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Décisions

CA Montpellier, 2e ch., 7 février 2012, n° 10-06688

MONTPELLIER

Arrêt

Confirmation

PARTIES

Demandeur :

Myriade (SARL)

Défendeur :

Casapizza France (SAS)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Bachasson

Conseillers :

Mme Olive, M. Chassery

Avocats :

Mes Watremet, Nicolas, Pepratx Nègre, Mainguy

T. com. Montpellier, du 28 juill. 2010

28 juillet 2010

Faits et procédure - Moyens et pretentions des parties

La société Casapizza France exploite un concept de restauration sous la forme d'une franchise à l'enseigne "La casa Pizza et Grill".

Par acte sous seing privé du 19 novembre 2004, la société Casapizza a conclu avec la société Myriade un contrat de franchise d'une durée de 7 ans prenant effet le 6 avril 2005, pour l'exploitation d'un restaurant situé <adresse>.

Le contrat prévoit notamment en son article 11-1, que "les causes d'extinction du contrat sont l'arrivée du terme et la clause résolutoire : le franchiseur sera en droit de mettre fin au contrat en cas de manquement grave ou répété du franchisé à l'une quelconque de ses obligations (...). Le franchiseur respectera un préavis de 3 mois. Toutefois, toute atteinte de toute nature à la notoriété et la réputation du réseau ou de l'enseigne sera sanctionnée par la résiliation immédiate du contrat après mise en demeure restée inopérante adressée au franchisé de cesser ses agissements ou de rectifier ses erreurs dans un délai de 8 jours."

La société Casapizza a, par l'intermédiaire de son conseil, dans un courrier recommandé en date du 5 mai 2009, demandé à la société Myriade de respecter ses obligations notamment, en ce qui concerne le paiement de la redevance fixée à 5 % du chiffre d'affaires réalisé et non au taux réduit de 2,5 % décidé unilatéralement par celle-ci en avril 2009, la mise en conformité de ses menus, prix et serviettes et l'approvisionnement auprès des fournisseurs référencés.

Après constat d'huissier en date du 27 mai 2009, le conseil de la société Casapizza a demandé à la société Myriade, par courrier simple du 29 juillet 2009, de se conformer aux stipulations contractuelles, sous peine de résiliation effective du contrat à compter du 31 août 2009.

Par lettre recommandée avec accusé de réception en date du 2 septembre 2009, la société Myriade a précisé que la baisse unilatérale du montant des redevances résultait des carences de la société Casapizza dans le cadre de la formation continue et de sa mission d'assistance mais également d'une mise en adéquation avec la réalité économique. Le 3 septembre 2009, elle l'a mise en demeure de lui verser les remises de fin d'année de l'année 2008 dues en vertu d'un avenant conclu en 2005, soit 4 944,59 euro.

Par acte d'huissier du 9 septembre 2009, la société Casapizza a fait assigner devant le Tribunal de commerce de Montpellier, la société Myriade afin que la résiliation du contrat aux torts exclusifs de celle-ci soit confirmée ou prononcée et qu'elle soit condamnée à lui payer des dommages et intérêts en réparation de divers préjudices outre un solde de redevances ainsi que la restitution de tous les signes distinctifs de la franchise.

Par jugement en date du 28 juillet 2010, le tribunal a notamment :

- constaté la modification unilatérale du contrat de franchise par la société Myriade et le manquement à l'obligation de paiement des redevances dues ;

- constaté le manquement de la société Myriade à ses obligations contractuelles au titre des approvisionnements et application des normes ;

- rejeté "l'acte de concurrence déloyale" ;

- confirmé la résiliation du contrat à compter du 31 août 2009, conformément aux stipulations contractuelles ;

- condamné la société Myriade au paiement de dommages et intérêts pour un montant de 138 508 euro, correspondant à la perte des redevances dues lors de la résiliation anticipée du contrat du 1er septembre 2009 au 6 mai 2012 ;

- condamné la société Myriade au paiement de dommages et intérêts selon l'article 11-2 du contrat de franchise, pour un montant de 16 000 euro par infraction constatée, soit 32 000 euro ;

- condamné la société Myriade au paiement du solde de redevances de 2009 pour un montant de 20 365 euro ;

- condamné la société Myriade à se conformer à ses obligations contractuelles, restitution au franchiseur de tous les documents et signes de la marque, respect de l'obligation de confidentialité et perte de droits aux remises et ristournes ainsi que respect de non-concurrence contractuelle ;

- débouté la société Myriade de ses demandes ;

- condamné la société Myriade à payer à la société Casapizza la somme de 1 000 euro, sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile ainsi qu'à supporter les dépens.

La société Myriade a régulièrement interjeté appel de ce jugement, en vue de son infirmation, réitérant les demandes faites en première instance et demandant à la cour de débouter la société Casapizza de ses demandes et de la condamner reconventionnellement à lui payer une somme de 100 000 euro, à titre de dommages et intérêts en réparation de son préjudice moral, outre le montant des remises de fin d'année dues pour les années 2008 et 2009. Elle conclut à la résiliation du contrat de franchise aux torts exclusifs de la société Casapizza et à sa condamnation à lui payer diverses sommes en réparation des préjudices financiers, d'image et de pertes d'exploitation (672 732,63 euro globalement), outre celle de 30 000 euro, sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile.

Dans des conclusions déposées au greffe de la cour, le 3 décembre 2010, elle soutient que :

- l'article 11-1 du contrat de franchise n'est pas une clause résolutoire de plein droit et se borne à rappeler les dispositions de l'article 1184 du Code civil ; c'est donc à tort que le tribunal a confirmé la résiliation du contrat notifiée par le franchiseur alors que la résolution devait être demandée en justice ;

- en tout état de cause, les conditions de mise en œuvre de la clause n'ont pas été respectées, notamment le préavis de 3 mois, étant précisé qu'elle n'a pas reçu le courrier du 29 juillet 2009 dont se prévaut la société Casapizza ;

- le contrat n'a donc pas été valablement résilié au 31 août 2009 et les dispositions de l'article L. 442-6 5° ne sont pas applicables ;

- les manquements reprochés par le franchiseur ne revêtent pas un caractère de gravité suffisant pour fonder la résiliation du contrat, et ce d'autant qu'un délai de 3 mois sépare la lettre d'interpellation du 5 mai 2009 et celle du 29 juillet 2009 ;

- le non-paiement intégral des redevances à compter du début de l'année 2009 résulte de l'exception d'inexécution, la société Casapizza ayant manqué à ses propres obligations en ne lui remboursant pas la remise de fin d'année 2008 due en vertu d'un avenant au contrat, au titre des avantages tarifaires consentis par les fournisseurs référencés, et ce, malgré plusieurs relances effectuées tant par elle-même que par d'autres franchisés du réseau ;

- en outre, la société Casapizza n'a pas fourni les différentes prestations lui incombant en contrepartie de la redevance, en l'état d'un désintérêt manifeste croissant pour les membres du réseau, notamment au titre de la formation continue non adaptée à l'activité et à son évolution, de l'assistance technique individuelle ou collective quasiment inexistante, de la promotion et de la valorisation de la marque également carencées, de campagnes publicitaires régionales ou nationales et d'offres promotionnelles non innovantes, et d'une protection non effective de la marque contre les nombreux comportements concurrentiels ; le franchiseur qui réalise un bénéfice important a pour seul but de générer du profit au détriment des franchisés sans investir dans le développement de son réseau ;

- la jurisprudence admet que le franchisé est en droit de suspendre le paiement des redevances en cas de manquement grave du franchiseur ;

- en ce qui concerne les manquements qui lui sont reprochés, elle a effectivement procédé à des rectifications et adaptations des menus pour répondre aux souhaits de la clientèle locale, dans le respect des normes de présentation de la marque, comme d'autres franchisés qui n'ont pas été poursuivis par la société Casapizza ; la prétendue atteinte à l'intégrité du réseau du fait de la réintégration dans le menu du magret de canard et de la côte de bœuf n'est pas constituée alors même que cette dernière a réintégré la côte de bœuf dans la carte de juillet 2009 et a accepté que des franchisés suppriment certains menus standard (Casa Malin et Casa Midi) ;

- quant à l'atteinte à l'homogénéité du réseau, il convient de constater que les restaurants franchisés récemment ne ressemblent pas aux plus anciens dont elle fait partie, ce qui démontre la mauvaise foi de l'intimée qui ne respecte pas la charte et le concept qu'elle a développés initialement ;

- le non-respect de l'obligation d'approvisionnement n'est pas fondé puisque l'article 9-4 du contrat permet au franchisé de s'approvisionner auprès d'autres fournisseurs non référencés quand les tarifs sont plus avantageux pour des produits ou services similaires ;

- les actes de contrefaçon non retenus à juste titre par la juridiction consulaire qui n'avait d'ailleurs pas compétence pour en connaître (demande relevant du tribunal de grande instance) ne sont pas constitués puisque les serviettes respectent la charte graphique de la marque et elle s'est adressée à un fabricant non référencé car le prix à l'unité était plus avantageux ;

- l'allocation des redevances dues jusqu'à la fin du contrat par le tribunal n'est pas compatible avec la résolution du contrat qui ne peut aboutir à son exécution totale ou partielle ;

- la clause pénale n'est pas applicable en l'absence de violation de ses obligations contractuelles et exclut, en toute hypothèse, les indemnisations complémentaires octroyées à l'intimée ;

- la perte de crédibilité du réseau et sa baisse de compétitivité résultent du manque de professionnalisme du franchiseur dans la gestion de celui-ci et de son inertie face aux difficultés financières de certains franchisés (9 sur 32 ont connu des procédures collectives ou ont fermé) ;

- la violation de ses obligations de franchiseur par la société Casapizza justifie la résolution du contrat de franchise aux torts exclusifs de celle-ci et l'octroi de dommages et intérêts ainsi qu'il suit :

* 40 000 euro au titre de l'impact négatif de l'absence totale de promotion et de valorisation de la marque sur le développement du réseau par rapport aux enseignes concurrentes ;

* 375 790,63 euro pour rupture anticipée du contrat (investissements non totalement amortis et nécessité de nouvelles dépenses pour modifier l'enseigne et réaménager ses locaux) ;

* 50 000 euro au titre du préjudice d'image ;

* 206 942 euro pour préjudice d'exploitation généré par la fermeture de l'établissement durant les travaux de réaménagement ;

- les fautes commises par la société Casapizza qui, alors que le contrat n'était pas effectivement rompu, l'a dénigrée auprès des autres franchisés et a coupé l'accès au site intranet du réseau, ce qui justifie la demande d'indemnisation du préjudice résultant de l'atteinte à sa réputation commerciale et à son image, à hauteur de 100 000 euro, soit 1 mois de chiffre d'affaires.

La société Casapizza a conclu à la confirmation du jugement, sauf en ce qui concerne le quantum des indemnisations allouées. Elle sollicite l'allocation de la somme de 8 000 euro, au titre de l'article 700 du Code de procédure civile.

Elle réplique que :

- elle n'a jamais invoqué l'application d'une clause résolutoire de plein droit mais des manquements graves de la société Myriade, fondant le constat de la résiliation du contrat aux torts exclusifs de celle-ci, prévue par l'article 11-1 dudit contrat ;

- cette clause reconnaît au franchiseur une faculté de résiliation du contrat en cas de violation grave des obligations du franchisé, sans préavis en cas d'atteinte à la notoriété et à la réputation du réseau ou de l'enseigne ;

- il s'ensuit que le contrat a été valablement rompu au 31 août 2009 ;

- en toute hypothèse, les manquements graves et réitérés de la société Myriade fondent la demande de résiliation judiciaire du contrat en vertu de l'article 1184 du Code civil ;

- en effet, la société Myriade n'a pas respecté l'obligation de payer la redevance et a prétendu modifier unilatéralement les stipulations contractuelles, en appliquant un pourcentage du chiffre d'affaires de 2,5 % au lieu de 5 % ;

- il est constant que le non-paiement des redevances constitue une rupture unilatérale du contrat de franchise, nonobstant des manquements mineurs du franchiseur ;

- en fait la société Myriade a voulu bénéficier des performances du réseau, (son chiffre d'affaires révélant la rentabilité de l'établissement), sans en payer la contrepartie ;

- le constat d'huissier établi le 27 mai 2009 établit les nombreux manquements de la société Myriade qui ne respecte pas le savoir-faire du réseau en modifiant les menus proposés à la clientèle, en n'utilisant pas des serviettes conformes à la charte, en refusant certains modes de paiement (carte American Express), en ne s'approvisionnant pas auprès des fournisseurs référencés sans l'avoir préalablement informée (article 9-4), en dénigrant le franchiseur, le tout constituant une atteinte à l'homogénéité du réseau ;

- la société Myriade a commis un acte de concurrence déloyale par imitation ou un acte de contrefaçon de marque en réalisant des serviettes en papier avec le logo "Casa Pizza Grill" par un fabricant tiers, alors qu'elle n'était nullement autorisée à le faire, ce qui constitue un acte de détournement d'image d'autant qu'y sont affichés ses propres prix ;

- la résiliation et non la résolution du contrat lui permet de réclamer paiement du manque à gagner occasionné par la rupture anticipée, soit 150 000 euro, la redevance mensuelle moyenne sur la durée d'exécution du contrat devant servir de base au calcul, en tenant compte d'une constante progression ;

- l'article 11 -2 du contrat prévoit une indemnisation égale à 16 000 euro par infraction constatée, soit 48 000 euro (non-respect du savoir-faire, des obligations d'approvisionnement et non-paiement des redevances) ;

- l'atteinte à l'intégrité du réseau et à l'image de marque doit donner lieu à l'octroi d'une somme de 50 000 euro ;

- la société Myriade reste redevable du solde des redevances de l'année 2009 et doit satisfaire les obligations post-contractuelles prévues à l'article 11-2 du contrat ;

- les manquements qui lui sont reprochés par la société Myriade ne sont pas établis, bien au contraire ; elle a correctement rempli toutes ses obligations de franchiseur et elle a dûment informé les autres membres du réseau de la résiliation du contrat intervenue le 1er septembre 2009 ;

- la demande reconventionnelle est infondée et les demandes d'indemnisation sont excessives et, pour le moins, peu sérieuses.

Le 8 juin 2010, la société Myriade a déposé une requête en incident de communication de pièces (bilans, comptes de résultat détaillés et tableau récapitulatif des remises de fin d'année 2008) qui a été rejetée par le conseiller chargé de la mise en état par ordonnance du 26 octobre 2011, au motif que la demande de production constituait, en fait, une mesure d'investigation générale portant sur l'ensemble de l'activité de la société Casapizza.

La société Myriade a déposé au greffe de la cour des conclusions au fond et 8 pièces nouvelles, le 21 décembre 2011.

C'est en cet état que la procédure a été clôturée par ordonnance du 22 décembre 2011.

La société Casapizza France a déposé les 23 décembre et 3 janvier 2012 des conclusions d'incident de rejet, auxquelles la société Myriade a répondu le 29 décembre 2011.

MOTIFS DE LA DECISION

Sur l'incident de communication tardive

La société Myriade a déposé le 21 décembre 2011 des conclusions en réponse à celles notifiées par la société Casapizza le 24 février 2011 ainsi que 8 pièces nouvelles.

Ces écritures et pièces déposées la veille de la clôture développent des prétentions nouvelles qui nécessitaient un délai plus important pour y répondre.

En conséquence, et en raison de la méconnaissance du principe du contradictoire, les conclusions récapitulatives déposées le 21 décembre 2011 par la société Myriade seront écartées des débats ainsi que les pièces n° 47 à 54 du bordereau de communication.

Sur la résiliation du contrat de franchise et ses conséquences

L'article 11-1 du contrat de franchise prévoit que le franchiseur peut mettre fin au contrat avec un préavis de trois mois en cas de manquement grave ou répété du franchisé à l'une quelconque de ses obligations et qu'en cas d'atteinte de toute nature à la notoriété ou à la réputation du réseau ou de l'enseigne, la résiliation du contrat sera acquise huit jours après une mise en demeure inopérante de cesser les agissements.

Dans le courrier du 5 mai 2009, le conseil de la société Casapizza a reproché essentiellement à la société Myriade d'avoir baissé de manière unilatérale le montant de la redevance fixée contractuellement, et d'avoir violé l'obligation d'approvisionnement auprès des fournisseurs référencés et l'obligation de se connecter au serveur intranet du réseau. La société Myriade a été invitée à se conformer, au plus vite, à ses obligations contractuelles, sous peine d'avoir à subir la rupture du contrat.

Le constat d'huissier établi le 27 mai 2009 révèle que les menus proposés à la clientèle de l'établissement exploité par la société Myriade n'étaient pas identiques à ceux fournis par le franchiseur au niveau de certains plats, des prix et des vins et comportaient des rajouts ou retraits par apposition d'autocollants ou de marquages au feutre. M. Derieux, co-gérant de la société Myriade, a précisé qu'il avait retiré des plats qui ne plaisaient pas aux clients ou des menus non rentables et que certains tarifs avaient été modifiés en raison de quantités supérieures à celles fixées par la fiche technique établie par le franchiseur. Il a indiqué qu'il utilisait les menus fournis par la société Casapizza et y apportait manuellement des modifications adaptées à la demande des clients à l'aide de feutres et d'adhésifs. Il a ajouté qu'il ne travaillait plus avec les fournisseurs référencés par le franchiseur car leurs prix n'étaient pas compétitifs ("gonflés à la demande du franchiseur pour augmenter le montant des remises") et que la qualité des produits proposés était médiocre. L'huissier instrumentaire a également relevé que les serviettes portant le logo Casa Pizza Grill n'étaient pas fabriquées par le fournisseur de la société Casapizza et mentionnaient les prix de trois boissons différents de ceux figurant sur les cartes de menus.

Par courrier du 29 juillet 2009, le conseil de la société Casapizza a constaté qu'aucune réponse n'avait été donnée au courrier du 5 mai 2009 et a demandé à la société Myriade de se conformer aux stipulations contractuelles dans les plus brefs délais et, qu'à défaut, le contrat serait résilié à compter du 31 août 2009. La société Myriade prétend qu'elle n'a pas reçu ce courrier alors même qu'elle y fait référence dans sa réponse en date du 2 septembre 2009.

Tous ces éléments révèlent que la société Myriade n'a pas respecté les obligations énoncées aux articles 4.1, 7.1.2, 9.3, 9.4, et 9.6 du contrat de franchise.

En effet, la société Myriade ne s'est pas conformée aux normes et standards définis dans le cahier des charges dans le cadre des menus et des signes distinctifs puisqu'elle a procédé à diverses modifications par le biais d'autocollants et a fait fabriquer des serviettes par une entreprise non présentée par le franchiseur. Elle a violé l'obligation d'exclusivité en matière d'approvisionnement puisqu'elle a cessé de se fournir en matières premières, consommables et fournitures auprès des fournisseurs inscrits sur la liste dite "mercuriale", étant observé que contrairement à ce qu'elle prétend, l'article 9.4 du contrat ne l'autorisait à s'adresser à tout autre fournisseur ou prestataire que si les tarifs étaient plus avantageux pour des produits ou services strictement identiques et surtout à condition d'en informer préalablement la société Casapizza "qui se rapprocherait de l'intéressé pour le référencer, le cas échéant". Elle ne justifie nullement de démarches faites auprès du franchiseur pour le référencement de nouveaux fournisseurs, se bornant seulement à invoquer, sans le démontrer, l'existence d'une collusion avec les personnes référencées pour obtenir des remises de fin d'année plus importantes. Enfin, la société Myriade a diminué unilatéralement la redevance fixée contractuellement.

Sur ce dernier point, elle allègue une exception d'inexécution en soutenant que la société Casapizza n'a pas mis en œuvre des formations adaptées, n'a pas protégé la marque contre les actes concurrentiels et ne l'a pas assistée efficacement. Or elle ne justifie pas de l'inefficacité ou de l'insuffisance de l'assistance commerciale ni d'une communication carencée au titre du savoir-faire ni d'une protection insuffisante de la marque. Bien au contraire, les courriers électroniques produits aux débats ainsi que les éléments susvisés démontrent à l'évidence que la société Myriade n'a eu de cesse à compter du début de l'année 2009 de se démarquer des normes et standards préconisés par le franchiseur tout en bénéficiant du succès de la formule de restauration développée par celui-ci. Les difficultés prétendument rencontrées par d'autres franchisés ont manifestement été sans influence sur la pérennité et même le développement du réseau (intégration de nouveaux membres) engendrant des avantages pour l'ensemble des franchisés, dont la société Myriade, qui, depuis 2005, a enregistré une augmentation constante de son chiffre d'affaires. Enfin, la société Casapizza justifie d'une réactivité aux actes de concurrence ou de contrefaçon de la marque ou de l'enseigne (cf. courriers adressés par son conseil à des sociétés étrangères au réseau).

Le non-paiement par la société Casapizza des remises de fin d'année 2008 représentant une somme de 4 944,59 euro, qui n'a fait l'objet d'une mise en demeure que le 2 septembre 2009, ne saurait justifier la cessation du paiement intégral de la redevance, qui constituait l'obligation principale de la société Myriade.

Ces manquements fautifs réitérés de la société Myriade dans le cadre de l'exécution des obligations lui incombant auxquels elle n'a pas remédié malgré la demande faite en ce sens le 5 mai 2009, revêtent un caractère suffisamment grave pour justifier la résiliation unilatérale du contrat de franchise aux torts exclusifs de celle-ci, en application des dispositions de l'article 11-1 dudit contrat et de l'article 1184 du Code civil.

La lettre simple du 29 juillet 2009 n'a pas eu pour effet de faire jouer la clause résolutoire de plein droit puisqu'il n'est pas fait référence à une atteinte portée à la notoriété ou à la réputation du réseau mais à la seule violation des obligations contractuelles visées dans le courrier du 5 mai 2009. Dès lors, la résiliation du contrat prendra effet à compter de l'assignation du 9 septembre 2009. Le jugement sera réformé sur ce point.

Les demandes reconventionnelles indemnitaires de la société Myriade sont donc infondées et ont été rejetées, à juste titre, par le premier juge. La société Myriade ne peut pas reprocher utilement à l'intimée d'avoir diffusé aux autres franchisés l'information selon laquelle celle-ci n'était plus membre du réseau en octobre 2009, en l'état de la résiliation intervenue en septembre 2009.

Du fait même de la résiliation intervenue aux seuls torts de la société Myriade, la société Casapizza a subi un préjudice lié à la privation des bénéfices attendus de la franchise, laquelle devait se poursuivre jusqu'au 6 avril 2012.

Eu égard au montant du chiffre d'affaires généré pendant la période d'exploitation, au taux de redevance contractuellement fixé et à la durée prévue de l'engagement, c'est à juste titre que le premier juge a fixé à la somme de 138 508 euro, le montant du préjudice subi suite à la résiliation du contrat, en faisant usage de son pouvoir d'appréciation et en prenant pour base la moyenne mensuelle des redevances versées de juin 2005 à avril 2009.

En revanche, cette indemnisation qui couvre nécessairement le manque à gagner résultant de la perte d'un membre du réseau ne permet pas à la société Casapizza de solliciter, en sus, l'application de l'alinéa 6 de l'article 11.2 du contrat de franchise aux termes duquel "le franchisé peut être tenu d'indemniser le franchiseur à hauteur de 16 000 euro par infraction constatée, au titre du préjudice causé à l'économie générale du réseau du fait de la remise en cause des objectifs globalement négociés".

La demande en paiement d'une somme de 48 000 euro, à titre de dommages et intérêts complémentaires, doit être rejetée et le jugement sera réformé, de ce chef.

La société Myriade est également redevable du solde de redevances dues pour l'année 2009, déduction faite des remises de fin d'année 2008 soit la somme de 20 365,07 euro (25 309,66 - 4 944,59). La société Myriade ne peut pas réclamer le paiement des remises de fin d'année afférentes à l'année 2009 dans la mesure où l'article 11.2 du contrat de franchise stipule "qu'en cas de cessation anticipée du contrat, quelle qu'en soit la cause, le franchisé perd droit à tout reversement de remises ou de tous autres avantages qui seront répartis entre les autres membres du réseau".

La société Myriade devra respecter les obligations post-contractuelles énoncées à l'article 11.2 du contrat de franchise, comme l'a justement rappelé le premier juge.

La société Casapizza ne justifie pas d'un préjudice résultant d'une atteinte à l'image ou à la notoriété du réseau générée par le comportement de la société Myriade alors même qu'elle était l'une des franchisées les plus performantes.

Au regard de la solution apportée au règlement du litige, la société Myriade sera condamnée à payer à la société Casapizza la somme de 3 000 euro, sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile, verra sa demande, de ce chef, rejetée et supportera la charge des dépens d'appel.

Par ces motifs : LA COUR, statuant publiquement et contradictoirement, Rejette les conclusions récapitulatives déposées au greffe de la cour par la société Myriade le 21 décembre 2011 ainsi que les pièces n° 47 à 54 portées au bordereau de communication de pièces ; Réforme le jugement entrepris en ce qu'il a fixé au 31 août 2009 la prise d'effet de la résiliation du contrat aux torts exclusifs de la société Myriade et en ce qu'il l'a condamnée à payer à la société Casapizza une somme de 32 000 euro, à titre de dommages et intérêts complémentaires ; Et statuant à nouveau de ces chefs ; Dit que la résiliation du contrat de franchise aux torts exclusifs de la société Myriade a pris effet le 9 septembre 2009 ; Déboute la société Casapizza de sa demande en paiement de la somme de 48 000 euro, à titre de dommages et intérêts complémentaires ; Confirme le jugement pour le surplus ; Condamne la société Myriade à payer à la société Casapizza la somme de 3 000 euro, sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile ; Déboute la société Myriade de sa demande fondée sur l'article 700 du Code de procédure civile ; Condamne la société Myriade aux dépens d'appel, qui seront recouvrés conformément à l'article 699 du Code de procédure civile.