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Décisions

CA Paris, Pôle 5 ch. 4, 16 septembre 2009, n° 07-07051

PARIS

Arrêt

Confirmation

PARTIES

Demandeur :

Sun Bronzage (SARL)

Défendeur :

Alizés Diffusion (SA)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Le Fèvre

Conseillers :

MM. Roche, Birolleau

Avoués :

Me Huyghe, SCP Fisselier-Chiloux-Boulay

Avocats :

Mes Chollon, Yver, Kalopissis

T. com. Paris, du 12 mars 2007

12 mars 2007

LA COUR,

Vu le jugement du 12 mars 2007 du Tribunal de commerce de Paris qui a notamment débouté la SARL Sun Bronzage, ayant exploité sous l'enseigne "Point Soleil" un "Centre de bronzage" à Rennes en franchise, de ses demandes, notamment en nullité du contrat de franchise et en dommages-intérêts, formulées à l'encontre de la SA Alizés Diffusion, franchiseur et l'a condamnée à payer à cette dernière la somme de 5 238,15 euro avec intérêts au taux légal à compter du 23 septembre 2004 et capitalisation au titre de reliquat de redevance outre 2 000 euro au titre de l'article 700 du Code de procédure civile, et condamné sous astreinte la restitution de divers matériels;

Vu l'appel de la SARL Sun Bronzage et ses conclusions du 20 janvier 2009 par lesquelles elle demande à la cour d'infirmer le jugement; dire nul le contrat de franchise; condamner Alizés Diffusion à lui payer les sommes de 10 000 euro HT en remboursement des droits d'entrée, 7 050 euro HT soit 9 149,40 euro TTC au titre du remboursement des redevances de franchise, 40 245 euro HT au titre de la "prise en charge des marges bénéficiaires perçues par le franchiseur lors de la vente du matériel et des produits", 282 372,39 euro HT au titre du remboursement des investissements réalisés, 242 349 euro au titre du remboursement de la perte comptable; subsidiairement condamner Alizés Diffusion à lui payer les trois dernières sommes outre 36 000 euro de dommages-intérêts pour "manque à gagner en terme de salaire" pour manquements à l'exécution légale de la bonne foi du contrat de franchise; rejeter les demandes d'Alizés Diffusion et réclame 8 000 euro au titre de l'article 700 du Code de procédure civile;

Vu les conclusions du 12 mai 2009 de la SA Alizés Diffusion qui demande notamment à la cour de confirmer le jugement en ce qu'il a débouté Sun Bronzage et l'a condamnée au titre de redevance ; rejeter ses demandes; la condamner à lui payer 36 975 euro HT et 5 000 euro de dommages-intérêts en raison de la résiliation anticipée du contrat et 6 000 euro au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ; ordonner sous astreinte la restitution de matériel;

Considérant sur les fautes alléguées d'Alizés Diffusion que le centre de bronzage à l'enseigne Point Soleil exploité par la société Sun Bronzage a débuté son activité en mars 2003; que Sun Bronzage a résilié le contrat de franchise et cédé son fond de commerce en septembre 2004; qu'elle a exploité le centre pendant 18 mois ; qu'elle reproche notamment au franchiseur un manque de loyauté, un défaut d'information, la remise de documents trompeurs, spécialement les comptes prévisionnels d'exploitation;

Mais considérant que l'intimée fait justement valoir que c'est le 25 septembre 2002 que Mme Menival, future créatrice et dirigeante de la SARL Sun Bronzage a rencontré le directeur du réseau Point Soleil qui lui a remis le document précontractuel d'information; que ce n'est que le 21 octobre 2002 qu'un protocole d'accord a été signé pour la recherche de locaux ; que rien ne démontre que le local trouvé par Alizés Diffusion à Rennes n'ait pas été adapté ; que ce n'est que le 19 décembre 2002 que le contrat de franchise a été signé ; que Mme Menival, qui exploitait depuis 1985 un bar PMU à Rouen était une commerçante avisée capable de faire une appréciation économique ; que le livre du savoir-faire lui a été remis ; qu'elle a reçu une formation d'une journée, qu'elle n'a pas effectué d'autre formation, malgré le rappel, de cette obligation effectuée par deux courriers des 30 mai 2003 et 25 juin 2004 ; qu'Alizés Diffusion déclare ainsi que Mme Menival a continué à exploiter son bar PMU à Rouen et a laissé la gestion du centre et de "la caisse" à son employée Mlle Grossin;

Considérant en ce qui concerne spécifiquement les comptes de résultats prévisionnels que Sun Bronzage remarque qu'elle a réalisé sur 10 mois 24 663 euro de chiffre d'affaires en 2003, 32 549 euro en 2004, ce qui donne 42 658 euro en projection sur 12 mois ; que les prévisionnels, dont le dossier a été transmis à Mme Menival en décembre sont certes très optimistes, les chiffre d'affaires indiqués, incluant celui du "bronzage" et de la boutique de vente de produits divers étant au titre de la première année de 98 134 euro pour le premier prévisionnel 116 653 euro pour le second, ces chiffres étant respectivement de 122 310 euro et 143 205 euro pour la deuxième année, 152 973 euro et 179 839 euro pour la troisième année; que la distorsion entres ces prévisions et ce que Sun Bronzage a réalisé est manifeste ; que ces chiffres, communiqués "à titre indicatif" par Alizés, paraissent résulter d'un calcul de moyenne nationale, ce qui est peu pertinent;

Mais considérant que Mme Menival disposait de tous les éléments pour effectuer les corrections utiles ; que le premier prévisionnel précise expressément qu'il est calculé sur 312 jours par an, 34 clients par jour, la première année, 42 la deuxième année, 53 la troisième année ; que le second prévisionnel mentionne qu'il est calculé sur 360 jours par an, soit une ouverture de sept jours sur sept toute l'année avec nombre journalier de clients pour les trois premières années, de 35, 43 et 54 respectivement; que le centre n'ayant ouvert que six jours par semaine avec plusieurs semaines de fermeture en été, il était exclu que les chiffres, même du premier prévisionnel calculé sur 312 jours, puissent être atteints; qu'il résultait de la liste des "centres Point Soleil" figurant dans le document d'information qu'une large majorité d'entre eux, de l'ordre de 80 %, était situé à Paris et en région parisienne ; que selon le tableau des chiffres d'affaires versés au débat, apparemment établi par l'appelante en fonction d'éléments comptables recueillis auprès des registres du commerce, la quasi totalité des centres importants réalisent plus de 150 000 euro de chiffre d'affaires par an sont situés dans la région parisienne ; que la future dirigeante de Sun Bronzage pouvait recueillir de tels renseignements auprès des registres du commerce et des autres franchisés au cours de l'automne 2002 ; que compte tenu de la sociologie, de la situation économique, de la position géographique proche de la mer, de la ville de Rennes, et du fait que l'activité de bronzage artificiel y était encore apparemment inconnue lors de la création de Sun Bronzage, il était aisé pour une commerçante expérimentée telle que Mme Menival, de prévoir qu'elle ne pourrait avoir 34 clients par jour dès la première année ; que Sun Bronzage aurait d'ailleurs vraisemblablement pu développer son activité sur plusieurs années ; que selon les chiffres communiqués par elle-même, son successeur la SARL Bretagne Couleur Soleil, crée en mai 2005, n'a réalisé qu'un chiffre d'affaires de 63 000 euro HT sur 18 mois en 2005/2006 mais 98 000 euro HT en 2007, augmentation très importante, atteignant à la troisième année d'exploitation, le chiffre indiqué dans le prévisionnel, pour la première année ; qu'il n'est donc pas impossible d'atteindre sur Rennes le chiffre de l'ordre de 100 000 euro ; que Sun Bronzage a fait le choix d'arrêter l'exploitation dès la seconde année ; que cela ne saurait lui être reproché mais qu'il n'apparaît pas qu'elle ait été délibérément trompée ni que son consentement ait été de manière légitime vicié substantiellement;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède et des motifs non contraires que du tribunal que la cour ne peut ni prononcer la nullité du contrat ni constater de violation par Alizés Diffusion de ses obligations pouvoir avoir droit à dommages-intérêts au profit de Sun Bronzage;

Considérant qu'il y a lieu de remarquer surabondamment que le prétendu manque à gagner en terme de salaire de Mme Menival n'est pas un préjudice de la société Sun Bronzage, personne juridique distincte, et que la demande de la société à ce titre est irrecevable;

Considérant sur les demandes de dommages-intérêts d'Alizés Diffusion que c'est de manière pertinente par des motifs que la cour adopte que le tribunal a constaté qu'Alizés Diffusion avait accepté la résiliation du contrat par Sun Bronzage ; qu'en cas de résiliation, comme en l'espèce, concomitante à la cessation d'activité du franchisé, aucune indemnité n'est stipulée par l'article 18-1 du contrat au profit du franchiseur ; que la référence à l'indemnité, prévue par l'article 18-4, en cas de résiliation par le franchiseur "aux torts et griefs du franchisé" pour faute de celui-ci, contrepartie d'un manquement et réparant un préjudice, n'a aucune pertinence en l'espèce, à défaut de résiliation par le franchiseur et de "torts" du franchisé ; qu'il ne peut être imputé à faute à Sun Bronzage d'avoir cessé l'exploitation d'une activité alors non rentable, en tous cas déficitaire, et de ne pas avoir pris le risque de la continuation dans l'espoir d'une rentabilité future; qu'au surplus Alizés Diffusion n'a subi aucun préjudice, n'ayant aucun intérêt au maintien d'une exploitation qu'elle classe elle-même au dernier rang dans ses tableaux comparatifs; qu'il en est de même en ce qui concerne le défaut de préemption lors de la cession de fonds; qu'apparemment, Sun Bronzage a eu, dès mai 2005, un successeur pour l'exploitation d'un centre Point Soleil à Rennes, la SARL Bretagne Couleur Soleil; que la prétention d'Alizés Diffusion de percevoir à titre de dommages-intérêts les redevances qui auraient été payées par Sun Bronzage, de manière pour le moins très hypothétique, jusqu'à 2011, plus de celles qui sont payées par Bretagne Couleur Soleil, est totalement infondée;

Considérant que la cour se réfère pour le surplus aux motifs non contraires du tribunal que les restitutions ayant été ordonnées par le tribunal, il est inutile de les réitérer ; que les difficultés d'exécution sont de la compétence du juge d'exécution;

Considérant sur les frais irrépétibles et les dépens qu'il est équitable de ne pas prononcer de condamnation en cause d'appel en application de l'article 700 du Code de procédure civile; que l'appelante succombant pour l'essentiel, devra les dépens d'appel;

Par ces motifs, LA COUR, Confirme le jugement entrepris. Déboute les parties de leurs autres demandes. Met à la charge de l'appelante les dépens d'appel qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile.