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Décisions

CA Versailles, 12e ch., 20 mars 2012, n° 11-07365

VERSAILLES

Arrêt

PARTIES

Demandeur :

Polimages (SARL), Legras de Grandcourt (ès qual.)

Défendeur :

Fiduciaire Internationale d'Audit (Selas)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Rosenthal

Conseillers :

Mmes Brylinski, Poinseaux

Avocats :

Mes Buffed, Ladaste

T. com. Nanterre, du 21 sept. 2011

21 septembre 2011

Vu le contredit formé le 6 octobre 2011, par Maître Legras de Grandcourt ès qualités de liquidateur judiciaire de la société Polimages à l'encontre d'un jugement rendu le 21 septembre 2011 par le Tribunal de commerce de Nanterre qui a :

* dit irrecevable la demande de la société Polimages fondée sur les dispositions de l'article L. 442-6 du Code de commerce,

* renvoyé les parties à une audience de procédure pour le dépôt de leurs conclusions sur le solde des factures de 87 289,86 euro,

* condamné la société Polimages aux dépens ;

Vu les observations écrites en date du 25 janvier 2012, oralement soutenues, par lesquelles Maître Legras de Grandcourt ès qualités de liquidateur judiciaire de la société Polimages, poursuivant l'infirmation du jugement déféré, demande à la cour de:

* dire le Tribunal de commerce de Nanterre compétent pour se prononcer sur la demande formée par la société Polimages suivant assignation en date du 30 septembre 2010 contre la société Fiduciaire Internationale d'audit,

* déclarer la société Polimages recevable et bien fondée en son contredit,

* renvoyer l'affaire devant le Tribunal de commerce de Nanterre pour qu'il statue sur l'intégralité des demandes,

* condamner la société Fiduciaire Internationale d'Audit au remboursement des frais du contredit ;

Vu les dernières observations écrites en date du 18 janvier 2012, oralement soutenues à l'audience, aux termes desquelles la société Fiduciaire Internationale d'Audit prie la cour de:

* rejeter le contredit sauf à préciser que le tribunal compétent pour connaître de la demande de dommages et intérêts sur le fondement de l'article L. 442-6 du Code de commerce est le Tribunal de commerce de Paris,

* condamner la société Polimages aux dépens;

Sur ce, LA COUR,

Considérant que, pour un exposé complet des faits et de la procédure, il est expressément renvoyé au jugement déféré et aux écritures des parties; qu'il convient de rappeler que :

* la société Polimages est une agence de communication et d'événementiel,

* la société Fiduciaire Internationale d'Audit est une filiale du groupe Deloitte qui a pour activité l'exercice de la profession d'expert-comptable,

* la société Fiduciaire Internationale d'Audit met en œuvre les actions susceptibles de promouvoir l'image du groupe Deloitte et entretient des relations d'affaires avec des prestataires dont la société Polimages référencée depuis 2006,

* à la fin de l'année 2008, les parties se sont opposées sur le règlement de diverses factures liées à l'organisation d'événements du groupe Deloitte,

* ces difficultés sont survenues concomitamment au départ de M. Rioult du groupe Deloitte,

* les parties ont cessé leurs relations commerciales,

* le 25 juin 2009, la société Polimages a assigné en référé la société Fiduciaire Internationale d'Audit,

* par ordonnance du 30 juillet 2009, le juge des référés du Tribunal de commerce de Nanterre a condamné la société Fiduciaire Internationale d'Audit au paiement de la somme provisionnelle de 8 806,46 euro, renvoyant par ailleurs, les parties à se pourvoir au fond,

* par jugement du 29 octobre 2009, la société Polimages a été mise en redressement judiciaire,

* par acte d'huissier du 30 septembre 2010, Maître Gay administrateur judiciaire de la société Polimages a assigné la société Fiduciaire Internationale d'Audit devant le Tribunal de commerce de Nanterre en paiement du solde des factures et en dommages et intérêts réparant son préjudice causé par la brutalité de la rupture de leurs relations commerciales établies au fondement de l'article L. 442-6 du Code de commerce,

* par jugement du 28 octobre 2010, la société Polimages a été déclarée en liquidation judiciaire,

* le premier juge a invité les parties à s'expliquer sur l'exception d'incompétence relevée d'office au visa du décret du 11 novembre 2009, relatif à la spécialisation des juridictions concernant les demandes fondées sur l'article L. 442-6 du Code de commerce;

Sur l'exception d'incompétence :

Considérant que pour s'opposer à l'exception d'incompétence soulevée d'office, par le tribunal, Maître Legras de Grandcourt ès qualités de liquidateur de la société Polimages soutient qu'il existe un lien de connexité entre les demandes, l'une tendant au paiement du solde de factures, l'autre à l'indemnisation de son préjudice résultant de la rupture brutale des relations commerciales;

Qu'il en conclut, au visa de l'article 101 du Code de procédure civile, qu'il est de l'intérêt d'une bonne administration de la justice de les faire juger ensemble par le Tribunal de commerce de Nanterre;

Qu'il fait également valoir que le tribunal a statué ultra petita dès lors que la société Fiduciaire Internationale d'Audit s'en est seulement rapportée à son appréciation quant à son dessaisissement;

Qu'il ajoute que le tribunal a omis de désigner la juridiction qu'il estimait compétente, alors même que la société Fiduciaire Internationale d'Audit l'invitait à statuer sur la nécessité de renvoyer devant le Tribunal de commerce de Paris;

Considérant que la société Fiduciaire Internationale d'Audit sollicite le rejet du contredit soutenant que les demandes formées par la société Polimages sont dissociables et que le Tribunal de commerce de Nanterre ne peut connaître des demandes fondées sur l'article L. 442-6 du Code de commerce;

Considérant en droit, qu'aux termes de l'article L. 442-6 III alinéa 5 du Code de commerce les litiges relatifs à l'application du présent article sont attribués aux juridictions dont le siège et le ressort sont fixés par décret;

que selon l'article D. 442-3 du même Code, pour l'application de l'article L. 442-6, le siège et le ressort des juridictions commerciales compétentes en métropole et dans les départements d'outre-mer sont fixés conformément au tableau de l'annexe 4-2-1 du présent livre;

Que cette annexe désigne pour juridiction compétente dans le ressort de la Cour d'appel de Versailles, le Tribunal de commerce de Paris;

Considérant ainsi, qu'eu égard au caractère impératif de cette compétence exclusive, le Tribunal de commerce de Nanterre ne peut connaître des demandes formées par Maître Legras de Grandcourt ès qualités de liquidateur de la société Polimages au fondement de l'article L. 442-6 du Code de commerce ;

Considérant, quelle que soit la connexité alléguée des demandes en paiement de factures et d'indemnisation au titre de la brutalité des relations commerciales, que force est de rappeler que la règle selon laquelle l'accessoire suit le principal conduisait à reconnaître à la seule juridiction spécialisée la faculté de juger l'intégralité du litige;

Que de sorte, le mandataire judiciaire représentant la société Polimages aurait dû saisir le Tribunal de commerce de Paris s'il estimait une réelle connexité entre ses prétentions et entendait voir juger l'ensemble du litige par la même juridiction;

Considérant que Maître Legras de Grandcourt ès qualités de liquidateur de la société Polimages ne saurait reprocher au premier juge d'avoir statué ultra petita au motif que la société Fiduciaire Internationale d'Audit se serait rapportée à justice sur l'exception d'incompétence soulevée d'office;

Considérant par voie de conséquence, que le contredit sera rejeté, sauf à préciser que le tribunal compétent, pour connaître de la demande formée par Maître Legras de Grandcourt ès qualités de liquidateur de la société Polimages sur le fondement de l'article L. 442-6 du Code de commerce, est le Tribunal de commerce de Paris;

Considérant que Maître Legras de Grandcourt ès qualités de liquidateur de la société Polimages supportera les frais du contredit;

Par ces motifs, Statuant par décision contradictoire, Dit le contredit mal fondé, sauf à préciser que le tribunal compétent, pour connaître de la demande formée par Maître Legras de Grandcourt ès qualités de liquidateur de la société Polimages sur le fondement de l'article L. 442-6 du Code de commerce, est le Tribunal de commerce de Paris, Condamne Maître Legras de Grandcourt ès qualités de liquidateur de la société Polimages aux frais du contredit, Prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile.