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Décisions

CA Paris, Pôle 5 ch. 4, 16 mai 2012, n° 09-12869

PARIS

Arrêt

Confirmation

PARTIES

Demandeur :

Bricorama (SA), Bricorama France (SAS)

Défendeur :

Bricotec (SARL), Delezenne (ès qual.)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Roche

Conseillers :

Mme Luc, M. Vert

Avocats :

Mes Fromantin, Bensimhon, Peytavi, Lezan

T. com. Paris, du 23 mars 2009

23 mars 2009

LA COUR,

Vu le jugement en date du 23 mars 2009 par lequel le Tribunal de commerce de Paris a :

- condamné la SAS Bricorama France à payer les sommes de 20 000 euro au titre de dommages et intérêts pour n'avoir pas fait cesser rapidement les livraisons de produits Bricorama à King Discount ;

- condamné la SAS Bricorama France à payer à la SARL Bricotec la somme de 31 228,74 euro au titre des remises de fin d'année et des bons Bricobonus ;

- fixé la créance de la SAS Bricorama France au passif de la SARL Bricotec au titre de l'indemnité de résiliation du contrat de franchise à 27 500 euro ;

- fixé la créance de la SAS Bricorama France au passif de la SARL Bricotec au titre du non-respect de l'obligation de non concurrence à la somme de 100 000 euro ;

- prononcé la résiliation du contrat de franchise et ordonné la restitution par la SARL Bricotec au siège de la SAS Bricorama France du matériel informatique et des logiciels mis à sa disposition sous astreinte de 100 euro par mois de retard à compter de la signification de la présente décision ;

- débouté les parties de leurs autres demandes plus amples ou contraires avec la présente décision ;

- dit qu'il n'y a pas lieu de faire application de l'article 700 du Code de procédure civile et déboute les parties de leurs demandes à ce titre ;

- ordonné l'exécution provisoire du présent jugement sans caution ;

- condamné solidairement les parties aux dépens, dont ceux à recouvrer par le greffe, liquidés à la somme de 152,14 euro TTC.

Vu l'appel interjeté le 10 juin 2009 par la SA Bricorama et la SAS Bricorama France et leurs conclusions enregistrées le 21 février 2012 tendant à faire partiellement infirmer le jugement rendu par le Tribunal de commerce de Paris en ce qu'il a limité les sommes allouées au titre de l'indemnité de résiliation du contrat de franchise ainsi qu'au titre de la méconnaissance de l'obligation de non concurrence, et en ce qu'il a condamné la SAS Bricorama France à payer des dommages et intérêts pour n'avoir pas fait cesser rapidement les livraisons de produits King Discount et, statuant à nouveau, à admettre au passif de la société Bricotec les créances de cette dernière à hauteur de 150 000 euro au titre de l'indemnité de résiliation du contrat de franchise et 450 000 euro au titre de l'obligation de non-concurrence.

Vu les conclusions de la société Bricotec et de Maître Delezenne, en qualité de liquidateur de cette dernière, en date du 16 janvier 2012 et tendant :

- à la confirmation du jugement en ce qu'il a estimé que la société Bricorama France avait engagé sa responsabilité en approvisionnant un magasin concurrent et en ce qu'il a condamné la société Bricorama France au titre des remises de fin d'année et des bons Bricobonus ;

- à son infirmation pour le surplus, et, statuant à nouveau,

à faire :

- constater que le savoir-faire de la société Bricorama n'est pas spécifique et substantiel, à titre subsidiaire, constater la non-transmission de celui-ci et en conséquence condamner la société Bricorama France à lui payer la somme de 15 244,90 euro ;

- condamner les appelantes à payer la somme de 165 000 euro au titre de l'inexécution de leurs obligations dans l'approvisionnement de la société Bricotec, à titre subsidiaire condamner in solidum les intéressées à payer la somme de 100 000 euro au titre de la perte d'une chance pour la société Bricotec de réaliser un chiffre d'affaires supérieur ;

- constater que la société Bricorama France a imposé des prix de revente à son franchisé et en conséquence la condamner au versement d'une indemnité à hauteur de 27 500 euro ;

- constater que la rupture du contrat de franchise initiée par la société Bricotec résulte de la mise en œuvre par l'administrateur de la faculté dont il dispose en vertu de l'article L. 622-13 alinéa 2 du Code de commerce ;

- débouter les appelantes de leur demande d'indemnisation au titre de la résiliation du contrat de franchise ;

- constater que la rupture du contrat est intervenue aux torts exclusifs du franchiseur, à titre subsidiaire, constater l'absence de contrepartie financière à la clause de non-concurrence prévue par le contrat, en conséquence, débouter les SAS Bricorama et la SA Bricorama France de leur demande, à défaut, constater le caractère manifestement disproportionné de la clause pénale et confirmer le jugement en ce qu'il l'a ramenée à la somme de 100 000 euro ;

- débouter les SAS Bricorama et la SA Bricorama France de leur demande tendant à la restitution du matériel informatique ;

SUR CE,

Considérant qu'il résulte de l'instruction les faits suivants :

Le groupe Bricorama a développé sous cette enseigne un réseau de distribution de bricolage, décoration, jardinerie et matériaux.

Par un contrat de franchise en date du 7 octobre 1999, la société Bricotec est devenue franchisée du réseau et a bénéficié du droit d'utilisation du système Bricorama comprenant le savoir-faire, les méthodes et la distribution des produits référencés Bricorama, pour une durée de cinq ans.

Ce contrat, arrivé à échéance, a été renouvelé par avenant en date du 7 octobre 2004 pour une durée de trois ans. C'est au titre de cet engagement que la société franchisée a exploité, sous l'enseigne Bricorama, son magasin sis à Coudekerque (59).

Toutefois, eu égard aux difficultés financières qu'elle rencontrait, un plan de sauvegarde a été ouvert à l'égard de la société Bricotec par jugement du Tribunal de commerce de Dunkerque en date du 21 février 2006.

Ce même jugement a désigné Maître Vandycke en qualités d'administrateur judiciaire et Maître Delezenne en qualité de représentant des créanciers.

Par courrier du 14 juin 2007, Maître Vandycke, ès qualité, reprochant des manquements graves et répétés au franchiseur, résiliait le contrat de franchise trois mois avant son terme sur le fondement de l'article L. 622-13 alinéa 2 du Code de commerce. La SAS Bricorama et la SA Bricorama France contestèrent alors les motifs invoqués par la société Bricotec et son administrateur judiciaire par un courrier du 21 aout 2007.

Par actes des 6 et 12 septembre 2007, la société Bricotec et Maître Vandycke, ès qualités, ont assigné les sociétés Bricorama et Bricorama France devant le Tribunal de commerce de Paris afin d'obtenir une indemnisation du fait d'un certain nombre de manquements contractuels imputés à ces dernières.

C'est dans ces conditions de fait et de droit qu'est intervenu le jugement déféré présentement entrepris et que, par acte du 10 juin 2009, les sociétés Bricorama et Bricorama France en ont interjeté appel.

La société Bricotec n'ayant pu, par la suite, tenir ses engagements au titre du plan de sauvegarde, sa liquidation judiciaire a été prononcée par jugement du Tribunal de commerce de Dunkerque en date du 1er décembre 2009. Par courrier recommandé en date du 9 février 2010, la société Bricorama France a alors déclaré sa créance au passif de l'intéressée pour un montant correspondant aux termes du jugement rendu par le Tribunal de commerce de Paris en date du 23 mars 2009, réévalué à la hausse en ce qui concerne le quantum des dommages et intérêts, ce qu'a contesté Maître Delezenne par courrier du 5 avril 2011.

SUR LA RESILIATION DU CONTRAT DE FRANCHISE

Considérant que l'article L. 622-13 alinéa 2 du Code de commerce dispose que "l'administrateur a seul la faculté d'exiger l'exécution des contrats en cours en fournissant la prestation promise au cocontractant du débiteur.

Lorsque la prestation porte sur le paiement d'une somme d'argent, celui-ci doit se faire au comptant, sauf pour l'administrateur à obtenir l'acceptation, par le cocontractant du débiteur, de délais de paiement. Au vu des documents prévisionnels dont il dispose, l'administrateur s'assure, au moment où il demande l'exécution, qu'il disposera des fonds nécessaires à cet effet. S'il s'agit d'un contrat à exécution ou paiement échelonnés dans le temps, l'administrateur y met fin s'il lui apparaît qu'il ne disposera pas des fonds nécessaires pour remplir les obligations du terme suivant." ;

Considérant que si l'article précité autorise ainsi la résiliation des contrats en cours, et donc du contrat de franchise litigieux, dès lors que l'administrateur ne disposerait pas des fonds nécessaires et si Monsieur Vandycke, es qualités, a, par courrier du 14 juin 2007, résilié ledit contrat sur ce fondement, il sera observé que l'intéressé s'est borné à reprocher au franchiseur "des manquements graves et répétés de la société Bricorama à ses obligations" et n'a aucunement justifié de l'impossibilité pour la société franchisée de faire face à ses obligations au sens des dispositions ci-dessus rappelées ; que, par suite, le contrat en cause doit être regardé comme ayant été unilatéralement et irrégulièrement résilié, générant ainsi pour le franchiseur un préjudice ouvrant droit à réparation à son profit ; qu'en revanche, et eu égard à la résiliation ainsi intervenue, fut-elle fautive, la demande aux fins du prononcé de la résiliation judiciaire de l'engagement formée par la société Bricorama est sans objet ;

SUR LES DEMANDES INDEMNITAIRES FORMEES PAR LES PARTIES

Considérant que le débiteur d'une obligation est condamné, s'il y a lieu, au paiement de dommages et intérêts, soit à raison de l'inexécution de son obligation, soit à raison du retard dans son exécution, toutes les fois qu'il ne justifie pas que l'inexécution provient d'une cause étrangère qui ne peut lui être imputée ;

Sur les demandes indemnitaires formées par les sociétés Bricorama et Bricorama France

Sur l'indemnité contractuelle de résiliation

Considérant que les parties ont stipulé à l'article 12-4 du contrat de franchise que "dans l'hypothèse où le contrat de Franchise serait rompu unilatéralement par le Franchisé, y compris dans l'hypothèse de la perte du droit au bail avant l'échéance, le Franchisé s'engage à payer au Franchiseur une somme destinée à compenser le manque à gagner du Franchiseur.

Cette somme sera égale au montant des redevances dues au titre des douze derniers mois par le franchisé au Franchiseur multiplié par le nombre d'années restant à courir jusqu'à la fin de la période contractuelle en cours" ; qu'ainsi qu'il a été ci-dessus énoncé, le contrat en cause a été renouvelé le 7 octobre 2004 pour une durée de trois ans, soit jusqu'au 7 octobre 2007 ; qu'il a été résilié le 14 juin 2007, soit quatre mois avant le terme ; que si la société Bricorama France réclame, sur le fondement de l'article précité, l'octroi d'une somme de 150 000 euro, la cour fait siennes l'analyse et le mode de calcul retenus par les premiers juges pour fixer le montant de la créance de l'appelante, considérée au passif de la société Bricotec, à la somme de 27 500 euro, rejetant le surplus de la demande de ce chef ;

Sur l'indemnité relative à la violation de la clause de non-concurrence

Considérant qu'aux termes de l'article 13-2 du contrat de franchise, "en cas de rupture du contrat pour quelque cause que ce soit, à l'exception d'une résiliation anticipée aux torts exclusifs du Franchiseur, le Franchisé (lui-même, son dirigeant de droit ou de fait et/ou son conjoint éventuel) s'interdit de créer, participer ou s'intéresser, directement ou indirectement, par lui-même ou par personne interposée, à tout groupement ou réseau, de quelque type qu'il soit, qui serait concurrent du réseau Bricorama.

Cette interdiction s'appliquera, à compter de la date de résiliation du contrat, pour une durée d'un an et sera limitée au territoire concédé, tel que défini à l'article 1-1 des présentes.

(...)

En cas de non-respect de l'une ou l'autre de ces obligations, le Franchisé s'engage à payer au Franchiseur, à titre de clause pénale, une somme de 3 000 000 F (trois millions de francs) (soit 450 000 euro) sans préjudice de tous droits et recours du Franchiseur" ;

Considérant qu'il est constant que, dès le mois de juin 2007, la société Bricotec a conclu un accord d'affiliation au réseau "Les Briconautes", lequel réunit des magasins de distribution de bricolage, décorations, jardinerie et matériaux et est donc directement concurrent du réseau Bricorama ; que si les intimés soutiennent pour s'exonérer de la violation, ainsi acquise, de l'obligation de non-concurrence prévue par l'article 13-2 précité que seuls les manquements des appelantes seraient à l'origine de la rupture du contrat, il a été ci-dessus énoncé que celui-ci a été irrégulièrement résilié par l'administrateur judiciaire et sans qu'une faute démontrée puisse être retenue à l'encontre du franchiseur ; que, par ailleurs, la clause contestée est limitée dans le temps et l'espace et répond à l'exigence de proportionnalité, le franchisé ne se voyant nullement interdire toute activité mais étant seulement contraint à ne pas adhérer à un réseau concurrent ou, alors, à déplacer le siège de son activité en cas d'adhésion ou de création immédiate d'un point de vente concurrent; qu'en revanche cette stipulation contractuelle s'analyse en une clause pénale que le juge peut modérer si la peine qui avait été convenue est manifestement excessive ; qu'en l'espèce, la clause de non-concurrence avait pour objet de réparer la perte réelle subie par le franchiseur du fait des manquements de son franchisé jusqu'à la reconstitution de son portefeuille de clients ; que la société Bricorama France ne justifie pas d'autre préjudice que "l'atteinte à son image de marque du fait de l'appropriation brutale d'un point de vente par la concurrence" ; que, par suite, le montant conventionnellement fixé est manifestement disproportionné au regard du but poursuivi par ladite clause et la Cour adoptera les motifs du jugement pour réduire l'indemnité allouée à ce titre à 100 000 euro ;

Sur les demandes indemnitaires formées par les intimés

Sur la demande indemnitaire présentée au titre de l'absence de transmission d'un savoir-faire et l'absence de formation du franchisé

Considérant qu'il est tout d'abord demandé à la Cour de condamner la société Bricorama France à verser la somme de 15 244,90 euro au titre des dommages et intérêts qui seraient dus en raison de l'absence de transmission d'un savoir-faire effectif et de la non-formation du franchisé ;

Sur le savoir-faire

Considérant que les intimés contestent tout d'abord, l'existence même d'un savoir-faire et ensuite la transmission de celui-ci ;

- sur l'existence du savoir-faire Bricorama

Considérant que le savoir-faire se définit comme un ensemble secret, substantiel et identifié d'informations pratiques non brevetées, résultant de l'expérience du fournisseur et testées par celui-ci ; que l'originalité en matière de franchise peut consister en la conjonction de divers éléments connus séparément si le franchisé se voit proposer ces procédés qu'il ne pourrait découvrir lui-même au prix de recherches longues et coûteuses ;

Considérant que l'intimée reproche au franchiseur une absence de savoir-faire substantiel et spécifique et en infère que le contrat de franchise serait dépourvu de cause ;

Considérant, néanmoins, que l'article préliminaire du contrat de franchise indique que "Le Franchiseur a mis au point et développé une méthode d'exploitation de fonds de commerce de bricolage. Il a ainsi créé des agencements spécifiques, des présentations originales, des équipements particuliers et a mis au point un service de promotion, commercialisation et gestion qui lui permet d'apporter à ses franchisés une assistance, des conseils et une clientèle actuelle et potentielle important pour les produits et services commercialisés sous son enseigne" ; que l'article 4 du contrat développe et précise les caractères du savoir-faire de la société appelante ; que celui-ci y est décrit comme "une stratégie marketing et merchandising originale et performante, une communication de qualité, des procédures marketing, commerciales, techniques et de gestion propres au système Bricorama, des produits de qualité, un outil informatique et des méthodes d'utilisation performants"; que ces éléments constituent un savoir-vendre qui doit être regardé comme un savoir-faire ; qu'en outre le concept de franchise sous l'enseigne Bricorama est établi et s'est normalement développé depuis sa création en 1975 ; que, par ailleurs, le franchisé a lui-même déclaré dans un courrier en date du 6 mai 2004 "j'ai le plaisir de vous confirmer la grande satisfaction rencontrée à partager avec votre équipe et vous-même les termes de cette collaboration, manifestement fructueuse." ; qu'en conséquence, l'existence d'un savoir-faire doit être considérée comme établie et la société Bricotec ne saurait prétendre à une quelconque indemnisation au titre du défaut de cause du contrat de franchise ;

- sur la transmission du savoir-faire Bricorama

Considérant que la société intimée excipe, subsidiairement, de l'absence de transmission de savoir-faire par le franchiseur en raison de l'insuffisance de la formation des vendeurs et de l'absence de remise de manuel opératoire ; qu'elle fait valoir, en outre, le fait que les formations proposées étaient facturées alors que le coût de la formation devait être inclus dans le montant des redevances conformément à l'article 4-1-1 du contrat ; qu'aucune nouvelle technique d'agencement n'aurait en outre été communiquée ;

Considérant, cependant, que l'article 4-1 du contrat de franchise stipule que le "franchiseur s'engage à proposer au Franchisé ou à son Responsable de magasin, des stages de formation permanente mis au point par ses soins qui se dérouleront dans le lieu fixé par le Franchiseur" et l'article 4-2 que "Le Franchiseur a mis au point un Manuel Opératoire qui constitue la formalisation écrite du savoir-faire qui est transmis dès la signature des présentes. (...) Le Manuel sera remis, en contrepartie d'un récépissé" ; que le franchiseur démontre par plusieurs courriers avoir proposé différentes formations au franchisé, s'être rendu sur place régulièrement et à de nombreuses reprises ; que ces visites ont donné lieu à des comptes rendus détaillés sur les améliorations à effectuer ;

Considérant, en tout état de cause, que les dommages et intérêts résultant de l'inexécution d'une obligation ne sont dus que lorsque le débiteur est mis en demeure de remplir son obligation ; que si ces formations ne devaient pas représenter un surcoût au regard de l'article 4-1-1 du contrat de franchise et si un manuel opératoire devait être remis au franchisé, ce dernier ne justifie depuis 1999, date de conclusion du contrat, d'aucun courrier mettant en demeure le franchiseur de remplir ses obligations contractuelles ; qu'en outre la société Bricotec a informé son cocontractant de son intention de renouveler le contrat de franchise par un courrier en date du 8 septembre 2003 et exprimé toute sa satisfaction à son égard ; que les intimés ne produisent aucun document de nature à justifier que les griefs formulés à l'encontre de son franchiseur auraient été portés à la connaissance de ce dernier avant que l'administrateur judiciaire ne résilie le contrat de franchise ; qu'il s'ensuit que les intimés ne rapportent la preuve d'aucun manquement de la part du franchiseur à son obligation de transmission du savoir-faire ; que le jugement sera, en conséquence, confirmé sur ce point ;

Sur la demande indemnitaire au titre du défaut d'approvisionnement de la société Bricotec

Considérant que la société Bricotec reproche à son cocontractant d'avoir négligé son approvisionnement ; que les nombreux défauts de livraison ainsi que les retards importants qui en seraient résulté auraient eu pour conséquence directe d'engendrer une perte de chiffre d'affaires et de porter atteinte à son image vis à vis de sa clientèle qu'il y aurait lieu d'indemniser à hauteur de 165 000 euro correspondant à trois années de redevances ou, à titre subsidiaire, à hauteur de 100 000 euro au titre de la perte de chance de réaliser un chiffre d'affaires supérieur ;

Considérant, toutefois, qu'au-delà des difficultés ponctuelles d'approvisionnement inhérentes à toute relation de la nature de celle liant les parties, les sociétés appelantes démontrent, par les pièces fournies et les explications données, avoir mis en œuvre toutes les diligence requises pour assurer l'approvisionnement de la société Bricotec ; qu'elles ont, en particulier, apporté la plus grande attention aux réclamations de cette dernière ainsi que le révèlent les télécopies des 22 mai, 1er juin, 15 juin et 29 juin 2006 adressées à l'intéressée, de même que l'échange de courriels du 5 mars 2007 ; que les seuls retards effectifs dans les livraisons faites à la société Bricotec proviennent du non-respect par celle-ci de la procédure spécifique mise en place ; qu'en outre les intimés ne rapportent pas la preuve du lien de causalité existant entre les retards litigieux et le préjudice réclamé ; que, par suite, la prétention indemnitaire susvisée sera écartée ;

Sur la demande indemnitaire au titre de la fourniture de produits portant la marque Bricorama à un concurrent

Considérant qu'il ressort d'un constat d'huissier qu'un magasin concurrent à celui de la société Bricotec était approvisionné en produits Bricorama ; que lesdits produits étaient revendus à un tarif inférieur de 50 % du prix habituel ;

Considérant, d'une part, que si la société Bricotec reproche à la société Bricorama France d'avoir approvisionné ce concurrent à des conditions discriminatoires et si elle demande à être indemnisée à ce titre, elle ne justifie toutefois pas que c'est la société Bricorama France elle-même qui fournissait ce concurrent ;

Considérant, en revanche, que la société Bricotec reproche également à son franchiseur son inertie à l'égard d'actes de contrefaçon de sa marque lui portant directement préjudice ; que l'article 3-3 du contrat de franchise prévoit à ce sujet que "le Franchisé sera tenu d'informer immédiatement le Franchiseur de toute atteinte aux marques et/ou concept fait par un tiers dont il aurait connaissance. Le Franchiseur prendra alors toute mesure nécessaire ou fera intenter contre le contrefacteur et/ou l'imitateur les actions qu'il jugera appropriées pour défendre ses droits" ; qu'en l'occurrence le franchisé a informé le 11 septembre 2006 la société Bricorama France de cet acte de concurrence déloyale ; que cette dernière ne justifie pour autant d'aucune diligence visant à faire cesser ces pratiques, de sorte qu'elle a engagé de ce fait sa responsabilité contractuelle et sera condamnée à verser les sommes de 10 000 euro au titre du manque à gagner et 20 000 euro au titre de l'atteinte à l'image du franchisé, la cour faisant sien le mode de calcul retenu à ce titre par les premiers juges ;

Sur la demande indemnitaire au titre des prix de revente imposés par le franchiseur

Considérant que l'article L. 442-5 du Code de commerce dispose qu'"est puni d'une amende de 15 000 euro le fait par toute personne d'imposer, directement ou indirectement, un caractère minimal au prix de revente d'un produit ou d'un bien, au prix d'une prestation de service ou à une marge commerciale." ; que la société Bricotec prétend que la société Bricorama France aurait imposé les prix de revente des marchandises Bricorama et demande à ce titre 27 500 euro de dommages et intérêt ;

Considérant, néanmoins, que si la société Bricotec produit à l'appui de sa demande un constat d'huissier qui constate que le système informatique dénommé "Anabel" l'empêcherait de déterminer elle-même le prix de revente de certains produits et lui imposerait parfois des marges négatives, il sera relevé que ce constat, réalisé hors de tout contrôle et de façon non contradictoire, ne saurait faire la preuve de l'existence des manquements allégués ; que les appelantes précisent que l'huissier n'a été aucunement en mesure de vérifier les fonctions et les possibilités du logiciel en cause et a pu relever que la solution informatique mise à la disposition du franchisé comprend un menu "personnalisation des prix" qui permet à chaque magasin, en fonction de sa région ou de sa zone de chalandise, d'être en mesure de s'aligner à la baisse ou à la hausse sur ses concurrents pour rester dans la compétition ou afin d'optimiser ses marges ; qu'en l'absence de tout autre élément probatoire produit par les intimés, la demande indemnitaire susvisée sera écartée ;

Sur la demande indemnitaire au titre des remises de fin d'années et des bons Bricobonus

Considérant que les parties ont stipulé à l'article 6-8 du Contrat de franchise que "la quote-part des ristournes remboursées au Franchisé sera déterminée au prorata des achats effectués par le Franchisé, auprès de chacun des fournisseurs référencés. ['] Bricorama procédera au remboursement par chèque de la quote-part de ristournes revenant au Franchisé au titre de l'année précédente" ; que l'article 6-9 prévoit que "le Franchiseur s'engage à faire bénéficier le Franchisé d'une ristourne annuelle de 10 % HT calculée sur le montant HT des redevances dûment payées par le Franchisé auprès du Franchiseur pendant l'année civile, déduction faite des avoirs dont le Franchisé aura pu bénéficier au cours de cette même période annuelle et de la ristourne versée au Franchisé au titre de l'année précédente" ;

Considérant que le franchiseur ne conteste pas que les achats effectués par la société Bricotec en 2006, soit un montant de 596 093 euro HT, ont généré des remises d'un montant de 34 847,60 euro ; que la société Bricorama France a versé la somme de 28 798,20 euro mais ne justifie pas avoir payé le reliquat de 6 049,40 euro ; qu'elle sera donc condamnée à payer cette somme à la société Bricotec au titre des avoirs et remises dus sur l'année 2006 ; qu'en outre, les achats effectués par la société Bricotec du 1er janvier 2007 au 31 mai 2007, soit un montant de 343 078 euro HT, ont généré des remises d'un montant de 20.056,34 euro que le franchiseur ne justifie pas avoir versé ; que c'est en conséquence à bon droit que les Premiers juges ont condamné la société Bricorama France à payer la somme de 26 105,74 euro ;

Considérant par ailleurs que la cour fait sienne l'évaluation - précise et détaillée - effectuée par le jugement entrepris concernant la demande de la société Bricotec au titre des bons Bricobonus, de sorte que la société Bricorama France sera également condamnée à payer à son franchisé la somme de 5 125 euro ;

SUR LA RESTITUTION PAR LA SOCIETE BRICOTEC DU MATERIEL INFORMATIQUE

Considérant que l'article 15-4 du contrat de franchise prévoit que "le Franchisé restituera immédiatement au Franchiseur le Manuel Opératoire, ainsi que tous documents, dossiers et d'une manière générale, tous matériels ou documents liés à l'exploitation du point de vente qui lui ont remis à titre de dépôt par le Franchiseur" ; que la société Bricorama France demande à ce titre la restitution des matériels informatiques par la société Bricotec ;

Considérant toutefois qu'aucune liste du matériel informatique dont la société Bricorama France demande la restitution n'est fournie ; qu'elle n'apporte, en outre, aucun élément qui serait de nature à démontrer la remise dudit matériel ou leur détention effective par la société Bricotec, de sorte que la cour rejettera cette demande et dès lors infirmera le jugement entrepris sur ce point ;

Considérant qu'il résulte de l'ensemble de ce qui précède qu'il y a lieu de confirmer le jugement déféré sauf en ce qu'il a prononcé la résiliation du contrat de franchise et ordonné la restitution sous astreinte par la société Bricotec du matériel informatique mis à sa disposition, et statuant à nouveau de ces seuls deux chefs, de dire n'y avoir lieu à prononcer la résiliation du contrat de franchise et de débouter les appelantes de leur demande de restitution de matériel informatique, le surplus des prétentions respectives des parties étant rejeté ;

Par ces motifs : Confirme le jugement déféré sauf en ce qu'il a prononcé la résiliation du contrat de franchise et ordonné la restitution sous astreinte par la société Bricotec du matériel informatique mis à sa disposition ; et statuant à nouveau de ces seuls deux chefs, Dit n'y avoir lieu à prononcer la résiliation du contrat de franchise ; Déboute les appelantes de leur demande de restitution de matériel informatique ; y ajoutant, Rejette le surplus des conclusions des parties ; Laisse à chacune des parties la charge des dépens exposés en cause d'appel ; Dit n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile.