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Décisions

CA Amiens, ch. économique, 18 juin 2009, n° 06-04046

AMIENS

Arrêt

Confirmation

PARTIES

Demandeur :

OK Voyages (SARL)

Défendeur :

Services Voyages (SARL)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Brieuc de Mordant de Massiac

Conseillers :

M. Bougon, Mme Belledina

Avoués :

SCP Le Roy, SCP Million, Plateau

Avocats :

Mes Broutin, Le Lausque

TGI Laon, prés., du 22 nov. 2004

22 novembre 2004

Procédure devant la cour

Par acte en date du 16 décembre 2004, la SARL OK Voyages a interjeté appel de l'ordonnance de référé du Tribunal de grande instance de Laon qui l'a déboutée de sa demande en cessation de concurrence déloyale formée contre la SARL Services Voyages.

L'affaire a donné lieu à deux arrêts avant dire droit de la cour de céans, en date des 24 mai 2005 (sursis à statuer) et 25 mars 2008 (réouverture des débats).

La SARL OK Voyages a conclu (conclusions des 10 juillet 2008, 28 octobre 2008).

La SARL Services Voyages, intimée, a conclu (conclusions des 21 avril 2008, 14 octobre 2008).

Après clôture de la mise en état, l'affaire a été fixée au 2 avril 2009 pour plaidoirie (O.C du 18 novembre 2008).

Les parties et leurs conseils ont été régulièrement avisés pour cette date, dans les formes et délais prévus par la loi.

Le jour dit, la cause et les parties ont été appelées en audience publique et les débats et plaidoiries tenus dans les conditions prévues aux articles 786 et 910 CPC, les avocats ne s'y opposant pas.

Après avoir entendu les avoués et avocats des parties en leurs demandes, fins et conclusions, le magistrat chargé du rapport a mis l'affaire en délibéré et indiqué aux parties que l'arrêt serait rendu et mis à disposition au greffe le 18 juin 2009.

Après rapport de l'affaire par le magistrat chargé du rapport et après en avoir délibéré conformément à la loi, la cour a rendu la présente décision à la date indiquée.

Decision

Faits, procédures, demandes en appel

La SARL OK Voyages exerce une activité de voyagiste.

En 1995, elle a vu d'un mauvais oeil l'installation, dans la ville de Laon où elle avait un établissement secondaire, d'un concurrent pris en la personne de la SARL Services Voyages.

Elle a tout de suite attaqué, devant la juridiction administrative, la licence d'exploitation que la gérante de cette société s'était vu accorder par le préfet de l'Aisne et, de fait, en a obtenu l'annulation par un arrêt de la Cour administrative d'appel de Douai du 21 décembre 2000.

Toutefois, la gérante de la SARL Services Voyages ayant obtenu une deuxième autorisation préfectorale, la SARL OK Voyages a, une nouvelle fois attaqué cette décision administrative et en a, à nouveau, obtenu l'annulation devant le Tribunal administratif d'Amiens le 19 octobre 2004.

De surcroît, par acte du 27 octobre 2004, elle a assigné la SARL Services Voyages devant le juge des référés du Tribunal de grande instance de Laon aux fins de voir cette société condamnée sous astreinte à cesser toute activité dès lors que cette société avait perdu sa licence d'exploitation et dès lors que cette société s'avérait ipso facto, selon elle, exercer une activité concurrentielle déloyale.

Toutefois, par ordonnance en date du 22 novembre 2004, le juge des référés a rejeté la requête de la SARL OK Voyages aux motifs que, même si les licences qu'elle avait obtenues avaient été constamment annulées sur recours de sa concurrente, il n'en demeurait pas moins que la SARL Services Voyages avait toujours exercé son activité sous le couvert d'une licence d'exploitation régulièrement sollicitée et obtenue et que, dans ces conditions, ni le trouble manifestement illicite, ni l'acte de concurrence déloyale, invoqués par la SARL OK Voyages n'étaient démontrés.

La SARL OK Voyages a interjeté appel de la décision le 16 avril 2004.

Après premières conclusions des parties et par arrêt du 24 mai 2005, la cour d'appel de céans a sursis à statuer dans l'attente de la décision de la juridiction administrative à intervenir, car il lui est apparu que, dans le courant de la procédure, la SARL Services Voyages avait obtenu une troisième licence d'exploitation, qui avait été une nouvelle fois annulée par le tribunal administratif et qui avait été une nouvelle fois déférée à la cour administrative d'appel.

La Cour administrative d'appel de Douai ayant, par arrêt du 7 février 2008, annulé le jugement du tribunal administratif (et validé, de ce fait, la troisième licence d'exploitation), la cour de céans a invité les parties à conclure à nouveau.

Devant la cour de céans,

La SARL OK Voyages demande à la cour de surseoir à statuer en attendant l'issue du pourvoi qu'elle a formé contre l'arrêt de la Cour administrative d'appel de Douai.

La SARL Services Voyages demande à la cour de rejeter la demande de sursis à statuer (au motif que le pourvoi n'était pas suspensif), de débouter la SARL OK Voyages de son appel et de confirmer l'ordonnance entreprise, de condamner cette société à lui payer 1 500 euro de dommages intérêts pour procédure abusive et 1 500 euro au titre de l'article 700 NCPC, aux motifs qu'elle a toujours exercé son activité de voyagiste en prenant la précaution de solliciter au préalable une licence d'exploitation que, remplissant les conditions nécessaires à l'obtention de cette licence, elle a toujours obtenu la dite licence que, sur recours de sa concurrente, cette licence a, par deux fois, été annulée pour des vices de forme affectant l'arrêté préfectoral portant licence ; que ces vices ne lui étant absolument pas imputables, il était abusif de la part de la SARL OK Voyages de la poursuivre en concurrence déloyale et de solliciter l'arrêt total d'activité sous astreinte.

En cet état,

Sur la recevabilité de l'appel

La SARL OK Voyages ayant formé son recours dans les délais et forme prévus par la loi et la recevabilité de l'acte n'étant pas contestée, la cour recevra l'intéressée en son appel.

Sur le bien-fondé de l'appel

La cour observe avec le premier juge et avec la SARL Services Voyages défenderesse que, même si les licences que cette société a obtenues ont été par deux fois annulées sur recours de la SARL OK Voyages, sa concurrente, il n'en demeure pas moins que la SARL Services Voyages a toujours exercé son activité sous le couvert d'une licence d'exploitation régulièrement sollicitée et obtenue, dès lors qu'elle remplissait les conditions pour l'obtenir, et que, dans ces conditions, ni le trouble manifestement illicite, ni l'acte de concurrence déloyale, invoqués par la SARL OK Voyages ne sont démontrés; que s'il est avéré que cette licence a bien été par deux fois annulée, sur recours de la SARL OK Voyages, il n'en demeure pas moins que cette annulation est intervenue pour des vices de forme, affectant les arrêtés préfectoraux portant licence et exclusivement imputables à l'administration préfectorale et non à l'impétrante, et que, dans ces conditions, il est particulièrement abusif de la part de la SARL OK Voyages de poursuivre la SARL Services Voyages en concurrence déloyale et de solliciter l'arrêt total d'activité sous astreinte.

En conséquence, la cour rejettera la demande de sursis à statuer, déboutera la SARL OK Voyages de son appel et confirmera l'ordonnance entreprise et, y ajoutant, condamnera la SARL OK Voyages à payer à la SARL Services Voyages 1 500 euro de dommages intérêts pour procédure abusive.

Sur les dépens et les frais irrépétibles

La partie perdante devant, aux termes de l'article 696 CPC, être condamnée aux dépens, la cour condamnera la SARL OK Voyages, qui succombe, à supporter les dépens de première instance et d'appel.

La partie perdante devant, en outre, aux termes de l'article 700 du même code, être condamnée à payer à l'autre partie, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens, une somme arbitrée par le juge, tenant compte de l'équité et de la situation économique de la partie condamnée, la cour condamnera la SARL OK Voyages à payer à la SARL Services Voyages une somme de 1 500 euro, tous frais de première instance et d'appel confondus.

Par ces motifs, et ceux adoptés des premiers juges, LA COUR, statuant publiquement et contradictoirement, Vu l'ADD de la Cour d'appel d'Amiens du 24 mai 2005; Vu l'ADD de la Cour d'appel d'Amiens du 25 mars 2008 ; Rejette la demande de sursis à statuer présentée par la SARL OK Voyages; Reçoit la SARL OK Voyages en son appel, mais le déclarant mal fondé, Confirme l'ordonnance de référé entreprise (sauf en ses dispositions relatives aux dépens et frais irrépétibles) ; Condamne la SARL OK Voyages à payer, à la SARL Services Voyages, 1 500 euro de dommages-intérêts pour procédure abusive; Condamne la SARL OK Voyages aux dépens de première instance et d'appel, dont distraction au profit de la SCP Millon et Plateau, avoués, conformément aux dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile; Condamne la SARL OK Voyages à payer à la SARL Services Voyages une somme de 1 500 euro, tous frais de première instance et d'appel confondus, au titre de l'article 700 CPC.