CA Lyon, ch. soc. B, 4 juin 2009, n° 08-02879
LYON
Arrêt
Confirmation
PARTIES
Demandeur :
Perrin
Défendeur :
Belat-Desprat (ès qual.), Espace Immobilier (SARL), AGS CGEA Annecy
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Gayat de Wecker
Conseillers :
Mmes Defrasne, Clément
Avocats :
Mes Brun, Cannet, Zotta, de Joussineau
Statuant sur l'appel formé par Monsieur Patrick Perrin d'un jugement du Conseil de prud'hommes de Lyon, en date du 10 avril 2008, qui a:
- dit que Monsieur Patrick Perrin avait le statut de VRP multicartes,
- débouté en conséquence Monsieur Patrick Perrin de ses prétentions, débouté la SCP Belat-Desprat de ses demandes,
- condamné Monsieur Patrick Perrin aux dépens.
Vu les écritures et les observations orale à la barre, le 20 mars 2009 de Monsieur Patrick Perrin, appelant, qui demande à la cour:
- d'infirmer le jugement du conseil de prud'hommes et statuant à nouveau:
- de dire qu'il avait le statut de VRP exclusif au sein de la société Espace Immobilier et qu'il exerçait son activité à temps plein au sein de ladite société,
- de fixer sa créance au passif de la liquidation judiciaire de la société Espace Immobilier aux sommes suivantes:
* 24 268 99 euro à titre de rappel de salaires,
* 2 426,89 euro à titre de congés payés afférents
avec intérêts au taux légal à compter du 12 juin 2007,
- de dire que l'AGS et le CGEA d'Annecy devront garantir l'ensemble de ces créances,
- de condamner la SCP Belat-Desprat ès qualité de mandataire liquidateur de la société Espace Immobilier à lui payer la somme de 1 000 euro en application de l'article 700 du Code de procédure civile,
- de déclarer la décision à intervenir opposable à l'AGS et au CGEA,
- de laisser les dépens à la charge de la liquidation judiciaire de la société Espace Immobilier.
Vu les écritures et les observations orales à la barre, le 20 mars 2009 de la société Espace Immobilier SARL représentée par son liquidateur, la SCP Belat-Desprat, intimée, qui demande à la cour:
- de débouter Monsieur Patrick Perrin de l'ensemble de ses demandes,
- de le condamner à lui rembourser la somme de 35 303,20 euro à titre d'avance sur commissions indûment perçues.
- de le condamner à lui payer la somme de 3 000 euro à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive ainsi que la somme de 2 000 euro en application de l'article 700 du Code de procédure civile.
- de condamner Monsieur Patrick Perrin aux dépens.
Vu les écritures et les observations orales à la baffe, le 20 mars 2009, de l'AGS et du CGEA d'Annecy, intervenants, qui demandent à la cour:
- de confirmer le jugement entrepris et de rejeter les prétentions de Monsieur Patrick Perrin.
- subsidiairement, de rejeter la demande d'intérêts au taux légal et de dire que l'AGS ne garantit pas les créances fondées sur l'article 700 du Code de procédure civile.
Exposé du litige
Attendu que Monsieur Patrick Perrin a été embauché à durée indéterminée par la SARL Espace Immobilier le 1er avril 2004, en qualité de voyageur représentant placier multicartes moyennant une rémunération à la commission, définie dans son contrat de travail;
Que par jugement du 21 juillet 2006, le Tribunal de commerce de Bourg-en-Bresse a prononcé le redressement judiciaire de la société Espace Immobilier en désignant Maître Picard en qualité d'administrateur judiciaire et la SCP Belat-Desprat en qualité de mandataire judiciaire;
Que le 23 mars 2007, le tribunal de commerce a prononcé la liquidation judiciaire de la société Espace Immobilier et désigné la SCP Belat-Desprat en qualité de liquidateur;
Que par lettre recommandée du 6 avril 2007, le liquidateur a notifié à Monsieur Perrin son licenciement pour motif économique, motivé par l'arrêt d'activité de la société et la suppression de son emploi;
Qu'après son départ de l'entreprise, Monsieur Perrin, considérant qu'il n'avait pas perçu la rémunération minimale forfaitaire prévue par la convention collective au profit des VRP exclusifs a saisi le 15 juin 2007 la juridiction prud'homale ;
Qu'il a été débouté de ses prétentions par la décision aujourd'hui frappée d'appel ;
Attendu que Monsieur Perrin fait valoir que contrairement à son contrat de travail de VRP multicartes, il a toujours exercé son activité professionnelle à titre exclusif et a temps plein pour le compte de la société Espace Immobilier et perçu seulement les rémunérations qui lui étaient versées par cette société ;
Qu'il réclame le paiement d'un complément de rémunération à concurrence de la ressource minimale forfaitaire prévue par l'article 5 de l'accord national interprofessionnel du 3 octobre 1975 ;
Que la SCP Belat-Desprat s'oppose à ces prétentions en faisant valoir que Monsieur Perrin a été embauché en qualité de VRP multicartes et non pas de VRP exclusif, qu'il était inscrit auprès des Caisses de retraite en qualité de VRP multicartes et que la faiblesse des commissions perçues par l'intéressé est incompatible avec une activité à titre exclusif;
Que le liquidateur, par ailleurs, formule une demande reconventionnelle en remboursement de la différence entre les avances sur commissions versées à Monsieur Perrin et les commissions réellement dues à ce dernier;
Motif de la cour
1 - Sur la demande du salarié:
Attendu que la garantie minimale de ressources dont Monsieur Perrin réclame le bénéfice est prévue par l'accord interprofessionnel du 3 octobre 1975, au profit des VRP relevant de cet accord, à la double condition qu'ils exercent leur activité pour un seul employeur et à temps plein;
Attendu qu'il est constant en l'espèce que Monsieur Perrin a été engagé par la société Espace Immobilier en qualité de VRP multicartes, qu'il était affilié en cette même qualité à la Caisse de Cotisations de Sécurité Sociale des VRP et que la plupart de ses bulletins de salaire font mention de la qualité de VRP multicartes;
Que le fait que le contrat de travail et certaines correspondances des organismes sociaux ne mentionnent pas d'autres employeurs que la société Espace Immobilier ne saurait exclure la possibilité réservée à Monsieur Perrin d'avoir plusieurs employeurs, peu important qu'il n'ait pas recherché d'autres entreprises;
Que Monsieur Perrin verse aux débats trois attestations d'anciens salariés d'Espace Immobilier qui décrivent ses activités au sein de la société et, pour deux d'entre elles, indiquent qu'il travaillait à temps plein ; qu'il produit aussi une attestation du liquidateur faisant état d'un temps plein pour le 1er semestre 2007 ;
Que cette dernière attestation est formellement remise en cause par son auteur dans un courrier explicatif du 18 décembre 2008 et que les autres témoignages doivent être examinés avec circonspection car il ressort des éléments produits par l'employeur que Monsieur Perrin n'a déployé qu'une faible activité pour la société Espace Immobilier pendant les quatre ans de la relation contractuelle, n'ayant réalisé que sept ventes, générant moins de 9 000 euro de commissions;
Que Monsieur Perrin se prévaut de ses avis d'imposition sur le revenu de 2004 à 2006 mais que ces documents sont insuffisants pour apprécier la réalité de son activité;
Qu'en conséquence, Monsieur Perrin ne rapporte pas la preuve qui lui incombe qu'il exerçait pour le compte de la société Espace Immobilier une activité de VRP exclusif au lieu de l'activité de VRP multicartes figurant à son contrat de travail ;
Que ne pouvant prétendre à la rémunération minimale conventionnelle, il doit être débouté de ses prétentions;
2- Sur la demande reconventionnelle de l'employeur :
Attendu qu'il résulte des pièces produites et des explications fournies à la cour que Monsieur Perrin a perçu sur l'ensemble de la période contractuelle une somme totale de 44 034,66 euro presque exclusivement à titre d'avances sur commissions pour des commissions effectivement dues d'un montant total de 8 731,48 euro ;
Que le salarié au demeurant ne conteste pas cette différence devant la cour;
Que le compte entre les parties devant être régularisé, il convient de faire droit à la demande de l'employeur en remboursement d'un trop-perçu de 35 303,20 euro;
Attendu en revanche que si l'appel de Monsieur Perrin ne peut prospérer, il n'est pas démontré pour autant que ce recours est abusif; que la demande de l'employeur en paiement de dommages et intérêts doit être rejetée;
Attendu que Monsieur Perrin qui succombe supportera les dépens ; qu'il n'y a pas lieu de faire application des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile;
Par ces motifs, Dit l'appel recevable, Confirme le jugement entrepris, Y ajoutant : Condamne Monsieur Patrick Perrin à rembourser à la SCP Belat-Desprat ès qualité de liquidateur judiciaire de la SARL Espace Immobilier la somme de 35 303,20 euro à titre de commissions indûment perçues, Dit sans objet la demande de garantie formée à l'égard de l'AGS et du CGEA d'Annecy, Dit n'y avoir lieu à application à l'article 700 ou Code de procédure civile en cause d'appel, Condamne Monsieur Patrick Perrin aux dépens de première instance et d'appel.