CA Aix-en-Provence, 17e ch., 5 octobre 2009, n° 08-21774
AIX-EN-PROVENCE
Arrêt
Confirmation
PARTIES
Demandeur :
Perez
Défendeur :
Luxottica France (SARL)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
Mme Cuttat
Conseillers :
M. Grand, Mme Verhaeghe
Avocats :
Mes Nevouet, Schwal, Penard
Faits et procédure :
Engagé le 9 avril 2003 en qualité de VRP exclusif pour la représentation de la ligne de montures Ray Ban Optique par la SARL Luxottica, Monsieur Didier Perez a refusé le 17 novembre 2006 la proposition de modification de l'employeur et a été licencié le 7 février 2007 pour motif économique.
Suivant jugement du 19 novembre 2008, le Conseil de prud'hommes de Grasse a considéré le licenciement justifié et débouté Monsieur Didier Perez de toutes ses demandes.
Appelant de cette décision, celui-ci conteste le motif économique du licenciement et soutient que l'employeur n'a pas satisfait à son obligation de reclassement, ni respecté l'ordre des licenciements. Il ajoute qu'il peut prétendre à une indemnité de clientèle.
Il conclut à l'infirmation du jugement entrepris, à l'absence de motif économique et à la condamnation de la SARL Luxottica France à lui payer les sommes suivantes:
- 200 000 euro à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ou, à défaut pour non-respect de l'ordre des licenciements
- 252 826,68 euro à titre principal sur l'indemnité de clientèle et 179 471,02 euro à titre subsidiaire
- 2 500 euro au titre des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile.
La SARL Luxottica France, intimée, reprenant son argumentaire antérieur, conclut à la confirmation du jugement entrepris, au débouté de toutes les demandes de Monsieur Didier Perez et à sa condamnation reconventionnelle à lui payer une indemnité de 3 500 euro sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile.
Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure, des moyens et des prétentions des parties, il est renvoyé au jugement entrepris, aux pièces de la procédure et aux conclusions des parties oralement reprises.
Motifs :
Il est constant que Monsieur Didier Perez a été licencié pour avoir refusé d'accepter la proposition de modification de son secteur faite sur le fondement de l'article L. 321-1-2 du Code du travail, cette modification étant indispensable selon l'employeur à la sauvegarde de la compétitivité de l'entreprise.
De fait, la SARL Luxottica France démontre la nécessité d'un redécoupage des secteurs des commerciaux de la ligne de vente Ray Ban Optique afin d'en optimiser la commercialisation.
En effet, les deux principales marques propres (Luxottica et Steroplex) avaient enregistré depuis trois ans une baisse importante atteignant - 25,9 % pour Luxottica. Or celle-ci disposait d'un potentiel de progression d'après les études effectuées qui soulignaient la sous-commercialisation flagrante de la ligne Ray Ban Optique comparativement à la ligne Ray Ban Solaire.
D'où l'objectif de doubler la première avant 2009. Ce qui nécessitait une augmentation des commerciaux de Ray Ban Optique de 11 à 16, laquelle impliquait nécessairement un redécoupage des secteurs.
Contrairement aux allégations de Monsieur Didier Perez, il ne s'agissait pas uniquement de réaliser davantage de profits, mais bien au premier chef de sauvegarder la compétitivité de l'entreprise mise en péril par le déclin, face à la concurrence internationale, de la vente de l'optique par rapport au solaire. L'employeur, faut-il ajouter, est seul juge des choix à arbitrer pour prévenir les difficultés économiques à venir avec leurs conséquences négatives sur l'emploi.
Il a été proposé à Monsieur Didier Perez un reclassement dans le secteur comprenant les départements 05, 07, 12, 15, 19, 26, 38, 43, 46, 48, 84 point tellement différent de celui antérieurement occupé (départements 05, 07, 15, 26, 30, 34, 38, 43, 78, 73, 74), un des départements étant toujours celui de son domicile (38).
Après le refus du salarié, la SARL Luxottica a proposé à Monsieur Didier Perez des postes d'attaché commercial à:
- Côte d'Azur (optique Ray Ban)
- D. et G. Est
- Versace - Paris
- Bulgari - Paris
- Ile-de-France Champagne-Ardenne (optique Ray Ban).
Il est spécieux pour Monsieur Didier Perez de déplorer l'absence de proposition de poste à l'étranger alors qu'il avait excipé des motifs familiaux pour rejeter la modification proposée.
Il apparaît donc que l'employeur a satisfait à son obligation de reclassement.
Il s'ensuit que le motif économique est avéré et que c'est à bon droit que les premiers juges ont débouté Monsieur Didier Perez de sa demande de dommages et intérêts pour licenciement injustifié.
Il doit l'être aussi de sa demande de dommages et intérêts pour non-respect de l'ordre des licenciements. En effet, un seul autre VRP : Monsieur Ellouk a également refusé la modification de son secteur. Aucun élément ne permet d'établir que l'employeur n'a pas respecté l'ordre des licenciements tel qu'édicté par l'article L. 1235-5 du Code du travail.
Concernant les indemnités de clientèle et de rupture réclamées par Monsieur Didier Perez, il n'apporte pas la preuve d'une augmentation de la clientèle en nombre et en valeur du fait de son activité propre car il exploitait un secteur déjà prospecté depuis 1999 par un autre VRP. A titre surabondant, il occulte la perception ab initio d'une avance sur indemnité de clientèle dénommée "sur-commission" dans le contrat, et ne démontre nullement que lui soit dû un reliquat sur ce versement anticipé. C'est donc à juste raison que les premiers juges l'ont débouté de ce chef de demande.
L'équité ne commande pas de faire application en l'espèce des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile.
Echouant dans ses prétentions, Monsieur Didier Perez doit être condamné aux dépens d'appel.
Par ces motifs, LA COUR, Statuant publiquement, contradictoirement et en matière prud'homale, Confirme le jugement entrepris; Y ajoutant, Condamne Monsieur Didier Perez aux dépens d'appel; Rejette toutes autres conclusions contraires ou plus amples des parties.