Livv
Décisions

TUE, 6e ch., 22 décembre 2009, n° T-254/08

TRIBUNAL DE L'UNION EUROPÉENNE

Ordonnance

PARTIES

Demandeur :

Associazione Giùlemanidallajuve

Défendeur :

Commission européenne

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Meij

Juges :

MM. Tchipev, Truchot

Avocats :

Mes Misson, Kettels, Ernes, Pel

TUE n° T-254/08

22 décembre 2009

LE TRIBUNAL DE PREMIÈRE INSTANCE DES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES (sixième chambre),

Antécédents du litige et procédure

1 La requérante, l'association sans but lucratif Gìulemanidallajuve, créée le 30 août 2006, est composée d'une cinquantaine de membres qui sont associés, actionnaires et/ou supporters sympathisants du Juventus Football Club SpA de Turin (ci-après la " Juventus "). Aux termes de l'article 4 de ses statuts, elle a notamment pour but de " promouvoir toutes initiatives auprès de toute autorité judiciaire et/ou administrative et/ou sportive, de tout institution, organisme, établissement public et/ou privé, visant à protéger les intérêts des sociétaires, actionnaires, supporters-sympathisants de [la Juventus], dans le but d'obtenir toutes les améliorations possibles de la protection juridique en défense de leurs intérêts économiques, financiers, moraux et de leur image ainsi que de toutes les problématiques technico-juridiques connexes ".

2 Par lettre du 1er juin 2007, la requérante a déposé auprès de la Commission européenne une plainte fondée sur l'article 7, paragraphe 2, du règlement (CE) n° 1-2003 du Conseil, du 16 décembre 2002, relatif à la mise en œuvre des règles de concurrence prévues aux articles 81 CE et 82 CE (JO 2003, L 1, p. 1), contre la Federazione Italiana Giuoco Calcio (FIGC, Fédération italienne de football), le Comitato Olimpico Nazionale Italiano (CONI, Comité olympique national italien), l'Union des associations européennes de football (UEFA) et la Fédération internationale de football association (FIFA). Cette plainte concernait de prétendues violations des articles 81 CE et 82 CE en rapport avec des mesures disciplinaires infligées à la Juventus et leurs fondements juridiques.

3 En effet, en 2006, à la suite d'une enquête sportive concernant plusieurs clubs de football italiens, la Juventus s'était vu infliger, par la Cour fédérale de la FIGC, plusieurs sanctions disciplinaires prévues par le code de la justice sportive de la FIGC, à savoir la révocation des titres de champion d'Italie en 2005 et en 2006, la rétrogradation à la dernière place du classement final du championnat 2005/2006 - avec pour conséquence, une relégation en série B (deuxième division) - 17 points de pénalité au classement du championnat 2006/2007 et une amende de 120 000 euro. À la suite d'un recours de la Juventus contre cette décision finale de la FIGC devant la chambre de conciliation et d'arbitrage du CONI, celle-ci a, par décision du 27 octobre 2006, ramené les points de pénalité de 17 à 9 et confirmé les autres sanctions.

4 Parallèlement, la Juventus avait introduit un recours devant le Tribunale amministrativo regionale di Lazio (tribunal administratif régional du Latium, ci-après le " TAR "), en vue d'obtenir la suspension et l'annulation de la décision de la cour fédérale de la FIGC. Par la suite, la Juventus a décidé d'abandonner le recours devant le TAR. Par ailleurs, la requérante a également déposé un recours auprès du TAR contre les sanctions imposées à la Juventus. Par arrêt du 15 mai 2008, ce recours a été déclaré irrecevable.

5 Dans sa plainte, la requérante soutenait que l'attribution de compétences disciplinaires aux organes de la FIGC et du CONI - à savoir la commission d'appel fédérale et la cour fédérale de la FIGC, et la chambre de conciliation et d'arbitrage du sport du CONI -, la composition de ces organes, ainsi que les règles et les procédures qu'ils appliquent, étaient illégaux. De plus, les mesures disciplinaires qu'ils auraient prises à l'encontre de la Juventus pour avoir influencé des arbitres dans la compétition italienne seraient d'une gravité injustifiée et porteraient atteinte à la Juventus et à nombre de ses supporters, actionnaires et sympathisants, à des titres divers. La FIGC, l'UEFA, la FIFA et le CONI auraient conclu des accords ou adopté des pratiques concertées restreignant illicitement la concurrence entre les clubs de football. En outre, la FIGC, l'UEFA, la FIFA et le CONI auraient indépendamment les uns des autres et/ou collectivement abusé de leur position dominante.

6 Le 4 août 2007, la requérante a communiqué des informations complémentaires à la Commission.

7 À l'invitation de la Commission, les quatre associations sportives contre lesquelles la plainte était dirigée ont présenté leurs observations sur la plainte entre le 12 septembre et le 15 octobre 2007.

8 Par lettre du 29 août 2007, la requérante a fourni des informations complémentaires à la Commission.

9 Par lettre du 19 février 2008, elle a invité cette institution à prendre position sur sa plainte, en application de l'article 232 CE, et lui a communiqué de nouveaux éléments d'information.

10 Par requête déposée au greffe du Tribunal le 26 juin 2008, la requérante a introduit le présent recours.

11 Par lettre du 29 août 2008, la Commission a informé la requérante de son intention de ne pas donner suite à la plainte pour un ensemble de raisons qu'elle a exposées dans cette lettre, et lui a imparti, conformément à l'article 7, paragraphe 1, du règlement (CE) n° 773-2004 de la Commission, du 7 avril 2004, relatif aux procédures mises en œuvre par la Commission en application des articles 81 CE et 82 CE (JO L 123, p. 18), un délai pour faire connaître son point de vue par écrit.

12 Dans son mémoire en défense déposé au greffe du Tribunal le 5 décembre 2008, la Commission a présenté à titre principal une demande de non-lieu à statuer, à la suite de la lettre du 29 août 2008, susvisée. À titre subsidiaire, elle a soutenu que le recours était irrecevable et, en tout état de cause, non fondé.

13 Par mémoire déposé au greffe du Tribunal le 26 janvier 2009, la requérante a présenté ses observations sur cette demande de non-lieu à statuer.

14 Par lettre du 26 mai 2009, la Commission a produit, à l'appui de sa demande susmentionnée de non-lieu à statuer, la décision finale de rejet de la plainte, adoptée le 12 mai 2009 en application de l'article 7, paragraphe 2, du règlement n° 773-2004.

15 La requérante, invitée à présenter ses observations sur cette lettre et les conséquences qu'il conviendrait d'en tirer sur la suite de la procédure, n'a pas présenté d'observations.

Conclusions des parties

16 Dans la requête, la requérante conclut à ce qu'il plaise au Tribunal :

- constater la carence de la Commission en ce qu'elle s'est abstenue de prendre position sur sa plainte, en violation du droit communautaire de la concurrence ;

- enjoindre la Commission de prendre position sur la plainte et d'apporter toutes les précisions nécessaires à cette fin.

17 Dans son mémoire en défense, la Commission conclut à ce qu'il plaise au Tribunal :

- déclarer qu'il n'y a pas lieu de statuer ;

- à titre principal, condamner la requérante aux dépens et, à titre subsidiaire, déclarer que chaque partie supportera ses propres dépens.

18 Dans ses observations sur la demande de non-lieu à statuer, la requérante a conclu à ce qu'il plaise au Tribunal :

- déclarer le recours recevable et fondé ;

- en conséquence, constater la carence de la Commission et lui enjoindre de prendre position sur la plainte.

En droit

19 En vertu de l'article 113 du règlement de procédure du Tribunal, le Tribunal peut à tout moment, d'office, les parties entendues, constater que le recours est devenu sans objet et qu'il n'y a plus lieu de statuer.

20 En l'espèce, le Tribunal s'estime suffisamment éclairé par les pièces du dossier et décide de statuer sans poursuivre la procédure.

21 Il importe tout d'abord de rappeler que, selon une jurisprudence constante, la voie de recours prévue à l'article 232 CE est fondée sur l'idée que l'inaction illégale de l'institution mise en cause permet de saisir le juge communautaire afin que celui-ci déclare que l'abstention d'agir est contraire au traité, lorsque l'institution concernée n'a pas remédié à cette abstention (arrêt de la Cour du 24 novembre 1992, Buckl e.a./Commission, C-15-91 et C-108-91, Rec. p. I-6061, point 14, et ordonnance du Tribunal du 29 avril 2009, HALTE/Commission, T-58-06, non publiée au Recueil, point 27).

22 Lorsqu'une prise de position intervient postérieurement à l'introduction d'un recours en carence, elle met fin à l'inaction de la Commission et prive de son objet ce recours (arrêt du Tribunal du 7 mars 2002, Intervet International/Commission, T-212-99, Rec. p. II-1445, point 67, et ordonnance HALTE/Commission, précitée, point 28).

23 La circonstance que la prise de position de l'institution ne donne pas satisfaction à la requérante est à cet égard indifférente. En effet, l'article 232 CE vise la carence par l'abstention de statuer ou de prendre position et non l'adoption d'un acte différent de celui que les intéressés auraient souhaité ou estimé nécessaire (arrêt Buckl e.a./Commission, précité, points 16 et 17, et ordonnance HALTE/Commission, précitée, point 29).

24 En l'espèce, il y a lieu de constater que, par la décision du 12 mai 2009, susmentionnée, adoptée en vertu de l'article 7, paragraphe 2, du règlement n° 773-2004, la Commission a rejeté la plainte de la requérante.

25 Cette décision constitue ainsi une prise de position de la Commission au sens de l'article 232 CE, adoptée à la suite de l'invitation à agir qui lui avait été adressée par la requérante le 19 février 2008.

26 Il s'ensuit que la Commission a mis fin, postérieurement à l'introduction du présent recours, à la carence qui lui était reprochée.

27 Dans ces conditions, il n'y a plus lieu de statuer sur le présent recours.

Sur les dépens

28 L'article 87, paragraphe 6, du règlement de procédure dispose que, en cas de non-lieu à statuer, le Tribunal règle librement les dépens. Le Tribunal estime qu'il trouve, dans les circonstances de la cause, des motifs suffisants pour ordonner que chaque partie supporte ses propres dépens.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (sixième chambre)

ordonne :

1) Il n'y a plus lieu de statuer sur le présent recours.

2) L'Associazione Giùlemanidallajuve et la Commission européenne supporteront leurs propres dépens.