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Décisions

Cass. 1re civ., 2 juin 1981, n° 80-10.359

COUR DE CASSATION

Arrêt

Rejet

PARTIES

Demandeur :

Cyanamid Italia (Sté)

Défendeur :

Gerling Konzern (Sté)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Charliac

Rapporteur :

M. Andrieux

Avocat général :

M. de Sablet

Avocat :

Me Ryziger

Douai, 2e ch. civ., du 9 nov. 1979

9 novembre 1979

LA COUR : - Sur le moyen unique, pris en ses trois premières branches : - Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué (Douai, 9 novembre 1979) qu'à la suite de désordres constatés dans ses cultures après utilisation d'un désherbant, la société Alibel a assigné, en paiement de dommages-intérêts, devant le Tribunal de commerce de Lille, le vendeur de ce désherbant, la société Duhem ; que celle-ci a appelé en garantie le distributeur du produit, la société Quinoleine, laquelle a elle-même assigné en garantie le fabricant, la société Cyanamid Italia, puis, par acte d'huissier du 27 avril 1978, l'assureur de cette dernière, la société d'assurances Gerling Konzern ; que, par conclusions du 18 mai 1979, cette société d'assurances a déclaré qu'elle était fondée à refuser sa garantie ; que la société Cyanamid Italia, ayant fait valoir qu'elle avait assigné la société Gerling Konzern devant le Tribunal civil de Milan le 18 décembre 1978, a demandé au Tribunal de commerce de Lille de se déclarer incompétent et de se dessaisir, pour causes de litispendance et de connexité, au profit de la juridiction italienne, par application de la Convention de Bruxelles du 27 septembre 1968 ; que cette demande a été rejetée par le tribunal ;

Attendu que la société Cyanamid Italia reproche aux juges du second degré d'avoir déclaré non fondé son contredit de compétence, au motif que le tribunal français avait été le premier saisi par l'assignation du 27 avril 1978, alors, en premier lieu, qu'ils auraient violé les dispositions de l'article 21 de la Convention de Bruxelles, en refusant de tenir compte des conclusions de la société Gerling Konzern du 18 mai 1979, conclusions qui, seules auraient eu pour effet de faire naître la litispendance, alors, en deuxième lieu, que ces conclusions constituaient une " demande " au sens dudit article 21, et alors, en troisième lieu, que, pour apprécier la litispendance qui suppose une identité de parties, la cour d'appel n'aurait pu se référer à l'assignation du 27 avril 1978 qui ne mettait pas en cause la société Cyanamid Italia ;

Mais attendu que l'article 21 de la Convention de Bruxelles du 27 septembre 1968 exige, pour qu'il y ait litispendance entre ces juridictions d'Etats contractants différents, et, par suite, dessaisissement de la juridiction saisie en second lieu, que les demandes soumises à ces juridictions soient formées " entre les mêmes parties " ; qu'en l'espèce, il n'y a pas de litispendance, la cour d'appel constatant que, devant le Tribunal de commerce de Lille, la demande a été introduite par la société Quinoleine contre les sociétés Cyanamid Italia et Gerling Konzern, tandis que, devant le Tribunal civil de Milan, la demande a été formée par la société Cyanamid Italia contre la société Gerling Konzern ; que, par ce motif de pur droit substitué à ceux de l'arrêt attaqué, le rejet de l'exception d'incompétence, en ce que cette exception était fondée sur une prétendue litispendance, se trouve légalement justifiée; que le premier moyen ne peut donc être accueilli en aucune de ses trois branches ;

Sur les quatrième et cinquième branches du moyen : - Attendu qu'il est également soutenu qu'en ce qui concerne la connexité, les juges d'appel n'auraient pas recherché à quel moment était apparue l'existence d'un rapport si étroit qu'il y avait intérêt à juger les affaires en même temps, et qu'en ne précisant pas pourquoi ils estimaient que le Tribunal de commerce de Lille avait été saisi le premier, au sens de l'article 22 de la Convention de Bruxelles, ils n'auraient pas suffisamment motivé leur décision ;

Mais attendu que, selon l'article 22 de la Convention de Bruxelles du 27 septembre 1968, en cas de demandes connexes, la juridiction saisie en second lieu " peut " se dessaisir à la demande d'une des parties ; que, dès lors, même en admettant que le Tribunal de commerce de Lille ait été saisi en second lieu, il n'était pas tenu de se dessaisir au profit du Tribunal civil de Milan ; que, par ce motif de pur droit, substitué à ceux de l'arrêt attaqué, le rejet de l'exception d'incompétence, en ce que cette exception était fondée sur la connexité, se trouve également justifié ; que les quatrième branches du moyen ne sont donc pas mieux fondées que les trois premières ;

Par ces motifs : Rejette le pourvoi formé contre l'arrêt rendu le 9 novembre 1979 par la Cour d'appel de Douai.