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Décisions

Cass. crim., 17 juin 2009, n° 07-88.354

COUR DE CASSATION

Arrêt

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Dulin (faisant fonction)

Avocats :

Me Ricard, SCP Peignot, Garreau

TGI Paris, JLD, 27 sept. 2007

27 septembre 2007

LA COUR : - Statuant sur les pourvois formés par la société X, la société Y, contre l'ordonnance du juge des libertés et de la détention du Tribunal de grande instance de Paris, en date du 27 septembre 2007, qui a statué sur la régularité des opérations de visite et de saisie de documents effectuées par l'administration de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes en vue de rechercher la preuve de pratiques anticoncurrentielles ; - Joignant les pourvois en raison de la connexité; - Vu le mémoire, commun aux demanderesses, et le mémoire en défense produits ;

Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles 6 et 8 de la Convention européenne de sauvegarde des Droits de l'Homme et des libertés fondamentales, L. 450-4 du Code de commerce, 56, 591 et 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs, défaut de réponse à conclusions, manque de base légale, et violation de la loi ;

"en ce que l'ordonnance attaquée a refusé de prononcer la nullité de la saisie des données informatiques pratiquées sur l'ordinateur de M. Z, soit du scellé n° 13 et sa restitution ;

"aux motifs que les sociétés requérantes demandent l'annulation de la saisie des données informatiques pratiquées sur l'ordinateur de M. Z au motif que celle-ci aurait porté sur des éléments non inventoriés, l'article L. 450-4 du Code de commerce autorise non seulement la saisie de tout document mais également celle de tout support d'information, la mise sous scellé est réalisée conformément à l'article 56 du Code de procédure pénale, dont l'alinéa 5 permet expressément que pour les données informatiques, il peut être réalisé une copie en présence des personnes qui assistent à la perquisition, en l'espèce, il résulte du procès-verbal établi le 11 janvier 2007 par les inspecteurs de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes se trouvant dans le bureau de M. Z qu'ils ont examiné par une fouille sommaire le contenu de l'ordinateur portable HP L 1925 installé dans son bureau et ont constaté la présence de documents entrant dans le champ de l'autorisation de visite et saisie donnée par le juge des libertés et de la détention, ils ont extrait et gravé sur DVD-R vierge non réinscriptible des fichiers informatiques issus de cet ordinateur, celui-ci a été finalisé afin d'interdire tout ajout, retrait ou modification de son contenu puis placé sous le scellé n° 13 et qu'une copie a été laissée à la société X SAS, il a été procédé à l'authentification numérique de chaque fichier puis en copie et élaboré un inventaire informatique des fichiers saisis placés sur un CD-R finalisé en annexe II, 71106/DL/DG l'impression papier de ce CD-R, objet du scellé n° 13 comporte 65 pages, joint en annexe au procès-verbal, démontre que pour chaque fichier informatisé, il existe l'indication de sa taille, son nom, son empreinte numérique et son chemin d'accès permettant ainsi son identification, les prescriptions de l'article 56 du Code de procédure pénale ont été respectées d'autant que les sociétés demanderesses ont bénéficié de la remise d'une copie du CD-R, leur permettant de connaître l'exact contenu des données saisies, il y a lieu en conséquence de rejeter les demande d'annulation et de restitution de ce scellé, les sociétés X et SAS et Y SA font grief à l'Administration de n'avoir pas pris connaissance des pièces et apprécié leur lien avec l'ordonnance autorisant les saisies, que faute de temps et compte tenu du volume important des données informatiques saisies, celles-ci auraient toutes été copiées, sans la moindre distinction ni vérification préalable, il est ainsi critiqué la méthode qui consisterait à une saisie d'éléments généraux et indéterminés, sans vérification préalable, assimilée à la pratique dite des "fishing expéditions" ; qu'il convient de rappeler qu'il ressort du procès-verbal du 11 janvier 2007 précité qu'une fouille sommaire préalable du contenu de l'ordinateur de M. Z a été effectuée, que suite à une vérification préalable, il a été constitué des documents entrant dans le champ de l'autorisation de visite et de saisie, que dès lors, la saisie n'a pas été faite sans distinction, une fouille détaillée et méticuleuse à l'excès qui aurait pour effet de paralyser l'activité économique de la société irait à l'encontre de la logique commerciale de celle-ci ;

"alors d'une part, qu'un inventaire n'opérant aucune identification ni distinction parmi la totalité des fichiers informatiques saisis ne satisfait ni aux exigences des articles L. 450-4 du Code de commerce et 56 du Code de procédure pénale qui prévoient que tous les objets et documents saisis sont immédiatement inventoriés et placés sous scellés, ni à l'autorisation donnée par l'ordonnance qui n'ordonnait que la saisie d'éléments permettant de rechercher la preuve des agissements entrant dans le champ des pratiques prohibées par les articles L. 420-1 du Code de commerce et 81-1 du traité de Rome relevés dans les secteurs de la production et distribution de glyphosates et de produits phytosanitaires ;

"alors d'autre part, que, constitue une atteinte aux droits essentiels de la défense, la saisie en bloc de données informatiques pratiquées sur le disque dur d'un ordinateur, lorsqu'elle porte sur des éléments non identifiés, empêchant de ce fait de connaître exactement la nature des pièces saisies, comme celles susceptibles de constituer des éléments à charge ;

"alors, par ailleurs, que l'Administration doit prendre connaissance des documents ou données avant de procéder à leur saisie, et ne peut appréhender que les documents informatiques ou édités sur support papier se rapportant exclusivement aux agissements retenus par l'ordonnance autorisant les visites et saisies qu'il lui appartient de délimiter elle-même ; qu'ainsi elle ne peut aucunement saisir en bloc l'ensemble des documents informatiques et fichiers présents sur le disque dur d'un ordinateur sans opérer au préalable une sélection afin de ne saisir que les documents en adéquation avec l'autorisation obtenue si bien que le juge des libertés et de la détention ne pouvait refuser d'annuler la saisie du scellé n° 13, comportant 65 pages, et comprenant des fichiers saisis sans distinction sur l'ensemble du disque dur d'un ordinateur, sans vérifier par des motifs concrets que les fichiers saisis n'étaient pas étrangers au but et au champ d'application de l'autorisation donnée ;

"alors enfin, que le juge des libertés et de la détention devait rechercher, comme cela lui était demandé, s'il n'appartenait pas à l'Administration, en cas d'impossibilité de procéder à un inventaire exhaustif sur place, de constituer des scellés provisoires et d'analyser le contenu des données informatiques saisies avant d'inventorier et de placer sous scellés définitifs uniquement ceux en rapport avec les infractions poursuivies" ;

Sur le second moyen de cassation, pris de la violation des articles 6 et 8 de la Convention européenne de sauvegarde des Droits de l'Homme et des libertés fondamentales, L. 450-4 du Code de commerce, 56, 591 et 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs, défaut de réponse à conclusions, manque de base légale, et violation de la loi ;

"en ce que l'ordonnance attaquée a refusé de prononcer la nullité de la saisie des données informatiques pratiquées sur l'ordinateur de M. Z, soit du scellé n° 3 et sa restitution ;

"aux motifs que, sur l'absence de vérification préalable avant saisie de la messagerie personnelle de M. Z, saisie n° 3 Les sociétés X et SAS et Y SA font grief à l'Administration de n'avoir pas pris connaissance des pièces et apprécié leur lien avec l'ordonnance autorisant les saisies, que faute de temps et compte tenu du volume important des données informatiques saisies, celles-ci auraient toutes été copiées, sans la moindre distinction ni vérification préalable; Il est ainsi critiqué la méthode qui consisterait à une saisie d'éléments généraux et indéterminés, sans vérification préalable, assimilée à la pratique dite des "fishing expéditions" ; qu'il convient de rappeler qu'il ressort du procès-verbal du 11 janvier 2007 précité qu'une fouille sommaire préalable du contenu de l'ordinateur de M. Z a été effectuée, que suite à une vérification préalable, il a été constitué des documents entrant dans le champ de l'autorisation de visite et de saisie, que dès lors, la saisie n'a pas été faite sans distinction, une fouille détaillée et méticuleuse à l'excès qui aurait pour effet de paralyser l'activité économique de la société irait à l'encontre de la logique commerciale de celle-ci, chaque fichier informatique constituant un tout indissociable, il y a lieu de copier dans sa totalité dès lors que l'un des documents contenus est pour tout ou partie utile à la preuve des agissements retenus, de sorte à éviter toute manipulation, que tel est le cas en l'espèce, s'agissant de la copie effectuée du fichier de messagerie de M. Z qui constitue un ensemble insécable, Il y a lieu en conséquence de rejeter la demande d'annulation et de restitution du scellé n° 3 ;

"alors d'une part, qu'un inventaire n'opérant aucune identification, ni distinction parmi la totalité des éléments figurant dans la messagerie d'un ordinateur ne satisfait ni aux exigences des articles L. 450-4 du Code de commerce et 56 du Code de procédure pénale qui prévoient que tous les objets et documents saisis sont immédiatement inventoriés et placés sous scellés, ni à l'autorisation donnée par l'ordonnance qui n'ordonnait que la saisie d'éléments permettant de rechercher la preuve des agissements entrant dans le champ des pratiques prohibées par les articles L. 420-1 du Code de commerce et 81-1 du traité de Rome relevés dans les secteurs de la production et distribution de glyphosates et de produits phytosanitaires ;

"alors, d'autre part, que l'Administration doit prendre connaissance des documents ou données avant de procéder à leur saisie, et ne peut appréhender que les documents informatiques ou édités sur support papier se rapportant exclusivement aux agissements retenus par l'ordonnance autorisant les visites et saisies qu'il lui appartient de délimiter elle-même ; qu'ainsi elle ne peut aucunement saisir en bloc l'ensemble des données figurant sur une messagerie présentes sur le disque dur d'un ordinateur sans opérer au préalable une sélection afin de ne saisir que les éléments en adéquation avec l'autorisation obtenue, si bien que le juge des libertés et de la détention ne pouvait refuser d'annuler la saisie du scellé n° 3, comprenant des éléments complètement étrangers à l'objet de l'enquête (notes de frais, avenant à contrat de travail...) sans vérifier par des motifs concrets que les fichiers saisis n'étaient pas étrangers au but et au champ d'application de l'autorisation donnée ;

"alors enfin, que le juge des libertés et de la détention devait rechercher, comme cela lui était demandé s'il n'appartenait pas à l'Administration, en cas d'impossibilité de procéder à un inventaire exhaustif sur place, de constituer des scellés provisoires et d'analyser le contenu des données informatiques saisies avant d'inventorier et de placer sous scellés définitifs uniquement ceux en rapport avec les infractions poursuivies" ;

Les moyens étant réunis ; - Attendu que, pour dire régulières les saisies des supports et données informatiques et télématiques réalisées sur un ordinateur portable, utilisé par Jean-Pierre Z, dans les locaux de la société X, l'ordonnance prononce par les motifs repris aux moyens ;

Attendu qu'en l'état de ces énonciations, dépourvues d'insuffisance comme de contradiction, le juge des libertés et de la détention, qui a répondu aux chefs péremptoires des conclusions dont il était saisi, a justifié sa décision ;

Que, d'une part, les fichiers saisis ont été identifiés et inventoriés, les sociétés demanderesses, auxquelles une copie du CD-R a été remise, étant en mesure de connaître le contenu des données appréhendées ;

Que, d'autre part, le juge a souverainement estimé que les supports et données saisis n'étaient ni divisibles ni étrangers au but de l'autorisation accordée ;

Qu'enfin, la possibilité de constituer des scellés provisoires est une faculté laissée à l'appréciation des enquêteurs ; d'où il suit que les moyens ne sauraient être admis ;

Et attendu que l'ordonnance est régulière en la forme ;

Rejette les pourvois.