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Décisions

Cass. soc., 8 mars 2012, n° 10-18.004

COUR DE CASSATION

Arrêt

Rejet

PARTIES

Demandeur :

W finance conseil (SA)

Défendeur :

Alberny

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Gosselin

Rapporteur :

M. Ballouhey

Avocat général :

M. Weissmann

Avocats :

SCP Baraduc, Duhamel, SCP Lyon-Caen, Thiriez

Toulouse, 4e ch. soc. sect. 1, du 24 mar…

24 mars 2010

LA COUR : - Attendu, selon l'arrêt attaqué (Toulouse, 24 mars 2010), que M. Alberny a été engagé le 2 novembre 1987 par la société Worms gestion diffusion, devenue W finance conseil, pour devenir conseiller en gestion de patrimoine à compter du 1er janvier 1992, moyennant une rémunération proportionnelle à son chiffre d'affaires ; que revendiquant le statut de VRP et estimant qu'il n'avait pas perçu toutes ses commissions, il a saisi la juridiction prud'homale ;

Sur le moyen unique du pourvoi principal de l'employeur : - Attendu que la société W finance conseil fait grief à l'arrêt de la condamner à payer une certaine somme au titre de rappel de commissions alors, selon le moyen : 1°) que les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites et que le juge doit rechercher quelle a été la commune intention des parties contractantes au moment de la formation de l'acte ; que si l'article 5.4 du contrat de travail prévoit que " la société pourra à tout moment modifier le ou les barèmes de commissions pour chaque catégorie de produits cela en fonction des circonstances économiques, notamment en cas de diminution des taux de chargements payés par la clientèle ", l'article 5.3.3. du même contrat précise que " pour le calcul de la rémunération proportionnelle, ne seront pris en considération que les souscriptions et ordres d'acquisition se traduisant par une augmentation nette de capitaux recueillis antérieurement auprès du client ", et surtout que " seule cette marge nette servait d'assiette au calcul de la rémunération proportionnelle " ; qu'en affirmant pour infirmer le jugement et condamner l'employeur au paiement de rappel de commissions, que la clause de l'article 5.4 du contrat de travail était nulle au motif qu'elle ne donnait aucune précision permettant de déterminer dans quelle proportion la réduction des frais d'entrée entraînerait celle des commissions quand il ressortait de l'article 5.3.3 du contrat de travail que pour le calcul de la rémunération proportionnelle, l'assiette des commissions était la marge nette réalisée par les frais supportés par le client, ce dont il résultait que seule l'assiette des commissions était impactée par les ristournes consenties par le salarié et non son taux de commissionnement, la cour d'appel, qui s'est prononcée au regard de la seule clause de l'article 5.4 du contrat de travail sans prendre en considération l'économie d'ensemble du contrat et notamment l'article 5.3.3 du contrat de travail, a violé l'article 1134 du Code civil, ensemble l'article L. 1221-1 du Code du travail ; 2°) qu'il appartient au juge de rechercher l'intention des parties contractantes dans les termes employés par elles tant au moment de la formation de l'acte que dans tout comportement ultérieur de nature à la manifester ; qu'en ne recherchant pas, ainsi qu'elle y était invitée, la commune intention des parties dans le comportement ultérieur du salarié et notamment au regard des "mémorandum" régulièrement versés aux débats par lesquels M. Alberny informait son employeur qu'il convenait de faire application pour le calcul de sa rémunération du chiffre d'affaires corrigé et au vu de ses écritures reconnaissant que W finance conseil appliquait les bons taux contractuels, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1134 du Code civil ; 3°) qu'une clause de contrat de travail peut prévoir une variation de la rémunération du salarié, dès lors qu'elle est fondée sur des éléments objectifs indépendants de la volonté de l'employeur ; que la société W finance conseil faisait valoir dans ses écritures d'appel que le conseiller ne pouvait prétendre au maintien de l'assiette de commission contractuel sur un produit dès lors qu'il avait librement choisi de faire bénéficier le client d'une remise et n'avait pas respecté le taux de frais figurant dans les conditions générales ; qu'en omettant de rechercher, ainsi qu'elle y était invitée par les écritures d'appel de la société W finance conseil, les conséquences qu'il convenait de tirer de la liberté du conseiller de réduire les taux de chargement supportés par son client, initiative qui avait pour corollaire immédiat de baisser la marge commerciale de la société W finance conseil, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1134 du Code civil et de l'article L. 1221-1 du Code du travail ; 4°) qu'une clause de contrat de travail peut prévoir une variation de la rémunération du salarié, dès lors qu'elle est fondée sur des éléments objectifs indépendants de la volonté de l'employeur, ne fait pas porter le risque d'entreprise sur le salarié et n'a pas pour effet de réduire la rémunération en dessous des minima légaux et conventionnels ; qu'en énonçant, pour justifier la nullité de la clause, que l'employeur percevait au cours du contrat un revenu sur les encours de sorte que la réduction des commissions du salarié n'est pas nécessairement directement proportionnelle à celle des droits d'entrée, la cour d'appel s'est prononcée par des motifs inopérants en violation de l'article 455 du Code de procédure civile ; 5°) qu'enfin, le salarié étant tenu d'exécuter de bonne foi le contrat de travail, l'employeur ne peut se voir imputer le paiement de rappel de commissions lorsque le salarié a de sa propre initiative fait bénéficier son client d'une remise et n'a pas respecté le taux figurant dans les conditions générales ; que la société W finance conseil faisait valoir qu'en réalité, selon les termes du contrat, le salarié en modifiant les taux de charges au bénéfice de ses clients s'imposait lui-même la modification de sa rémunération qu'il prétendait avoir seulement aujourd'hui subi ; qu'en ne s'expliquant pas sur ce moyen dont il ressortait que le salarié avait volontairement provoqué les conditions d'absence de versement des commissions, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 1222-1 du Code du travail ;

Mais attendu qu'interprétant l'ensemble des clauses du contrat de travail du salarié, la cour d'appel a, sans encourir les griefs du moyen, exactement décidé que la clause de l'article 5-4 du contrat de travail était nulle en ce qu'elle donnait à l'employeur la possibilité de modifier la rémunération prévue par le contrat en fonction d'éléments généraux, s'agissant notamment des remises consenties sur les droits d'entrée des produits souscrits, sans l'accord du salarié ; que le moyen n'est pas fondé ;

Et sur le moyen unique du pourvoi incident du salarié : - Attendu que le salarié fait grief à l'arrêt de le débouter de sa demande tendant à se voir reconnaître le statut de VRP alors, selon le moyen : que les limites du secteur de prospection ne doivent pas nécessairement être définies avec précision, dès lors qu'il présente en fait un caractère de fixité suffisante pour être considéré comme déterminé et comme répondant aux conditions du statut du représentant ; que la cour d'appel qui a reconnu que le salarié concentrait l'essentiel de son activité dans les régions Midi-Pyrénées et Languedoc-Roussillon et a ainsi suffisamment caractérisé l'existence d'un secteur géographique et a violé l'article L. 7311-3 du Code du travail ;

Mais attendu qu'ayant relevé, en s'appuyant sur le rapport d'expertise, que le salarié n'avait pas de secteur déterminé puisqu'il prospectait dans de très nombreux départements, au-delà de la zone dont il prétendait qu'elle constituait son secteur, la cour d'appel a pu, sans encourir les griefs du moyen, décider que le salarié ne pouvait revendiquer le statut de VRP ; que le moyen n'est pas fondé ;

Par ces motifs : Rejette le pourvoi.