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Décisions

Cass. 1re civ., 20 décembre 1993, n° 91-21.434

COUR DE CASSATION

Arrêt

Cassation

PARTIES

Demandeur :

Silo services (Sté), Elvia (SA), Boythorpe (Sté)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Grégoire (faisant fonction)

Rapporteur :

M. Lemontey

Avocat général :

Mme Le Foyer de Costil

Avocats :

Mes Parmentier, Barbey, SCP Masse-Dessen, Georges, Thouvenin, SCP Boré, Xavier

Rennes, du 2 oct. 1991

2 octobre 1991

LA COUR : - Attendu qu'en juillet 1984, la société Silo services a installé chez M. X un silo fourni par la société anglaise Boythorpe et destiné à l'ensilage de maïs ; qu'à la suite d'un voilement de la jupe du silo et d'une implosion, M. X a, le 24 avril 1987, assigné en réparation la société Silo services et l'assureur de celle-ci, la compagnie Helvetia (devenue la compagnie Elvia), lesquels ont appelé en garantie le fournisseur anglais ; que l'arrêt attaqué a fait droit à la demande de M. X et s'est déclarée incompétente pour connaître de la demande dirigée contre la société Boythorpe ;

Sur le deuxième moyen du pourvoi principal de la compagnie Elvia et sur le premier moyen du pourvoi provoqué de la société Silo services : - Attendu qu'il est reproché à l'arrêt attaqué d'avoir dit que la société Silo services devait réparation sur le fondement de la garantie décennale alors que les articles 1792 et 2290 du Code civil sont inapplicables en cas de travaux ne présentant pas le caractère d'ouvrage immobilier et ne faisant pas appel aux techniques des travaux du bâtiment ;

Mais attendu que la cour d'appel, ayant relevé, par motifs propres et adoptés, que le silo se présentait comme un ensemble très important et solidaire de pièces assemblées, élevé à partir du sol sur des fondations et rivé à celles-ci, a justement retenu que ce silo était un ouvrage au sens de l'article 1792 du Code civil malgré la possibilité de son déplacement lequel ne pouvait s'effectuer qu'en recourant à des moyens très importants ; que les griefs ne sont donc pas fondés ;

Et sur le troisième moyen du pourvoi principal de la compagnie Elvia et le second moyen du pourvoi provoqué, pris en leurs diverses branches : - Attendu qu'il est encore reproché à l'arrêt d'avoir accueilli l'exception d'incompétence opposée par la société Boythorpe alors, selon les moyens, que la clause par laquelle l'acheteur se soumet à la juridiction des tribunaux anglais ne stipulait nullement qu'elle concernait la demande en garantie, de sorte que la cour d'appel a violé les articles 6 et 17 de la Convention de Bruxelles du 27 septembre 1968, révisée, et a inversé le fardeau de la preuve de l'étendue de la clause qui incombait à la partie soulevant l'exception ;

Mais attendu que c'est par une interprétation souveraine et sans inversion de la charge de la preuve, que la cour d'appel a relevé que la clause attributive de juridiction était conçue en termes généraux qui exprimaient la commune volonté des parties d'écarter dans leurs rapports toutes les compétences dérivées et, notamment, la demande en garantie ; que les moyens ne peuvent être accueillis ;

Mais sur le premier moyen du pourvoi principal de la compagnie Elvia : - Vu les articles 15 et 16 du nouveau Code de procédure civile ; - Attendu, d'une part, que les parties doivent se faire connaître mutuellement, en temps utile, les moyens qu'elles invoquent afin que chacune soit à même d'organiser sa défense ; que, d'autre part, le juge ne peut retenir, dans sa décision, les moyens et les explications invoqués par les parties que si celles-ci ont été à même d'en débattre contradictoirement ;

Attendu que l'arrêt attaqué retient que la compagnie Elvia n'est plus recevable à opposer à la société Silo services l'exclusion de la garantie décennale dont elle ne s'était pas prévalue en première instance, aux motifs qu'ainsi que le faisaient valoir les Mutuelles du Mans, assureur de M. X, elle avait constamment assuré la direction du procès sans aucune réserve de sorte qu'elle avait renoncé à la clause d'exclusion ;

Attendu qu'en retenant ce moyen qui n'était pas exposé dans les écritures des Mutuelles du Mans, ce qui n'avait donc pas mis la compagnie Elvia à même d'en débattre contradictoirement, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;

Par ces motifs : Rejette le pourvoi provoqué de la société Silo services ainsi que sa demande accessoire ; Casse et annule, mais seulement en ce qu'il a dit que la compagnie Elvia doit sa garantie à son assurée, la société Silo services, pour toutes les condamnations prononcées contre cette dernière et a condamné la compagnie Elvia aux côtés de la société Silo services, l'arrêt rendu le 2 octobre 1991, entre les parties, par la Cour d'appel de Rennes ; remet, en conséquence, quant à ce, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la Cour d'appel d'Angers.