CA Dijon, ch. soc., 29 janvier 2009, n° 08-00334
DIJON
Arrêt
Infirmation
PARTIES
Demandeur :
Alves de Barros
Défendeur :
Tropet
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président de chambre :
M. Drapier
Conseillers :
MM. Hoyet, Vignard
Avocats :
Mes Marque, Merienne
Monsieur Adriano Alves de Barros a été engagé par Monsieur Patrice Tropet, le 19 janvier 1999, en qualité d'électricien.
Le 4 mai 2006, Monsieur Alves de Barros a saisi le Conseil de prud'hommes de Dijon afin d'obtenir le paiement d'heures supplémentaires. Il a été licencié pour faute grave, le 25 octobre 2006. Il a contesté cette mesure et a sollicité le paiement d'une indemnité pour travail dissimulé.
Par jugement du 10 avril 2008, le Conseil de prud'hommes de Dijon a:
- dit que le licenciement reposait sur une cause réelle et sérieuse,
- constaté que Monsieur Alves de Barros ne demandait ni indemnité de préavis, ni indemnité de licenciement,
- condamné Monsieur Tropet à payer à Monsieur Alves de Barros la somme de 450 euro en application de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile,
Appelant de cette décision, Monsieur Alves de Barros demande d'infirmer le jugement et de condamner Monsieur Tropet à lui verser les sommes suivantes :
- 3 033,40 euro à titre d'indemnité compensatrice de préavis,
- 303,34 euro au titre des congés payés afférents,
- 1 190 euro au titre de l'indemnité de licenciement,
- 18 200,40 euro à titre de dommages-intérêts pour licenciement abusif,
- 9 100 euro en réparation de son préjudice moral,
- 2 400 euro au titre d'heures supplémentaires,
- 240 euro au titre des congés payés afférents,
- 1 150 euro au titre des repos compensateurs,
- 115 euro au titre des congés payés afférents,
- 9 100 euro à titre d'indemnité pour travail dissimulé,
- 2 500 euro en application de l'article 700 du Code de procédure civile.
Monsieur Tropet conclut au rejet de toutes les prétentions formées par Monsieur Alves de Barros.
Pour un plus ample exposé des demandes et moyens des parties, la cour entend se référer à leurs conclusions reprises oralement à l'audience et régulièrement échangées et déposées.
Motifs
Sur le licenciement, Attendu que la lettre du 25 octobre 2006, avisant Monsieur Alves de Barros de son licenciement est rédigée comme suit:
"Nous avons eu à déplorer de votre part un agissement constitutif d'une faute grave.
En effet le 9 octobre dernier qui correspondant pour vous à un jour de repos, nous vous avons surpris avec un témoin, Monsieur Tribolet, en train de travailler pour votre propre compte sur le chantier de Madame Caquais à Asnières au (Bois des grottes).
Vous procédiez à l'installation de l'éclairage extérieur sur un mur de soutènement.
Or, nous vous rappelons que Madame Caquais est une cliente de l'entreprise et que ces prestations n'étaient pas comprises dans notre marché.
Ce travail fait en toute illégalité constitue un acte de concurrence déloyale vis-à-vis de l'entreprise qui met en cause la bonne marche du service.
Les explications recueillies auprès de vous au cours de notre entretien du 20 octobre ne nous ont pas permis de modifier notre appréciation à ce sujet.
Nous vous informons que nous avons en conséquence décidé de vous licencier pour faute grave.
Votre licenciement prend donc effet à compter de ce jour, sans indemnité de préavis, ni de licenciement.
Vous pourrez vous présenter à réception de la présente au service du personnel pour percevoir les sommes vous restant dues et retirer votre certificat de travail et votre attestation Assedic";
Attendu que Monsieur Alves de Barros ne conteste pas avoir installé un éclairage extérieur, dans la propriété de Madame Caquais, cliente de l'entreprise dirigée par Monsieur Tropet, que ce travail a été accompli alors qu'il était en congé, et que la prestation réalisée n'était pas incluse dans le marché, conclu entre Monsieur Tropet et Madame Caquais;
Attendu, cependant, qu'il n'est pas démontré que, sans l'intervention de Monsieur Alves de Barros, Madame Caquais aurait inévitablement confié l'installation d'un éclairage extérieur à l'entreprise de Monsieur Tropet et que l'exécution de cette prestation était acquise à ce dernier, que le lien de causalité entre le travail effectué par Monsieur Alves de Barros et la non obtention de cette partie du marché, au demeurant minime par rapport à l'importance des travaux visés dans le devis d'un montant de 18 337,57 euro n'est pas établi ;
Que, dès lors, il ne peut être reproché à l'intéressé de s'être livré à un agissement déloyale de concurrence, que, de plus, l'employeur ne peut justifier d'un quelconque préjudice puisqu'il précise dans ses écritures que, finalement, l'installation de l'éclairage extérieur a été comprise dans des travaux complémentaires facturés le 12 février 2007 ;
Attendu, en conséquence, que les faits exposés dans la lettre de licenciement ne sont pas fautifs, que la rupture du contrat de travail était abusive;
Attendu qu'il s'ensuit que Monsieur Tropet doit être condamné à verser à Monsieur Alves de Barros une indemnité compensatrice de préavis de deux mois d'un montant de 3 033,40 euro, ainsi que la somme de 303,34 euro au titre des congés payés afférents et celle de 1 190,09 euro à titre d'indemnité de licenciement;
Attendu que Monsieur Alves de Barros est en droit de prétendre à l'indemnité prévue à l'article L. 122-14-5 du Code du travail, devenu L. 1235-5, que son ancienneté était de 7 ans, qu'il ne fournit, ni pièces, ni explications quant à l'évolution de sa situation socioprofessionnelle depuis son congédiement, que le préjudice résultant nécessairement du licenciement sera réparé par l'allocation d'une indemnité de 8 000 euro;
Sur la demande de dommages-intérêts pour préjudice moral
Attendu que Monsieur Alves de Barros ne produit aucune pièce à l'appui de ses affirmations selon lesquelles il aurait été victime d'insultes et de vexations provenant de son employeur, qu'en conséquence, il doit être débouté de sa demande de dommages-intérêts;
Sur les heures supplémentaires et repos compensateurs
Attendu que Monsieur Alves de Barros soutient que, du 1er juillet 2004 au 31 mars 2006, 3 heures de travail par semaine, à savoir celles accomplies de la 40e à la 42e heure, ne lui ont pas été payées ;
Attendu qu'il appartient au salarié qui demande le paiement d'heures supplémentaires de fournir préalablement au juge des éléments de nature à étayer sa demande;
Qu'en l'occurrence, Monsieur Alves de Barros se borne à produire des décomptes d'heures supplémentaires qu'il a lui-même établis, ainsi que deux attestations qui ne contiennent pas d'informations précises sur la durée effective de son travail, qu'en effet Monsieur Weill buraliste témoigne uniquement qu'il voyait l'intéressé rentrer tard le soir, que Monsieur Vadot, client de l'entreprise, ne fait que relater que, lors de la réalisation de son chantier, Monsieur Alves de Barros ne quittait pas son travail avant 19 heures;
Que ces éléments sont insuffisants pour étayer la demande en paiement d'heures supplémentaires, formée par Monsieur Alves de Barros, que cette prétention doit être rejetée, ainsi que celles subséquentes au paiement de repos compensateurs et d'une indemnité pour travail dissimulé ;
Attendu que Monsieur Tropet, qui succombe, doit être condamné à verser à Monsieur Alves de Barros, la somme de 800 euro en application de l'article 700 du Code de procédure civile, et doit supporter la charge des dépens ;
Par ces Motifs, LA COUR, Infirme le jugement déféré, Dit que le licenciement de Monsieur Adriano Alves De Barros est abusif, Condamne Monsieur Tropet à verser à Monsieur Alves de Barros les sommes suivantes : - 3 033,40 euro à titre d'indemnité compensatrice de preavis, - 303,34 euro au titre des congés payés afférents, - 1 190 euro au titre de l'indemnité de licenciement, 8 000 euro à titre de dommages-intérêts pour licenciement abusif 800 euro en application de l'article 700 du Code de procédure civile, Déboute Monsieur Alves de Barros de ses autres demandes, Condamne Monsieur Tropet aux dépens.