CJUE, 8e ch., 17 décembre 2009, n° C-586/08
COUR DE JUSTICE DE L’UNION EUROPEENNE
Arrêt
PARTIES
Demandeur :
Rubino
Défendeur :
Ministero dell'Università e della Ricerca,
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président de chambre :
Mme Toader
Avocat général :
M. Jääskinen
Juges :
MM. Schiemann (rapporteur), Kuris
Avocats :
Mes Brunello, Quadri
LA COUR (huitième chambre),
1 La demande de décision préjudicielle porte sur l'interprétation des articles 3, paragraphe 1, sous c), CE et 47, paragraphe 1, CE ainsi que de la directive 2005-36-CE du Parlement européen et du Conseil, du 7 septembre 2005, relative à la reconnaissance des qualifications professionnelles (JO L 255, p. 22).
2 Cette demande a été présentée dans le cadre d'un litige opposant M. Rubino au Ministero dell'Università e della Ricerca (ministère de l'Université et de la Recherche, ci-après le "ministère") au sujet du rejet par ce dernier de la demande de M. Rubino d'être inscrit sur la liste des titulaires de l'aptitude scientifique nationale (ci-après l'"ASN") tenue par le ministère.
Le cadre juridique
La directive 2005-36
3 La directive 2005-36 procède à une réorganisation ainsi qu'à une rationalisation des dispositions de directives antérieures et remplace notamment les directives 89-48-CEE du Conseil, du 21 décembre 1988, relative à un système général de reconnaissance des diplômes d'enseignement supérieur qui sanctionnent des formations professionnelles d'une durée minimale de trois ans (JO 1989, L 19, p. 16), et 92-51-CEE du Conseil, du 18 juin 1992, relative à un deuxième système général de reconnaissance des formations professionnelles, qui complète la directive 89-48 (JO L 209, p. 25). Selon le quatorzième considérant de la directive 2005-36, la refonte opérée par celle-ci n'affecte pas le mécanisme de reconnaissance établi par les directives 89-48 et 92-51.
4 Il ressort de l'article 2, paragraphe 1, de la directive 2005-36 que celle-ci s'applique à tout ressortissant d'un État membre voulant exercer une "profession réglementée" dans un État membre autre que celui où il a acquis ses qualifications professionnelles.
5 L'article 3, paragraphe 1, sous a) et b), de la directive 2005-36 contient les définitions suivantes:
"Aux fins de la présente directive, on entend par:
a) 'profession réglementée': une activité ou un ensemble d'activités professionnelles dont l'accès, l'exercice ou une des modalités d'exercice est subordonné directement ou indirectement, en vertu de dispositions législatives, réglementaires ou administratives, à la possession de qualifications professionnelles déterminées; l'utilisation d'un titre professionnel limitée par des dispositions législatives, réglementaires ou administratives aux détenteurs d'une qualification professionnelle donnée constitue notamment une modalité d'exercice. [...]
b) 'qualifications professionnelles': les qualifications attestées par un titre de formation, une attestation de compétence visée à l'article 11, point a) i) et/ou une expérience professionnelle".
6 L'article 11 de la directive 2005-36 est intitulé "Niveaux de qualification". Cet article 11, sous a), i), dispose:
"Pour l'application de l'article 13, les qualifications professionnelles sont regroupées selon les niveaux suivants tels que décrits ci-après:
a) attestation de compétence délivrée par une autorité compétente de l'État membre d'origine désignée en vertu de dispositions législatives, réglementaires ou administratives de cet État sur la base:
i) [...] d'un examen spécifique sans formation préalable [...]".
7 L'article 13 de la directive 2005-36, intitulé "Conditions de la reconnaissance", prévoit à son paragraphe 1:
"Lorsque, dans un État membre d'accueil, l'accès à une profession réglementée ou son exercice est subordonné à la possession de qualifications professionnelles déterminées, l'autorité compétente de cet État membre accorde l'accès à cette profession et son exercice dans les mêmes conditions que pour les nationaux aux demandeurs qui possèdent l'attestation de compétences ou le titre de formation qui est prescrit par un autre État membre pour accéder à cette même profession sur son territoire ou l'y exercer.
Les attestations de compétences ou les titres de formation doivent remplir les conditions suivantes:
[...]
b) attester d'un niveau de qualification professionnelle au moins équivalent au niveau immédiatement inférieur à celui exigé dans l'État membre d'accueil, tel que décrit à l'article 11."
La réglementation nationale
8 Le 6 novembre 2007, a été adopté le décret législatif nº 206 portant mise en œuvre de la directive 2005-36-CE relative à la reconnaissance des qualifications professionnelles ainsi que de la directive 2006-100-CE qui adapte certaines directives sur la libre circulation des personnes à la suite de l'adhésion de la Bulgarie et de la Roumanie (decreto legislativo n. 206 - Attuazione della direttiva 2005-36-CE relativa al riconoscimento delle qualifiche professionali, nonché della direttiva 2006-100-CE che adegua determinate direttive sulla libera circolazione delle persone a seguito dell'adesione di Bulgaria e Romania, supplément ordinaire à la GURI n° 261, du 9 novembre 2007, ci-après le "décret législatif n° 206-2007").
9 Toutefois, selon l'interprétation qu'en donne la juridiction de renvoi, ce décret législatif n'est pas applicable à la profession de professeur d'université.
10 En Italie, aucun titre de formation ni aucune expérience professionnelle n'est nécessaire pour accéder à cette profession.
11 Le processus de sélection des professeurs d'université y est régi par la loi nº 230 portant de nouvelles dispositions concernant les professeurs et les chercheurs d'université, et délégation au gouvernement pour réorganiser le recrutement des professeurs d'université (legge n. 230 - Nuove disposizioni concernenti i professori e i ricercatori universitari e delega al Governo per il riordino del reclutamento dei professori universitari), du 4 novembre 2005 (GURI n° 258, du 5 novembre 2005, ci-après la "loi n° 230-2005"), ainsi que par le décret législatif nº 164 portant réforme de la réglementation sur le recrutement des professeurs d'université, conformément à l'article 1er, paragraphe 5, de la loi nº 230 du 4 novembre 2005 (decreto legislativo n. 164 - Riordino della disciplina del reclutamento dei professori universitari, a norma dell'articolo 1, comma 5 della legge 4 novembre 2005, n° 230), du 6 avril 2006 (GURI n° 101, du 3 mai 2006, ci-après le "décret législatif n° 164-2006").
12 L'article 1er, paragraphes 5 à 9, de la loi nº 230-2005 prévoit ce qui suit:
"5. Afin de procéder à la réforme de la réglementation relative au recrutement des professeurs d'université, en garantissant une sélection adaptée à la nature des fonctions à remplir, le gouvernement dispose d'une délégation pour adopter, dans les six mois à compter de la date d'entrée en vigueur de la présente loi et dans le respect de l'autonomie des institutions universitaires, un ou plusieurs décrets législatifs, en se conformant aux principes et critères directeurs suivants:
a) avant le 30 juin de chaque année, le ministre de l'Instruction, de l'Université et de la Recherche lance, par décret, par secteurs scientifiques et disciplinaires, des procédures visant à décerner l'[ASN], séparément pour les classes des professeurs ordinaires et des professeurs associés, en fixant notamment:
1) les modalités définissant le nombre maximal de personnes pouvant obtenir l'[ASN] pour chaque classe et par secteurs disciplinaires, en fonction des besoins; ce nombre est indiqué par les universités, majoré d'un coefficient maximal de 40 %, la couverture financière en étant garantie et sous réserve que l'[ASN] n'implique pas de droit d'accès à l'enseignement; sont aussi définis les procédures et les délais relatifs à la convocation, à l'exécution et à la conclusion des examens d'aptitude qui se déroulent auprès des universités, en assurant la publicité des actes et des décisions arrêtées par les jurys; pour chaque secteur disciplinaire, il faudra que soit offert aux détenteurs de l'[ASN] au moins un poste par période de cinq ans pour chaque classe;
[...]
6. Les candidats jugés aptes et non appelés à la suite des procédures déjà organisées ou dont les dossiers ont été approuvés conservent le bénéfice de l'[ASN] pour une durée de cinq ans à compter de son octroi. L'affectation aux postes de professeur ordinaire et de professeur associé par les diverses universités, par l'appel des lauréats enseignants jugés aptes, [...] doit en tout cas se faire dans le respect des procédures [...]
[...]
8. Les universités pourvoient les postes de professeur ordinaire et associé au terme de procédures régies par leurs propres règlements, qui assurent l'évaluation comparative des candidats et la publicité des actes, et sont réservées à ceux qui disposent [de l'ASN visée] au paragraphe 5, sous a), [...]
9. Les universités [...] peuvent pourvoir un pourcentage non supérieur à 10 % des postes de professeur ordinaire et associé par la nomination directe de chercheurs spécialisés étrangers ou italiens employés à l'étranger ayant obtenu à l'étranger un titre d'aptitude à l'enseignement de même niveau [...]"
13 L'article 3 du décret législatif nº 164-2006, intitulé "Aptitude scientifique nationale", dispose:
"1. Le titre d'[ASN] s'obtient à l'issue de procédures ouvertes par décret du ministre, pour chaque secteur et séparément pour les classes des professeurs ordinaires et des professeurs associés.
2. Le titre d'[ASN] est attribué dans les limites des quotas fixés dans l'avis adressé aux candidats qui possèdent la "piena maturità scientifica" pour la classe des professeurs ordinaires et la "maturità scientifica" pour la classe des professeurs associés.
3. La possession du titre d'[ASN] constitue une condition nécessaire pour participer aux procédures visées à l'article 1er, paragraphe 8, de la loi et n'implique pas de droit d'accès à la fonction de professeur d'université.
4. Aux fins de la participation aux procédures de recrutement, la validité du titre d'[ASN] est de quatre ans à compter de son obtention."
14 L'article 9 du décret législatif nº 164-2006, intitulé "Travaux des commissions d'évaluation", prévoit:
"1. Les commissions qui siègent auprès des universités dans lesquelles se déroule l'examen d'aptitude élisent leur président et définissent les critères de principe et les procédures d'évaluation comparative des candidats en appliquant, dans la mesure du possible, des paramètres reconnus aux niveaux national et international.
[...]
3. Pour évaluer la production scientifique, les autres titres scientifiques et le curriculum général du candidat, y compris en ce qui concerne l'activité pédagogique et les expériences professionnelles et organisationnelles éventuelles, la commission prend en compte les critères suivants:
a) l'originalité et l'innovation de la production scientifique comprenant publications, brevets et projets innovants ainsi que la rigueur méthodologique;
b) l'apport individuel du candidat, déterminé analytiquement, dans les travaux collectifs, quand [cet apport] peut être identifié;
c) la direction et la coordination de groupes de recherche;
d) l'adéquation de l'activité du candidat avec les disciplines appartenant au secteur pour lequel la procédure a été ouverte ou bien avec les questions interdisciplinaires qu'elles couvrent;
e) l'importance scientifique des publications et leur diffusion à l'intérieur de la communauté scientifique;
f) la continuité dans le temps de la production scientifique, en ce qui concerne également l'évolution des connaissances dans le secteur spécifique;
g) l'importance et les caractéristiques des engagements pédagogiques certifiés par les organismes concernés;
h) l'importance et les caractéristiques des activités exercées dans le domaine clinique et thérapeutique, et dans tout autre domaine professionnel et de travail dans lequel les expériences et les compétences associées sont explicitement requises ou complètent le profil général du candidat.
4. Le jugement de la commission quant à la production scientifique, aux titres et au mérite global du candidat est formulé en se référant spécifiquement aux critères visés aux paragraphes 1 et 3.
5. Au terme des évaluations de la production scientifique et des titres, dans le cadre des examens d'aptitude relatifs à la classe des professeurs associés, les candidats passent une épreuve pédagogique et débattent de leur production scientifique. L'appel à candidatures peut prévoir que ces épreuves seront passées dans la langue étrangère faisant l'objet de l'évaluation comparative. Dans [le cadre des] examens relatifs à la classe des professeurs ordinaires, les candidats débattent de leur production scientifique et ceux qui n'ont pas la qualification de professeur associé passent également une épreuve pédagogique qui concourt à l'évaluation générale.
[...]
9. Au terme de ses travaux, la commission, après une évaluation comparative, indique, par décision prise à la majorité de ses membres, les candidats jugés dignes du titre d'[ASN] dans les limites des quotas fixés dans l'appel à candidatures."
Le litige au principal et la question préjudicielle
15 Au terme d'activités universitaires ayant débuté en 1991, M. Rubino, ressortissant italien, a obtenu en 2005 l'"Habilitation" (facultas legendi) dans la discipline de l'océanographie ainsi que la "Lehrbefugnis" (venia legendi) à la faculté des sciences géophysiques de l'université de Hambourg (Allemagne). Ces titres attestent son aptitude à enseigner à l'université en qualité de professeur ordinaire ("Ordinarius") dans le système d'enseignement supérieur allemand.
16 M. Rubino travaille actuellement en qualité d'océanographe physicien à l'université Ca' Foscari de Venise (Italie) et est inscrit depuis 1999 dans les registres italiens des chercheurs universitaires.
17 Depuis le 14 septembre 2007, M. Rubino a demandé à plusieurs reprises la reconnaissance en Italie de ses qualifications acquises en Allemagne, afin d'être inscrit sur la liste des titulaires de l'ASN.
18 Le ministère a toutefois rejeté ces différentes demandes par décision du 23 janvier 2008. Celui-ci conteste l'équivalence entre la "Lehrbefugnis" accordée en Allemagne et l'ASN propre au système universitaire italien, estimant que le décret législatif nº 206-2007 n'est pas applicable, dans la mesure où la profession de professeur d'université ne constitue pas une profession réglementée en Italie, puisqu'elle concerne du personnel engagé sur la base d'une procédure de sélection à laquelle il est possible de participer sans que soit exigée la possession d'un titre d'études déterminé.
19 M. Rubino a saisi le Tribunale amministrativo regionale del Lazio (tribunal administratif régional du Latium) d'un recours contre cette décision du ministère, faisant valoir que celle-ci est contraire au droit communautaire, notamment à la directive 2005-36.
20 Estimant qu'un doute peut subsister quant à la compatibilité de la réglementation italienne avec le droit communautaire, le Tribunale amministrativo regionale del Lazio a décidé de surseoir à statuer et de poser à la Cour la question préjudicielle suivante:
"Les principes communautaires d'abolition, entre les États membres de la Communauté [européenne], des obstacles à la libre circulation des personnes et des services, et de reconnaissance mutuelle des diplômes, certificats et autres titres, résultant des articles 3, paragraphe 1, sous c), [CE] et 47, paragraphe 1, [CE], ainsi que les dispositions contenues dans la directive 2005-36 [...] s'opposent-ils à une réglementation nationale telle que [...] le décret législatif nº 206-2007, qui exclut les professeurs d'université du champ des professions réglementées aux fins de la reconnaissance des qualifications professionnelles?"
Sur la question préjudicielle
21 Selon la juridiction de renvoi, aucun titre de formation ni aucune expérience professionnelle n'est nécessaire en Italie pour accéder à la profession de professeur d'université ou pour l'exercer.
22 Il convient dès lors de comprendre la question posée comme demandant en substance si le fait que l'accès à cette profession est réservé aux candidats ayant été reçus à une procédure de sélection telle que celle menant à l'ASN a pour conséquence que ladite profession constitue une profession réglementée au sens de l'article 3, paragraphe 1, sous a), de la directive 2005-36.
23 Il convient de relever, dans ce contexte, que la définition de la notion de profession réglementée au sens de la directive 2005-36 relève du droit communautaire (voir par analogie, en ce qui concerne la directive 89-48, arrêts du 8 juillet 1999, Fernández de Bobadilla, C-234-97, Rec. p. I-4773, point 14, et du 9 septembre 2003, Burbaud, C-285-01, Rec. p. I-8219, point 43).
24 Il résulte de l'article 3, paragraphe 1, sous a), de la directive 2005-36 que constitue une profession réglementée une activité professionnelle qui, quant à ses conditions d'accès ou d'exercice, est directement ou indirectement régie par des dispositions législatives, réglementaires ou administratives imposant la possession de qualifications professionnelles déterminées.
25 En vertu des articles 3, paragraphe 1, sous b), et 11, sous a), i), de la directive 2005-36, les qualifications professionnelles concernées peuvent notamment consister en des qualifications attestées par un titre de formation ou une attestation de compétence délivrée sur la base d'un examen spécifique sans formation préalable.
26 M. Rubino fait valoir que l'ASN constitue une attestation de compétence délivrée sur la base d'un tel examen spécifique sans formation préalable au sens de l'article 11, sous a), i), de la directive 2005-36. Il en déduit qu'il s'agit d'une qualification professionnelle au sens de l'article 3, paragraphe 1, sous b), de cette directive et que, par voie de conséquence, la profession de professeur d'université est, en Italie, une profession réglementée au sens de l'article 3, paragraphe 1, sous a), de ladite directive. M. Rubino en conclut que, en vertu de l'article 13, paragraphe 1, de celle-ci, les qualifications qu'il a obtenues en Allemagne lui donnent le droit d'être inscrit sur la liste des titulaires de l'ASN.
27 Il convient toutefois de relever qu'il résulte de la jurisprudence que les systèmes généraux de reconnaissance des diplômes établis par les directives 89-48 et 92-51 ne portent pas sur le choix des procédures de sélection et de recrutement prévues pour pourvoir un emploi et que ces systèmes ne sauraient être invoqués pour fonder un droit à être effectivement recruté. Lesdits systèmes se limitent, en effet, à imposer la reconnaissance des qualifications obtenues dans un État membre afin de permettre à celui qui les possède de postuler à un emploi dans un autre État membre, selon les procédures de sélection et de recrutement qui y régissent l'accès à une profession réglementée (voir en ce sens, en ce qui concerne la directive 89-48, arrêt Burbaud, précité, point 91). Ces principes demeurent inchangés à la suite de la réorganisation et de la rationalisation résultant de l'adoption de la directive 2005-36.
28 Partant, un demandeur ne saurait se prévaloir de la directive 2005-36 pour obtenir d'être dispensé d'une partie d'une procédure de sélection et de recrutement.
29 Or, il ressort du dossier soumis à la Cour et de la réglementation italienne citée par la juridiction de renvoi que l'obtention de l'ASN constitue une étape de sélection dans la procédure de recrutement des professeurs d'université.
30 Cette procédure comprend en effet deux étapes dont l'obtention de l'ASN constitue la première. Les titulaires de ce titre voient leurs noms inscrits sur une liste des titulaires de l'ASN et peuvent ensuite, dans la seconde étape de la procédure de sélection, se porter candidat pour un poste spécifique auprès d'une université et, par conséquent, être recrutés selon des critères qui varient selon les universités.
31 En ce qui concerne plus particulièrement la procédure de sélection menant à l'obtention de l'ASN, l'article 1er, paragraphe 5, sous a), 1), de la loi nº 230-2005 ainsi que les articles 3, paragraphe 2, et 9, paragraphe 9, du décret législatif nº 164-2006 prévoient qu'un nombre maximal de personnes pouvant obtenir ce titre est fixé d'avance pour chaque discipline en fonction des besoins indiqués par les universités. En outre, il résulte des articles 1er, paragraphe 8, de la loi nº 230-2005 et 9 du décret législatif nº 164-2006 que la sélection se fait sur la base d'une évaluation comparative des candidats qui se présentent, plutôt que par l'application de critères absolus. Par ailleurs, en vertu des articles 1er, paragraphe 6, de la loi nº 230-2005 et 3, paragraphe 4, du décret législatif nº 164-2006, l'ASN est valide pendant une période limitée dans le temps.
32 Il convient de constater que le fait d'être retenu à l'issue d'une procédure visant à sélectionner un nombre prédéfini de personnes sur la base d'une évaluation comparative des candidats, plutôt que par l'application de critères absolus, et conférant un titre dont la validité est strictement limitée dans le temps ne saurait être considéré comme une qualification professionnelle au sens de l'article 3, paragraphe 1, sous b), de la directive 2005-36.
33 Dans ce contexte, la circonstance, invoquée par M. Rubino, que l'article 1er, paragraphe 9, de la loi nº 230-2005 permet aux universités, par dérogation aux règles normalement applicables, de pourvoir 10 % des postes de professeur par la nomination directe de chercheurs spécialisés étrangers ou italiens employés à l'étranger et ayant obtenu à l'étranger un titre équivalent à l'ASN n'est pas pertinente en elle-même pour la réponse à apporter à la question posée au regard de la directive 2005-36. Il est au demeurant constant que, dans la procédure au principal, M. Rubino n'invoque pas ladite disposition dérogatoire, mais demande à être inclus dans la liste des titulaires de l'ASN sans devoir se présenter à la procédure de sélection prévue par la réglementation nationale applicable.
34 Eu égard à la référence dans la question posée aux dispositions du traité CE concernant les libertés fondamentales, il convient néanmoins de rappeler que les articles 39 CE et 43 CE garantissent aux ressortissants des États membres l'accès, sans discrimination fondée sur la nationalité, aux activités salariées et non salariées. Il incombe par conséquent aux autorités nationales de veiller notamment à ce que, dans le cadre d'une procédure de sélection telle que celle menant à l'inscription sur la liste des titulaires de l'ASN, les qualifications acquises dans d'autres États membres soient reconnues à leur juste valeur et dûment prises en compte (voir, par analogie, arrêt Burbaud, précité, points 99 et 100).
35 Au vu de l'ensemble de ces considérations, il convient de répondre à la question posée que le fait que l'accès à une profession soit réservé aux candidats ayant été retenus à l'issue d'une procédure visant à sélectionner un nombre prédéfini de personnes sur la base d'une évaluation comparative des candidats, plutôt que par l'application de critères absolus, et conférant un titre dont la validité est strictement limitée dans le temps n'a pas pour conséquence que ladite profession constitue une profession réglementée au sens de l'article 3, paragraphe 1, sous a), de la directive 2005-36.
36 Néanmoins, les articles 39 CE et 43 CE imposent que les qualifications acquises dans d'autres États membres soient reconnues à leur juste valeur et dûment prises en compte dans le cadre d'une telle procédure.
Sur les dépens
37 La procédure revêtant, à l'égard des parties au principal, le caractère d'un incident soulevé devant la juridiction de renvoi, il appartient à celle-ci de statuer sur les dépens. Les frais exposés pour soumettre des observations à la Cour, autres que ceux desdites parties, ne peuvent faire l'objet d'un remboursement.
Par ces motifs, LA COUR (huitième chambre) dit pour droit:
Le fait que l'accès à une profession soit réservé aux candidats ayant été retenus à l'issue d'une procédure visant à sélectionner un nombre prédéfini de personnes sur la base d'une évaluation comparative des candidats, plutôt que par l'application de critères absolus, et conférant un titre dont la validité est strictement limitée dans le temps n'a pas pour conséquence que ladite profession constitue une profession réglementée au sens de l'article 3, paragraphe 1, sous a), de la directive 2005-36-CE du Parlement européen et du Conseil, du 7 septembre 2005, relative à la reconnaissance des qualifications professionnelles.
Néanmoins, les articles 39 CE et 43 CE imposent que les qualifications acquises dans d'autres États membres soient reconnues à leur juste valeur et dûment prises en compte dans le cadre d'une telle procédure.