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Décisions

CA Paris, Pôle 5 ch. 4, 23 septembre 2009, n° 09-14211

PARIS

Arrêt

PARTIES

Demandeur :

Baby and Children (SA)

Défendeur :

Alt Partners (SA)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Le Fèvre

Conseillers :

MM. Roche, Birolleau

Avoués :

SCP Verdun-Seveno, Me Melun

Avocats :

Mes Berthault, Malard

T. com. Paris, du 29 mai 2009

29 mai 2009

LA COUR,

Vu le jugement du 29 mai 2009 par lequel le Tribunal de commerce de Paris a, notamment :

- dit la société Alt Partners mal fondée en l'exception d'incompétence qu'elle a soulevée et l'en a débouté,

- dit que cette dernière s'était rendue coupable d'actes de concurrence déloyale au préjudice de la société Baby & Children,

- dit que celle-ci s'était rendue coupable de dénigrement au préjudice de la société Alt Partners,

- dit les parties mal fondées en leurs demandes plus amples ou contraires,

- condamné la société Baby & Children aux dépens;

Vu l'appel interjeté par la société Baby & Children le 6 juillet 2009 et l'ordonnance sur requête rendue par le Premier Président de la cour de céans le 10 juillet 2009 et l'autorisant à assigner à jour fixe la société Alt Partners;

Vu, enregistrées le 10 juillet 2009, les conclusions de la société Baby & Children et tendant à faire:

- confirmer le jugement en ce que le tribunal saisi s'est déclaré compétent et a dit que la société Alt Partners s'était rendue coupable d'actes de concurrence déloyale,

- l'infirmer pour le surplus,

- condamner la société Alt Partners à lui verser à titre de dommages et intérêts la somme de 1 323 700 euro,

- débouter cette dernière de l'ensemble de ses demandes,

- la condamner à lui rembourser les frais de publication de la décision à intervenir dans les journaux et périodiques de son choix à hauteur de 20 000 euro et à lui verser la somme de 20 000 euro au titre des frais hors dépens;

Vu, enregistrées le 21 août 2009, les conclusions de la société Alt Partners et tendant à faire :

- à titre principal, réformer le jugement entrepris en ce que le tribunal s'est déclaré compétent, déclarer le Tribunal de commerce de Paris incompétent et renvoyer les parties à mieux se pourvoir devant le Tribunal de commerce de Clermont-Ferrand,

- à titre subsidiaire:

- constater qu'il n'existe aucun contrat de distribution exclusive entre les parties,

- constater que la rupture des relations commerciales est intervenue dans des conditions normales et pour des motifs légitimes,

- en conséquence réformer le jugement entrepris en ce qu'il a dit qu'elle-même s'était rendue coupable d'actes de concurrence déloyale,

- le confirmer en ce qu'il a dit que la société Baby & Children avait commis des actes de dénigrement,

- réformer la décision en ce qu'elle a rejeté ses demandes de ce chef, condamner la société Baby & Children à payer la somme de 150 000 euro, au titre du préjudice subi;

- la débouter de l'intégralité de ses demandes,

- la condamner à payer la somme de 50 000 euro du fait du nouvel acte de dénigrement perpétué en juin 2009,

- ordonner la publication du dispositif de l'arrêt, dans trois revues spécialisées de la distribution, aux choix de l'intimée, aux frais exclusifs et avancés de la société Baby & Children et dans la limite global de 20 000 euro,

- en tout état de cause

- condamner l'appelante aux entiers dépens ainsi qu'à lui verser la somme de 20 000 euro au titre des frais hors dépens;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que la société Alt Partners, laquelle, en sa qualité de fabricant ou de distributeur, propose à ses clients des articles de puériculture et des jeux d'éveil, avait noué depuis juin 2001 des relations commerciales avec la société Baby & Children qui exerce une activité semblable à la sienne et qui lui avait confié la commercialisation de l'intégralité de la marque Pinpon qu'elle diffusait elle-même directement jusqu'alors; que, toutefois, les relations entre les parties devaient se dégrader et la société Alt Partners qui reprochait à la société Baby & Children un "désengagement" de plus en plus caractérisé, l'obligeant, selon ses dires, à assurer l'intégralité du service après-vente de cette dernière ainsi que ses "nombreuses et régulières erreurs logistiques" a, par des courriers des 29 mars et 19 avril 2004, notifié à l'intéressée la rupture du lien commercial les unissant sous réserve d'un délai de 6 mois; que contestant les conditions de ladite rupture qu'elle a estimé brutale et abusive la société Baby & Children a, par acte du 4 mai 2005, assigné la société Alt Partners devant le Tribunal de commerce de Paris aux fins d'indemnisations de son préjudice; que c'est dans ces conditions qu'est intervenu le jugement susvisé présentement entrepris;

Considérant que la société Alt Partners excipe, à titre principal et avant toute défense au fond, de l'incompétence territoriale du Tribunal de commerce de Paris au profit de celui de Clermont-Ferrand, lieu de son siège social, et invoque à cet effet les dispositions de l'alinéa 1er de l'article 46 du Code de procédure civile; que si la société Baby & Children demande, pour sa part, la confirmation du jugement en ce que le tribunal saisi s'est déclaré compétent et soutient que "la compétence d'une juridiction s'apprécie au moment de l'introduction de l'instance" et qu' "en matière de demandes additionnelles (...) la compétence du tribunal initialement saisi est prorogée (...)", il convient, cependant, de rappeler que, par l'acte susmentionné du 4 mai 2005, l'appelante a assigné la société Alt Partners aux fins de la voir condamnée sur le fondement exclusif de la responsabilité délictuelle en invoquant l'article L. 442-6-5 du Code de commerce et le caractère abusif de la rupture des relations entre les parties; que, par ses dernières conclusions, les seules sur lesquelles la juridiction saisie est susceptible de se prononcer, la société Baby & Children a procédé à une complète substitution de la base légale de son action indemnitaire en fondant sa demande sur l'unique terrain de la responsabilité contractuelle et de la violation du contrat de distribution exclusive qui aurait existé entre les parties; qu'il ne s'agit ainsi aucunement, contrairement aux dires de l'appelante, de demandes additionnelles ou connexes qui justifieraient la "prorogation" ou l'extension de la compétence territoriale du Tribunal de commerce de Paris mais d'une modification du fondement de l'action entreprise, lequel est devenu purement contractuel; que, par suite, l'appelante ne saurait utilement invoquer à son profit les dispositions de l'alinéa 3 de l'article 46 susmentionné aux termes duquel le demandeur peut saisir "en matière délictuelle la juridiction du lieu du fait dommageable ou celle dans le ressort de laquelle le dommage a été subi"; que, dès lors, ne peuvent s'appliquer que les alinéas 1 et 2 du même article énonçant que "le demandeur peut saisir à son choix, outre la juridiction du lieu où demeure la défendeur : en matière contractuelle, la juridiction du lieu de la livraison effective de la chose ou du lieu de l'exécution de la prestation de service; (...)"; que, par ailleurs, le contrat de distribution dont fait état la société Baby & Children et qui aurait été violé par l'intimée exclut, de par sa nature même de contrat complexe, que puisse être identifié un quelconque "lieu de livraison" ou "d'exécution de la prestation de service" et qu'ainsi puisse jouer l'option prévue par les dispositions précitées; qu'il y a lieu, en conséquence, d'infirmer le jugement du chef de la compétence et de renvoyer la cause et les parties, conformément aux dispositions de l'article 79 du Code de procédure civile, devant la Cour d'appel de Riom, juridiction d'appel relativement à la juridiction consulaire de Clermont-Ferrand qui eût été compétente en première instance au regard du siège social sus-rappelé de la société intimée;

Sur l'application de l'article 700 du Code de procédure civil;

Considérant que l'équité commande, dans les circonstances de l'espèce, de condamner la société Baby & Children à verser à la société Alt Partners la somme de 3 000 euro sur le fondement de l'article susvisé;

Par ces motifs, - Infirme le jugement. - Déclare le Tribunal de commerce de Paris incompétent pour connaître du présent litige. - Renvoie la cause et les parties devant la Cour d'appel de Riom. - Condamne la société Baby & Children aux dépens de première instance et du présent appel avec recouvrement dans les conditions de l'article 699 du Code de procédure civile - La condamne aussi à payer à la société Alt Partners la somme de 3 000 euro au titre des frais hors dépens.