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Décisions

CA Paris, Pôle 5 ch. 5, 31 mai 2012, n° 11-05516

PARIS

Arrêt

Confirmation

PARTIES

Demandeur :

Air Promotion Group (SAS)

Défendeur :

Corsair (Sté)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Perrin

Conseillers :

Mmes Pomonti, Luc

Avocats :

SCP Galland-Vignes, SCP Fisselier-Chiloux-Boulay, Mes Delgrange, Rothman

T. com. Paris, du 7 mars 2011

7 mars 2011

FAITS CONSTANTS ET PROCÉDURE

Dans le cadre de trois contrats conclus successivement à partir du 30 janvier 2003, la société Corsair a chargé la société Air Promotion Group de traiter une partie des appels téléphoniques de ses clients et d'émettre des titres de transport ayant fait l'objet d'une réservation via ces appels.

Ces accords ont en dernier lieu été remplacés par un contrat "de prestations de services centre de contact" conclu le 20 décembre 2007 pour une durée indéterminée et résiliable avec un préavis de 45 jours.

Le 27 mai 2009, la société Corsair a envoyé à la société Air Promotion Group un dossier d'appel d'offres portant sur des prestations identiques à celles prévues dans le contrat précédemment conclu avec ladite société.

Le 12 juin 2009, la société Air Promotion Group a répondu à cet appel d'offres.

Le 11 août 2009, la société Corsair a informé oralement la société Air Promotion Group que sa candidature n'avait pas été retenue dans le cadre de l'appel d'offres.

Après la recherche par les deux parties d'un accord sur les modalités pratiques de rupture du contrat du 20 décembre 2007 qui n'a pas abouti, la société Corsair a, par un courrier du 11 septembre 2009, notifié à la société Air Promotion Group la résiliation du contrat du 20 décembre 2007 avec un préavis de quatre mois commençant à courir au jour de la réception de la lettre de résiliation.

C'est dans ces conditions que la société Air Promotion Group a fait assigner la société Corsair par devant le Tribunal de commerce de Paris par acte extra-judiciaire en date du 4 décembre 2009 aux fins de voir constater que le contrat qui liait les deux parties était un contrat d'agent commercial et à ce titre de voir condamner la société Corsair à lui payer des dommages et intérêts pour rupture de la relation commerciale sans octroi d'un préavis raisonnable, deux ans de rémunération au titre de l'indemnité due en tant qu'agent commercial et toutes les indemnités que la société Air Promotion Group devra payer aux salariés licenciés.

Par jugement rendu le 7 mars 2011, assorti de l'exécution provisoire, le Tribunal de commerce de Paris a condamné la société Corsair à payer à la société Air Promotion Group la somme de 35 450 euro au titre du complément de préavis dû au titre de la rupture brutale de la relation commerciale, débouté la société Air Promotion Group du surplus de ses demandes et condamné la société Corsair à payer à la société Air Promotion Group la somme de 5 000 euro au titre de l'article 700 du Code de procédure civile.

Vu l'appel interjeté le 22 mars 2011 par la société Air Promotion Group.

Vu les dernières conclusions signifiées le 11 avril 2011 par lesquelles la société Air Promotion Group demande à la cour :

- de constater que la société Corsair, a par lettre reçue par la société Air Promotion Group le 14 septembre 2009, mis fin aux relations sans la moindre faute imputable à la société Air Promotion Group et avec un préavis de seulement 4 mois, alors qu'un préavis de 12 mois était nécessaire compte tenu, notamment, de l'importance des relations mises en place,

- de constater que la société Air Promotion Group exerçait une activité relevant de l'agence commerciale (articles L. 134 et suivants du Code de commerce) et subsidiairement, à tout le moins du mandat d'intérêt commun (jurisprudence citée dans les présentes conclusions).

En conséquence :

- d'infirmer le jugement entrepris en ce qu'il a refusé de reconnaître à la société Air Promotion Group le statut d'agent commercial ou, à tout le moins, celui de mandataire d'intérêt commun,

- d'infirmer le jugement entrepris en ce qu'il a considéré que les relations entre les parties pouvaient être résiliées avec un préavis de seulement 8 mois, et ce de surcroît, en faisant courir le préavis à partir du lancement par la société Corsair d'une procédure d'appel d'offres.

Statuant à nouveau :

1°) Quant au préavis

En application de l'article L. 442-6.I.5 du Code de commerce :

- de condamner la société Corsair à payer à la société Air Promotion Group la somme de 654 581 euro, qui correspond à 8 mois de rémunération moyenne, ainsi que celle de 91 604,91 euro à raison du coût des licenciements et de la procédure prud'homale, le tout au titre des dommages et intérêts pour la rupture de la relation commerciale sans octroi d'un délai raisonnable,

2°) Quant à l'indemnité de rupture du contrat d'agent commercial :

En application de l'article L. 134-12 du Code de commerce :

- de condamner la société Corsair à payer à la société Air Promotion Group la somme de 1 963 743 euro, avec intérêts au taux légal, et ce à compter du 25 septembre 2009, date de la lettre de mise en demeure, qui correspond à deux années de l'ensemble des rémunérations perçues calculé du 1er septembre 2007 au 31 août 2009 au titre de l'indemnité due en tant qu'agent commercial,

A titre subsidiaire, de condamner la société Corsair à payer à la société Air Promotion Group, à titre de dommages et intérêts, la somme d'un montant de 981 871 euro, correspondant à une année de rémunération au titre de l'indemnité de rupture du mandat d'intérêt commun liant les parties,

- de porter à 25 000 euro la condamnation de la société Corsair au titre de l'article 700 du Code de procédure civile pour la première instance,

- d'y ajouter 6 000 euro pour la procédure d'appel.

La société Air Promotion Group soutient au visa de l'article L. 442-6 I 5° du Code de commerce, que la rupture du contrat à l'initiative de la société Corsair est brutale, eu égard à l'absence de respect par cette dernière d'un délai de préavis raisonnable et qu'à ce titre le quantum des dommages intérêts attribués par la juridiction de première instance doit être revu à la hausse, à hauteur de 12 mois de préavis.

De plus, la société Air Promotion Group entend démontrer qu'elle exerçait pour la société Corsair une activité d'agent commercial ou à tout le moins, de mandataire d'intérêt commun et réclame les indemnités de rupture y afférentes.

Vu les dernières conclusions signifiées le 9 juin 2011 par lesquelles la société Corsair demande à la cour :

- de prendre acte que la société Air Promotion Group a renoncé à sa demande de dommages et intérêts à hauteur de 50 000 euro au titre de la prétendue exécution fautive du contrat de prestations de services du 20 décembre 2007, à sa demande de dommages et intérêts à hauteur de 1 100 euro au titre du prétendu non-respect par la société Corsair du délai de préavis fixé par cette dernière, à sa demande de garantie par la société Corsair de toutes les réclamations éventuelles de la société Telpro,

1°) Sur le délai de préavis raisonnable :

- de dire et juger que la société Air Promotion Group a bénéficié d'un délai de préavis de près de huit mois, ce dernier ayant commencé à courir à compter du lancement par la société Corsair de son appel d'offres le 27 mai 2009,

- de dire et juger qu'un tel délai de préavis est raisonnable et suffisant au sens de l'article L. 442-6 I 5° du Code de commerce,

En conséquence :

- de confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a considéré que le point de départ du préavis à prendre en compte est la date de l'appel d'offres, soit le 27 mai 2009,

Statuant à nouveau :

- d'infirmer le jugement entrepris en ce qu'il a condamné la société Corsair à payer à la société Air Promotion Group la somme de 35 450 euro au titre d'un complément de préavis d'une durée de 13 jours,

- de condamner la société Air Promotion Group à restituer à la société Corsair la somme totale de 40 450 euro versée par cette dernière en exécution du jugement entrepris, assortie des intérêts de retard au taux légal à compter de la date de signification des conclusions d'appel de la société Corsair,

A titre subsidiaire, si la cour devait malgré tout considérer que le délai de préavis accordé par la société Corsair était insuffisant :

- de dire et juger que l'indemnité qui pourrait être accordée à ce titre à la société Air Promotion Group ne peut être calculée que sur le fondement de la marge brute perdue,

- de débouter en conséquence la société Air Promotion Group de sa demande de versement d'une somme de 654 581 euro correspondant à huit mois de rémunération moyenne,

- de dire et juger que la société Air Promotion Group n'établit pas le coût des licenciements et de la procédure prud'homale dont elle se prévaut et qui résulteraient de la prétendue brutalité de la rupture de ses relations contractuelles avec la société Corsair,

En tout état de cause, de dire et juger que les conditions d'application de l'article L. 1224-1 du Code du travail ne sont pas réunies,

- de débouter purement et simplement la société Air Promotion Group de sa demande de versement d'une somme de 91 604,91 euro au titre du coût des licenciements et de la procédure prud'homale,

2°) Sur la demande de versement de l'indemnité compensatrice prévue par l'article L. 134-12 du Code de commerce :

- de dire et juger que la société Air Promotion Group ne peut prétendre au bénéfice du statut d'agent commercial, et n'a donc pas droit au versement de l'indemnité compensatrice prévue par l'article L. 134-12 du Code de commerce,

En conséquence, de confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a débouté la société Air Promotion Group de sa demande d'indemnité formulée au titre d'un contrat d'agent commercial,

- subsidiairement, de dire et juger que la société Air Promotion Group a commis une faute grave excluant le versement d'une quelconque indemnité, en application de l'article L. 134-13 du Code de commerce,

3°) Sur la demande subsidiaire de versement de dommages et intérêts pour rupture de mandat d'intérêt commun :

- de dire et juger que les relations contractuelles ayant lié les sociétés Corsair et Air Promotion Group ne sont pas constitutives d'un mandat d'intérêt commun,

En conséquence, de confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a débouté la société Air Promotion Group de sa demande d'indemnité formulée pour rupture d'un mandat d'intérêt commun,

- subsidiairement, de dire et juger que la société Corsair justifie d'un motif légitime de rupture de ses relations contractuelles avec la société Air Promotion Group,

En conséquence, de débouter purement et simplement la société Air Promotion Group de l'intégralité de ses demandes, fins et conclusions,

- de condamner la société Air Promotion Group à verser à la société Corsair la somme de 15 000 euro au titre des frais irrépétibles de première instance sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile,

La société Corsair soutient à titre liminaire, qu'en rompant ses relations contractuelles avec la société Air Promotion Group, elle a mis en œuvre le droit de résiliation unilatérale dont bénéficie toute partie à un contrat à durée indéterminée.

Elle affirme que la société Air Promotion Group a bénéficié d'un préavis raisonnable au sens de l'article L. 442-6 I 5° du Code de commerce et en conséquence, que cette dernière doit être déboutée de l'ensemble de ses demandes indemnitaires à ce titre.

En outre, elle estime que la société Air Promotion Group ne saurait se prévaloir du bénéfice du statut d'agent commercial et ne peut par voie de conséquence, prétendre au versement de l'indemnité compensatrice prévue par l'article L. 134-12 du Code de commerce.

Enfin, elle considère que la société Air Promotion Group ne peut pas davantage se prévaloir d'un quelconque mandat d'intérêt commun pour justifier de sa demande de dommages et intérêts.

LA COUR renvoie, pour un plus ample exposé des faits et prétentions initiales des parties, à la décision déférée et aux écritures susvisées, par application des dispositions de l'article 455 du Code de procédure civile.

MOTIFS

La société Air Promotion Group n'a présenté en appel aucun moyen nouveau de droit ou de fait qui justifie de remettre en cause le jugement attaqué, lequel repose sur des motifs pertinents, non contraires à l'ordre public, résultant d'une analyse correcte des éléments de la procédure, notamment des pièces contractuelles et de la juste application de la loi et des principes régissant la matière.

Sur le délai de préavis raisonnable :

Il est constant que les relations commerciales entre les parties ont débuté le 30 janvier 2003, se sont poursuivies au cours de quatre contrats successifs, de manière régulière et continue et donc établie, pour prendre fin au bout de plus de six années, quatre mois après la réception du courrier de notification de la résiliation du contrat adressé le 11 septembre 2009 par la société Corsair à la société Air Promotion Group.

Il est incontestable que la société Corsair avait droit de mettre fin aux relations contractuelles sans avoir à justifier d'un quelconque motif.

Par contre, aux termes de l'article L. 442-6-I-5° du Code de commerce, engage la responsabilité de son auteur et l'oblige à réparer le préjudice causé le fait, par tout producteur, commerçant, industriel ou personne immatriculée au répertoire des métiers de rompre brutalement, même partiellement, une relation commerciale établie, sans préavis écrit tenant compte de la durée de la relation commerciale et respectant la durée minimale de préavis déterminée en référence aux usages du commerce, par des accords interprofessionnels.

Il convient de rappeler que le fournisseur ne peut obtenir réparation que du préjudice entraîné par le caractère brutal de la rupture et non du préjudice découlant de la rupture elle-même.

La société Air Promotion Group soutient que le préavis de quatre mois octroyé par la société Corsair était insuffisant et qu'un préavis de douze mois aurait dû lui être accordé.

Les parties sont également en désaccord sur le point de départ du préavis.

S'agissant tout d'abord de la durée du préavis, quatre mois apparaissent effectivement comme une durée insuffisante eu égard à la durée des relations commerciales de plus de six ans et à l'objectif du délai de préavis prévu par l'article L. 442-6-I-5° du Code de commerce qui est de permettre au partenaire contractuel victime de la rupture de se réorganiser de façon à ne pas subir trop brutalement la fin de la relation commerciale.

Il est indéniable que la société Air Promotion Group avait dû procéder, pour l'exécution de ses relations contractuelles avec la société Corsair, à des investissements non négligeables, même si ces investissements n'étaient pas destinés exclusivement à l'exécution du contrat avec la société Corsair et ont pu servir à l'exercice de son activité commerciale avec l'ensemble de ses clients aériens.

Le contrat exigeait également un personnel formé, la société Air Promotion Group ayant d'ailleurs procédé au licenciement de six salariés au mois de janvier 2010, à l'issue du préavis.

Il résulte des propres pièces et conclusions de la société Air Promotion Group que la société Corsair n'était pas son unique client, ne correspondant qu'à 27 % de son chiffre d'affaires moyen des trois derniers exercices, et qu'elle n'occupait que 25 % de ses salariés, ce qui ne caractérise en aucun cas un état de dépendance économique au sens des dispositions de l'article L. 420-2 du Code de commerce.

Compte tenu de ces éléments, un délai de préavis de huit mois était légitime pour permettre à la société Air Promotion Group de réorganiser son activité, notamment en sollicitant d'autres compagnies aériennes, en France et à l'étranger.

S'agissant du point de départ du préavis, la société Corsair estime qu'il doit être fixé à la date de réception par la société Air Promotion Group de l'appel d'offres, soit le 27 mai 2009, ce que conteste cette dernière qui considère que le point de départ du préavis ne peut se situer qu'à la réception, le 14 septembre 2009, de la lettre de résiliation du contrat qui lui a été adressée par la société Corsair le 11 septembre 2009.

Il est incontestable que le lancement d'un appel d'offres vaut manifestation de l'intention de ne pas poursuivre les relations contractuelles dans les conditions antérieures et fait courir le délai de préavis, à condition qu'il ait été fait par écrit.

Tel est bien le cas en l'espèce, l'appel d'offres ayant été transmis à la société Air Promotion Group par e-mail du 27 mai 2009, pour des prestations identiques à celles prévues par le contrat de prestation de service Centre de Contact du 20 décembre 2007, avec des échéances précises, à savoir sélection des finalistes le 19 juin 2009 et sélection du nouveau Centre de Contact le 15 juillet 2009.

Le message indiquait également que "le contrat commencera au minimum un mois après la fin de l'appel d'offres, période qui sera pleinement utilisée pour la formation du personnel et la passation des consignes".

La société Air Promotion Group n'a pu avoir un quelconque doute sur la remise en cause de sa relation contractuelle avec la société Corsair dès la réception de l'appel d'offres, le 27 mai 2009 et ce d'autant plus que le contrat à durée indéterminée du 20 décembre 2007 en cours d'exécution prévoyait un délai de préavis très court de 45 jours.

Le fait que lors d'une réunion entre les parties le 25 mars 2009, la société Corsair ait manifesté sa volonté de réactualiser le contrat du 20 décembre 2007 ne démontre pas, comme le voudrait la société Air Promotion Group, la volonté de la société Corsair de poursuivre les relations à n'importe quelles conditions mais au contraire une remise en cause dudit contrat, l'échec des négociations ayant abouti à la mise en œuvre de l'appel d'offre quelques semaines plus tard.

La lettre recommandée avec accusé de réception adressée par la société Corsair à la société Air Promotion Group le 11 septembre 2009 fait suite au rapprochement qui a eu lieu entre les parties au mois d'août 2009 et qui avait abouti à l'établissement d'un projet de protocole de résiliation de contrat qui prévoyait une cessation progressive des prestations de la société Air Promotion Group avec un arrêt définitif au 15 janvier 2010 qui n'a finalement pas été signé par cette dernière.

Par cette lettre du 11 septembre 2009, la société Corsair réitérait sa décision de résilier le contrat du 20 décembre 2007 et accordait un prévis supplémentaire de quatre mois.

Il ne saurait pour autant en être déduit que le point de départ du préavis se situe à la date de réception de cette lettre.

En conséquence, le jugement doit être confirmé en ce qu'il a fixé la durée du préavis à huit mois et le point de départ de ce préavis au 27 mai 2009, de sorte que le préavis s'achevait le 27 janvier 2010.

Les premiers juges ont donc à juste titre considéré qu'une période de 13 jours de préavis supplémentaire, du 14 au 27 janvier 2010, devait être indemnisée sur la base de la rémunération moyenne perçue par la société Air Promotion Group pour la période antérieure de 24 mois qui se confond en l'espèce avec la marge brute, soit 1 963 743 euro correspondant à 81 822,62 euro par mois, c'est-à-dire 35 456,47 euro pour les 13 jours en cause, arrondis à 35 450 euro.

Sur la demande d'indemnisation du licenciement de salariés :

La société Air Promotion Group réclame en outre la prise en charge par la société Corsair du coût des licenciements et de leurs suites, soit les indemnités versées à hauteur de 28 104,91 euro et le montant de 63 500 euro réclamé par un salarié qui a contesté son licenciement.

Mais, comme cela a déjà été relevé plus haut, seul le caractère brutal de la rupture peut être indemnisé et non le préjudice découlant de la rupture elle-même.

Or, la société Air Promotion Group n'établit pas que les licenciements en cause résulteraient de la brutalité de la rupture.

Par ailleurs, les conditions de mise en œuvre de l'article L. 1244-1 du Code du travail ne sont pas réunies en l'espèce, la société Corsair n'étant pas soumise à l'obligation de reprendre une partie du personnel de la société Air Promotion Group car l'exécution d'un marché de prestation de services par un nouveau titulaire ne réalise pas le transfert d'une entité économique ayant conservé son identité et dont l'activité est poursuivie ou reprise qui seul entraînerait l'obligation de reprise des contrats de travail.

La société Air Promotion Group ne peut en outre arguer d'un personnel exclusivement dédié aux prestations réalisées pour la société Corsair alors qu'elle a fait appel successivement à deux sociétés sous-traitantes pour la réalisation d'une partie de ces prestations.

Surabondamment, la société Air Promotion Group ne saurait réclamer paiement d'une somme qui a été demandée par un salarié devant le conseil des prud'hommes mais qui ne résulte d'aucune condamnation, l'appelante se contentant de produire sa convocation devant le Conseil des prud'hommes de Paris en date du 21 mai 2010.

Le jugement entrepris doit également être confirmé en ce qu'il a rejeté la demande de la société Air Promotion Group de prise en charge par la société Corsair du coût des licenciements et de leurs suites.

Sur la demande au titre de la rupture d'un contrat d'agent commercial :

La société Air Promotion Group soutient que le contrat de prestations de service Centre de Contact du 20 décembre 2007 constituerait en réalité un contrat d'agent commercial et que la société Corsair serait donc redevable de l'indemnité compensatoire prévue par l'article L. 134-12 du Code de commerce en cas de cessation des relations avec le mandant.

Il convient en effet de rappeler qu'aux termes de l'article L. 134-1 du Code de commerce : "l'agent commercial est un mandataire qui, à titre de profession indépendante, sans être lié par un contrat de louage de services, est chargé, de façon permanente, de négocier et, éventuellement, de conclure des contrats de vente, d'achat, de location ou de prestations de services, au nom et pour le compte de producteurs, d'industriels, de commerçants ou d'autres agents commerciaux. Il peut être une personne physique ou une personne morale."

Or, il résulte tant des stipulations contractuelles que de la pratique de ses relations commerciales avec la société Corsair que la société Air Promotion Group était strictement encadrée dans l'exercice de sa mission et n'avait aucune indépendance, qu'elle n'effectuait aucun démarchage de la clientèle et qu'elle ne disposait pas d'un quelconque pouvoir de négociation puisqu'elle ne disposait pas du pouvoir de déterminer les tarifs et conditions des contrats conclus.

C'est ainsi que des horaires étaient imposés à la société Air Promotion Group, que toutes les informations étaient fournies aux clients par la société Corsair, les réservations de billets d'avion étant effectuées à partir du système informatique de cette dernière, dans des conditions totalement encadrées.

La société Air Promotion Group était tenue de remonter les problèmes commerciaux rencontrés aux différents services Corsair concernés, les réclamations post-voyage étant directement traitées par le service clientèle de Corsair. Elle devait fournir des statistiques détaillées des appels reçus et consentir à être soumise à des audits de qualité.

Plus particulièrement, la société Air Promotion Group ne saurait arguer du fait qu'elle était en possession d'un Code IATA pour en déduire son statut d'agent commercial, dans la mesure où tout émetteur de billets d'avion doit disposer d'un tel Code lui conférant l'habilitation nécessaire pour accéder au système de réservation des compagnies aériennes, les sociétés ayant accès audit système étant classées dans la catégorie "GSA" (General Sales Agent), ce qui ne leur confère pas pour autant la qualification juridique d'agent commercial.

En conséquence, le jugement entrepris doit être confirmé en ce qu'il estimait que la société Air Promotion Group ne pouvait prétendre au bénéfice du statut d'agent commercial et n'avait donc pas droit au versement de l'indemnité compensatrice de rupture.

Sur la demande subsidiaire au titre de la rupture d'un mandat d'intérêt commun:

L'existence d'un mandat d'intérêt commun implique un intérêt réciproque des parties et une collaboration permettant d'aboutir à l'obtention et à l'accroissement d'une clientèle commune.

Or, en l'espèce les parties n'étaient liées que par un contrat de prestation de services, la société Air Promotion Group s'étant engagée à réaliser des prestations pour le compte de la société Corsair en appliquant strictement les procédures et conditions fixées par cette dernière.

En outre, la société Air Promotion Group n'établit pas avoir reçu pour mission de développer la clientèle de la société Corsair.

En réalité, la société Air Promotion Group n'a pour seules clientes que les compagnies aériennes pour le compte desquelles elle effectue des prestations téléphoniques et non les clients desdites compagnies.

En conséquence, le jugement entrepris doit être confirmé en ce qu'il estimait qu'il n'y avait pas lieu de qualifier les relations contractuelles entre la société Corsair et la société Air Promotion Group de mandat d'intérêt commun.

Sur les autres demandes :

Le jugement dont appel doit être confirmé en ce qu'il a alloué à la société Corsair la somme de 5 000 euro au titre des frais irrépétibles de première instance.

L'équité commande d'allouer à la société Corsair une indemnité de 7 000 euro au titre de l'article 700 du Code de procédure civile en appel.

Par ces motifs : LA COUR, statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort, Confirme le jugement déféré en toutes ses dispositions, Déboute les parties de leurs plus amples demandes, Condamne la société Air Promotion Group à payer à la société Corsair la somme de 7 000 euro au titre de l'article 700 du Code de procédure civile, Condamne la société Air Promotion Group aux dépens d'appel, qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile.