CA Pau, ch. soc., 14 septembre 2009, n° 07-03928
PAU
Arrêt
Confirmation
PARTIES
Demandeur :
Viola
Défendeur :
Jun (ès qual.), MR immobilier (SARL), CGEA Bordeaux
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Zanghellini
Conseillers :
Mmes Robert, Page
Avocats :
Selarl Lamorere-François, Me Camescasse
Faits et procédure
Monsieur Patrice Viola a signé un contrat de mandat d'agent commercial avec la SARL MR immobilier le 4 mars 2004. Il a reçu le 19 avril 2005 une lettre l'informant de la rupture du contrat d'agent commercial pour faute grave. Il a saisi le conseil des prud'hommes d'une demande de requalification de son mandat d'agent commercial en contrat de travail avec toutes ses conséquences de droit.
Le Conseil des prud'hommes de Dax, section commerce, par jugement contradictoire du 11 octobre 2007, auquel il conviendra de se reporter pour plus ample exposé des faits, des moyens et de la procédure a débouté Monsieur Patrice Viola de l'intégralité de ses demandes et la SARL MR immobilier de ses demandes reconventionnelles et il a condamné Monsieur Patrice Viola aux dépens de l'instance.
Le conseil des prud'hommes a retenu que le fait pour le salarié d'invoquer qu'il n'exerçait pas ses fonctions de manière indépendante et qu'il n'avait aucune liberté dans l'exécution de sa mission était insuffisant pour remettre en cause son statut d'agent commercial alors même qu'au moment de la rupture il se reconnaît comme un agent commercial et invoque la facturation de ces honoraires.
Monsieur Patrice Viola a interjeté appel de ce jugement le 30 novembre 2007.
Les parties ont comparu à l'audience par représentation de leur conseil respectif.
Prétentions et moyens des parties
Par conclusions déposées le 16 février 2009 reprises à l'audience, Monsieur Patrice Viola demande à la cour de déclarer l'appel recevable, de réformer le jugement, d'ordonner la jonction de l'appel en cause formé contre Maître Jun ès qualités de mandataire liquidateur de la SARL MR immobilier, de requalifier le contrat de mandat en contrat de travail et de condamner la SARL MR immobilier à payer :
- 1 871,60 euro au titre des rémunérations impayées sur le fondement de l'article 1134 du Code civil,
- 15 000 euro au titre de l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,
- 4 000 euro en réparation de son préjudice matériel,
- 3 000 euro sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile,
- de fixer ces sommes au passif de la SARL MR immobilier et de condamner la SARL MR immobilier aux entiers dépens de première instance et d'appel.
Monsieur Patrice Viola fait valoir l'existence entre lui-même et son employeur d'un lien de subordination dans la mesure où il faisait partie d'un service organisé qui l'obligeait à respecter strictement des horaires et des jours de présence, qu'il devait en outre accomplir des obligations supplémentaires étrangères à son mandat, tâches ménagères et de secrétariat. Il critique que le jugement de première instance qui retient le respect strict de ses obligations déclaratives et de son statut pour écarter l'existence d'un contrat de travail sans analyser les relations factuelles évoquées qui permettent de caractériser le lien de subordination.
Maître Jun ès qualités de mandataire liquidateur de la SARL MR immobilier, intimé, par conclusions déposées le 29 mai 2009 reprises à l'audience demande à la cour de confirmer le jugement, de le condamner à paver la somme de 2 000 euro par application de l'article 700 du Code de procédure civile et de le condamner aux entiers dépens d'appel.
Subsidiairement si la cour estimait devoir réformer le jugement et condamner Monsieur Viola à rembourser 7 159,79 euro de TVA et 25 398,02 euro à titre du trop-perçu des rétrocessions.
Maître Jun fait valoir que Monsieur Patrice Viola ne s'explique pas plus avant sur l'argumentation développée selon laquelle un lien de subordination existerait dans la mesure où il faisait partie d'un service organisé qui l'obligeait à respecter strictement des horaires et des jours de présence et d'accomplir des obligations supplémentaires étrangères à son mandat qu'en renvoyant aux pièces 4, 5, 6 de son dossier qui ne font pas la preuve du lien de subordination. Il rappelle par ailleurs que le salarié n'a saisi le conseil des prud'hommes que postérieurement à une assignation qu'il a lui-même reçu l'invitant à comparaître devant le Tribunal de grande instance de Dax pour concurrence déloyale, la SARL MR immobilier s'était aperçue que le fichier client de l'agence dans laquelle Monsieur Patrice Viola travaillait profitait à une nouvelle agence la SARL Europa Aquitaine et qu'un procès-verbal de constat a été dressé par huissier démontrant que sur les 15 premiers mandats de vente enregistrés par cette société, 13 étaient détenus pendant la même période par la SARL MR immobilier alors même que figurait dans les contrats d'agents commerciaux une clause de non-concurrence sur le secteur pendant un an.
Le CGEA de Bordeaux, intimé, par conclusions déposées le 29 mai 2009 reprises à l'audience demande à la cour de confirmer le jugement, de le débouter de l'ensemble de ses demandes,
Vu l'article L. 625-3 du Code de commerce,
Vu l'article L. 3253-8 du Code du travail,
En tout état de cause, rappeler le caractère subsidiaire de l'intervention du CGEA,
- dire et juger que la décision est simplement opposable au CGEA dans le cadre des dispositions légales et réglementaires applicables,
- dire et juger que l'AGS ne peut procéder à l'avance des créances que dans les termes et conditions résultant des dispositions des articles L. 3253-8 du Code du travail, L. 3253-17 et L. 3253-19 et suivants du Code du travail,
- dire et juger que l'obligation de faire l'avance de la somme à laquelle serait évalué le montant des créances garanties ne pourra s'exécuter que sur présentation d'un relevé par le mandataire judiciaire et justification par celui-ci de l'absence de fonds disponibles entre ses mains pour procéder à leur paiement,
- dire et juger que l'AGS ne saurait être tenu aux dommages et intérêts et au titre de l'article 700 du Code de procédure civile pour frais irrépétibles et autres indemnités n'ayant pas le caractère de créances salariales,
- condamner Monsieur Patrice Viola aux entiers dépens d'appel.
LA COUR se réfère expressément aux conclusions visées plus haut pour l'exposé des moyens de fait et de droit.
Motifs de la décision
La cour examinera successivement les points litigieux au vu du dossier de la procédure, des éléments des débats et des pièces régulièrement produites au dossier.
Sur la recevabilité de l'appel:
L'appel formalisé dans les délais et formes requis est recevable.
Au fond,
Sur la qualification des relations contractuelles :
L'application du statut d'agent commercial ne dépend ni de la volonté exprimée par les parties dans le contrat, ni de la dénomination qu'elles ont donnée à leur convention mais des conditions dans lesquelles l'activité est effectivement exercée qui caractérisent ou non l'existence d'un lien de subordination qui se définit par l'exécution d'un travail sous l'autorité d'un employeur qui a le pouvoir de donner des ordres et des directives, d'en contrôler l'exécution et de sanctionner les manquements de son subordonné.
Monsieur Patrice Viola invoque l'existence d'un lien de subordination caractérisé par le fait qu'il faisait partie d'un service organisé qui l'obligeait à respecter strictement des horaires et des jours de présence, qu'il devait en outre accomplir des obligations supplémentaires étrangères à son mandat.
Monsieur Patrice Viola ne s'explique effectivement pas plus avant sur ses obligations, il produit aux débats un seul compte rendu de réunion du 10 février 2004 et deux attestations dont l'une émane de sa compagne desquels il résulte que les seules obligations mises à la charge des commerciaux par la SARL MR immobilier étaient de se réunir tous les matins à 9 heures pour faire le point et de tenir par roulement une permanence à l'agence, le dernier de permanence le soir devant assurer le ménage.
Toute convention comporte des obligations réciproques et il ne résulte pas des constatations tenant à l'obligation de réunir les commerciaux tous les matins à 9 heures et de les obliger à tenir une permanence à tour de rôle dont la fréquence et la durée n'est même pas explicitée que Monsieur Patrice Viola, précisément n'ait pas eu la possibilité d'organiser par ailleurs son travail comme il l'entendait, mis à part ces obligations de présence à l'agence, il n'invoque aucun ordre, directive, ou contrôle dans l'exécution de son travail d'agent commercial immobilier,
Par ailleurs, il y a lieu de constater qu'après avoir reçu le 19 avril 2005 la lettre de rupture du contrat d'agent commercial pour faute grave, il n'a saisi le conseil des prud'hommes d'une demande de requalification de son mandat d'agent commercial que le 15 septembre 2006 alors qu'il avait reçu le 6 février 2006 de la SARL MR immobilier une assignation à comparaître devant le Tribunal de grande instance de Dax pour l'entendre condamner à payer 90 000 euro à titre de dommages et intérêts pour concurrence déloyale.
Le lien de subordination n'étant pas démontré la demande de requalification sera rejetée et le jugement confirmé.
Sur le complément de rémunération de 1 871,60 euro :
La compétence de la juridiction est liée à l'existence d'un contrat de travail article L. 511-1 du Code du travail, elle ne peut donc que renvoyer les parties à mieux se pourvoir sur le paiement de commissions qui ne sont pas de nature salariale.
Sur l'article 700 du Code de procédure civile et les dépens;
Il est équitable ne pas faire application de l'article 700 du Code de procédure civile.
Monsieur Patrice Viola qui succombe sera condamné aux entiers dépens d'appel.
Par ces motifs, LA COUR, Statuant publiquement, contradictoirement, en matière sociale et en dernier ressort. Déclare l'appel recevable, Confirme le jugement en toutes ses dispositions. Y ajoutant. Dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du Code de procédure civile, Condamne Monsieur Patrice Viola aux entiers dépens d'appel.