Cass. 1re civ., 12 janvier 2012, n° 10-24.696
COUR DE CASSATION
Arrêt
Rejet
PARTIES
Demandeur :
Labrador (SAS)
Défendeur :
RR Donnelley Printing France (SARL), RR Donnelley UK ltd
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Charruault
Rapporteur :
Mme Canas
Avocat général :
Mme Petit
Avocats :
SCP Hémery, Thomas-Raquin, Me Bertrand
LA COUR : - Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 30 juin 2010), que la société Labrador s'est vue confier par la société Total, à compter de l'année 2003, la réalisation des avis de convocation aux assemblées générales ainsi que des brochures de présentation de ces assemblées ; qu'elle a en outre été choisie en 2006 pour réaliser les documents de référence des sociétés Total et Gaz de France ; que l'année suivante, ces dernières ont fait appel à la société RR Donnelley Printing France ; que soutenant que celle-ci s'est contentée de reproduire servilement ses propres documents, constituant selon elle des œuvres collectives, la société Labrador a engagé à son encontre une action en contrefaçon de droits d'auteur et en concurrence déloyale et parasitaire ;
Sur le premier moyen :- Attendu que la société Labrador fait grief à l'arrêt de déclarer irrecevables ses demandes formées au titre de la contrefaçon alors, selon le moyen : - 1°) que, d'une part, en l'absence de revendication du ou des auteurs, l'exploitation d'une œuvre par une personne morale fait présumer, à l'égard des tiers recherchés pour contrefaçon, que cette personne est titulaire sur l'œuvre, qu'elle soit collective ou non, du droit de propriété incorporelle de l'auteur ; que pour écarter cette présomption, la cour d'appel s'est fondée sur le fait que les sociétés Total et Gaz de France avaient exploité ou divulgué les documents en cause sous leur propre nom ; qu'en statuant ainsi, sans rechercher, comme elle y était invitée, s'il n'était pas justifié par les devis et factures produits que la société Labrador avait également exploité et commercialisé les documents litigieux auprès des sociétés Total et Gaz de France avant que ces dernières ne les diffusent, et si, en l'absence de toute revendication de droit d'auteur par celles-ci, la société Labrador ne pouvait pas ainsi bénéficier de cette présomption à l'égard de la société RR Donnelley Printing (France), tiers poursuivi en contrefaçon, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L.113-5 du Code de la propriété intellectuelle ; 2°) que, d'autre part, en se bornant à affirmer qu'au regard de l'ensemble des normes imposées par les chartes graphiques des sociétés Total et Gaz de France, la société Labrador ne justifierait pas avoir pu disposer d'une quelconque liberté de création dans la confection des mises en page revendiquées, sans indiquer en quoi ces " normes " seraient de nature à exclure toute œuvre créative de sa part, et sans rechercher, comme elle y était invitée, si indépendamment des recommandations contenues dans ces chartes graphiques, il ne résultait pas des devis et des factures, mais aussi des recommandations adressées par la société Labrador à la société Gaz de France, exposant une série de choix graphiques et typographiques pour les documents financiers à réaliser, que la prestation de la société Labrador incluait un effort créatif, la cour d'appel a privé sa décision de motifs, en violation de l'article 455 du Code de procédure civile ;
Mais attendu qu'ayant retenu, d'une part, que la société Labrador ne démontrait pas que les œuvres collectives alléguées aient été créées à son initiative et sous sa direction et, d'autre part, que les documents financiers en cause avaient été diffusés et exploités par les sociétés Total et Gaz de France sous leur propre nom, la cour d'appel, qui a ainsi souverainement apprécié la portée des éléments de preuve qui lui étaient soumis et qui n'était pas tenue de suivre les parties dans le détail de leur argumentation, a légalement justifié sa décision ;
Et sur le second moyen : - Attendu que la société Labrador fait grief à l'arrêt de la débouter de ses demandes en concurrence déloyale et en parasitisme alors, selon le moyen, qu'en se bornant à affirmer, pour écarter toute usurpation du savoir-faire de la société Labrador, que la contribution propre de celle-ci ne serait ni identifiée, ni individualisée, sans rechercher, comme elle y était invitée, si la réalisation des mises en page invoquées par la société Labrador ne traduisait pas, à tout le moins, la mise en œuvre d'un savoir-faire, la cour d'appel a privé sa décision de motifs, en violation de l'article 455 du Code de procédure civile ;
Mais attendu que la cour d'appel a retenu, par motifs adoptés des premiers juges, que la société Labrador ne rapportait la preuve ni de la notoriété du savoir-faire invoqué, ni des investissements réalisés pour conférer à celui-ci une valeur économique, ni de son appropriation délibérée par la société RR Donnelley Printing France ;
D'où il suit que le moyen manque en fait ;
Par ces motifs : Rejette le pourvoi.