d'aucun autre élément que cette lettre avait été précédée d'une annonce dont puisse résulter la notification d'un préavis écrit, qu'à cet égard, il ne peut être excipé des informations résultant de la réunion du 24/01/2003, étant observé qu'il est simplement produit le programme simplifié de cette réunion et non les décisions prises et que cette réunion à caractère général avait simplement pour objet d'examiner les perspectives à venir et de mobiliser les partenaires dont les confectionneurs et non de leur notifier une quelconque décision quant au maintien immédiat ou non de leur relation contractuelle ;
Considérant que la SA Anaik Descamps discute vainement l'existence d'une relation commerciale établie, d'une part, au regard du contrat dont s'agit qui ne s'analyse nullement en une relation ponctuelle mais visait à développer des relations suivies à caractère intuitu personae dans le cadre d'une relation indéterminée étant observé que la SA Anaik Descamps revendique fortement son souci de former le confectionneur et de lui communiquer son savoir-faire ce qu'une relation ponctuelle priverait de sens, d'autre part, que par la généralité de ses termes, le texte précité n'exclut pas d'une relation commerciale établie, une relation de sous-traitance qui est une forme juridique organisée d'exécution des obligations contractuelles laquelle peut recouvrer des situations profondément différentes et s'inscrire tout à la fois dans un cadre ponctuel exclusif d'une relation établie mais aussi dans le cadre de relations ayant vocation à se maintenir et à se développer de manière durable, constitutives en tout état de cause de relations établies, de troisième part, que tel était précisément le cas au regard de la situation de fait découlant des stipulations contractuelles, du choix de la durée indéterminée de la relation, de la revendication de formation de divulgation d'un savoir-faire de la SA Anaik Descamps, des contrôles que les stipulations contractuelles imposaient, du courant d'affaires sur lequel il a porté dès l'origine ;
Considérant qu'il n'y a pas lieu de faire remonter la relation établie à l'année 1974, comme le revendique la SARL Rousseaux Confection en se prévalant pour l'essentiel de ce que la SARL Rousseaux Confection n'a fait que continuer sous la même forme le fonds de commerce qu'elle a repris exploité précédemment par Mme Rousseaux, d'une part, car la reprise d'un fonds de commerce est en elle-même insuffisante pour déterminer la poursuite d'une relation établie qui est une situation de fait, d'autre part, parce que les attestations produites ne peuvent en l'espèce qu'être admises avec réserves en raison de l'ancienneté des faits auxquels elle se rapportent, de la date à laquelle elles ont été établies et du lien de leurs auteurs avec l'une des parties, de troisième part, parce que l'ancienneté des contrats de certains salariés que révélera leur licenciement n'est pas non plus déterminante, de quatrième part, parce qu'il n'est justifié par les pièces produites de relations et de commandes de la part de la SA Anaik Descamps qu'à compter de 1990 pour des montants limités et enfin, car n'est produit aux débats aucun élément objectif et notamment un contrat de nature à expliciter la relation alors établie alors qu'au regard de la durée d'une relation établie résultant en l'espèce d'un contrat de fabrication, il incombe à la SARL Rousseaux Confection, qui échoue dans cette démonstration, d'établir que les relations entretenues avec son prédécesseur étaient, à tout le moins, et dans les faits, similaires ;
Considérant que si le contrat de fabrication a été conclu le 21/08/2002, il est néanmoins justifié de faire remonter la relation commerciale établie à la date de création de la SARL Rousseaux Confection, d'une part, parce que les comptes produits mettent en évidence une permanence du volume d'affaires dès l'origine, et d'autre part, car dans ses dernières écritures, la SA Anaik Descamps admet de façon indiscutable cette date en indiquant, pour s'opposer à la date revendiquée de 1974, que la SA Rousseaux Confection ayant été créée en 1994, "la durée des relations entre les parties s'entend donc d'un durée de dix ans" ;
Considérant que la rupture est brutale et soudaine au sens du texte précité du seul fait qu'elle n'a comporté la notification d'aucun préavis écrit ;
Considérant que pour s'opposer à l'application du texte précité et à la responsabilité qu'elle encourt, la SA Anaik Descamps excipe d'abord de ce que la fin de relations contractuelles résultait du fait d'un tiers dans la mesure où elle-même sous-traitante de la SA Hermès, elle ne pouvait passer des commandes qu'elle n'avait pas ;
Considérant que cette argumentation est vaine, dès lors, d'une part, que le fait d'un tiers exonératoire de responsabilité doit revêtir le caractère d'une force majeure constituée par son extériorité et son irrésistibilité, d'autre part, que cette extériorité ne saurait résulter d'une décision prise à raison de l'évolution du marché à l'égard du sous-traitant de premier rang engagé à l'égard du sous-traitant de second rang, par son propre donneur d'ordre ayant donc la qualité de maître de l'ouvrage auquel elle était contractuellement liée tant à raison de la finalité contractuelle unique que constituent l'ensemble de ces liens contractuels que parce que les conditions économiques de l'exécution des prestations contractuelles et donc leur évolution sont le cadre même de l'exécution des stipulations contractuelles, d'autre part, car n'est établie par aucune pièce la suppression de toute commande de la fabrication litigieuse par la SA Hermès à la SA Anaik Descamps ou, même, une réduction de ces mêmes commandes à la date du 11/09/2003 en sorte que cette dernière s'est bornée à anticiper une décision qui n'avait pas encore été prise, de troisième part, car l'évolution du volume de commandes au regard de la nature et de l'objet du contrat entre les deux sous-traitants et des stipulations contractuelles dont résultent une négociation annuelle à cet égard n'est pas en elle-même un événement irrésistible qui ne pouvait être prévu et enfin, car, en tout état de cause, la SA Anaik Descamps qui revendique l'exécution des prestations sous-traitées par une douzaine de confectionneurs ne justifie d'aucune discussion avec l'ensemble de ces confectionneurs pour tenter de répartir entre eux la charge d'une éventuelle réduction du niveau des commandes que lui passait la SA Hermès ;
Considérant que pour s'opposer encore à ce que sa responsabilité soit retenue sur la base du texte précité, la SA Anaik Descamps excipe de divers manquements contractuels commis par la SARL Rousseaux Confection ;
Considérant que les manquements contractuels, pour justifier une résiliation sans préavis doivent être d'une gravité telle qu'elle impose la cessation immédiate du lien contractuel tandis que lorsque la relation contractuelle procède d'un nouveau contrat ou du renouvellement d'un contrat antérieur, seuls peuvent être utilement invoqués, à cet égard les griefs résultant de manquements contractuels commis dans le cadre de l'exécution du nouveau contrat ou du contrat renouvelé ;
Considérant que, par suite, ne peuvent être utilement invoqués les griefs antérieurs au 21/08/2002, date à laquelle a été conclu entre les parties le contrat litigieux après que des relations contractuelles ont été entretenues depuis 1994 sur des bases non précisées ;
Considérant qu'il s'évince des griefs allégués que ceux-ci n'ont été formulés qu'à partir de mars 2003 et consistent dans l'absence de justification d'une assurance adaptée à la couverture d'une mauvaise exécution, de la fabrication, à une qualité insuffisante des prestations, au non-respect des délais, à la non-information de ce que la quasi-totalité du chiffre d'affaires de la SARL Rousseaux Confection était réalisé avec elle, au non-redéploiement de cette activité vers d'autres fournisseurs, de l'absence d'investissement dans la relation ;
Considérant qu'il est constant que la SA Anaik Descamps n'a pas mis en œuvre la clause contractuelle de résiliation pour défaillance de la SARL Rousseaux Confection dans l'exécution de ses obligations et qu'elle n'a pas invoqué ces griefs dans la lettre dans la lettre du 11/09/2003 mettant fin aux relations contractuelles ce qui ne la prive pas pour autant de s'en prévaloir au regard du texte précité pour tenter de justifier une résiliation sans préavis dans la mesure où ces griefs seraient d'une gravité suffisante pour entraîner non seulement la fin des relations contractuelles mais leur cessation immédiate sans aucun préavis ;
Considérant que le grief tiré de ce que la SARL Rousseaux Confection n'aurait pas informé la SA Anaik Descamps de ce que la quasi-totalité de son chiffre d'affaires était réalisé par elle et celui de son redéploiement de son activité vers d'autres fournisseurs sont liés, qu'ils ne sont pas suffisamment établis dès lors qu'il incombe à une entreprise commerciale de déterminer sa propre politique commerciale dans le respect des stipulations contractuelles, que ces dernières n'imposaient aucune information préalable à cet égard, que cette information a été au demeurant donnée en octobre 2002, donc deux mois après la conclusion du contrat litigieux, dans une fiche d'identité sollicitée par la SA Anaik Descamps qui n'ignorait donc pas cette situation ;
Considérant que sur le grief de défaut de justification d'une assurance adaptée à une mauvaise exécution du fait de ses prestations par la SARL Rousseaux Confection alors que la justification d'une telle garantie était contractuellement exigée il y a lieu de retenir que :
- à la suite d'un contrôle effectué dans les ateliers de la SARL Rousseaux Confection sur la fabrication des sacs Deauville Caban, la SA Anaik Descamps a, le 04/03/2003 à raison des nombreuses malfaçons les affectant suspendu la fabrication par cette dernière, qu'il ressort du compte-rendu de visite de contrôle que la SA Anaik Descamps a alors envisagé la mise en œuvre d'un nouveau modèle et refusé les sacs fabriqués en demandant la destruction à charge pour la SARL Rousseaux Confection d'en préciser le nombre et de chiffrer le coût auprès de son assurance, que la SA Anaik Descamps relevait le 21/03/2003 une quantité de 600 pièces écartées et l'absence d'assurance couvrant le risque malfaçon ce qu'elle avait décelé le 19/03/2003, que, le 16/04/2003, elle indiquait avoir informé la SA Hermès de ce défaut de couverture du risque pour malfaçon laquelle avait décidé de proposer 200 sacs dans la vente de solde annuelle, que le 12/06/2003, la SA Anaik Descamps indiquait que la SA Hermès avait demandé l'incinération des 413 sacs restants en précisant que les frais d'incinération seront répartis entre les trois confectionneurs concernés par ces trois litiges en cours, que le 06/07/2003, la SA Hermès a exigé son indemnisation intégrale du préjudice subi au titre de la destruction des matières premières en ne retenant plus que 381 sacs, soit un montant de 4 766 euro de la SA Anaik Descamps, que cette dernière avait déjà répercuté cette demande à la SARL Rousseaux Confection, qui a, de fait, suivant chèque non daté, réglé directement à la SA Hermès la somme précitée, que le certificat de destruction se référant à des actes du 30/07/2003 a été établi le 14/05/2003,
- à l'occasion de ce litige la SA Anaik Descamps a demandé, le 18/04/2003, au regard du contrat de fabrication les liant à la SARL Rousseaux Confection de justifier être garantie par une assurance pour le risque malfaçon,
- le contrat de fabrication stipulait (article 5-7) que le confectionneur qui devra en justifier à première demande du donneur d'ordre, "s'oblige à souscrire une police d'assurance auprès d'une compagnie notoirement solvable, garantissant tous risques de destruction ou vol pour quelque cause que ce soit les matières et composants fournis par le donneur d'ordre, de même que tous risques de malfaçons et défauts de toutes sortes de produits",
- la SARL Rousseaux Confection se limite à produire :
* une attestation du 08/12/1999 valable pour la période du 31/10/1999 au 31/10/2000 d'assurance de responsabilité civile de son courtier certifiant que cette dernière société était titulaire au titre d'un contrat G 01215359 d'une garantie responsabilité souscrite depuis le 15/12/1997 couvrant au titre de la responsabilité civile exploitation les dommages matériels et immatériels pour un montant de 4 000 000 FF dont 100 000 FF pour les dommages aux biens confiés s'entendant comme ceux confiés par des tiers par suite de faute ou négligence dans l'exécution des travaux et la conservation aux biens, qu'à cette première garantie s'ajoutait la garantie responsabilité civile après livraison et la garantie protection juridique,
* des extraits des conditions particulières d'un contrat des MMA n° 111 448342 garantissant la SARL Rousseaux Confection pour l'activité de confection sans tricotage, linge de maison, lingerie au titre des garanties suivantes; incendie biens mobiliers d'exploitation et archives, PE marge brute après incendie, RC avant et après livraison - PJ - recours, vols et détérioration sur biens matériels d'exploitation, vols des archives support d'information, bris de glace, bris de machines - matériels d'exploitation, pour un montant, notamment en ce qui concerne l'incendie et les garanties annexes de biens mobiliers d'exploitation, de 132 110 euro ;
Considérant que, en cet état, il importe de relever que les manquements concernant ces sacs ont concerné plusieurs confectionneurs et que la SA Hermès a envisagé d'en supprimer la fabrication ce qui n'exclut pas une difficulté tenant à la conception même de la fabrication de ces sacs, que le dommage effectif de la SA Hermès a été indemnisé directement par la SA Rousseaux Confection tandis que ce grief au regard de l'indemnisation intégrale versée apparaît limité dans son montant, que faute pour la SARL Rousseaux Confection de produire l'intégralité de son contrat d'assurance, que ne verse pas plus aux débats cet assureur à qui il incombe d'établir les limites du contrat d'assurance et la décision de cet assureur, il y a lieu d'admettre que la SARL Rousseaux Confection qui justifie s'être assurée spontanément avant toute réclamation de la SA Anaik Descamps auprès de la MMA pour divers risques et notamment de la responsabilité civile avant et après livraison s'est mépris sur l'étendue de la police souscrite à l'exclusion de tout manquement délibéré, dolosif ou frauduleux et, que si elle ne justifie pas avoir remis l'attestation demandée le 16/04/2003, elle a pu, sans manquement délibéré de sa part, ne pas se sentir concernée par une telle demande adressée de manière générale à tous les confectionneurs sans référence à ce litige précis, alors qu'il était acquis depuis plusieurs semaines que la SA Anaik Descamps savait pour le lui reprocher l'insuffisance de ses garanties ;
Considérant qu'il s'ensuit que le grief ainsi allégué en l'espèce n'est pas d'une gravité suffisante pour avoir exclu tout préavis ;
Considérant que les reproches de non-respect des délais qui reposent sur quelques courriels adressés essentiellement en mars et mai 2003 et non utilement discutés apparaissent ponctuels et, comme tels, insusceptibles de justifier l'exclusion de tout préavis ;
Considérant que le grief tenant la qualité défectueuse de la fabrication tient, en l'espèce, essentiellement au contentieux déjà examiné quant aux sacs Deauville Caban, à un reproche formulé le 16/07/2003 par lequel la SA Anaik Descamps demande qu'il soit remédié immédiatement à la baisse de qualité constatée, à l'évocation de faits de même nature constatés en 2000, 2001, le 24/10/2002 et le 12/05/2003 ;
Considérant que les stipulations contractuelles en évoquant une procédure de traitement des produits de second choix ou défectueux admettent des difficultés à cet égard ce que confirme l'insistance de la SA Anaik Descamps sur les précautions à prendre, les contrôles à effectuer, comme la divulgation en juillet 2003 des défauts que la SA Hermès veut éradiquer comme inacceptables ;
Considérant qu'il a été précédemment indiqué que le contentieux relatif aux sacs Deauville Caban n'excluait pas toute difficulté de conception ;
Considérant qu'est vaine la référence à des griefs antérieurs à la conclusion du contrat de fabrication puisque ceux ci, précisément, n'ont pas fait obstacle à l'établissement de relations contractuelles plus profondes exprimant une confiance maintenue ;
Considérant que ne peut pas plus être retenu un grief formé le 03/06/2004 plusieurs mois après la cessation des relations contractuelles ;
Considérant que le grief formulé le 23/10/2002 n'a pas été suivi de reproches similaires pendant plusieurs mois tandis que la SA Anaik Descamps admet elle-même le caractère exceptionnel de l'année 2002 pour les deux parties ;
Considérant que le grief formulé en mai 2003 se rapporte au contrôle d'une caisse de quinze pièces de trousses de toilette, qu'il relève une amélioration sur certains points et comporte surtout une mise en garde sur le point d'arrêt du croisillon et la nécessité de reprendre le lot avant expédition, qu'il se réfère au contrôle d'une autre série de 10 trousses de toilette en en écartant une et en formulant quelques recommandations, que ce grief paraît, en définitive, ponctuel et limité ;
Considérant que par le message du 18/07/2003, la SA Anaik Descamps formulait une critique générale de baisse de qualité et notifiait à la SARL Rousseaux Confection que ses performances étaient les moins bonnes de tous les confectionneurs ce qu'elle étayait par un document récapitulatif et lui transmettait à nouveau la liste non exhaustive des défauts jugés inacceptables par la SA Hermès avant de conclure en sollicitant que soient prises des mesures immédiates avec effets visibles dès le retour du gérant en précisant que ne pourra plus être toléré l'envoi de produits finis dont la qualité laisse à désirer et dont le contrôle s'est, de toute évidence, éloigné petit à petit de ses exigences, qu'un document récapitulant les performances des confectionneurs et les comparant confirmait que la SARL Rousseaux Confection se situait au dernier rang ;
Considérant que ce message ne comporte aucun nouveau grief mais analyse de manière critique les prestations de la SARL Rousseaux Confection, qu'il a été relevé le caractère ponctuel de plusieurs griefs, que cette analyse prend nécessairement en compte le contentieux des sacs Deauville Caban ce que confirme l'état récapitulatif et comparatif des performances avec une cotation en baisse en mars et avril pour la relation-partenariat qui devient excessivement basse au mois de juillet, août et septembre 2003, qu'il ne peut être en l'état des pièces produites quant à la justification de l'exclusion de tout préavis rien être déduit de ce message dans la mesure où le contentieux ayant opposé les parties relativement aux sacs Deauville Caban ne peut être détaché, que comme il a été dit, il n'a qu'une portée limitée où les mois d'été ne permettaient pas une reprise de relations confiantes ce qui s'évince du message du 16/07/2003 et où à partir du 02/09/2003, la SA Anaik Descamps s'orientait nettement vers la fin des relations contractuelles en sorte que la SARL Rousseaux Confection n'a pas été en mesure de justifier des mesures prises pour remédier à ce grief alors que lors de la notification faite le 18/07/2003, elle envisageait la poursuite des relations contractuelles et non leur rupture ;
Considérant que, sous couvert d'une absence d'investissement dans la relation de la SARL Rousseaux Confection, la SA Anaik Descamps n'allègue aucun grief nouveau précis mais se limite à revendiquer la divulgation de son savoir-faire, son souci de justifier auprès d'un donneur d'ordre son choix d'un confectionneur défaillant, son absence de discrimination à l'égard des différents confectionneurs ;
Considérant qu'il s'ensuit que la SA Anaik Descamps, qui n'établit pas que la résiliation sans préavis était justifiée par une situation de force majeure ou par une inexécution par la SARL Rousseaux Confection de ses obligations contractuelles, était tenue de notifier un préavis écrit d'une durée suffisante tenant compte de la durée de la relation commerciale, que faute d'avoir, ainsi qu'il a été dit, notifié un tel préavis, elle a, de ce seul fait, rompu brutalement et abusivement la relation commerciale et doit réparer le préjudice résultant non de cette rupture qui était l'exercice d'un droit mais du non-respect d'un préavis suffisant ;
Considérant que, au titre de ce préjudice, la SARL Rousseaux Confection réclame :
- une somme de 750 000 euro au titre de la perte de la marge qu'elle aurait pu réaliser pendant la durée du préavis fixée à quinze mois et doublée s'agissant de produits distribués sous la marque Hermès,
- une somme de 78 773,05 euro au titre de l'indemnisation des pertes subies liées directement à l'absence de préavis,
- une somme de 300 000 euro au titre du gain manqué pour n'avoir pu participer au développement de la SA Anaik Descamps ;
Considérant que pour justifier le montant réclamé au titre du gain manqué, la SARL Rousseaux Confection se prévaut de la baisse radicale de son chiffre d'affaires depuis la fin des relations contractuelles qui est passé de 318 000 euro au 31/10/2003 à 60 810 euro, ce montant incluant la vente du matériel au 31/10/2004 puis à 1 178 euro au 31/10/2005 avant d'être ramené à zéro les deux années suivantes et que sans la rupture du contrat, elle aurait poursuivi sa progression et maintenu son activité avec la SA Anaik Descamps ;
Considérant que par une telle argumentation la SARL Rousseaux Confection rattache ce chef de demande non à l'absence de préavis mais à la rupture même du contrat dont elle soutient qu'elle est abusive indépendamment de l'absence de notification d'un préavis écrit, en faisant valoir que :
- cette rupture non motivée lorsqu'elle a été décidée sans que soit mise en œuvre la clause de résiliation n'a été justifiée que par des motifs contradictoires et contraires à la réalité,
- sous l'expression de "la spécialité de l'outil" que, à partir de 1998 elle a réalisé des investissements importants pour acquérir du matériel lui permettant de spécialiser son activité au profit de la seule société Anaik Descamps ce qui caractérise un comportement fautif de cette dernière,
- la SA Anaik Descamps l'a placée et maintenue dans une totale dépendance technique (formation, conseils, contrôles, cahiers des charges imposés), juridique (quasi-exclusivité, intransmissibilité, abus de positon dominante), économique (saturation de son outil de production par les commandes de la SA Anaik Descamps),
- la SA Anaik Descamps a manqué à son obligation d'aide, d'accompagnement et de loyauté dans la rupture,
- la rupture est intervenue de manière soudaine sans être précédée d'aucun avertissement ;
Mais considérant que cette argumentation est vaine, d'une part, car le contractant qui met fin à une relation commerciale à durée indéterminée et qui ne fait qu'exercer un droit n'est tenu d'en donner aucun motif tandis que l'allégation postérieure de motifs qui se révéleraient non fondés, et qu'il incombe au juge de contrôler, n'a pas pour effet de rendre fautive l'exercice de ce droit, d'autre part, que les investissement faits par le contractant pour exécuter ses obligations ne sauraient limiter cette faculté de rompre, de troisième part, parce que la SARL Rousseaux Confection ne peut utilement exciper d'une dépendance économique, juridique, technique, qui résulte de son choix de signer le contrat du 25/08/2002 avec une société dont elle connaissait les exigences pour entretenir avec elle des relations contractuelles depuis plusieurs années, de quatrième part, car cette faculté de rompre n'emporte aucune obligation d'assister celui qui fut son contractant mais lui impose seulement de ne pas commettre d'actes positifs de nature à entraver sa recherche d'autres fournisseurs et enfin parce que le caractère soudain de la rupture relève de l'obligation de respecter un préavis écrit suffisant et ne peut être utilement invoquée pour caractériser un abus distinct et à un double titre ;
Considérant qu'il s'ensuit que la SARL Rousseaux Confection qui ne caractérise aucun autre abus que l'absence d'un préavis écrit ne peut qu'être déboutée de ce chef de demande qui ne s'y rattache pas et qu'elle ne peut solliciter que la réparation des préjudices liés à l'absence de tout préavis et non les dommages résultant de la rupture elle-même ;
Considérant que la SARL Rousseaux Confection sollicite que la durée du préavis à respecter soit fixée à quinze mois en invoquant expressément le doublement du délai pour avoir fourni des produits distribués sous la marque Hermès et en se prévalant de ce que dans une telle situation elle se trouve dans un état de dépendance et de faiblesse le plus grand qui puisse exister en sorte que sa reconversion et la recherche de débouchés nécessitent un délai plus important mais qu'elle réclame une indemnisation de l'absence de tout préavis calculée sur une durée non de quinze mois mais de 30 mois dès lors qu'elle évalue l'indemnité due sur quinze mois à la somme de 375 000 euro mais réclame le double de cette somme ;
Considérant que la SA Anaik Descamps réplique que, en première instance, la règle du doublement n'avait pas été invoquée, qu'elle n'a vocation à s'appliquer que pour donner une protection supplémentaire aux entreprises fournissant les centrales d'achat avec lesquelles elles sont en étroite dépendance, que tel n'est pas le cas en l'espèce, que la SARL Rousseaux Confection était en relation d'affaires avec la seule SA Anaik Descamps qui n'est pas un distributeur de produits confectionnés par elle ni une centrale d'achats ;
Considérant que les dispositions du texte précité relatives au doublement du délai de préavis ne sont pas applicables, dès lors, d'une part, que s'agissant d'un texte d'ordre public et dérogatoire à la durée du préavis à retenir, elles doivent être interprétées restrictivement, d'autre part, que la SARL Rousseaux Confection se limite à fabriquer, suivant une rémunération convenue, à partir des composants qui lui sont fournis suivant les exigences qui lui sont transmises par la SA Anaik Descamps qui répercute celles de son donneur d'ordre la SA Hermès en sorte qu'elle ne vend aucun produit, de troisième part, que la SA Anaik Descamps elle même ne distribue pas les objets ainsi fabriqués mais se limite, en qualité de sous-traitant de premier rang ayant elle-même sous-traité la fabrication des objets, à assumer à l'égard de son donneur d'ordre les obligations liées à cette fabrication, de quatrième part, que la fourniture d'un produit distribué sous marque de distributeur s'apprécie en l'espèce entre les seules parties liées par le contrat de fabrication, seules au demeurant parties à l'instance ;
Considérant que le respect d'un préavis en cas de rupture des relations contractuelles a pour objet d'éviter les conséquences d'un arrêt brutal des relations pour chacune des parties en permettant la poursuite des commandes en cours, le maintien pendant un certain temps d'un volume d'affaires équivalent à celui réalisé avant la rupture et la recherche d'autres contractants pour pallier les conséquences de la rupture, que si l'absence de préavis donne droit à une indemnisation, un préavis a vocation à être exécuté en sorte que la durée du préavis, si elle doit tenir compte de la durée et de la nature des relations, s'apprécie également au regard des possibilités raisonnables d'exécution de ce préavis dans le contexte précis dans lequel est intervenue cette rupture ;
Considérant que le contrat de fabrication dont s'agit portait sur des articles destinés à être distribués sous marque de haute couture selon des collections d'hiver et d'été, en sorte que, pour permettre à un contractant dont le contrat a pris fin de retrouver un autre fournisseur, il importe que la notification du préavis soit faite dans un délai lui permettant de solliciter utilement un ou plusieurs fournisseurs, qu'il n'est pas discutable ce qui n'est d'ailleurs pas contredit, que pour la saison d'hiver les commandes doivent être faites au mois d'avril de l'année précédente et pour celle d'été au mois de septembre de l'année précédente, que lorsqu'il s'agit de rechercher un nouveau fournisseur ce délai doit être majoré d'un certain temps ;
Considérant que face à ces exigences il y a lieu de tenir compte, ce qui n'est pas discutable, de la forte concurrence existant sur ce secteur de marché, du nombre réduit de fournisseurs potentiels et de la nécessité pour ceux-ci de s'adapter à un marché en forte évolution ce qui a pour effet de tendre à une limitation de la durée même du préavis ;
Considérant qu'il est encore manifeste que la rupture est intervenue dans un cadre conflictuel excluant une relation de confiance réciproque puisque la rupture est intervenue en septembre 2003 alors qu'un contrat de fabrication destiné à pérenniser les relations contractuelles avait été conclu le 21/08/2002, que dès le début de son exécution, il avait donné lieu à des remarques, avant qu'en mars 2003 survienne un litige sérieux relativement à la fabrication des trousses de toilette Deauville Caban, lequel est incontestablement à l'origine d'une altération durable des relations et de la critique générale des prestations de la SARL Rousseaux Confection faite début juillet 2003 sous forme de mise en demeure ;
Considérant que cette altération durable des relations est confirmée par les décisions prises par cette société de se mettre en sommeil, paralysant ainsi, de son propre fait, un redéploiement effectif de son activité puisque si elle justifie de commandes limitées dans leur nombre comme pour leur montant dans les semaines avant précédé la rupture elle a dès le mois d'octobre 2003, mis en œuvre le licenciement de son personnel technique, mis en vente du matériel de production alors qu'il ne résulte d'aucun élément qu'il n'aurait pu être utilisé au profit d'autres fournisseurs, qu'elle ne justifie d'aucune tentative sérieuse de recherche d'autres fournisseurs et que si la SARL Rousseaux Confection n'a fait l'objet d'aucun dépôt de bilan ni procédure collective et reste immatriculée, son chiffre d'affaires au titre d'une activité est quasi-inexistant en 2004 et 2005 et nul en 2006 et 2007 ;
Considérant qu'il s'ensuit que, au regard de cette situation de fait, un préavis d'une durée de neuf mois était suffisant ;
Considérant que les parties discutent le montant de l'indemnité au titre de ce préavis compte tenu de l'évaluation du taux de marge brute globale pouvant être retenu sur le chiffre d'affaires qui aurait pu être réalisé au cours des neuf mois de préavis ;
Considérant que la SARL Rousseaux Confection indique que simple façonnier travaillant sur une matière première qui lui est fournie, il n'est pas surprenant que cette marge soit proche du chiffres d'affaires réalisé, qu'au vu des éléments comptables fournis, cette marge annuelle moyenne sur les années 2002 et 2003 est de 331 832 euro, que le taux élevé de la rentabilité nette de l'exploitation de 25,5 % pour les mêmes années par rapport aux autres entreprises du secteur confirme cette analyse, qu'il est donc justifié de retenir un montant annuel de 300 000 euro au titre de la marge brute ;
Considérant que la SA Anaik Descamps conteste une telle analyse comme celle du tribunal qui tend à retenir un taux de 100 % ou de 50 % de marge brute sans tenir compte de l'activité réelle et des chiffres officiels de la SARL Rousseaux Confection ;
Considérant que selon les pièces produites aux débats que :
- les exercices comptables d'une durée de 12 mois étaient arrêtés au 31/10 de chaque année,
- les comptes annuels arrêtés au 31/10/2003 révèlent :
* un actif circulant de 360 146 euro (2002) et de 468 581 euro (2003),
* des produits d'exploitation de 381 364 euro (2002) et de 318 207 euro (2003),
* des charges d'exploitation de 288 947 euro (2002) et de 246 437 euro (2003),
* un résultat d'exploitation de 92 687 euro (2002) et de 7 147 euro (2003),
* une marge globale de 367 956 euro (2002) et de 295 708 euro (2003),
* une valeur ajoutée de 302 368 euro (2002) et de 238 707 euro (2003),
* un excédent brut d'exploitation de 110 010 euro (2002) et de 64 965 euro (2003),
* un résultat net de 80 261 euro (2002) et de 72 131 euro (2003),
- une analyse de ces comptes exprime une rentabilité nette d'exploitation de 29 % (2002) et de 22 % (2003), ces valeurs étant pour le secteur de 6,17 % (2002 et de 6, 17 % (2003) ;
Considérant que le taux de marge à retenir en l'espèce s'apprécie par rapport à la marge globale ce qu'admet la SARL Rousseaux Confection mais qu'il y a lieu de retraiter cette dernière pour tenir compte de certaines charges externes liées à l'activité de sous-traitance même et du personnel employé à la fabrication, ces valeurs étant celles sur le seul exercice 2002, l'exercice 2003 n'étant pas significatif à raison des difficultés ayant opposé les parties et la résiliation étant intervenue avant que celui-ci ne soit achevé ;
Considérant que en ce qui concerne les charges externes et les charges salariales dont il incombait à la SARL Rousseaux Confection de fournir le détail à partir de la liasse fiscale complète, ne peuvent être retenus que le montant indiqué aux comptes annuels qui est pour les charges externes de 59 222 euro et pour le montant des salaires et charges figurant de 161 597 euro en sorte que la marge brute ainsi retraitée est ramenée au montant de 149 667 euro pour l'année 2002 et que rapporté à une période de 9 mois, le montant de l'indemnité de préavis est donc fixée à la somme de 100 992 euro ;
Considérant que pour réclamer ensuite une somme de 78 773,05 euro au titre des pertes subies à raison des licenciements effectués, de la contribution Delalande, des frais de plan social, de la perte sur la vente du matériel, de sommes non amorties au bilan arrêté au 31/10/2004, la SARL Rousseaux Confection prétend que :
- son état de dépendance ne résulte d'aucune faute de sa part, la SA Anaik Descamps ayant une connaissance précise de sa situation à la date de la résiliation, des investissements qu'elle avait réalisés, pour mettre son outil de production au bénéfice et à l'instigation du fabricant et de ce qu'elle mobilisait la totalité de sa capacité de production entraînant la perte de ses autres clients,
- toute diversification effective était impossible au regard de son état de dépendance technique, juridique, économique du fait fautif du donneur d'ordre en sorte que cette absence de diversification ne peut lui être utilement reprochée, étant observé que la SA Anaik Descamps ne l'a jamais mise en garde à cet égard,
- l'arrêt des commandes est à l'origine de la cessation de son activité bien qu'elle ait tenté de la redéployer ce que confirment les commandes dont elle justifie tandis que la SA Anaik Descamps a manqué à toute obligation en lui refusant toute aide en s'opposant à la diffusion auprès de ses autres confectionneurs du matériel qu'elle souhaitait vendre, en transférant ses commandes réelles, en favorisant certains autres confectionneurs par des majorations de prix de plus de 20 % ou des anticipations de règlements en trésorerie en sorte qu'elle ne pouvait dès lors que procéder au licenciement de son personnel avec le seul souci de faire coïncider l'exécution du préavis des employés ainsi licenciés avec celle des 10 % de commandes résiduelles laissées pour 2004,
- elle ne pouvait donc échapper à cette cessation d'activité à raison tout à la fois, du rythme semestriel des collections, de la notoriété des produits Hermès concernés, du caractère technique particulier et protégé des collections et produits, des investissements, de la spécialisation de l'outil et du personnel, de la progression régulière, permanente et constante du chiffre d'affaires, de la proximité géographique et commerciale des deux sociétés,
- il a été admis que le préjudice ne se limite pas à "l'indemnisation de la réduction de l'activité pendant le seul délai de préavis qui aurait dû être respecté, les équilibres financiers et économiques ayant pu être durablement et profondément affectés" et que "si l'absence de préavis a provoqué la diminution ou même la cessation des activités de l'entreprise, c'est cette diminution ou cessation qui doit être indemnisée" ;
Considérant que s'il peut être admis qu'une absence de préavis soit à l'origine immédiate de la cessation d'activité puisqu'elle prive la société objet de cette mesure de résiliation de toute commande et de tout délai pour organiser le redéploiement de son activité, encore faut-il que cette cessation d'activité se rattache inéluctablement à cette absence de préavis et non à la rupture des relations contractuelles ;
Considérant qu'il résulte des pièces produites que:
- la lettre de résiliation est datée du 11/09/2003,
- les procédures de licenciement ont été mises en œuvre à compter du 30/09/2003 les licenciements étant effectifs à compter de décembre 2003,
- le matériel composé principalement de machines à coudre a été vendu en janvier 2004,
- la SARL Rousseaux Confection a refusé début décembre une commande portant sur la fabrication d'un produit nouveau,
- sur un reproche de fabrication défectueuse et de délais non respectés, la SA Anaik Descamps envisageait de transférer certaines commandes résiduelles en cours ce à quoi s'opposait fermement la SARL Rousseaux Confection suivant mail du 21/10/2003,
- le transfert de la totalité de l'activité de la SARL Rousseaux Confection au profit de la société Anaik Descamps était effectif en décembre 2003,
- les commandes dont il est justifié à d'autres fournisseurs sont d'un montant limité et datées pour l'essentiel en mai et juin 2003 ;
Considérant, par ailleurs, que la situation de dépendance alléguée par la SARL Rousseaux Confection résulte pour l'essentiel du contrat de fabrication conclu en août 2002 et donc du choix librement négocié de cette dernière ;
Considérant que des faits rappelés, il ressort que, à la suite d'une cessation des relations contractuelles sans notification de préavis écrit ne comportant plus aucune livraison à partir de décembre 2002, la SA Anaik Descamps comme la SARL Rousseaux Confection ont mis en œuvre pour cette date la cessation effective de toutes relations ;
Considérant que, au regard de la rupture abusive découlant de l'absence de tout préavis écrit, sont indifférentes les raisons d'une éventuelle dépendance dans laquelle se serait trouvée la SARL Rousseaux Confection, seul important le point de savoir si l'absence de tout préavis a fait obstacle à un redéploiement de l'activité qui aurait pu être possible si celui-ci avait été donné ;
Considérant, en présence de la seule situation de fait, il est manifeste d'une part que la quasi-totalité du chiffre d'affaires de la SARL Rousseaux Confection était réalisé avec la Anaik Descamps ce que cette dernière n'ignorait pas que la SARL Rousseaux Confection ne pouvait sans délai au regard notamment du caractère saisonnier des collections redéployer son activité, que, en tirant les conséquences elle a pris les mesures pour arrêter son activité à la date de cessation des commandes de la SA Anaik Confection en procédant à la mise en œuvre des licenciements et en mettant en sommeil son entreprise ;
Considérant qu'il résulte de l'argumentation de la SA Rousseaux Confection que cette dernière considérait difficile compte tenu de la situation de dépendance qui était, selon elle, la sienne, le redéploiement de son activité même si un préavis suffisant avait été respecté en sorte qu'il ne peut être exclu, que dans une telle hypothèse, cette société aurait pu être amenée à cesser son activité ;
Mais considérant qu'en assortissant sa décision de mettre fin aux relations contractuelles d'aucune notification d'un préavis écrit et en rendant de ce fait l'exercice d'une faculté qui lui était reconnue abusive et donc fautive en lui conférant un caractère soudain et brutal, la SA Anaik Descamps a privé de tout délai pour entreprendre un redéploiement de son activité lequel était incontestablement nécessaire au regard du caractère saisonnier des collections et d'un volume de commandes dont il n'est pas démontré qu'elles auraient pu être immédiatement remplacées en sorte que la décision de la SARL Rousseaux Confection d'organiser la cessation de son activité et de se mettre en sommeil, à la date ou elle a été prise, et même en l'absence de toute nécessité de déposer son bilan ou de mise en œuvre à son encontre d'une procédure collective, ne peut lui être utilement reprochée au regard des risques et responsabilités encourues et était donc inéluctable du fait non de la rupture des relations contractuelles mais de la rupture brutale et soudaine par absence de notification d'un préavis écrit d'où il suit qu'elle découle exclusivement de cette absence de préavis ce qui justifie dès lors que soient prises en compte, au titre de la seule indemnisation de cette absence de préavis, les pertes subies directement liées à cette cessation d'activité ;
Considérant qu'il est manifeste que les licenciements intervenus en décembre 2003 pour un montant de 27 103 euro quels que soient les motifs énoncés dans les lettres et notamment à la référence dans seulement deux lettres de licenciement du 17/10/2003 concernant Marie Cerqueira et Khet Loucheux à un contrat de fabrication remontant à trois ans alors qu'il n'était applicable à la date de ces lettres, que depuis 14 mois, se rattachent à la mise en œuvre de la cessation de cette activité, qu'il n'en est pas de même du licenciement de Madame Lescluse intervenu le 24/01/2006, eu égard à cette date, et au fait que ce salarié souffrant d'une maladie professionnelle depuis septembre 1999 n'exerçait aucune activité de fabrication ;
Considérant que la demande formée pour un montant de 12 114 euro au titre de la contribution dite Delalande qui est en réalité la contribution supplémentaire en cas de licenciement sous réserve de certaines exclusions par application de l'article L. 321-13 du Code du travail ne peut qu'être rejetée dès lors qu'il n'est versé aux débats que la seule mise en demeure concernant Ait Ouarabi Djohra pour un montant de 6 768,30 euro dont il n'est pas justifié qu'il a été payé ;
Considérant qu'il y a lieu de prendre en compte mais seulement à concurrence de 1 500 euro les frais et honoraires d'avocat réclamés pour un montant de 3 472 euro TTC dès lors qu'il ressort des factures que ceux-ci se rapportent à l'assistance et le conseil de la SARL Rousseaux Confection pour la mise en œuvre des licenciements intervenus, qu'une telle assistance et conseil était en l'espèce légitime mais que le paiement n'en est justifié qu'à hauteur de la somme de 1 500 euro par la mention apposée sur cette facture portant paiement pour cette somme suivie du numéro du chèque ;
Considérant que pour réclamer la somme de 30 000 euro au titre de la perte sur la vente du matériel, la SARL Rousseaux Confection indique que cette perte est une conséquence nécessaire de la cessation de son activité et du refus de la SA Anaik Descamps de faire circuler entre les autres confectionneurs, qu'elle justifie de la revente en janvier 2004 de ces matériels, que cette diminution de valeur a été prise en considération au titre des immobilisations dans les comptes annuels de l'exercice 2003 tandis que la Anaik Descamps n'a développé aucune argumentation spécifique à cet égard, que ce chef de demande compte tenu des justifications apportées et de l'absence de toute contestation est donc retenu ;
Considérant qu'il s'ensuit que, au titre des conséquences de l'absence de notification, d'un préavis écrit, la SA Anaik Descamps est redevable du montant de 58 521 euro (27 021 + 1 500 + 30 000) ;
Considérant que les époux Frys réclament au titre du préjudice qu'ils ont subi, d'une part, la perte de valeur du capital investi par eux dans la société soit la somme de 7 622,45 euro en se prévalant de ce que seuls associés de la SARL Rousseaux Confection, ils ont au titre de la constitution du capital de 500 parts versé respectivement, lui, la somme de 47 500 FF représentant 475 parts, elle, la somme de 2 500 FF représentant 25 parts ;
Considérant que la SA Anaik Descamps conteste cette prétention en faisant valoir que le préjudice est inexistant puisque ce capital existe et que la SARL Rousseaux Confection ne fait l'objet d'aucune procédure collective ;
Mais considérant que cette demande ne peut qu'être rejetée dès lors, d'une part, que le capital une fois libéré appartient non à ceux qui l'ont versé mais à la société durant toute sa vie sociale, d'autre part, que cette société toujours immatriculée existe encore, de troisième part, que de ce fait, la perte alléguée n'a pas été caractérisée ;
Considérant que Ludovic Frys réclame ensuite la perte de ses revenus annuels sur deux ans au titre de sa rémunération de gérant et des cotisations dites de la loi Madelin, soit la somme de 101 288 euro en faisant observer que cette rémunération de gérant qui était de 36 823 euro en 2001, de 40 382 euro en 2002, n'avait aucun caractère dispendieux ;
Considérant que la SA Anaik Descamps réplique que Ludovic Frys ne justifie pas de la perte de revenus qu'il invoque spécialement pour l'année 2003, que de tels revenus sont la contrepartie d'un travail ;
Considérant qu'une telle demande est fondée dans son principe pendant l'exécution du préavis qui aurait dû être accordé et que la cour a fixé à une durée de 9 mois puisque pendant l'exécution du préavis l'activité de la SARL Rousseaux Confection aurait du se poursuivre sur les mêmes bases mais qu'il ne peut y être fait droit, que pour autant que les organes sociaux de cette société aurait décidé de maintenir en contrepartie d'une activité effective et au regard de la situation économique et financière de la société au gérant le niveau de la rémunération qui était le sien, étant précisé que ce gérant lui même faisait état de ses plus grandes inquiétudes quant aux perspectives de redéploiement de l'activité de cette société ;
Considérant qu'il est constant que la SARL Rousseaux Confection est restée immatriculée plusieurs années après la fin des relations contractuelles ainsi qu'en attestent les comptes annuels de l'exercice 2006 et que l'absence d'activité de cette société pendant plusieurs années découle non de la rupture abusive, pour absence de préavis, mais de la décision de son gérant qui ne justifie d'aucune tentative sérieuse de redéployer l'activité de cette société et de la mettre en sommeil ; qu'en tout état de cause, à supposer que Ludovic Frys ait accompli tous les efforts et effectué toutes les diligences nécessaires pour redéployer son activité sans y parvenir, il s'en suivrait que la perte de sa rémunération de gérant est la conséquence de la rupture et non de ce que cette rupture n'était assorti d'aucun préavis ;
Considérant que ce chef de demande est donc rejeté;
Considérant que les époux Frys réclament encore une somme de 160 000 euro au titre des dividendes qu'ils n'ont pas perçus pendant deux ans ;
Mais considérant que pour le même motif que celui indiqué ci-dessus une telle demande ne peut qu'être rejetée ;
Considérant qu'il s'ensuit que les époux Frys sont déboutés des demandes qu'ils ont formées au titre de leur préjudice personnel et que la SA Anaik Descamps est condamnée à payer à la SARL Rousseaux Confection les sommes de 100 992 euro et 58 521 euro ;
Considérant que ces sommes seront majorés conformément à la demande et par application de l'article 1153 du Code civil des intérêts au taux légal à compter de l'assignation du 05/05/2004 ;
Considérant qu'il y a lieu d'ordonner la capitalisation des intérêts dans les termes de l'article 1154 du Code civil à compter des conclusions du 28/09/2006 par lesquelles cette demande a été pour la première fois formée ;
Considérant qu'il n'y a pas lieu de donner acte à la SA Anaik Descamps de ce qu'elle se réserve la faculté d'engager une procédure en réparation du préjudice subi par suite de l'arrêt brutal de la production par la SARL Rousseaux Confection alors même que les commandes étaient en cours "dès lors qu'il n'appartient pas au juge de donner acte à une partie de ses éventuels droits" ;
Considérant que l'équité commande de condamner la SA Anaik Descamps à payer une somme de 3 000 euro au titre de l'article 700 du Code de procédure civile, le jugement étant confirmé sur l'application de cet article ;
Considérant que la SA Anaik Descamps est condamnée aux dépens d'appel, le jugement étant confirmé en ses dispositions relatives aux dépens ;
Par ces motifs, Réforme le jugement sur le montant de la condamnation prononcée contre la SA Anaik Descamps au profit de la SARL Rousseaux Confection ; Le confirme pour le surplus ; Statuant à nouveau et y ajoutant; Condamne la SA Anaik Descamps à payer les montants de 100 992 euro et 58 521 euro à la SARL Rousseaux Confection avec intérêts au taux légal à compter du 05/05/2004. Ordonne la capitalisation des intérêts dans les termes de l'article 1154 du Code civil à compter de la demande du 28/09/2006 ; Condamne la SA Anaik Descamps à payer la somme de 3 000 euro à la SARL Rousseaux Confection au titre de l'article 700 du Code de procédure civile. Condamne la SA Anaik Descamps aux dépens d'appel ; Admet la SCP Grappotte Benetreau-Jumel au bénéfice de l'article 699 du Code de procédure civile.