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Décisions

Cass. soc., 16 mai 2012, n° 11-10.712

COUR DE CASSATION

Arrêt

Cassation

PARTIES

Défendeur :

Flandredis (Sté)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Mazars

Conseiller :

M. Bailly

Avocats :

Me Balat, SCP de Chaisemartin, Courjon

Douai, du 19 novembre 2010

19 novembre 2010

LA COUR : Sur le moyen unique : - Vu l'article 1134 du Code civil ; Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X... a été engagé le 5 mars 2001 par la société Flandredis, exploitant un magasin à l'enseigne Leclerc à Bailleul (Nord), en qualité de directeur de ce magasin ; que son contrat de travail comportait une clause de non-concurrence lui interdisant pendant une période limitée à la durée égale à son ancienneté, plafonnée à deux ans, "de travailler dans toute entreprise, d'une surface de vente comprise entre 1 000 m² et 10 000 m², ayant pour objet la vente au public de produits ou marchandises concurrençant directement ou indirectement les nôtres, et ce dans un rayon de 100 kilomètres à vol d'oiseau autour de notre magasin" ; qu'il était prévu qu'en contrepartie de cette obligation de non-concurrence, le salarié percevrait le jour de la cessation effective de son contrat de travail une indemnité égale à 400 % de son dernier salaire mensuel de base ; que M. X... a démissionné le 27 septembre 2006, à effet du 2 octobre 2006, et a été engagé à compter du 3 octobre 2006 par la société Distrifives en qualité de directeur d'un autre magasin Leclerc exploité à Fives, à une trentaine de kilomètres de Bailleul ; que le salarié a saisi la juridiction prud'homale d'une demande en paiement d'indemnité de non-concurrence ;

Attendu que pour accueillir cette demande, l'arrêt retient qu'il est certes exact que chacune des sociétés exploitant un magasin à l'enseigne Leclerc constitue une entité juridiquement et économiquement autonome et qu'il n'existe pas à proprement parler un groupe Leclerc au sens capitalistique de ce terme, le "mouvement Leclerc" étant une association de commerçants indépendants, chaque nouvel adhérent de ce mouvement étant simplement parrainé par un ou plusieurs adhérents et ce parrainage ne se traduisant, sur le plan financier, que par une prise de participation minoritaire des parrains dans la société du nouvel adhérent ; que, toutefois, tous les magasins à l'enseigne Leclerc ont une centrale d'achat nationale commune et des centrales d'achat régionales, chaque adhérent participant en outre à des groupes de travail chargés en particulier de piloter les achats dans les différentes catégories de produits devant être commercialisés et de définir les modalités de commercialisation ; que c'est l'association des centres distributeurs Leclerc qui définit les orientations générales de l'enseigne, sa stratégie commerciale et veille au respect par les adhérents des politiques définies par elle ; que si le "mouvement Leclerc" doit être regardé comme une entité originale différente d'un groupe de sociétés classiques, il n'en constitue pas moins un ensemble structuré destiné à faire en sorte que tous les magasins de la même enseigne Leclerc disposent d'un certain nombre de moyens importants communs, ce afin de leur permettre d'exercer efficacement, selon une politique commerciale commune et des orientations communes, leur activité en concurrence avec les autres enseignes de la grande distribution en France, et qu'il ne peut être en tout cas sérieusement soutenu que les magasins à l'enseigne Leclerc sont des entités concurrentes entre elles ; que le salarié n'a donc nullement violé l'obligation de non-concurrence résultant de la clause figurant à son contrat de travail ;

Qu'en se déterminant ainsi, alors que l'intégration dans un même réseau de distribution ne suffit pas en elle-même à exclure l'existence d'un état de concurrence entre les entreprises qui en font partie, la cour d'appel, à laquelle il appartenait de vérifier concrètement l'existence d'une situation de concurrence entre les deux magasins concernés, a privé sa décision de base légale ;

Par ces motifs : Casse et annule, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 19 novembre 2010, entre les parties, par la cour d'appel de Douai ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel d'Amiens.