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Décisions

CA Paris, 1re ch. A, 30 septembre 1998, n° 1992-20943

PARIS

Arrêt

PARTIES

Demandeur :

Mors (SA)

Défendeur :

Labinal (SA)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Canivet

Conseillers :

Mme Favre, M. Garban

Avoués :

SCP Duboscq-Pellerin, SCP Barrier-Monin

Avocats :

Mes Thieffry, Lecuyer- Thieffry, Lafarge, Bartfeld

T. com. Paris, 3e ch. A, du 3 juin 1992

3 juin 1992

Estimant que les sociétés Westland (Westland) et Labinal (Labinal), à l'occasion de l'appel d'offres lancé en juillet 1988 par la société British Aerospace (Bae) pour le système de mesure de la pression des pneus (TPIS) destiné à équiper optionnellement les futurs avions Airbus A 330 et A 340 (A 330/340), s'étaient livrées à des comportements abusifs et à des actes de concurrence déloyale et illicite pour avoir, notamment, fait pression sut Bae en vue de faire retenir Labinal comme seconde source d'approvisionnement, débauché deux salariés, retardé les conclusions des accords pour permettre à Labinal de rattraper son retard, transmis des informations techniques confidentielles sur le TPIS, mis en œuvre des pratiques d'abus de position dominante et constitué une entente illicite, la société Mors (Mors) a fait assigner ces deux sociétés devant le Tribunal de commerce de Paris.

Par jugement rendu le 3 juin 1991, le tribunal a :

- rejeté l'exception d'incompétence soulevée par la société Westland au profit de la juridiction arbitrale convenue par la clause compromissoire stipulée dans le contrat préliminaire de joint-venture du 27 septembre 1988,

- sur le fond, dit que l'accord du 19 avril 1991 passé entre Labinal et Westland constitue une entente illicite incompatible avec le marché commun et en a prononcé la nullité,

- d'office, interdit, sous astreinte de un million de francs, à Westland et à Labinal de reconstituer une telle entente ayant pour objet d'éliminer toute concurrence pour la fourniture du TPIS A 330/340,

- dit que la société Westland s'est rendue coupable d'un comportement déloyal visant à désorganiser le plan de production de Mors en retardant sciemment la signature d'un contrat définitif avec Bae afin de favoriser l'objectif poursuivi par l'entente illicite,

- condamné solidairement les sociétés Westland et Labinal à payer à Mors une provision de 300 000 F à titre de dommages-intérêts et ordonné une mesure d'expertise sur l'entier préjudice susceptible d'être causé, si la plaignante était écartée de la sélection obtenue,

- débouté Mors de ses autres demandes tendant à faire juger que Labinal, avec la participation de Westland, aurait débauché deux salariés de son entreprise, puis aurait commis des actes de concurrence déloyale et d'abus de position dominante en sollicitant son agrément comme seconde source, le tribunal relevant sur ces points que le groupement Westland /Mors ne pouvait prétendre à aucune exclusivité pour la fourniture du TPIS,

- débouté les sociétés Westland et Labinal de leurs demandes reconventionnelles et accordé à la société Mors la somme de 200 000 F en application de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.

Saisie des appels respectivement interjetés par les sociétés Mors, Westland et Labinal de ce jugement, la cour, par arrêt du 19 mai 1993 auquel il est fait référence pour l'exposé des faits et de la procédure antérieure a:

- rejeté les moyens d'irrecevabilité de l'appel opposés par la société Labinal,

- confirmé le jugement entrepris en ce qu'il a rejeté les demandes de la société Mors sur le fondement d'une concurrence déloyale,

- infirmé pour le surplus le jugement et statuant à nouveau :

- s'est déclarée incompétente pour statuer sur les demandes formées par la société Mors contre la société Westland et l'a renvoyée à mieux se pourvoir devant le tribunal arbitral,

- a dit que la société Labinal s'est livrée, au préjudice de la société Mors, à des pratiques contraires aux articles 854 et 86 du traité instituant la Communauté économique européenne et engageant sa responsabilité sur le fondement de l'article 1382 du Code civil,

- a fait en conséquence interdiction à la société Labinal, sous astreinte de 100 000 F par infraction constatée, de proposer à ses clients, pour des équipements, pièces ou prestations indépendants de la fourniture de TPIS A 330/340, des avantages, primes et remises liées à la vente de ces systèmes et interdiction de proposer à ses clients, pour la fourniture de TPIS A 330/340, de pièces ou de prestations annexes, des prix se référant directement ou indirectement à ceux pratiqués par le groupement Westland/Mors,

- avant-dire-droit sur le préjudice causé à la société Mors par les pratiques anticoncurrentielles caractérisées à l'encontre de la Société Labinal, a désigné en qualité d'expert M. William Nahum avec pour mission, de se faire communiquer tous documents et pièces utiles à l'accomplissement de sa mission, d'entendre les parties et tous sachant, de donner un avis sur les divers éléments des préjudices causés à la société Mors par les faits dommageables retenus à l'encontre de la société Labinal, à savoir:

1) - le retard apporté, entre le début de l'année et la fin du mois d'août 1991, dans la négociation par la société Westland avec la société Bae du contrat agréant comme option standard le TPIS A 330/340 construit par le groupement Westland /Mors,

2) - les pratiques tarifaires abusives ci-dessus interdites mises en œuvre par la société Labinal,

- a condamné la société Labinal à payer à la société Mors une somme de 200 000 F au titre des frais exposés en première instance non compris dans les dépens,

- a rejeté les demandes reconventionnelles des sociétés Westland et Labinal, et, sur le fondement de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile a sursis à statuer sur la demande formée en cause d'appel par la société Mors, rejeté la demande de la société Labinal et condamné enfin la société Mors à payer à la société Westland une somme de 120 000 F. Elle a encore condamné la société Mors aux dépens de l'appel intenté par la société Westland, mettant ainsi fin à l'instance.

Monsieur Nahum, qui s'est fait assister d'un sapiteur en la personne de Monsieur Nussenbaum, a déposé son rapport le 6 février 1998.

Dans ses conclusions récapitulatives signifiées après le dépôt du rapport d'expertise, la société Mors demande à la cour de condamner la société Labinal:

- au titre de la perte de parts du marché des TPIS pour Airbus A 330/340, en ce compris les coûts non récurrents, la somme de 42 586 180 F,

- au titre de la perte de parts des marchés adjacents, la somme de 40 000 000 F,

- au titre du préjudice dû aux sur-coûts occasionnés par les agissements de la société Labinal, la somme de 5 666 000 F,

- au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, la somme de 5 000 000 F,

Soit la somme totale de 93 252 180 F.

Elle sollicite, en outre, la condamnation de la société Labinal au paiement des intérêts légaux à compter du 27 novembre 1991 sur la somme de 4 649 000 F à titre compensatoire, à compter du 1er janvier 1998 sur le solde de 88 603 180 F, et au paiement des entiers dépens, en ce compris les coûts de l'expertise avec les intérêts à compter de l'arrêt à intervenir et, en ce qui concerne les montants avancés par Mors, aux intérêts compensatoires depuis le jour du paiement par elle des différents montants.

La société Labinal soulève de son côté l'irrégularité des opérations d'expertise et à titre subsidiaire critique le rapport de l'expert en relevant des erreurs commises, selon elle, par l'expert sur le plan juridique au regard en particulier du régime de l'indemnisation de la société Mors découlant de l'arrêt de 19 mai 1993 ;

Elle demande en conséquence à la cour de prononcer la nullité des opérations d'expertise confiées à Monsieur Nahum, comme du rapport par lui déposé, en ce compris le document présenté comme une annexe audit rapport établi par Monsieur Nussenbaum le 30 janvier 1998, sur le fondement des articles 233 et 278 du nouveau Code de procédure civile, avec toutes conséquences de droit en écartant toutes informations pouvant résulter d'opérations et de rapports ainsi annulés, de dire que conformément à l'arrêt rendu le 19 mai 1993, l'indemnisation du préjudice éventuellement subi par la société Mors du chef des pratiques tarifaires abusives relevées par ledit arrêt, comme du retard dans la signature du contrat entre Mors et Bae, se trouve soumise aux conditions fixées pour l'application de l'article 1382 du Code civil et au droit commun de la responsabilité délictuelle ou quasi délictuelle, de constater qu'aux termes de son arrêt du 19 mai 1993, la cour a limitativement défini la faute constitutive des pratiques tarifaires abusives de la société Labinal et, qu'au vu des offres faites par cette dernière aux compagnies aériennes, la seule d'entre elles faisant apparaître l'une des pratiques tarifaires interdites par la cour ayant ainsi pu être génératrice d'un dommage pour Mors est constituée par l'offre faite par Labinal à la compagnie Lufthansa et représentative d'un enjeu total portant sur 29 avions Airbus A 340, que le seul préjudice indemnisable de Mors est donc représenté par la perte d'une chance pour la société Mors d'équiper de son TPIS les 29 avions Airbus A 340 de la compagnie Lufthansa, et ce à l'exclusion de toute autre indemnisation, notamment du chef d'une perte de parts de marché, de fixer au maximum à la somme de 1 047 577 F valeur 1993, le montant de l'indemnisation de la société Mors, de constater que la société Mors n'apporte la preuve ni d'un dommage, ni d'un quelconque lien de causalité avec le retard relevé par la cour dans la signature par Mors entre le mois de janvier et le mois d'août 1991 du contrat avec Bae, de débouter la société Mors de l'ensemble de ses demandes d'indemnisation liées aux surcoûts découlant dudit retard ainsi que de celles liées à la perte des marchés adjacents, de la débouter enfin de sa demande en paiement d'une indemnisation au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, de la condamner à lui verser, sur ce fondement, une somme de 500 000 F et de la condamner aux entiers dépens qui comprendront les frais et honoraires de l'expertise.

Répondant aux moyens de nullité invoqués par la société Labinal, la société Mors qui conclut à la régularité des opérations d'expertise fait valoir que l'expert a accompli personnellement sa mission dans son domaine de spécialité, ne confiant au sapiteur qu'une étude spécifique hors du domaine de l'expertise comptable.

Sur ce, LA COUR

1) - Sur les opérations d'expertise

Considérant que la société Labinal met en cause la régularité des opérations d'expertise et conclut, à titre principal, à leur nullité; qu'elle fait valoir à cet effet que Monsieur Nussenbaum a été imposé par Monsieur Nahum en qualité de technicien alors qu'il n'a, en réalité, aucune spécialité distincte de celle de Monsieur Nahum et qu'ainsi, en faisant appel à Monsieur Nussenbaum qui n'a aucune compétence spécifique et distincte de la sienne, l'expert désigné n'a pas respecté les termes de l'article 278 du nouveau Code de procédure civile;

Considérant qu'aux termes du texte précité, l'expert peut prendre l'initiative de recueillir l'avis d'un autre technicien, mais seulement dans une spécialité distincte de la sienne ;

Considérant, en l'espèce, que Monsieur Nahum, expert désigné, analysant les termes de la mission qui lui était confiée, a relevé que le retard apporté dans la négociation par Westland avec Bae et les pratiques tarifaires abusives de Labinal avaient entraîné une perte de parts de marché et donc une perte de marge pour Mors et qu'en conséquence le calcul du préjudice subi par Mors nécessitait la détermination des parts de marché perdues du fait des agissements de Labinal ; que l'évaluation de marchés potentiels, qui impliquait une étude prospective et une approche stratégique sur le développement futur du marché en question, ne relevant pas de sa compétence d'expert comptable, il a pu régulièrement solliciter l'avis d'un technicien maîtrisant cette spécialité, à savoir Monsieur Nussenbaum, expert en matière économique inscrit sur la liste des experts sous la rubrique d'expert en diagnostic d'entreprise;

Que le grief tiré d'une violation des dispositions de l'article 278 du nouveau Code de procédure civile n'est donc pas fondé et doit être écarté ;

Considérant que la société Labinal soutient ensuite que Monsieur Nussenbaum, requis à l'origine par l'expert comme sapiteur s'est, en réalité, érigé en véritable co-expert avec l'assentiment de l'expert désigné et a fourni un avis dépassant très largement celui purement technique et limité qu'il était supposé formuler pour relever d'une véritable conclusion d'expert que seul Monsieur Nahum pouvait formuler ; qu'il a ainsi, en réalité, procédé aux lieu et place de l'expert à des opérations essentielles relevant de la mission d'expertise et que Monsieur Nahum n'a pas accompli personnellement sa mission, enfreignant les dispositions de l'article 233 du nouveau Code de procédure civile;

Mais considérant qu'il ressort de l'examen attentif tant des pré-rapports que des rapports déposés par Monsieur Nahum et par Monsieur Nussenbaum que ce dernier s'est borné à effectuer les diligences qui lui incombaient dans son domaine de spécialité, l'étude des répercussions des pratiques illicites mises en œuvre par la société Labinal, sur le marché concerné et les marchés adjacents, et à proposer à l'expert, toujours dans son domaine de spécialité, des éléments d'analyse, laissant à Monsieur Nahum, qui ne pouvait mener lui-même des opérations dont il ne possède pas la technique, le soin d'en tirer les conclusions utiles pour son expertise ;

Qu'ainsi, dans son pré-rapport, Monsieur Nussenbaum, après avoir indiqué dans la partie critiquée par la société Labinal intitulée " Analyse du préjudice causé par Labinal ", que la question qui lui était posée en tant que sapiteur revenait à apprécier qu'elles avaient été toutes les conséquences directes pour Mors en terme de position sur le marché des agissements de Labinal, mentionne en conclusion que ses investigations le conduisent à proposer à l'expert de retenir comme base du préjudice de perte de marché de Mors du fait des agissements de Labinal trois hypothèses, ce qui s'analyse comme un avis technique au sens de l'article 278 du nouveau Code de procédure civile ;

Que dans son rapport définitif, il indique que Monsieur Nahum lui a demandé son avis, en tant que technicien assistant, sur le marché des TPIS A 330/A 340, et ne conclut que sur les hypothèses proposées à l'expert pour apprécier l'impact des actes illicites de Labinal sur le partage du marché des TPIS A 330/A 340;

Que, loin de renvoyer purement et simplement les parties à la lecture du rapport du sapiteur par une délégation de ses pouvoirs, Monsieur Nahum a, quant à lui, pleinement et personnellement accompli la mission qui lui était confiée en faisant des commentaires sur les hypothèses retenues par le sapiteur (pages 170 et suivantes de son rapport) ;

Que le fait que Monsieur Nussenbaum se serait érigé en expert ne peut, dans ces conditions, se déduire de ce qu'il a malencontreusement indiqué dans divers courriers : " Monsieur Nahum et moi-même avons été nommés en tant qu'experts par la Cour d'appel de Paris " ;

Qu'il s'ensuit que la violation des dispositions de l'article 233 du nouveau Code de procédure civile n'est pas établie ;

Que le moyen tiré de l'irrégularité des opérations d'expertise sera en conséquence écarté ;

II) - Sur les préjudices

1) - Sur les préjudices nés du retard dans la négociation

Considérant que la société Mors fait valoir que le retard dans la négociation du contrat avec Bae lui a fait perdre le bénéfice de l'avance qu'elle avait acquise dans le développement de son produit et dans les démarches commerciales auprès des compagnies aériennes et l'a contrainte à exposer des coûts supplémentaires ;

Considérant que l'expert a identifié quatre postes de surcoûts : les surcoûts des études, les frais administratifs et commerciaux, les frais de conseiller et les frais de restructuration de l'usine de Blanc-Mesnil dans laquelle était originairement fabriqué le TPIS ; que ce dernier poste, supposant établie une perte de chiffre d'affaires imputable à la société Labinal sera discuté avec l'évaluation de la perte de marge par Mors du fait des agissements de son concurrent;

1) - Les surcoûts des études

Considérant que l'expert, après avoir validé par tests, au moyen de la comptabilité analytique recoupée avec la comptabilité générale, les chiffres avancés par la société Mors relatifs aux différents postes de coût d'études, indique qu'au total le coût direct des études s'est élevé à 8 649 000 F, soit un surcoût total par rapport au budget initial de 5 000 000 F de 3 649 000 F;

Qu'il observe que les budgets prévisionnels sont, en général, assez correctement élaborés dans les sociétés et que leurs dépassements dus à l'erreur ou aux imprévus s'établissent autour de 5 à 10 % du budget initial, ce qui en l'espèce conduit à un budget dépassé, pour des raisons usuelles, de 5 500 000 F ;

Considérant que la société Mors affirme que la totalité du surcoût ainsi fixé à 3 149 000 F est imputable aux agissements de la société Labinal, tandis que cette dernière soutient, d'une part, qu'il n'est apporté la preuve ni de frais effectivement engagés ni du lien direct existant entre ces surcoûts et son action, et, d'autre part, qu'il est invraisemblable que la société Mors ait dû supporter des frais d'études supplémentaires, après que son produit ait déjà été agréé par Bae, ce qui implique qu'il s'agissait d'un produit par définition complètement mis au point et ne pouvant donc nécessiter de nouvelles études techniques ;

Considérant que si, contrairement à ce que prétend Labinal, des surcoûts d'études ont été identifiés et chiffrés de manière fiable par l'expert, il n'en demeure pas moins que la société Mors n'explique ni ne démontre en quoi le dépassement du budget prévisionnel des études trouve son origine dans les agissements de Labinal;

Que dans ces conditions, faute d'établir le lien de causalité entre la faute et le préjudice invoqué, Mors doit être déboutée de sa demande de réparation au titre de surcoûts d'études;

2 - Les frais administratifs et commerciaux

Considérant que l'expert mentionne que s'il parait très probable que le retard dans la signature du contrat a contraint Mors à renforcer son action commerciale, il ne lui a pas été possible de fixer un montant précis de surplus de frais administratifs et commerciaux, n'ayant pas disposé d'éléments lui permettant de les isoler ;

Considérant que Mors, qui réclame à ce titre une somme de 1 500 000 F, alors que, dans un dossier du 26 février 1993, elle estimait le total des coûts commerciaux pour 1991 à 939 000 F, ne fournit aucun document ou élément probant de nature à justifier le montant de sa demande; que celle-ci ne peut donc qu'être rejetée ;

3 - Les frais de conseiller

Considérant que Mors demande le remboursement des dépenses relatives à l'assistance d'un expert-comptable que son avocat a sollicité compte tenu du caractère très technique du dossier ;

Considérant cependant que cette dépense ne peut être définie comme un surcoût imputable au retard dans la négociation, s'agissant en réalité de frais exposés par Mors pour organiser sa défense dans le cadre de la présente procédure et non compris dans les dépens qui seront appréciés avec la demande d'indemnité au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile ;

Qu'elle ne peut en conséquence constituer un chef de préjudice ;

III) - Sur l'évaluation du préjudice résultant de la perte de marches

Considérant que l'évaluation des conséquences préjudiciables résultant pour Mors des agissements sanctionnés par la cour suppose, outre le calcul de la marge, qui a été effectuée par l'expert, l'estimation du nombre de TPIS dont la vente a été perdue ;

- Sur le calcul de la marge

Considérant qu'afin de déterminer la marge occasionnée par les TPIS, l'expert a calculé le chiffre d'affaires et le coût de revient pour les trois sous-ensembles composant le produit - le capteur, le transformateur et le calculateur - et ce tant pour ce qui concerne la fourniture initiale (première monte) que pour le service après-vente (rechange et réparation) ;

Considérant que la détermination du chiffre d'affaires telle qu'effectuée par l'expert n'est pas discutée par les parties ; qu'en revanche, Labinal critique celle du coût de revient en ce qu'elle n'incorporerait qu'une faible part des charges de structure et tiendrait compte, à tort et de façon erronée, de paramètres macro-économiques ;

Mais considérant, s'agissant du coût de main-d'œuvre, que l'expert base, avec raison, ses calculs sur des standards déterminés par les ingénieurs du bureau des méthodes, et non comme le voudrait Labinal sur des temps réels, car les petites séries fabriquées n'ont pas permis d'affiner les standards ;

Que, s'agissant du coefficient de frais fixes, M. Nahum a écarté les frais généraux de structure, indépendants dans la mesure où ils auraient été engagés en tout état de cause, et n'a retenu que les frais fixes spécifiques à la fabrication des TPIS, déduction faite des frais commerciaux qui devaient être assumés par Westland et des frais de siège qui auraient été exposés de toutes les façons, de sorte que l'affirmation de Labinal selon laquelle seul le taux certifié par le commissaire aux comptes de Mors pour l'année 1991 et utilisé pour évaluer les stocks de l'exercice 1991 serait cohérent ne peut être retenue ; qu'il en est de même de sa demande tendant à la prise en compte d'un taux de frais commerciaux, de 11% du chiffre d'affaires après-vente et de 5,5 % du chiffre d'affaires première monte, d'un taux de frais financiers de 5 % et d'un taux de frais de siège de 3 %;

Que, pour les frais d'approvisionnement relatif au module électronique fourni par Westland, l'expert a logiquement réduit forfaitairement le taux d'approvisionnement issu de la comptabilité de Mors en retenant que les achats étaient faits en fonction des besoins immédiats de la production;

Que, s'agissant des phénomènes macro-économiques ayant un impact sur le calcul de la marge, le taux de remise sur l'après-vente a été estimé à 30 % correspondant à la fourchette basse indiqué par le représentant d'Airbus dans la mesure où Labinal n'a pas apporté des preuves comptables permettant de retenir un taux de remise de 40 %, le taux d'actualisation fixé en retenant un taux de risque maximum de 1,5 %, eu égard à la prise en compte par le sapiteur des aléas spécifiques au marché, le taux, d'inflation fixé à 1 % en fonction d'un taux réel constaté en 1997 de 1,1 %, étant en outre observé que l'expert a précisé qu'il ne tenait compte que partiellement de ce taux dans la mesure où les marges devaient être en réalité maintenues (hors inflation) du fait de la courbe d'expérience et des gains de productivité inhérents au processus industriel;

Qu'il résulte de ce qui précède que l'avis de l'expert s'appuie sur une motivation pertinente que ne contredit aucune des pièces produites par les parties ;

Que, de cet avis, qui emporte la conviction, il résulte que le montant des marges sur la première monte dégagées par la vente du TPIS pour un avion s élève :

- en 1992, pour un A 330 à 51 914 F et pour un A 340 à 60 478 F,

- en 1993, pour un A 330 à 61 126 F et pour un A 340 à 71 156 F,

- en 1994, pour un A 330 à 58 330 F et pour un A 340 à 67 915 F,

- en 1995, pour un A 330 à 44 655 F et pour un A 340 à 52 063 F,

- en 1996, pour un A 330 à 47 660 F et pour un A 340 à 55 547 F,

Que le montant de la marge sur la rechange d'un capteur est de :

<emplacement tableau>

Que la marge sur la réparation d'un calculateur est de 4 637 F et que celle dégagée par le service après-vente par avion et par an est fixée ainsi qu'il suit :

<emplacement tableau>

Sur l'évaluation du nombre d'avions dont la vente a été perdue ou l'évaluation de la perte de parts de marché résultant des agissements de Labinal

Considérant que, s'appuyant sur les travaux de l'expert et de son sapiteur, la société Mors demande à la cour, pour réparer l'entier préjudice qu'elle a subi du fait des pratiques anticoncurrentielles de Labinal, et se référant aux différentes approches faites par le sapiteur des parts de marché qu'elle a perdues, de retenir l'hypothèse 4 formulée par ce dernier, seule basée, selon elle, sur le résultat des pratiques condamnées, et plus précisément, la "fourchette haute" de cette hypothèse qui seule tient compte de la part de marché qui aurait du être la sienne en raison de sa position de fournisseur de première source ; qu'elle fixe en conséquence son préjudice à la somme de 41 585 431 F devant être augmentée de celle de 1 000 749 F au titre des coûts non récurrents ;

Qu'elle soutient, en outre, que la position importante qui aurait dû être la sienne en tant que fournisseur des TPIS pour les Airbus A 330/340 lui aurait permis d'être référencée pour d'autres avions, tels les Airbus A 340/500 et A 340/600 sur lesquels le TPIS qui sera un équipement standard présentera un haut degré de communalité avec l'équipement existant pour les A 330/340 et demande à la cour de fixer la perte subie sur ces marchés adjacents à 40 000 000 F, soit, toutes proportions gardées, au tiers du préjudice causé sur le marché spécifique;

Qu'elle sollicite les intérêts légaux sur ces sommes à compter du 1er janvier 1998 ;

Considérant que la société Labinal prétend, de son côté, que la cour ayant limité, dans son arrêt du 19 mai 1993, d'une manière particulièrement catégorique, aux deux seules pratiques tarifaires par elle énoncées la faute commise, l'existence du préjudice, qui est résulté, pour la société Mors, de ces fautes, doit être appréciée au regard des seules offres faisant apparaître l'une des pratiques tarifaires interdites ; qu'elle affirme qu'au vu des offres qu'elle a faites aux compagnies aériennes, la seule qui a pu être génératrice d'un dommage pour Mors est constituée par celle faite à la compagnie aérienne Lufthansa et représentative d'un enjeu total portant sur 29 avions Airbus A 340, et qu'à ce titre Mors ne peut se prévaloir que d'une perte de chance ;

Qu'elle soutient, en revanche, que toute autre indemnisation est interdite, notamment du chef d'une perte de parts de marché ou de l'exclusion de Mors par les compagnies Air France et UTA dont les décisions sont dépourvues de tout lien de causalité avez les pratiques mises en œuvres et condamnées par la cour ; qu'elle conteste également le droit de la société Mors à solliciter une réparation au titre des marchés adjacents en l'absence de tout lien entre le préjudice par elle allégué et les pratiques anti-concurrentielles retenues aux termes de l'arrêt de la cour ;

Mais considérant que la cour, dans sa précédente décision, a expressément qualifié les pratiques mises en œuvre par la société Labinal au regard des dispositions des articles 85-1 et 86 du traité instituant la Communauté économique européenne;

Que, sur un marché où elle était en position dominante, en raison du monopole de fait qu'elle détenait depuis plusieurs années sur l'ensemble des différents marchés des TPIS, équipement qu'elle a inventé et créé en 1980, et dont, à la seule exception de ceux des A 330/340, elle était depuis cette date l'unique constructeur, livrant ses produits à plus de soixante-dix compagnies aériennes, la société Labinal, grâce à l'action concertée de Westland, a pu faire progresser, de janvier à octobre 1991, ses recherches technologiques et poursuivre ses négociations commerciales auprès des compagnies aériennes de manière à être effectivement admise comme seconde source d'approvisionnement avant même la signature du contrat entre Bae et Mors ; qu'elle a, par ailleurs, mis en œuvre des pratiques tarifaires illicites dont la cour a déjà dit qu'elles avaient pour objet d'éliminer le seul concurrent pour la fourniture du TPIS sur le marché des Airbus A 330/340 et par voie de conséquence de lui interdire l'accès aux marchés des TPIS d'autres avions ;

Que les agissements de la société Labinal ont en conséquence nécessairement fait perdre à Mors une chance très sérieuse de faire admettre sa technologie, nouvelle et performante, tant auprès des compagnies Air France, Lufthansa et UTA qui étaient les compagnies de lancement pour le A 340 et les plus importants clients potentiels, qu'auprès des autres compagnies que le choix des premières aurait pu influencer et à l'égard desquelles Mors aurait pu bénéficier d'une réputation de spécialiste ;

Que cette perte de chance doit dès lors être calculée sur l'ensemble du marché potentiel des A 330/340, et non comme le voudrait la société Labinal, limitée aux seules offres contenant l'une des pratiques illicites et appréciée à la date limite du 19 mai 1993 ;

Qu'il doit également être recherché si les agissements de Labinal n'ont pas eu de conséquence préjudiciable pour Mors sur les marchés adjacents ;

* Sur le marché des Airbus A 330/340

Considérant que l'expert, s'appuyant sur les travaux du sapiteur, propose de retenir un marché potentiel des A330/340 compris entre 750 à 800 unités d'ici l'an 2010 pouvant se répartir à 50/50 entre les deux types d'avions;

Que, pour arriver à cette proposition, il a pertinemment rejeté l'objection de Labinal tendant à l'exclusion d'une partie des prévisions d'Airbus par la limitation des A 330/340 au seul segment des avions de 241 à 350 sièges alors qu'ils doivent être positionnés sur celui des 250 à 400 sièges ;

Qu'il a tenu compte de l'arrivée sur le marché des versions A 340/500 et 600 positionnées sur le même créneau que les avions concernés par le litige ;

Qu'il a également justifié la prise en compte des options d'achat des compagnies aériennes par l'analyse du potentiel du segment des avions gros porteurs, la place d'Airbus sur le marché aéronautique civil et l'état des commandes existantes ;

Que son avis sera en conséquence retenu, et la demande de Labinal tendant à voir ramener ce chiffre à celui maximum de 570 appareils écartée ;

Considérant qu'en fonction des travaux techniques de M. Nussenbaum, l'expert retient au 31 décembre 1996 un taux de pénétration du TPIS de 24 % pour les A 330 et de 42 % pour les A 340 et estime les taux de pénétration prévisionnels respectivement à 30 % pour le TPIS A 330 et de 50 % pour le TPIS A 340;

Que ce taux est contesté par Labinal qui soutient que ne peuvent être retenus que les taux respectifs de 24 % et de 42 % constatés au 31 décembre 1996 par les compagnies aériennes ;

Mais considérant que, depuis le milieu de l'année 1997, le TPIS est devenu un équipement " Standard " et non plus optionnel, ce qui établit qu'il présente un véritable intérêt technique lié à l'apport en matière de sécurité au décollage et à l'atterrissage ainsi qu'un intérêt économique dans la mesure où il simplifie les tâches de contrôle de la pression des pneus et permet ainsi de réduire les coûts de personnel ; que c'est donc avec pertinence que l'expert a estimé que cet élément nouveau allait entraîner un accroissement des taux de pénétration par rapport à leur niveau au 31 décembre 1996 ; que Labinal ne fournit aucun élément de statistique venant contredire cette analyse ;

Considérant que Labinal discute encore la détermination de la durée de vie de l'Airbus faite par l'expert poux évaluer la perte de marge au titre de l'après-vente (échange et réparation) ; qu'elle prétend que la durée moyenne d'utilisation de leurs flottes par les principales compagnies mondiales, dites compagnies de première zone, s'établit à 11 ans et non à 25 ans comme le retient Monsieur Nahum, suivant en cela les propositions de Monsieur Nussenbaum;

Mais considérant que là encore le technicien a justifié sa proposition, en indiquant, d'une part, que la durée de vie technique d'un TPIS était de 30 années, et, d'autre part, que la pratique de " désactivation " d'options telles que le TPIS, invoquée par Labinal au soutien de ses prétentions, ne concernait que le marché de l'occasion, soit pour Airbus 15 % du nombre total d'A 330/340 ; qu'il note encore que cette pratique n'a rien de systématique ; que Labinal ne fournit aucun élément tiré de son activité professionnelle venant contredire cette analyse ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le marché potentiel du TPIS doit être évalué, comme le suggère l'expert à :

<emplacement tableau>

Que sur ce marché, le taux de pénétration du TPIS est, au 31 décembre 1996, de 24 % pour les A 330 et de 42 % pour les A 340, et doit être fixé, pour la période postérieure, respectivement à 30% et 50% ; que la durée de vie d'un Airbus doit être estimée A 25 ans;

Considérant que l'expert, à partir des données techniques fournies par le sapiteur, indique qu'en tant que nouvel arrivant sur le marché des TPIS A 330/340, choisi comme première source pour fournir un équipement optionnel, Mors avait une vocation naturelle à une part de marché, au minimum égale à celle de son seul concurrent Labinal, au maximum de 70 % poux mieux prendre en compte sa qualité de fournisseur de première source, alors que sa part de marché effective s'élève actuellement, tout avion confondu, à 25 %;

Que cette approche, fondée sur une analyse technique et économique du marché, emporte la conviction;

Qu'il s'ensuit que les agissements de Labinal ont fait perdre à Mors une chance très certaine d'obtenir un tel positionnement sur le marché spécifique des Airbus A 330/340;

Qu'outre cette chance, ils l'ont privé de la possibilité d'obtenir le remboursement de ses frais non récurrents, c'est-à-dire des dépenses d'investissement préalables à la production du TPIS qui ne se renouvelleront pas dans le temps, dont l'amortissement s'effectuait de manière automatique par le biais d'une majoration du prix de vente de l'équipement des 100 premiers avions, le paragraphe 14.2.2.5 du contrat, invoqué par Labinal pour affirmer que le groupement Westland/Mors devait obtenir de Bae le remboursement de ses frais d'étude quoiqu'il arrive ne s'appliquant en réalité qu'en cas d'arrêt de la ligne de production d'une version de l'aéronef ;

Qu'ils lui ont encore fait perdre une chance de pouvoir maintenir en l'état la structure de l'usine du Blanc-Mesnil où le TPIS était originairement fabriqué ;

Qu'en fonction des différents paramètres entrant en ligne de compte pour le calcul de la perte de marge, tels que déterminés et calculés par l'expert, et dont les éléments discutés par la société Labinal ont été ci-dessus examinés, la cour a les éléments d'appréciation suffisants pour allouer à la société Mors la somme évaluée à ce jour de 34 200 000 F en réparation du dommage causé, sur le marché concerné, par les agissements de la société Labinal ;

Que la société Mors sera déboutée du surplus de ses demandes indemnitaires, et notamment de celles tendant à l'obtention d'intérêts moratoires sur la somme allouée à compter du 1er janvier 1998 ;

* Sur les marchés adjacents

Considérant que la société Mors soutient que la position importante qu'elle aurait dû obtenir en tant que fournisseur des TPIS pour les Airbus A 330/340 lui aurait permis d'être référencée pour d'autres avions ; qu'elle précise que le détournement par Labinal d'importants clients de référence comme Air France, Lufthansa et UTA a eu une influence sur le choix ultérieure de ces compagnies pour d'autres avions ainsi que sur celui d'autres compagnies moins prestigieuses ; qu'à titre d'exemple, elle indique qu'elle a soumissionné pour le TPIS du Boeing B 777 mais n'a pas été retenue, qu'Aerospatiale n'a pas lancé d'appel d'offres pour les Airbus A 321 et A 319; qu'elle ajoute, enfin, que si elle fait les démarches nécessaires pour être présente sur le marché des TPIS pour Airbus A 340/500 et A 340/600, les effets de l'action concertée de Labinal avec Westland et de l'abus de position dominante relevé à l'encontre de Labinal continueront de s'y faire sentir ;

Mais considérant que Monsieur Nussenbaum, sapiteur, indique, après avoir procédé à une analyse prospective du marché spécifique, que, s'il ne peut être exclu qu'en gagnant des contrats A 340 avec Air France, Lufthansa et UTA Mors aurait bénéficié d'une réputation de spécialiste du TPIS qui lui aurait permis d'être référencée, aucun élément précis ne vient conforter le caractère déterminant de ce paramètre dans le choix final opéré par les compagnies;

Que Monsieur Nahum, au vu des éléments d'appréciation apportés par Monsieur Nussenbaum, est d'avis qu'il n'y a pas lieu de prendre en compte les revendications de Mors relatives aux avions autres que les A 330/340;

Que cet avis est conforté par les indications fournies par Labinal selon lesquelles Air Inter qui a choisi Mors pour ses TPIS A 330 était auparavant équipée chez Labinal pour ses A 320, Turkish Airlines qui a choisi Mors pour ses A 340 était équipée chez Labinal pour ses A 310 et de même Air Portugal qui a choisi Mors pour ses A 340 était équipé chez Labinal pour ses A 310 et A 320;

Que Mors ne fournit aucun élément de nature à établir qu'elle a mis en œuvre les moyens techniques et financiers nécessaires au développement pour chaque programme d'avions de chaque constructeur aéronautique d'un TPIS offrant une originalité ou une avancée sur le plan technologique ou un avantage tarifaire significatif pour les compagnies aériennes ;

Que, s'agissant des exemples avancés, rien ne permet de dire que le choix de Labinal pour l'équipement des Boeing B 777 est en relation avec les agissements sanctionnés par la cour dès lors qu'il a été opéré à l'issue d'un appel d'offres auquel a répondu Mors ainsi que Westland et que les critères de sélection étaient exclusivement techniques ;

Que Labinal explique, sans être contredite par son adversaire, que si Aerospatiale n'a pas estimé utile de procéder à un nouvel appel d'offre pour les TPIS des Airbus A 321 et A 319, c'est parce qu'il s'agissait d'un TPIS présentant des caractéristiques identiques à celui de l'Airbus A 320;

Qu'enfin, le groupement Mors/Westland est appelé par British Aerospace, tout comme Labinal, à soumissionner à l'appel d'offre pour le nouveau TPIS devant équiper le nouvel avion A 340-500/600;

Qu'en conséquence, rien ne permettant de relever un lien entre les pratiques anticoncurrentielles et le fait que cette société ne se soit pas implantée sur le marché d'autres avions, la demande formée par la société Mors au titre d'un préjudice sur les marchés adjacents doit être rejetée ;

Sur les autres demandes

Considérant que la société Labinal sera condamnée à payer à la société Mors une indemnité complémentaire en application de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile qui, compte tenu de la longueur et de la complexité des opérations d'expertise qui a contraint la société Mors à s'adjoindre un expert-comptable, doit être fixée à 800 000 F ; que la demande formée par la société Labinal sur le même fondement doit être rejetée ;

Que la société Labinal doit être condamnée aux dépens qui comprendront les frais d'expertise, sans qu'il y ait lieu de faire droit à la demande de la société Mors tendant à l'octroi d'intérêts compensatoires sur les divers montants versés par elle ;

Par ces motifs, Vu l'arrêt rendu le 19 mai 1993 dans la présente instance ; Déboute la société Labinal de sa demande tendant à l'annulation des opérations d'expertise ; Condamne la société Labinal à payer à la société Mors la somme de 34 200 000 F à titre de dommages et intérêts et celle de 800 000 F sur le fondement de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile ; Rejette toutes autres prétentions des parties ; Condamne la société Labinal aux dépens de première instance et d'appel qui comprendront les frais et honoraires d'expertise et dit que les dépens d'appel seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du nouveau Code de procédure civile.