Livv
Décisions

CA Paris, Pôle 5 ch. 4, 30 mai 2012, n° 09-15255

PARIS

Arrêt

Confirmation

PARTIES

Demandeur :

Reverdy (ès qual.), ATC Lyon (SA)

Défendeur :

SFR (Sté)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Roche

Conseillers :

Mme Luc, M. Vert

Avocats :

Mes Baechlin, Morin, Fertier, de Lammerville

T. com. Paris, du 4 juin 2009

4 juin 2009

Vu le jugement du 4 juin 2009 par lequel le Tribunal de Commerce de Paris a :

- débouté Maître Jean-Philippe Reverdy, ès qualités de mandataire judiciaire de la SA Acitel Société Nouvelle "Atc Lyon" de toutes ses demandes,

- condamné Maître Jean-Philippe Reverdy, ès qualités de mandataire judiciaire de la SA Acitel Société Nouvelle "Atc Lyon" à payer à la SA Française de Radiotéléphone (SFR) venant aux droits de la SA Compagnie Financière pour le Radiotéléphone (Cofira), elle-même venant aux droits de la SA Française du Radiotéléphone, la somme de 20 000 euro sur le fondement des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile,

- condamné Maître Jean-Philippe Reverdy, ès qualités de mandataire judiciaire de la SA Acitel Société Nouvelle "Atc Lyon" aux dépens ;

Vu l'appel interjeté par Me Reverdy, ès qualités de représentant des créanciers de la société "Acitel Société Nouvelle" et ses conclusions signifiées le 13 février 2012 ;

Vu les conclusions de la société SFR signifiées le 28 février 2012 ;

SUR CE

Considérant qu'il résulte de l'instruction les faits suivants :

La société SFR a pour activité l'établissement et l'exploitation d'un réseau de radiotéléphonie publique numérique.

Dans ce cadre, elle diffuse et commercialise des formules d'abonnement à son réseau tant auprès du grand public que des entreprises. Ces formules d'abonnement peuvent être proposées seules ou dans le cadre de packs comportant à la fois un téléphone mobile et une formule d'abonnement.

La commercialisation des produits et abonnements de la société SFR est effectuée, en France, soit directement par cette dernière elle-même, soit par différents canaux de vente indépendants spécialisés dans la distribution d'abonnements et dans la vente de matériels de téléphonie mobile dont des commerçants indépendants, dits "Partenaires" avec lesquels l'intéressée a cherché à renforcer ses relations, en leur concédant l'usage de la marque SFR et d'une enseigne "Espace SFR", associées à un concept de point de vente bénéficiant d'aménagements et de PLV (publicité sur le lieu de vente) spécifiques. Ces commerçants "Partenaire" bénéficient également d'un support de vente, de publicités et opérations marketing mises en œuvre par SFR et peuvent proposer dans leur boutique des produits ou des offres d'abonnements auxquels les autres catégories de distributeurs n'ont pas accès.

En contrepartie, les commerçants "Partenaires" s'engagent à ce que 80 % des abonnements souscrits par l'intermédiaire de leur point de vente soient des abonnements au réseau de téléphonie mobile de SFR.

Ils sont libres par ailleurs de revendre le matériel et les accessoires de téléphonie mobile qu'ils acquièrent auprès du fournisseur de leur choix.

La société ATC était l'un de ces commerçants "Partenaires" et exploitait sous l'enseigne "Espace SFR" ses trois fonds de commerce situés à Lyon, Mâcon et Villefranche-sur-Saône.

C'est ainsi que le 14 juin 1996, elle avait conclu avec la société Cellcorp mandatée pour ce faire par la société SFR et aux droits de laquelle vient désormais celle-ci, un contrat de distribution Partenaire pour son point de vente situé à Lyon.

Deux autres contrats Partenaires avaient été conclus dans les mêmes conditions, les 9 juillet 1996 et 11 juin 1997, pour les deux autres points de vente de la société ATC situés à Villefranche-sur-Saône et à Mâcon.

Différentes autres contrats et avenants furent ultérieurement conclus entre les parties en vertu desquels la société ATC fut autorisée à distribuer des offres à destinations des entreprises.

Des difficultés sont toutefois apparues dans les rapports entre les sociétés intéressées tenant essentiellement au retard de paiement des rémunérations dues par la société SFR à la société ATC et aux critiques générées par la non-réalisation par cette dernière de ses engagements de seuil minimal d'activité.

C'est dans ces conditions que, par courriers des 18 décembre 2002, 16 et 29 septembre 2003, la société SFR a prononcé la résiliation des contrats partenaires la liant à la société ATC.

Estimant lesdites résiliations abusives cette dernière a, par acte du 18 décembre 2003, assigné la société SFR devant le Tribunal de commerce de Paris aux fins de paiement de diverses indemnités, prétentions rejetées par le jugement susvisé présentement entrepris.

Sur les demandes indemnitaires formées par la société ATC sur le fondement du statut d'agent commercial ou d'un mandat d'intérêt commun.

Considérant que la société ATC soutient que la relation commerciale qui la liait à la société SFR devrait être requalifiée de contrat d'agence commerciale ou subsidiairement en mandat d'intérêt commun ;

Considérant, cependant, qu'il convient de rappeler que le mandat est un contrat par lequel le mandant confère à une personne qui en accepte la charge le pouvoir et la mission d'accomplir pour elle et en son nom un acte juridique ; que la prestation du mandataire se caractérise par le fait qu'elle porte sur l'accomplissement d'actes juridiques par opposition à de simples actes matériels et que ces actes sont accomplis au nom et pour le compte du mandant ;

Considérant, en l'espèce, que l'expression "au nom et pour le compte de SFR", figurant à l'article 2 du contrat Partenaire litigieux ne visait pas l'activité de la société ATC mais renvoyait à l'intervention de cette dernière qui était, à l'époque, mandatée par la société SFR par contrat du 30 avril 1996 pour créer et organiser un réseau de distribution ; que l'appelante, quant à elle, n'a jamais agi au nom et pour le compte de l'intimée et ne s'est jamais présentée comme telle à l'égard des tiers mais au contraire sous sa propre dénomination ; que le contrat Partenaire précisait à cet égard que la société ATC "intervient en qualité d'intermédiaire entre l'abonné et SFR, et ne peut en aucun cas s'engager vis à vis des abonnés de SFR ou conclure tout contrat au nom et pour le compte de SFR"; que, plus précisément, l'intimée est l'auteur d'une offre permanente d'abonnements auprès du public, laquelle est détaillée dans les conditions générales d'abonnement et, le cas échéant, dans les conditions particulières existant pour certains services spécifiques ; que cette offre est ferme puisque la société SFR s'engage par avance "à satisfaire toute demande d'abonnement, dans la limite de la capacité des systèmes de radiotéléphonie publics qu'elle exploite et les contraintes de qualité de ses services" (conditions générales d'abonnement, article 8.1) et est diffusée par différents canaux (distributeurs, site Internet, presse (...)), lesquels ne peuvent la modifier ; qu'elle est également précise et intangible, le contrat Partenaire prévoyant à cet égard que le distributeur "s'engage à n'apporter aucune modification de quelque nature que ce soit aux tarifs et conditions fixés par SFR pour la souscription des abonnements aux services" (contrat Partenaire, article 6.1) ; que, de même, le futur client accepte l'offre de la société SFR en signant le formulaire d'abonnement, qui est établi sur le papier à en-tête de la société SFR, et en fournissant les pièces justificatives permettant la constitution de son dossier ; que pour marquer son acceptation, le client signe le formulaire d'abonnement en cochant les croix qui correspondent aux services choisis et accepte les conditions générales d'abonnement et, le cas échéant, les conditions particulières ; que l'acceptation de l'offre de la société SFR par l'abonné marque l'achèvement du processus contractuel et entraîne la formation du contrat ; que le contrat d'abonnement est ainsi formé dès la signature par le client et la remise des pièces justificatives sous condition résolutoire de la réception par la société SFR de l'entier dossier (article 4.4 in fine et 12.3 des conditions générales d'abonnement) ; que le lien contractuel qui s'établit entre la société SFR et l'abonné ne résulte ainsi pas d'un acte du distributeur mais de l'expression de la seule volonté des intéressés ; que, pour sa part, l'intervention de la société ATC à l'occasion de la souscription de l'abonnement ne portait pas sur des actes juridiques, mais consistait en de simples actes matériels, ainsi que le démontre la description, dans le contrat Partenaire, des tâches confiées à l'appelante dans le cadre de la souscription d'abonnements au nombre desquelles, seront citées ;

- la présentation pure et simple des tarifs et des conditions fixés par SFR (article 6.1), lesquels ne peuvent faire l'objet d'aucune intervention ou modification par le distributeur ;

- la collecte et la vérification des informations requises auprès des abonnés (article 6.4) ;

- la saisie de ces informations sur le serveur informatique de SFR (article 6.3) ;

- la participation à la promotion des services sur la base de la documentation commerciale fournie par SFR (article 10.1) ;

- l'apposition sur le formulaire d'abonnement du numéro de téléphone fourni par le serveur informatique de SFR et de la carte Sim correspondant au terminal vendu au client ;

Considérant que le contrat Partenaire précise à cet égard que :

(Le Partenaire) "intervient en qualité d'intermédiaire entre l'abonné et SFR et ne peut en aucun cas s'engager vis-à-vis des abonnés de SFR ou conclure tout contrat au nom et pour le compte de SFR" (article 6.3) ; que, par suite, et dès lors qu'elle n'agissait pas au nom et pour le compte de la société SFR et qu'elle n'accomplissait en pratique aucun acte juridique, la société ATC ne peut en aucune façon être considérée comme ayant été mandatée par l'intimée ;

Considérant, enfin, qu'il sera rappelé que seule la réalité des relations commerciales entre les parties est susceptible de permettre la qualification du contrat d'agence commerciale et non l'emploi - éventuellement inapproprié - de tel ou terme ; que, dès lors, la circonstance, à la supposer établie, que la société SFR aurait reconnu la qualité de mandataire de la société ATC dans divers documents non contractuels est sans influence sur la nature juridique de la convention en cause ; qu'en conséquence, et en l'absence ci-dessus démontrée de mandat entre les parties, il ne saurait exister de mandat d'intérêt commun entre la société SFR et son distributeur, l'intérêt commun à l'essor de deux entreprises non liées par un contrat de mandat étant sans incidence sur les conditions de l'arrêt de leur collaboration ;

Considérant que le contrat dont s'agit ne saurait davantage être qualifié de contrat d'agence commerciale dès lors qu'aux termes de l'article L. 134-1 du Code de commerce : "L'agent commercial est un mandataire qui, à titre de profession indépendante, sans être lié par un contrat de louage de service, est chargé, de façon permanente, de négocier, et éventuellement de conclure des contrats de vente, d'achat, de location ou de prestations de services au nom et pour le compte de producteurs,

d'industriels, de commerçants ou d'autres agents commerciaux", et que la mission de l'appelante de conseiller le client pour lui proposer parmi les offres SFR disponibles celle la mieux adaptée à son besoin et la mission d'argumenter sur la pertinence des offres concurrentes à la société SFR ne caractérisent pas des actes de négociation mais des actes d'information comparative ; que, de même le fait d'assister le client dans l'accomplissement des formalités complexes destinées à formaliser le contrat liant le client à la société SFR et le fait de mettre en œuvre le matériel pour qu'il soit opérationnel ne constituent pas davantage des actes de négociation mais de simple exécution ; qu'il échet ainsi de souligner à ce sujet qu'alors que le contrat d'agent commercial vise à confier à un mandataire le soin de démarcher une clientèle au nom et pour le compte du mandant, l'activité de l'agent commercial étant en tout état de cause une activité civile, fut-elle même exercée par une société commerciale, les contrats Partenaire, objet du présent litige, tendent quant à eux, à renforcer la coopération commerciale entre la société SFR et un commerçant revendeur d'appareils de téléphonie mobile, pour un magasin déterminé, en lui accordant une enseigne et un support commercial spécifiques ; qu'ils n'ont donc pas pour objet de confier au Partenaire un "mandat" de démarcher la clientèle, mais portent seulement sur les modalités de l'exploitation d'un fonds de commerce sous l'enseigne, "Espace SFR" et de la coopération commerciale entre la société SFR et une boutique déterminée, notamment, sur le plan publicitaire et promotionnel ; qu'il sera précisé sur ce dernier point, que le fait de disposer d'une force de vente spécialisée, d'assurer la promotion du matériel, de conseiller le client, comme tout vendeur, de participer à des stages de formations n'implique pas la possibilité de négocier des contrats, c'est-à-dire d'engager juridiquement son mandant dans le cadre d'une négociation ; qu'en effet, si le Partenaire dispose, comme l'indique la société ATC, de marges de négociation du prix de revente de téléphones portables, il s'agit d'une marge de négociation qui lui est propre, puisqu'elle porte sur le prix de revente de matériels qu'il a lui-même achetés, soit auprès de la société SFR, soit auprès d'autres fournisseurs ; que l'appelante ne peut donc invoquer la liberté dont elle dispose dans le cadre d'une activité d'achat/revente, pour tenter de démontrer qu'elle serait l'agent commercial de la société SFR ; que, de même, la circonstance que la rémunération soit fonction du volume des ventes obéit à une simple logique économique, consistant à faire dépendre la rémunération d'une société de la qualité de l'action promotionnelle réalisée sur le terrain et des résultats constatés au vu de cette action, et demeure sans influence sur la qualification même du contrat ; que si la société ATC soutient également que le Partenaire réaliserait une négociation qui porterait sur "la chose qui est la prestation de service rendue au client et notamment sur le prix du mobile, indissociablement lié à la prise d'abonnement" et si elle estime que l'existence de cette négociation serait confirmée par les termes de l'article 3.2 du Référentiel Espace SFR qui prévoit que "le vendeur fait au prospect une préconisation et une proposition tarifaire comprenant le mobile, l'abonnement ou le forfait, les options et les frais de mise en service (...)", il sera souligné que l'appelante ne saurait utilement exciper à l'appui d'une démonstration quant à la nature des contrats partenaires conclus d'un simple document de certification de service, élaboré par un tiers et sans portée juridique intrinsèque ; que, de même, si la société ATC invoque le caractère "indivisible" de l'offre faite aux clients, laquelle serait constituée à la fois du mobile et de l'abonnement et si elle en infère que la société SFR l'aurait mandatée pour négocier les conditions de la prise d'abonnement, partie intégrante de l'offre, il échet de souligner que l'opération, si elle peut être envisagée comme une action unique dans la mesure où elle s'exécute en un seul temps et ne met en présence que l'acquéreur-souscripteur et le distributeur, n'en est pas moins constituée de deux contrats distincts donnant lieu à des facturations séparées, source de deux séries parallèles d'obligations réciproques intéressant, d'une part, SFR et le souscripteur pour l'abonnement, et d'autre part, l'acquéreur et le distributeur pour la vente de l'appareil ; qu'ainsi la circonstance que l'un des éléments de l'offre puisse faire l'objet d'une négociation avec le client est sans influence sur la nature de l'autre élément de celle-ci ; qu'au demeurant il sera souligné que deux factures sont émises, l'une par la société ATC, au titre de la vente du terminal, et l'autre par la société SFR, au titre de la redevance mensuelle qui lui est due par l'abonné ;

Considérant, enfin, que l'appelant ne saurait davantage arguer de la jurisprudence communautaire en matière d'agence commerciale dès lors précisément que l'activité ci-dessus analysée exercée par la société ATC ne répond pas à la définition de l'agent commercial telle que retenue par la directive communautaire applicable ; qu'il ne saurait ainsi, et en tout état de cause, être sursis à statuer en attendant un quelconque avis de la Cour de justice des Communautés Européennes sur ce point ;

Considérant qu'il y a lieu en conséquence de débouter Me Reverdy, ès-qualités, de l'ensemble des demandes, notamment indemnitaires, formées sur le fondement des textes régissant le contrat d'agence commerciale ou par application de la théorie du mandat d'intérêt commun ;

Sur les résiliations des contrats partenaires liant les parties

Considérant que la société ATC conteste lesdites résiliations en prétendant notamment, que la clause de résiliation en cas de non-atteinte des quotas contractuels serait nulle tant par application de l'article L. 330-3 du Code de commerce qu'en raison de son statut d'agent commercial ; qu'elle soutient également que la résiliation serait abusive en raison de prétendues actions de démarchages menées par la société SFR ainsi que des problèmes de rémunération auxquels elle aurait été confrontée, lesquels l'auraient empêchée de réaliser ses quotas contractuels ;

Considérant, toutefois, que l'article 6.6 des Contrats Partenaires conclus entre les sociétés SFR et ATC stipule que ;

"Le Partenaire s'engage sur un nombre d'abonnements bruts au moins égal aux quotas fixés en annexe 1 du présent contrat. En cas de non-réalisation du quota précité durant une période de deux mois consécutifs, Cellcorp a la faculté d'adresser au Partenaire, par courrier recommandé avec accusé de réception, une lettre d'alerte à l'issue du deuxième mois, lui précisant qu'il doit réaliser ce quota avant la fin du troisième mois sous peine de voir son contrat de partenaire résilié de plein droit sans préavis ni indemnité à compter de cette date" ; que l'annexe 1 desdits contrats prévoyait que la société ATC s'engageait sur un nombre d'abonnements bruts au moins égal à 20 par mois ; que les parties sont donc expressément convenues que le respect par la société ATC des quotas de distribution contractuellement définis constituait un engagement essentiel de cette dernière, dont le non-respect était susceptible d'entraîner la résiliation du contrat, à l'issue d'une période de préavis ;

Considérant que c'est donc en stricte application de ces stipulations que, dès lors que la matérialité de la non-réalisation des quotas convenus n'est pas utilement contestée, les résiliations litigieuses sont intervenues après mises en demeure restées infructueuses ; que sur ce point il convient de préciser qu'un renouvellement de mobiles en distribution (RMO) ne constituant pas la souscription d'un nouvel abonnement (il n'y a pas succession de deux abonnements à durée déterminée mais conclusion d'un avenant au contrat d'abonnement à durée indéterminée) il n'entre pas dans la définition donnée par l'annexe 1 susmentionnée relative aux quotas de souscription contractuels ;

Considérant, par ailleurs, que si la société ATC soutient que les clauses de quotas et de résiliation seraient, de toute façon, nulles au regard des dispositions de l'article L. 330-3 du Code de commerce et si elle invoque à cet effet un défaut d'information précontractuelle préalablement à la signature du contrat, elle ne justifie aucunement de l'effectivité de manquements qui auraient prétendument été de nature à vicier son consentement lors de la conclusion desdits engagements ; qu'en effet il échet de souligner qu'il appartient au juge saisi de rechercher si ledit défaut a eu pour effet de vicier le consentement du cocontractant et de l'empêcher de s'engager en connaissance de cause ; que le risque d'altération du consentement du distributeur doit être apprécié "in concreto" au regard de l'expérience de celui-ci et de sa connaissance des affaires et du domaine d'activité concerné ; qu'en l'occurrence, et eu égard à sa qualité de professionnel averti du secteur d'activité en cause, nécessairement informé des divers développements du marché considéré, la société ATC, laquelle indique elle-même dans ses écritures avoir été en relation avec l'intimée depuis "le début de son activité", ne démontre pas avoir eu son consentement vicié du fait de défaut d'information précontractuelle, lequel ne l'a donc pas privée des éléments d'appréciation nécessaires à une prise de décision éclairée ; que, par suite, aucune nullité ne saurait être induite des règles de l'article L. 330-3 invoqué ;

Considérant que si l'appelant, pour justifier l'inexécution des engagements contractuels de la société ATC invoque aussi le caractère potestatif de la clause de quotas sus rappelée, il sera rappelé qu'aux termes de l'article 1170 du Code civil : "la condition potestative est celle qui fait dépendre l'exécution de la convention d'un événement qu'il est au pouvoir de l'une ou l'autre des parties contractantes de faire arriver ou d'empêcher" ; qu'en l'espèce rien ne démontre en quoi la société SFR aurait eu le pouvoir d'empêcher la société ATC de réaliser ses quotas contractuels de 20 abonnements par mois ; qu'aucun caractère potestatif ne saurait donc être retenu à l'endroit de ladite clause ;

Considérant, de même, que si la société ATC impute ses éventuels manquements à ses engagements contractuels à la société SFR, laquelle aurait à dessein provoqué des difficultés de trésorerie en son sein en ne lui accordant aucune facilité de paiement, ce qui l'aurait empêchée de s'approvisionner en packs pour satisfaire la demande de clients potentiels, il sera souligné faits constants suivants :

- la société a bénéficié, de juin 2000 à février 2001, de 316 678,32 euro (soit 2 077 273,60 F) d'avances de trésorerie,

- le 15 janvier 2001, elle était débitrice de la société de SFR à hauteur de 315 270,60 euro, cette somme correspondant à un trop-perçu en termes de rémunération,

- plusieurs moratoires ont été ultérieurement proposés par la société SFR,

- un moratoire a été conclu le 25 juin 2002 prévoyant le paiement échelonné de la créance de la société SFR (218 273,68 euro), cette dernière acceptant également la demande de rééchelonnement formulée par la société ATC en octobre 2002 ; qu'au regard de ces éléments constants l'appelante est donc mal fondée à faire état de difficultés de trésorerie de la société ATC qui seraient imputables à la société SFR ;

Considérant que s'il est reproché à l'intimée des actions de démarchage national à destination des futurs clients ou des clients existants de la société ATC et s'il est prétendu que ces actions seraient la cause de la non-atteinte des quotas contractuels susmentionnés, la société STR ayant tenté de "récupérer la clientèle qui fait partie du parc d'abonnés de son agent" et de "récupérer la clientèle captive faisant partie de la zone de chalandise du point de vente de ATC" , il convient de rappeler que la société SFR, qui réalise des campagnes promotionnelles auprès de ses abonnés, n'utilise ni le nom, ni la réputation, ni le savoir-faire, ni les fichiers de la société ATC puisqu'il s'agit du fichier des abonnés de la société SFR elle-même ; que de surcroît, la société ATC ne bénéficiait d'aucune exclusivité et ne peut reprocher à la société SFR de diffuser certains de ses propres services de radiotéléphonie mobile ; qu'en tout état de cause, la clientèle que prétend s'attribuer la société ATC est en réalité une clientèle d'abonnés à l'opérateur SFR, sur laquelle l'intéressée ne peut justifier d'aucun droit privatif ; qu'enfin, les campagnes de publicité réalisées au niveau national et local par la société SFR profitent nécessairement aux distributeurs telle la société ATC puisqu'elles font connaître au public la marque et les services proposés dans les espaces SFR ; que, de même, en l'absence de toute exclusivité consentie à la société ATC, il ne peut être pertinemment invoqué les dispositions de l'article L. 442-6-I-6 du Code de commerce qui prévoit que peut engager la responsabilité de son auteur le fait de "participer directement ou indirectement à la violation de l'interdiction de la revente hors réseau faite au distributeur lié par un accord de distribution sélective ou exclusive exempté au titre des règles applicables du droit de la concurrence" ;

Considérant qu'il s'ensuit que la société SFR en procédant aux résiliations des contrats de distribution qu'elle avait conclus avec la société ATC en raison du non-respect par celle-ci des objectifs commerciaux contractuellement convenus n'a commis aucune faute de nature à engager sa responsabilité et à justifier l'octroi à ce titre des dommages-intérêts réclamés par l'appelant, étant observé que la violation par la société ATC d'une obligation essentielle de son contrat exclut que celle-ci puisse invoquer à l'encontre de l'intimée la brutalité de la rupture ainsi que les dispositions de l'article L. 442-6-I-5ème du Code de commerce ;

Sur la demande présentée pour la société ATC au titre de la rémunération variable appelée 'Air Time '

Considérant que la société ATC sollicite par l'intermédiaire du représentant des créanciers à sa procédure collective le versement de L'Air Time qu'elle estime lui être due à hauteur de 1 671 100 euro, au motif que son droit au paiement d'une telle rémunération ne pourrait s'éteindre que par le non-règlement des factures des abonnés de la société SFR concernés ;

Considérant, toutefois, que l'article 2-2 de l'annexe 6 prévoit :

"Le Partenaire perçoit 3 % du chiffre d'affaires encaissé HT.

Toutefois, la partie variable cesse d'être exigible dans les cas suivants :

- En cas de cessation définitive d'activité du Partenaire.

- En cas de résiliation du présent contrat, à l'initiative de l'une ou de l'autre Partie et quelle qu'en soit la cause.

Dans les cas prévus ci-dessus, la rémunération cesse à la date de cessation ou à la date de résiliation du présent contrat, la rémunération acquise au titre du mois en cours étant calculée au prorata";

Considérant, en l'occurrence, que la société SFR a procédé à la résiliation des contrats concernés et aucunement à leur non-renouvellement ; que, dès lors, le seul fait des stipulations précitées excluait le versement à la société ATC de L'Air Time réclamée, à l'issue des relations contractuelles liant les parties ; que, par ailleurs la clause attaquée ne peut être considérée comme purement potestative dès lors qu'elle se réfère expressément à la résiliation du contrat "par l'une ou l'autre partie" et surtout que cette résiliation - comme la cessation des relations contractuelles - font l'objet de strictes conditions définies tant pour la cessation et pour la résiliation des engagements ; que la demande susvisée sera, dès lors, écartée et ce sans qu'il soit besoin de recourir d'ordonner une mesure expertale ;

Sur les demandes présentées pour la société ATC au titre de diverses rémunérations en ce qui concerne la somme réclamée de 153 106,83 euro

Considérant que la société ATC fonde sa demande de ce chef sur un courrier qui a été adressé par la société SFR à l'ensemble des distributeurs le 26 janvier 2001 ; que celui-ci annonçait le versement d'un acompte exceptionnel ayant pour objet de palier un éventuel retard de paiement des rémunérations et précisait aux distributeurs le mode de calcul de cet acompte, à savoir 1 400 F HT par contrat non validé par SFR au 31 décembre 2000 ; qu'afin de fournir l'information la plus précise possible aux distributeurs, un spécimen de courrier de rémunération était joint qui montrait les lignes qui seraient prises en compte pour déterminer le nombre de contrats non validés au 31 décembre 2000 (sur l'exemple : 819 contrats en tout qui, cependant, ce spécimen ne comportait ni nom ni référence ni Code de distributeurs ; qu'ainsi, la lettre du 26 janvier 2001 et le spécimen joint n'avaient qu'un but informatif et ne déterminaient en aucune façon le montant qui individuellement serait versé à chaque distributeur ;

Que l'appelant ne peut, dès lors, formuler une quelconque demande de paiement sur un tel fondement ; que, de même, il ne saurait non plus être reproché à l'intimée de ne pas avoir fourni à la société ATC les informations lui permettant de procéder aux vérifications nécessaires dès lors que la société SFR adresse précisément à cet effet à tous ses distributeurs un état détaillé des contrats composé d'un récapitulatif des rémunérations et de tableaux fournissant le détail des rémunérations par contrat en indiquant :

- la date de souscription,

- le numéro du contrat,

- le nom du titulaire,

- le type d'offre et les options souscrites,

- le numéro du kit,

- le numéro de la carte Sim,

- le point de livraison du kit ou du pack,

- les sommes versées au distributeur par SFR au titre de l'offre souscrite,

- les sommes versées au distributeur par SFR au titre des options souscrites ;

- les sommes versées au distributeur par SFR au titre d'une éventuelle rémunération complémentaire ;

Qu'au demeurant les mêmes informations sont fournies pour les tableaux présentant le "détail des contrats non retournés ou réceptionnés non traités" et le "détail des contrats non acceptés" ;

Sur les demandes formées au titre de trois ensembles de 215, 205 et 22 contrats d'abonnement qui n'auraient pas été rémunérés

Considérant que la cour fait siens les motifs pertinents retenus par les premiers juges pour rejeter les demandes susvisées, Me Reverdy, ès-qualités, ne rapportant pas la preuve, par les pièces produites et les explications données, que la société ATC eût été en droit de bénéficier de rémunérations en sus de celles déjà obtenues et qu'il aurait demeuré des contrats rémunérables et non encore réglés par la société SFR ; qu'il sera simplement précisé que ne saurait être confondue la rémunération dite "faciale" avec la rémunération complémentaire, la première étant celle versée forfaitairement au distributeur après l'acceptation du dossier d'abonnement par la société SFR et la seconde correspondant aux seules options spécifiques souscrites par le client ; que, par ailleurs, les pièces produites par la société SFR comportent les numéros de contrats, numéros de carte Sim, la date de souscription, les noms des points de vente et de paiement, l'échéance de rémunération et le détail de la rémunération versée par l'intéressée ;

Sur la demande formée pour la société ATC au titre d'un manque à gagner avec "le client Fiducial" à hauteur de 262 800 euro HT, soit 314 308 TTC

Considérant que la cour fait encore sienne les motifs retenus par les premiers juges pour écarter ce chef de demande ; qu'il sera seulement relevé que si un contrat-cadre a bien été conclu entre les sociétés SFR et Fiducial le 14 mai 2002, le nombre d'abonnements et de portables devant être commandés s'élevait à 580 ; que les 1 000 abonnements complémentaires dont la société ATC fait état sont purement éventuels et conjecturels et ne sauraient fonder en quelque manière que ce soit une demande de condamnation sur ce fondement ;

Sur la demande formée au titre d'une diminution du parc-clients de la société ATC

Considérant que la société ATC demande la condamnation de la société SFR à lui payer une somme égale à 2 556 euro par nombre de clients qui auraient disparu de façon "brutale" de son parc ; que pour ce faire, la société ATC indique, sans justifier du montant avancé, comparer l'évolution de son parc clients en décembre 2000, décembre 2001, décembre 2002 et septembre 2003, date à laquelle une baisse aurait été constatée ; que, cependant, pour appuyer sa demande, la société ATC se réfère à des chiffres effectivement fournis par l'intimée dans les courriers de rémunération mais se rapportant non pas au nombre de clients de son parc mais à celui de factures prises en compte pour le calcul de L'Air Time ; que cette rémunération variable est en effet calculée sur "le chiffre d'affaires encaissé" qui est défini comme "le montant du chiffre d'affaires HT généré par les abonnés constituant le parc d'abonnés et encaissé par SFR" ; que plusieurs factures peuvent être encaissés pour un même client (factures précédentes réglées tardivement et factures du mois en cours) et en revanche pour un client donnant cet indice, d'une très grande variabilité (par exemple : 7 195 en juin 2002, 6 833 en juillet 2002 et 7 406 en août 2002), ne permet ainsi pas d'identifier le nombre de clients du parc de la société ATC ; que, par suite, aucune variation brutale et anormale du parc de celle-ci ne peut être déduite des chiffres fournis par Me Reverdy ès-qualités ; que, dans ces conditions, aucune indemnisation ne peut être alloués à ce titre ;

Sur la demande afférente à L'Air Time qui n'aurait pas été réglé de 2001 à 2003 et s'élevant à 127 132 euro

Considérant que la société ATC conteste par principe les montants qu'elle a perçus au titre de L'Air Time entre 2001 et 2003 au seul motif que, dès lors qu'elle n'a pas connaissance de la facture adressée aux abonnés de son parc, la rémunération perçue par ses soins ne correspondrait pas à ce qui lui est dû ; que si elle estime qu'il y aurait lieu d'évaluer la consommation moyenne des abonnés de son parc à 59 euro, motif pris que la consommation moyenne d'un abonné était de ce montant en 2002, elle ne saurait utilement pouvoir substituer au calcul précis effectué chaque mois par l'intimée une simple approximation forfaitaire non justifiée et qu'aucun élément précis et concret ne corrobore ; que sa demande susvisée ne peut, donc, qu'être rejetée ;

Sur les dommages-intérêts moratoires sollicités à hauteur de 500 000 euro en application de l'article 1147 du Code civil

Considérant que les dommages-intérêts sollicités correspondraient, selon l'appelante, à des "défauts et retards récurrents des règlements" imputables à la société SFR ; que la société ATC aurait été ainsi privée de trésorerie, ce qui aurait eu notamment pour effet de faire obstacle à son approvisionnement auprès de la société SFR et aurait paralysé la souscription des abonnements par les clients ; que, toutefois, il sera rappelé qu'aux termes de l'article 1153 du Code civil :

"dans les obligations qui se bornent au paiement d'une certaine somme, les dommages-intérêts résultant du retard dans l'exécution ne consistent jamais que dans la condamnation aux intérêts au taux légal" ; que, par ailleurs, la référence à l'article L. 442-6 al.7 lequel sanctionne le fait de soumettre un partenaire commercial à des conditions de règlement abusives, ne repose quant à elle sur aucun fondement, s'agissant de rémunérations qui sont contestées par l'intimée qui estime, pour sa part, n'être redevable d'aucune somme à la société ATC ;

Sur la demande de résiliation des contrats partenaires aux torts exclusifs de la société SFR et l'octroi des dommages et intérêts y afférents.

Considérant que la société ATC demande à la cour, à titre "infiniment subsidiaire" et, dans l'hypothèse où celle-ci jugerait que les accords ne relèvent pas du statut d'agent commercial ou du mandat d'intérêt commun, de prononcer la rupture desdits accords, aux torts exclusifs de l'intimée ; que selon la société ATC, cette résiliation serait justifiée par les "non paiements des rémunérations, l'inexécution fautive des accords et le manque de loyauté de SFR" ;

Considérant, cependant qu'au-delà d'affirmations non démontrées à cet effet aucune pièce du dossier ne permet de retenir une quelconque faute à l'encontre de l'intimée ; que, dès lors et sans qu'il soit besoin d'apprécier la réalité du préjudice invoqué, la demande indemnitaire présentée sur le fondement susvisé sera nécessairement écartée ;

Sur la demande aux fins de versement d'une indemnité de clientèle

Considérant que ATC soutient enfin que "en dénonçant l'ensemble des contrats qui liaient la société SFR à la société ATA, la société SFR a privé la société ATC d'utiliser le fichier client qu'elle s'est constitué après quinze ans de louables efforts de démarchages et fidélisations"; qu'il convient de relever qu'en l'absence de toute faute ainsi qu'il a été ci-dessus démontré imputable à l'intimée dans le prononcé des résiliations critiquées, aucune indemnité de clientèle ne saurait, en tout état de cause, être accordée ; qu'au surplus la clientèle que prétend s'attribuer la société distributrice et en vertu de laquelle l'indemnité susmentionnée est sollicitée est une clientèle d'abonnés propre à l'opérateur SFR sur laquelle l'intéressée ne peut justifier d'aucun droit privatif ;

Considérant qu'il résulte de l'ensemble de ce qui précède qu'il y a lieu de confirmer le jugement en toutes ses dispositions par les motifs ci-dessus énoncés et ceux non contraires des premiers juges et de débouter l'appelant de l'ensemble de ses prétentions.

Par ces motifs : - Confirme le jugement déféré en toutes ses dispositions. - Déboute Me Reverdy, ès-qualités, de l'ensemble de ses prétentions. - Ordonne l'emploi des dépens d'appel en frais privilégiés de procédure collective avec recouvrement dans les conditions de l'article 699 du Code de Procédure Civile. - Dit n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.