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Décisions

CA Montpellier, 3e ch. corr., 20 octobre 2009, n° 09-00010

MONTPELLIER

Arrêt

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Rajbaut

Conseillers :

Mme Chapon, M. Salvatico

Avocat :

Me Benoit

TGI Montpellier, ch. corr., du 1er déc. …

1 décembre 2008

RAPPEL DE LA PROCEDURE :

Par jugement contradictoire du 1er décembre 2008 le Tribunal correctionnel de Montpellier saisi par citation directe a :

Sur l'action publique : déclaré :

Y et X coupables :

* pour avoir à Montbazin (34), Condorcet (26), courant 2005, en tout cas sur le territoire national et depuis temps n'emportant pas prescription :

- effectué une publicité comportant des allégations, indications ou présentations fausses ou de nature à induire en erreur :

A/ en vendant sous la dénomination " pays de Provence " des oeufs provenant des poulaillers industriels de la SARL C à Montbazin, en l'espèce 556 044 oeufs du 1er janvier au 6 septembre 2005 ;

B/ en vendant sous la dénomination Bio des produits ne pouvant se prévaloir de cette dénomination, en l'espèce 270 000 oeufs vendus par B ;

C/ en vendant sous le signe de qualité "Label Rouge" des produits ne pouvant se prévaloir de cette dénomination (dans le cadre de B) ;

D/ en utilisant de façon abusive les termes "traçabilité totale", "démarche qualité certifiée", "organisme certificateur rigoureux", "fermes agréées" et en utilisant de façon abusive le terme "fermier" ;

E/ en utilisant de façon abusive le logo "Visez santé - Fondation des maladies du coeur" (dans le cadre de B) ;

F/ en faisant référence au caractère naturel des oeufs alors que du maïs transgénérique entrait dans l'alimentation des poules pondeuses ;

G/ en ne respectant pas les règles sur la traçabilité des oeufs, en l'espèce en détenant des oeufs démunis de tout marquage dans les 48 heures (749 375 à la date du 6 septembre 2005) et des oeufs périmés (94 443 à la date du 6 septembre 2005),

infraction prévue par les articles L. 121-1, L. 121-5, L. 121-1-1 du Code de la consommation et réprimée par les articles L. 121-6, L. 121-4, L. 213-1 al. 1 du Code de la consommation

- trompé le consommateur :

A/ en vendant sous la dénomination "pays de Provence" des oeufs provenant des poulaillers industriels de la SARL C à Montbazin, en l'espèce 556 044 oeufs du 1er janvier au 6 septembre 2005 ;

B/ en vendant sous la dénomination Bio des produits ne pouvant se prévaloir de cette dénomination, en l'espèce 270 000 oeufs vendus par B ;

C/ en vendant sous le signe de qualité "Label Rouge" des produits ne pouvant se prévaloir de cette dénomination (dans le cadre de B) ;

D/ en utilisant de façon abusive les termes "traçabilité totale", "démarche qualité certifiée", "organisme certificateur rigoureux", "fermes agréées" et en utilisant de façon abusive le terme "fermier" ;

E/ en utilisant de façon abusive le logo "Visez santé - Fondation des maladies du coeur" (dans le cadre de B) ;

F/ en faisant référence au caractère naturel des oeufs alors que du maïs transgénérique entrait dans l'alimentation des poules pondeuses ;

G/ en ne respectant pas les règles sur la traçabilité des oeufs, en l'espèce en détenant des oeufs démunis de tout marquage dans les 48 heures (749 375 à la date du 6 septembre 2005) et des oeufs périmés (94 443 à la date du 6 septembre 2005),

infraction prévue par l'article L. 213-1 du Code de la consommation et réprimée par les articles L. 213-1, L. 216-2, L. 216-3, L. 216-8 al. 5 du Code de la consommation

- utilisé frauduleusement un Label Rouge,

infraction prévue par les articles L. 115-20 4°, L. 115-19 du Code de la consommation, les articles L. 671-5 §II, L. 641-4 du Code rural et réprimée par l'article L. 115-20 al. 1, al. 9 du Code de la consommation

- utilisé frauduleusement un certificat de conformité,

infraction prévue par les articles L. 115-26 3°, L. 115-25 du Code de la consommation, les articles L. 671-6, L. 641-20 du Code rural et réprimée par l'article L. 115-26 al. 1, al. 9 du Code de la consommation

- trompé sur l'existence d'une garantie publique pour un produit assorti d'un Label Rouge,

infraction prévue par l'article L. 115-20 7° du Code de la consommation, l'article L. 671-5 §II du Code rural et réprimée par l'article L. 115-20 al. 1, al. 9 du Code de la consommation

- présenté des produits faisant croire qu'ils bénéficient d'un certificat de conformité,

infraction prévue par l'article L. 115-26 5° du Code de la consommation, l'article L. 671-6 du Code rural et réprimée par l'article L. 115-26 al. 1, al. 9 du Code de la consommation

- commercialisé des oeufs sans mentions obligatoires conformes,

infraction prévue par l'article 1 du Décret 94-641 du 20/07/1994, les articles 2, 4 du Règlement CE 2006-1028 du 19/06/2006, les articles 7, 8, 10, 12, 16, 18 du Règlement CE du 23/05/2007, les articles L. 214-3, L. 214-1 al. 1 2° du Code de la consommation et réprimée par l'article L. 214-2 al. 1 du Code de la consommation

- et pour avoir à Montbazin le 27 septembre 2007, en tout cas sur territoire national et depuis temps n'emportant pas prescription, exposé, mis en circulation, mis en vente des denrées animales ou d'origine animale non conformes aux normes sanitaires ou qualitatives pour être reconnues propres à la consommation, en l'espèce des oeufs,

infraction prévue par les articles R. 237-2 5°, 13°, R. 231-18, R. 231-16, R. 231-13 al. 1, R. 231-12 du Code rural et réprimée par l'article R. 237-2 al. 1 du Code rural

La SARL B non coupable :

* d'avoir à Montbazin (34), Condorcet (26), courant 2005, en tout cas sur le territoire national et depuis temps n'emportant pas prescription :

- effectué une publicité comportant des allégations, indications ou présentations fausses ou de nature à induire en erreur :

A/ en vendant sous la dénomination "pays de Provence" des oeufs provenant des poulaillers industriels de la SARL C à Montbazin, en l'espèce 556 044 oeufs du 1er janvier au 6 septembre 2005 ;

B/ en vendant sous la dénomination Bio des produits ne pouvant se prévaloir de cette dénomination, en l'espèce 270 000 oeufs vendus par B ;

C/ en vendant sous le signe de qualité "Label Rouge" des produits ne pouvant se prévaloir de cette dénomination (dans le cadre de B) ;

D/ en utilisant de façon abusive les termes "traçabilité totale", "démarche qualité certifiée", "organisme certificateur rigoureux", "fermes agréées" et en utilisant de façon abusive le terme "fermier" ;

E/ en utilisant de façon abusive le logo "Visez santé - Fondation des maladies du coeur" (dans le cadre de B) ;

F/ en faisant référence au caractère naturel des oeufs alors que du maïs transgénérique entrait dans l'alimentation des poules pondeuses ;

G/ en ne respectant pas les règles sur la traçabilité des oeufs, en l'espèce en détenant des oeufs démunis de tout marquage dans les 48 heures (749 375 à la date du 6 septembre 2005) et des oeufs périmés (94 443 à la date du 6 septembre 2005),

infraction prévue par les articles L. 121-1, L. 121-5, L. 121-1-1 du Code de la consommation et réprimée par les articles L. 121-6, L. 121-4, L. 213-1 al. 1 du Code de la consommation

- trompé le consommateur :

A/ en vendant sous la dénomination "pays de Provence" des oeufs provenant des poulaillers industriels de la SARL C à Montbazin, en l'espèce 556 044 oeufs du 1er janvier au 6 septembre 2005 ;

B/ en vendant sous la dénomination Bio des produits ne pouvant se prévaloir de cette dénomination, en l'espèce 270 000 oeufs vendus par B ;

C/ en vendant sous le signe de qualité "Label Rouge" des produits ne pouvant se prévaloir de cette dénomination (dans le cadre de B) ;

D/ en utilisant de façon abusive les termes "traçabilité totale", "démarche qualité certifiée", "organisme certificateur rigoureux", "fermes agréées" et en utilisant de façon abusive le terme "fermier" ;

E/ en utilisant de façon abusive le logo "Visez santé - Fondation des maladies du coeur" (dans le cadre de B) ;

F/ en faisant référence au caractère naturel des oeufs alors que du maïs transgénérique entrait dans l'alimentation des poules pondeuses ;

G/ en ne respectant pas les règles sur la traçabilité des oeufs, en l'espèce en détenant des oeufs démunis de tout marquage dans les 48 heures (749 375 à la date du 6 septembre 2005) et des oeufs périmés (94 443 à la date du 6 septembre 2005),

infraction prévue par l'article L. 213-1 du Code de la consommation et réprimée par les articles L. 213-1, L. 216-2, L. 216-3, L. 216-8 al. 5 du Code de la consommation

La SARL A, et la SARL C coupables :

* pour avoir à Montbazin (34), Condorcet (26), courant 2005, en tout cas sur le territoire national et depuis temps n'emportant pas prescription :

- effectué une publicité comportant des allégations, indications ou présentations fausses ou de nature à induire en erreur :

A/ en vendant sous la dénomination "pays de Provence" des oeufs provenant des poulaillers industriels de la SARL C à Montbazin, en l'espèce 556 044 oeufs du 1er janvier au 6 septembre 2005 ;

B/ en vendant sous la dénomination Bio des produits ne pouvant se prévaloir de cette dénomination, en l'espèce 270 000 oeufs vendus par B ;

C/ en vendant sous le signe de qualité "Label Rouge" des produits ne pouvant se prévaloir de cette dénomination (dans le cadre de B) ;

D/ en utilisant de façon abusive les termes "traçabilité totale", "démarche qualité certifiée", "organisme certificateur rigoureux", "fermes agréées" et en utilisant de façon abusive le terme "fermier" ;

E/ en utilisant de façon abusive le logo "Visez santé - Fondation des maladies du coeur" (dans le cadre de B) ;

F/ en faisant référence au caractère naturel des oeufs alors que du maïs transgénérique entrait dans l'alimentation des poules pondeuses ;

G/ en ne respectant pas les règles sur la traçabilité des oeufs, en l'espèce en détenant des oeufs démunis de tout marquage dans les 48 heures (749 375 à la date du 6 septembre 2005) et des oeufs périmés (94 443 à la date du 6 septembre 2005),

infraction prévue par les articles L. 121-1, L. 121-5, L. 121-1-1 du Code de la consommation et réprimée par les articles L. 121-6, L. 121-4, L. 213-1 al. 1 du Code de la consommation

- trompé le consommateur :

A/ en vendant sous la dénomination "pays de Provence" des oeufs provenant des poulaillers industriels de la SARL C à Montbazin, en l'espèce 556 044 oeufs du 1er janvier au 6 septembre 2005 ;

B/ en vendant sous la dénomination Bio des produits ne pouvant se prévaloir de cette dénomination, en l'espèce 270 000 oeufs vendus par B ;

C/ en vendant sous le signe de qualité "Label Rouge" des produits ne pouvant se prévaloir de cette dénomination (dans le cadre de B) ;

D/ en utilisant de façon abusive les termes "traçabilité totale", "démarche qualité certifiée", "organisme certificateur rigoureux", "fermes agréées" et en utilisant de façon abusive le terme "fermier" ;

E/ en utilisant de façon abusive le logo "Visez santé - Fondation des maladies du coeur" (dans le cadre de B) ;

F/ en faisant référence au caractère naturel des oeufs alors que du maïs transgénérique entrait dans l'alimentation des poules pondeuses ;

G/ en ne respectant pas les règles sur la traçabilité des oeufs, en l'espèce en détenant des oeufs démunis de tout marquage dans les 48 heures (749 375 à la date du 6 septembre 2005) et des oeufs périmés (94 443 à la date du 6 septembre 2005),

infraction prévue par l'article L. 213-1 du Code de la consommation et réprimée par les articles L. 213-1, L. 216-2, L. 216-3, L. 216-8 al. 5 du Code de la consommation

et, en répression, les a condamnés aux peines suivantes :

- Mme Y : une amende délictuelle de 2 000 euro et deux amendes contraventionnelles de 500 euro et de 450 euro,

- M. X : une amende délictuelle de 5 000 euro dont 2 000 euro avec sursis et deux amendes contraventionnelles de 500 euro et de 450 euro,

- La SARL C représentée par Y : une amende délictuelle de 20 000 euro,

- La SARL A représentée par Y : une amende délictuelle de 15 000 euro,

Le tribunal a également ordonné pour chacun des condamnés la publication par extrait de son jugement dans le journal " Midi Libre " à leurs frais à titre de peine complémentaire.

APPELS :

Y, X, la SARL B, la SARL C et la SARL A ont interjeté appel principal de ce jugement par déclaration au greffe en date du 11 décembre 2008 en cantonnant leur appel aux dispositions civiles et pénales relatives aux infractions de vente sous le signe de qualité Label Rouge, d'utilisation du terme fermier, d'allégations relatives à la maîtrise de la qualité de nature à induire en erreur et de référence indue au caractère naturel de l'alimentation et des oeufs.

Le Ministère public a interjeté appel incident le 12 décembre 2008 contre Y, X, la SARL B, la SARL C et la SARL A.

FAITS :

La situation juridique des sociétés en cause:

La SARL C, sise à Montbazin (34) a une activité de production d'oeufs de poules élevées en batterie, une activité de calibrage et de conditionnement de ces oeufs ainsi que de ceux provenant de la SARL B, elle est aussi amenée à s'approvisionner auprès de producteurs et fournisseurs extérieurs et de trier, classer et marquer ces oeufs ; cette société commercialise les oeufs à son unique client la SARL A.

La SARL B, sise à Condorcet (26) mais dont la gestion s'effectue depuis Montbazin, a une activité de production d'oeufs par l'intermédiaire d'élevages intégrés (oeufs Bio, oeufs Plein-Air, oeufs 1, oeufs Label Rouge), les fait conditionner par la SARL C et les commercialise à son unique client la SARL A.

Enfin la SARL A, sise à Montbazin, a une activité de négoce, chargée de commercialiser les produits acquis auprès des SARL C et B.

Si la gérante de droit de ces trois sociétés est Y, l'enquête menée par les gendarmes de Nyons et de sète a établi que son mari, X, en est le gérant de fait, les salariés de ces sociétés ne connaissant que lui et recevant de lui ses directives.

L'enquête de la Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes :

Le 6 septembre 2005 et les jours suivants les fonctionnaires de la Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes ont effectué un contrôle sur le site de Montbazin les amenant à dresser, le 24 février 2006, un procès-verbal à l'encontre [de X et Y] et des SARL B, C et D pour diverses infractions au Code de la consommation.

Il en ressort que les oeufs dit " cages ", produits dans les poulaillers en batterie de Montbazin, sont triés, marqués et conditionnés le jour même (ou au plus tard deux jours après s'il y a un jour férié) de la production tandis que les oeufs " Bio " et " Plein air ", provenant essentiellement d'éleveurs intégrés à la SARL B situés dans les départements de la Drôme, du Gard et de l'Ardèche, sont collectés en général deux fois par semaine et parviennent au centre de conditionnement entre un à cinq jours après la date de ponte.

Dès leur arrivée dans le centre de conditionnement les oeufs suivent un circuit et sont stockés d'abord à proximité du quai de réception puis au fond et enfin sur la partie gauche de l'entrepôt où le responsable du centre va chercher les palettes d'oeufs à trier qui sont alors disposés au centre de l'entrepôt, à proximité de la chaîne de marquage et de conditionnement. Les palettes en attente de marquage et de tri sont identifiées à l'aide d'une fiche de couleur mentionnant la qualité des oeufs (Plein air, Bio, 1, etc), le nom de l'éleveur, le Code de l'élevage, la date de ponte, le nombre d'oeufs classés A et le nombre d'oeufs déclassés au stade du poulailler.

Les oeufs sont alors disposés sur une calibreuse qui va procéder au tri et au classement selon un critère de poids puis sur une marqueuse qui va procéder au marquage au jet d'encre de l'indication d'un Code désignant le numéro distinctif du producteur et permettant d'identifier le mode d'élevage (0 = bio, 1 = plein air, 2 = sol, 3 = cage), puis les oeufs ainsi triés et marqués sont conditionnés dans des emballages de diverses contenances où sont indiquées les mentions obligatoires relatives au nom et adresse de l'entreprise qui a emballé ou fait emballer les oeufs, le numéro du centre d'emballage, la catégorie de poids, le nombre d'oeufs, le mode d'élevage (oeufs de poules élevées en plein air ou au sol ou en cage) et la date de durabilité minimale (calculée en ajoutant au maximum 28 jours à la date de ponte).

Une fois le lot d'oeufs triés, la fiche de couleur apposée par le producteur est apportée au service comptabilité pour rapprochement avec les bons d'enlèvement, en l'espèce le dernier rapprochement ayant été effectué le 29 août 2005, toutes les fiches non encore rapprochées concernaient des lots triés et conditionnés entre le 29 août et le 6 septembre 2005.

Au 6 septembre 2005 il a été procédé à un inventaire exhaustif contradictoire des oeufs en stock, il était ainsi constaté qu'étaient détenus 749 375 oeufs non calibrés, démunis de tout marquage, en attente de tri, calibrage et conditionnement, pondus entre le 21 juillet et le 4 septembre 2005, quasi exclusivement des oeufs " Bio " et " Plein air " (seulement 80 160 oeufs " cages ").

Il apparaissait donc que ces oeufs n'avaient pas fait l'objet d'un marquage dans les deux jours suivant la date de réception et que 94 443 d'entre eux étaient périmés, la date de durabilité minimale étant dépassée de 19 jours pour les plus anciens.

Cet inventaire constatait également la présence de 17 891 oeufs calibrés, marqués, de 56 052 oeufs calibrés, marqués, conditionnés prêts à l'expédition (dont 5 240 oeufs " Label Rouge ") et 43 552 oeufs déclassés, stockés à part et destinés à un usage industriel.

L'enquête des fonctionnaires de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes se portait également sur l'exploitation des documents comptables pour procéder, pour chaque catégorie d'oeufs (cages, Bio, label, plein air, 1, Oméga 3) à un bilan matière afin de comparer les disponibilités à la vente par rapport aux ventes réalisées durant la période du 1er janvier au 6 septembre 2005 en déterminant le stock au 1er janvier 2005 (quantité figurant sur l'inventaire commercial au 31 décembre 2004), les entrées de marchandises (achats externes, achats au sein des trois sociétés), le stock au 6 septembre 2005 (résultant de l'inventaire contradictoire effectué par les fonctionnaires), les ventes du 1er janvier au 6 septembre 2005 et les disponibilités à la vente (en ne prenant en compte que les oeufs de classe A destinés à la consommation).

Il en résultait qu'en ce qui concerne les oeufs Bio pour la période du 1er janvier au 6 septembre 2005 les disponibilités à la vente s'élevaient au maximum à 2 541 703 oeufs alors que la SARL A a vendu 2 811 815 oeufs " Bio ", soit un excédent des ventes de 270 112 oeufs au regard des disponibilités.

En ce qui concerne les oeufs Label Rouge le bilan global laisse apparaître un bilan quasi équilibré avec des manquants restreints sur les ventes au regard des disponibilités.

En ce qui concerne les oeufs 1 (race spécifique de poule) le bilan global laisse apparaître un manquant de 939 901 oeufs sur les ventes au regard des disponibilités.

En ce qui concerne les oeufs Plein air le bilan global laisse apparaître un excédent des ventes de 958 439 oeufs au regard des disponibilités, toutefois dans la mesure où les poules 1 sont élevées en plein air, leurs oeufs peuvent aussi être présentés et vendus sous la seule indication " Plein air " et, dans ces conditions, le compte global des oeufs Plein air se trouve quasiment équilibré.

Enfin en ce qui concerne les oeufs " cages " le bilan global laisse apparaître un manquant de 147 309 oeufs au regard des disponibilités.

Toutes catégories d'oeufs confondues le compte est quasiment équilibré puis qu'il n'existe qu'un écart de 134 225 oeufs entre les disponibilités et les ventes, soit 0,7 % de la quantité d'oeufs vendue, cet écart pouvant s'expliquer par l'approximation de la quantité d'oeufs déclassée et par les pertes inhérentes aux manipulations spécifiques à un centre de conditionnement d'oeufs.

Les infractions relevées par la Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes :

1) Non-respect des règles assurant la traçabilité des produits : les fonctionnaires relevaient qu'en ne procédant pas dans un délai de 48 heures au classement, au marquage et à l'emballage des oeufs, en l'absence d'un suivi des lots qui aurait permis d'assurer la traçabilité de la marchandise et en ne tenant pas à jour un stock, les sociétés C et D et leurs responsables ont contrevenu aux obligations édictées par l'article 7 du Règlement 1907-90 du 26 juin 1990 (concernant les normes de commercialisation applicables aux oeufs) et aux articles 2 et 26 du Règlement 2295-2003 du 23 décembre 2003 (établissant les modalités d'application du Règlement 1907-90) qui, en vertu de l'article 2 du décret n° 94-641 du 20 juillet 1994, constituent des mesures d'exécution prévues à l'article L. 214-1 du Code de la consommation.

2) Absence de marquage de certains oeufs : les fonctionnaires relevaient, lors de leur contrôle du 6 septembre 2005, la présence, dans les locaux des sociétés C et D, de palettes contenant 3 600 oeufs conditionnés sous la dénomination " oeufs frais du grand Sud " prêts à être livrés en magasin alors qu'ils n'étaient pas marqués et ne comportaient aucun identifiant du Code éleveur ; en outre les constations effectuées dans les magasins I de Sarrians, de Mèze et de Montélimar et U d'AGDE sur la mise en vente au consommateur final d'oeufs présentés sous la marque " oeufs frais du grand Sud " mettaient en évidence 3 810 oeufs démunis de tout marquage, ces faits constituant des infractions à l'article 7 du Règlement 1907-90 du 26 juin 1990 et à l'article 8 du Règlement 2295-2003, l'obligation de marquage sur les oeufs du Code désignant le numéro distinctif du producteur et permettant d'identifier le mode d'élevage étant applicable depuis le 1er janvier 2004 et ces dispositions constituant, en vertu de l'article 2 du décret précité du 20 juillet 1994, des mesures d'exécution prévues à l'article L. 214-1 du Code de la consommation.

3) Détention d'oeufs dont la date limite de consommation était dépassée : selon l'article 9 du Règlement 2295-2003 la date de durabilité minimale ne peut aller au-delà du vingt-huitième jour suivant celui de la ponte, or les fonctionnaires ont constaté, le 6 septembre 2005, la présence, dans les locaux du centre de conditionnement de la société C, de 94 443 oeufs dont la date de durabilité minimale était dépassée depuis 19 jours pour les plus anciens et qui étaient détenus parmi les oeufs frais en attente de tri et de conditionnement, ce qui constitue une tentative de tromperie au sens de l'article L. 213-1 du Code de la consommation.

4) Post datage des oeufs frais : les fonctionnaires ont constaté que la date de consommation recommandée (ou date de durabilité minimale) était déterminée non pas à partir de la date de ponte mais à partir de la date de conditionnement des oeufs ce qui entraînait un post datage et un rallongement de la date de consommation recommandée de 16 à 21 jours au-delà des 28 jours maximum admis, ce qui constitue d'une part une tromperie sur les qualités substantielles au sens de l'article L. 213-1 du Code de la consommation et un mode de présentation de nature à induire en erreur au sens de l'article L. 121-1 dudit Code.

5) Vente sous la dénomination " Pays de Provence " de produits ne pouvant se prévaloir de cette origine : les fonctionnaires ont constaté, le 6 septembre 2005, 1 320 oeufs conditionnés prêts à l'expédition présentés comme " oeufs du Pays de Provence ", leur enquête, notamment auprès des magasins I de Sarrians et de Montélimar commercialisant ces oeufs, a permis d'établir qu'entre le 1er janvier et le 6 septembre 2005 la société D avait commercialisé 556 044 oeufs (en 66 250 emballages) sous la dénomination " oeufs du Pays de Provence " alors que ceux-ci avaient été produits sur le site de Montbazin, dans le département de l'Hérault (soit dans la région Languedoc), et qu'ils ne pouvaient en aucun cas se prévaloir d'une origine " Pays de Provence ", ce qui constitue une infraction à l'article L. 217-6 du Code de la consommation pour indication sur des produits d'une origine différente de leur véritable origine, une infraction à l'article L. 213-1 du Code de la consommation pour tromperie sur les qualités substantielles de la marchandise, sur les contrôles effectués et une infraction à l'article L. 121-1 du Code de la consommation pour publicité et modes de présentation faux ou de nature à induire en erreur.

6) Vente sous la dénomination " Bio " de produits ne pouvant se prévaloir de cette dénomination : par le rapprochement entre les quantités d'oeufs " Bio " acquises et les quantités de ces mêmes produits commercialisées par la société D entre le 1er janvier et le 6 septembre 2005, les fonctionnaires ont constaté que cette société a vendu sous la dénomination " Produits issus de l'agriculture biologique " 270 112 oeufs qui ne pouvaient en aucun cas se prévaloir de cette dénomination, ce qui constitue une infraction à l'article L. 115-24 du Code de la consommation pour utilisation frauduleuse d'un label ou d'une certification et utilisation d'un mode de présentation faisant croire qu'un produit bénéficie d'un label agricole ou d'une certification, une infraction à l'article L. 213-1 du Code de la consommation pour tromperie sur les qualités substantielles et une infraction à l'article L. 121-1 du Code de la consommation pour publicité mensongère et mode de présentation de nature à induire en erreur.

7) Vente sous le signe de qualité " Label Rouge " de produits ne pouvant se prévaloir de cette dénomination : les fonctionnaires rappellent que le règlement " Label Rouge " prévoit que les oeufs doivent être présentés en boîtes de 6 ou de 12, qu'ils doivent être conditionnés dans des centres spécifiques préalablement admis par l'organisme certificateur et que le transfert des oeufs " Label Rouge " entre centres de conditionnement n'est pas autorisé ; ils rappellent également que le centre de conditionnement de la société C n'est pas agréé et ne peut procéder au conditionnement des oeufs " Label Rouge " alors que la société D réceptionnait et commercialisait des oeufs " Label Rouge " en vrac ; en outre le rapprochement entre les quantités d'oeufs " Label Rouge " acquises et les quantités de ces mêmes produits commercialisés par la société D entre le 1er janvier et le 6 septembre 2005 établissait que pendant cette période cette société avait vendu sous la dénomination " Label Rouge " un minimum de 7 134 oeufs ne pouvant en aucun cas se prévaloir de cette qualité, ce qui constituait une infraction à l'article L. 115-24 du Code de la consommation pour utilisation frauduleuse d'un label ou d'une certification et utilisation d'un mode de présentation faisant croire qu'un produit bénéficie d'un label agricole ou d'une certification, une infraction à l'article L. 213-1 du Code de la consommation pour tromperie sur les qualités substantielle de la marchandises, sur les contrôles effectués et une infraction à l'article L. 121-1 du Code de la Consommation pour publicité et modes de présentation faux ou de nature à induire en erreur.

8) Utilisation abusive du terme "Fermier" : les fonctionnaires constataient le 6 septembre 2005, dans les locaux des sociétés C et D, la détention d'emballages d'oeufs vides et de présentoirs en bois à la marque B portant des allégations relatives au caractère "fermier" des oeufs et/ou des élevages, à savoir : " oeufs extra roux fermiers ", " 1, l'authentique poule fermière élevée en plein air ", " 2 de Provence(r) ", " 3 en Rhône-Alpes(r) " et " gros oeufs fermiers ", ces emballages et présentoirs étant constatés à la vente dans les magasins H de Pézenas et de Palavas, I de Mèze, H de Saint-Jean-De-Védas et S de Montbazin alors que les Codes éleveurs identifiés sur les oeufs ainsi mis en vente correspondaient à des éleveurs pratiquant l'élevage de poules en plein air, ce qui ne saurait être confondu avec des élevages d'oeufs fermiers, ce qui constitue une infraction à l'article L. 121-1 du Code de la consommation.

9) Allégations relatives à la maîtrise de la qualité de nature à induire en erreur : les fonctionnaires ont constaté sur les emballages des oeufs des allégations ayant trait à la maîtrise de la traçabilité et de la qualité des produits, à savoir : " B assure le contrôle et la traçabilité de ce produit à tous les stades de son élaboration ", " traçabilité totale : Code du poulailler nom et adresse du producteur ", " une démarche qualité Certifiée ", " un cahier des charges rigoureux "; " des organismes certificateurs rigoureux ", " ferme agréée sélectionnée " alors que les constatations effectuées montrent qu'il n'y a pas de traçabilité totale du fait de l'absence de marquage du Code éleveur sur certains oeufs, de l'absence de traçabilité aval et de l'absence de tenue de stock physique hebdomadaire ; en outre les adjectifs " agréée " et " sélectionnée " laissent penser à l'existence d'une procédure d'accréditation des fermes par un organisme externe aux sociétés en cause, du type label et les références à une démarche qualité " certifiée " et à des " organismes certificateurs rigoureux " laissent penser que ces oeufs proviennent d'élevages bénéficiant de signes de qualité et contrôlés par des organismes certificateurs alors que les éleveurs concernés ne sont pas soumis à une procédure de contrôle par un organisme certificateur externe comme c'est le cas dans les produits certifiés, sous label ou les productions issues de l'agriculture biologique, ce qui constitue une infraction à l'article L. 121-1 du Code de la consommation.

10) Référence indue et utilisation abusive du logo " Visez Santé - Fondation des maladies du coeur" : les fonctionnaires ont constaté sur les emballages des oeufs Oméga 3 un logo intitulé " Visez Santé - Fondation des maladies du coeur" qui induit une participation à un programme sur les aliments et la nutrition reflétant les recommandations alimentaires du Gouvernement canadien, soumise au paiement de frais de licence et au respect de critères spécifiques (indications de valeurs nutritionnelles validées par un comité), alors que le produit ne pouvait prétendre aux spécificités de ce logo, ce qui constitue une infraction à l'article L. 121-1 du Code de la consommation.

11) Référence indue au caractère " naturel " de l'alimentation et des oeufs : les fonctionnaires ont constaté, sur les emballages des oeufs Oméga 3, les informations suivantes : " Produit par des poules nourries avec un aliment entièrement naturel à base de graines de lin additionnées de vitamine E ", ils ont également constaté, sur les oeufs plein air et en cage commercialisés par la société D, les mentions " L'oeuf au naturel " avec, parfois, en bas de paragraphe la mention " naturellement votre... ", ces mentions ayant également été constatées sur les présentoirs dans les magasins H de Pézenas et I de Mèze commercialisant ces produits, alors qu'il a été constaté que ces oeufs sont issus de poules nourries avec des aliments génétiquement modifiés, à savoir des tourteaux de soja dans une proportion de 15 à 26 % de la ration des poules, ce que ne pouvaient ignorer les époux X et Y, alimentation incompatible avec ce que le consommateur est en droit d'attendre d'un aliment naturel ou d'un oeuf naturel, ce qui constitue une infraction à l'article L. 121-1 du Code de la consommation.

PRÉTENTIONS DES PARTIES

Les fonctionnaires de la direction de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes ont été entendues à titre de simple renseignements et s'en rapportent à leur procès-verbal.

Le Ministère public requiert les sanctions requises en première instance, sans sursis ainsi que la publicité de la décision à intervenir et son affichage ainsi qu'une interdiction, pour X, de gérer une société ayant un rapport avec l'activité relative aux oeufs.

X, Y, la SARL A, la SARL B et la SARL C ont déposé le 15 septembre 2009 des conclusions au terme desquelles ils demandent à la cour d'annuler le jugement déféré pour fausse application des dispositions des articles L. 121-1 et L. 213-1 du Code de la consommation, de déclarer infondées les infractions relatives aux allégations relatives à la traçabilité des oeufs, à l'utilisation du terme "fermier", aux allégations relatives à la maîtrise de la qualité et à l'utilisation du signe de qualité " Label Rouge " et de la dénomination " Bio ", la contravention de troisième classe pour défaut de marquage de conditionnement faute de texte incriminant et l'infraction liée faisant référence au caractère naturel de l'alimentation de certaines poules et des oeufs pondus par ces dernières, l'infraction n'étant ni fondée en fait ni qualifiée en droit.

Ils font valoir que le tribunal n'a pas opéré de distinction entre les délits de tromperie et de publicité trompeuse ou de nature à induire en erreur dont les régimes juridiques sont totalement différents, qu'en ce qui concerne la traçabilité la société C tenait un registre des entrées permettant d'identifier la quantité, la qualité et la provenance des oeufs reçus quotidiennement, les quelques défaillances constatées relevant davantage d'un défaut de compétence ou de vigilance que d'un plan de fraude, qu'en ce qui concerne l'utilisation du terme "fermier" il a existé un vide juridique de dix ans pour définir réglementairement les conditions d'utilisation de ce terme et que les élevages en cause remplissaient objectivement les conditions définies par une circulaire de 1999.

En ce qui concerne les allégations relatives à la maîtrise de la qualité ils font valoir que la sélection des fermes chargées de la production des oeufs se fait sous le contrôle d'organismes certificateurs et en ce qui concerne l'utilisation du logo "Visez santé - Fondation des maladies du coeur" ils font valoir qu'ils ont agi de bonne foi et ont cessé cette utilisation au demeurant non mensongère en elle-même.

En ce qui concerne les ventes sous le signe de qualité "Label Rouge" ils font valoir que les oeufs sous ce label commercialisés par la société D sont livrés conditionnés par leurs producteurs-conditionneurs (soit en boîtes, soit en " vrac " par cartons de 160, 200 ou 240 oeufs composés d'alvéoles de 20 ou 30 oeufs destinés à la vente dans le rayon " coupe " des grandes surfaces) et sont revendus en l'état dans leur emballage définitif, cette société ne les reconditionne donc pas.

En ce qui concerne les oeufs vendus sous la dénomination " Bio " ils contestent l'analyse comptable de l'administration en faisant valoir que les rapports d'audit d'Ulase, organisme certificateur de contrôle des oeufs " Bio ", ne font apparaître aucune irrégularité.

En ce qui concerne la contravention pour défaut de marquage d'oeufs conditionnés ils font valoir l'absence de disposition légale ou réglementaire permettant de qualifier cette infraction.

En ce qui concerne les références au caractère naturel de l'alimentation des poules et des oeufs, ils font valoir qu'il s'agit également d'une infraction non qualifiée et qu'en tout état de cause il y a eu une confusion avec les aliments utilisés par la société C qui est spécialisée dans l'élevage industriel et ne produit pas d'oeufs " bio ".

Pour les infractions reconnues par les prévenus, ils demandent de prendre en compte les circonstances particulières de l'affaire pour ne les sanctionner qu'avec indulgence, en annulant notamment la mesure de publicité ordonnée par le jugement déféré en faisant valoir la disproportion des griefs dont bon nombre sont dépourvus de fondement juridique, la situation personnelle des époux X/Y, âgés, le fait qu'il s'agit de PME familiales en difficultés et que la publication aurait un effet dévastateur sur la clientèle des prévenus.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Attendu qu'il sera statué contradictoirement à l'encontre de tous les prévenus ;

Sur la recevabilité des appels

Attendu que l'appel principal de X, de Y, de la SARL A et de la SARL C ainsi que l'appel incident du Ministère public sont réguliers pour avoir été interjetés dans les formes et délais légaux ;

Attendu en revanche que l'appel principal de la SARL B est irrecevable pour défaut d'intérêt dans la mesure où cette société a bénéficié d'une décision de relaxe ;

Sur la culpabilité

Attendu que le Ministère public n'a pas requis l'infirmation du jugement déféré en ce qu'il a prononcé la relaxe de la SARL B, qu'en conséquence la cour confirmera en tant que de besoin, par adoption de ses motifs corrects et pertinents tant en droit qu'en fait, le jugement déféré en ce qu'il a prononcé cette relaxe ;

Attendu qu'en vertu des dispositions de l'article 509 du Code de procédure pénale, l'affaire est dévolue à la cour dans la limite fixée par l'acte d'appel et par la qualité des appelants ;

Attendu qu'en l'espèce l'appel principal des prévenus est expressément cantonné aux dispositions du jugement déféré relatives aux seules infractions suivantes :

- vente sous le signe de qualité Label Rouge,

- utilisation du terme fermier,

- allégations relatives à la maîtrise de la qualité de nature à induire en erreur,

- référence indue au caractère naturel de l'alimentation et des oeufs ;

Attendu que ces quatre catégories correspondent bien aux infractions analysées aux points (7), (8), (9) et (11) du présent arrêt, au paragraphe relatif aux infractions relevées par la Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes, à savoir respectivement :

- vente sous le signe de qualité " Label Rouge " de produits ne pouvant se prévaloir de cette dénomination (7),

- utilisation abusive du terme "Fermier" (8),

- allégations relatives à la maîtrise de la qualité de nature à induire en erreur (9),

- référence indue au caractère " naturel " de l'alimentation et des oeufs (11) ;

Attendu en conséquence qu'en raison de l'effet dévolutif de cet appel expressément cantonné aux dites infractions, la cour n'est pas saisie de la connaissance des infractions analysées aux points (1), (2), (3), (4), (5), (6) et (10) du présent arrêt, à savoir respectivement :

- non-respect des règles assurant la traçabilité des produits (1),

- absence de marquage de certains oeufs (2),

- détention d'oeufs dont la date limite de consommation était dépassée (3),

- post datage des oeufs frais (4),

- vente sous la dénomination " Pays de Provence " de produits ne pouvant se prévaloir de cette origine (5),

- vente sous la dénomination " Bio " de produits ne pouvant se prévaloir de cette dénomination (6),

- référence indue et utilisation abusive du logo " Visez Santé - Fondation des maladies du coeur" (10);

Attendu dès lors que les chefs du dispositif du jugement déféré ayant déclaré X, Y, la SARL A prise en la personne de son représentant légal et la SARL C prise en la personne de son représentant légal, coupables de ces chefs de poursuite sous les qualifications pénales pour tous de publicité mensongère et de tromperie et également, pour les époux X et Y, de commercialisation d'oeufs sans mentions obligatoires conformes et de mise en circulation d'oeufs non conformes aux normes sanitaires ou qualitatives pour être reconnues propres à la consommation sont désormais définitifs;

Attendu qu'en conséquence X, Y, la SARL A prise en la personne de son représentant légal et la SARL C prise en la personne de son représentant légal sont irrecevables à critiquer, dans leurs conclusions, les chefs d'incrimination du jugement déféré relatifs au non-respect des règles assurant la traçabilité des produits (1), à l'absence de marquage de certains oeufs (2), à la vente sous la dénomination " Bio " de produits ne pouvant se prévaloir de cette dénomination (6) et à la référence indue et à l'utilisation abusive du logo " Visez Santé - Fondation des maladies du coeur" (10);

Attendu de même que X, Y, la SARL A prise en la personne de son représentant légal et la SARL C prise en la personne de son représentant légal ne sauraient demander la nullité de l'entier jugement au seul motif d'une prétendue fausse application des dispositions des articles L. 121-1 et L. 213-1 du Code de la consommation étant observé que ce fait ne pourrait constituer qu'un motif d'infirmation du jugement et non pas de sa nullité ;

Attendu dès lors que la cour n'examinera, dans les limites de sa saisine, que les quatre catégories d'infractions expressément visées par X, Y, la SARL A et la SARL C dans leur appel principal cantonné ;

La vente sous le signe de qualité "Label Rouge" de produits ne pouvant se prévaloir de cette dénomination :

Attendu que les oeufs " Label Rouge " commercialisés par la société D au cours de l'année 2005 ont été acquis auprès du producteur D et de la CL, essentiellement conditionnés en petits emballages de 6 ou 10 oeufs et une partie en "vrac", que le producteur D adhère au groupement "Les Fermiers de nos Provinces" qui a fait valider un cahier des charges conférant le signe de qualité "Label Rouge" aux oeufs produits, l'organisme certificateur étant Qualité France ;

Attendu que le règlement "Label Rouge" prévoit notamment que les oeufs sous label doivent être conditionnés dans des centres spécifiques préalablement habilités par l'organisme certificateur (cf également la notice technique du ministère de l'Agriculture, de l'Alimentation, de la Pêche et des Affaires rurales définissant les critères minimaux à remplir pour l'obtention de ce label), que pour garantir la traçabilité de ces oeufs le transfert entre centres d'emballage n'est pas autorisé, sauf pour les oeufs conditionnés dans leur emballage définitif, qu'ainsi aucun reconditionnement des oeufs n'est possible ;

Attendu que X, Y, la SARL A prise en la personne de son représentant légal et la SARL C prise en la personne de son représentant légal soutiennent qu'il ne saurait leur être reproché la commercialisation d'oeufs "Label Rouge" en "vrac" en indiquant que la vente en "vrac" d'oeufs "Label Rouge" en cartons de 160, 200 ou 240 oeufs placés dans des alvéoles de 20 ou 30 oeufs destinés à la vente dans le rayon "coupe" des grandes surfaces n'est pas en soi interdite ;

Mais attendu que ce qui est en réalité reproché aux prévenus est le fait d'avoir présenté à la vente, mis en vente et vendu à l'aide du signe de qualité "Label Rouge" des oeufs qui ne pouvaient en aucun cas se prévaloir de cette dénomination en relevant d'une part que la société C n'était pas agréée pour le conditionnement des oeufs "Label Rouge" et d'autre part que le rapprochement entre les quantités d'oeufs "Label Rouge" acquises et les mêmes produits commercialisés par la société D entre le 1er janvier et le 6 septembre 2005 sous la dénomination "Label Rouge" permettait de constater qu'un minimum de 7 134 oeufs ne pouvaient en aucun cas se prévaloir de ce signe de qualité ;

Attendu que l'exploitation comptable de l'activité de la société D effectuée par l'administration établit qu'au 31 décembre 2004 le stock d'oeufs "Label Rouge" était de 5 880, que pour la période du 1er janvier au 6 septembre 2005 les disponibilités ont été de 265 919 oeufs et les ventes de 258 803 oeufs, qu'il en résulte donc globalement un bilan quasiment équilibré avec des manquants restreints sur les ventes au regard des disponibilités (2,68 %) ; que l'attestation de la SA Sogecic, expert-comptable, produite par les prévenus présente des chiffres comparables (disponibilités de 266 239 oeufs et vente de 256 811 oeufs) aboutissant à la même constatation ;

Mais attendu qu'au-delà de ce bilan global il a été constaté, en procédant à des bilans par type de conditionnement (par 6, par 10 et en "vrac"), un excédent pour cette période de 6 684 oeufs conditionnés par 6 et des manquants de 4 610 oeufs conditionnés par 10 et de 9 190 oeufs conditionnés en "vrac", que ces constatations, qui font foi jusqu'à preuve contraire, ne sont pas combattues par l'attestation précitée de l'expert-comptable qui ne comporte que des chiffres mensuels globaux sans distinguer le type de conditionnement ;

Attendu qu'il apparaît donc qu'une partie non négligeable des oeufs "Label Rouge" reçus par la société C conditionnés en "vrac" ont été nécessairement reconditionnés sur place dans des conditionnements par 6 en infraction avec le règlement du cahier des charges "Label Rouge" puisqu'il est constant que cette société n'est pas habilitée pour procéder à un tel reconditionnement ;

Attendu d'autre part qu'en procédant à des bilans des ventes mois par mois pour les oeufs conditionnés en boîtes de 6, il a été constaté que pour les mois de février, juin et juillet 2005 la société avait commercialisé respectivement 186 emballages (1 116 oeufs), 201 emballages (1 206 oeufs) et 565 emballages (3 390 oeufs) de plus que ne le permettaient alors les disponibilités, que de même pour les oeufs conditionnés en "vrac", il a été constaté que pour les mois de janvier et février 2005 la société avait commercialisé respectivement 1 070 et 352 oeufs de plus que ne le permettaient les disponibilités, soit un total de 7 134 oeufs ne pouvant se prévaloir du signe de qualité "Label Rouge", qu'ici encore ces constatations ne sauraient être combattues par l'attestation précitée de l'expert-comptable qui ne détaille pas les ventes mensuelles par conditionnement en boîtes de 6 ou en "vrac" ;

Attendu que la répétition de ces pratiques ne saurait être assimilée à une simple erreur ou négligence mais ressort d'une volonté délibérée d'utiliser frauduleusement le signe de qualité "Label Rouge" pour des oeufs ne pouvant s'en prévaloir, ce qui constitue non seulement l'infraction prévue à l'article L. 115-24 du Code de la consommation mais également l'infraction de publicité fausse ou de nature à induire en erreur prévue par l'article L. 121- 1 dudit Code réprimant tout moyen d'information destiné à permettre à un client potentiel de se faire une opinion sur la qualité du produit qui lui est proposé à la vente et comportant, sous quelque forme que ce soit, des allégations, indications ou présentations de nature à induire en erreur un consommateur moyen ;

Attendu enfin que, parallèlement au délit de publicité fausse ou de nature à induire en erreur, le fait d'attribuer faussement le signe de qualité "Label Rouge" à des oeufs qui ne peuvent s'en prévaloir constitue également le délit de tromperie sur les qualités substantielles de la marchandise prévu par l'article L. 213-1 dudit Code ;

Attendu que c'est donc à juste titre que les premiers juges ont retenu la culpabilité de X, de Y, de la SARL A prise en la personne de son représentant légal et de la SARL C prise en la personne de son représentant légal à ce titre ;

L'utilisation abusive du terme "Fermier" :

Attendu qu'il a été constaté, tant dans les locaux des sociétés C et D que dans les supermarchés du département de l'Hérault commercialisant leurs oeufs (ainsi qu'analysé plus haut), l'existence de présentoirs et d'emballages d'oeufs portant les allégations relatives au caractère "fermier" des oeufs et/ou des élevages alors que les codes éleveurs identifiés sur les oeufs ainsi mis en vente (éleveurs S, P, L) correspondent à des élevages d'oeufs dits " plein air " incompatibles avec des élevages d'oeufs dits "fermiers" dans la mesure où il s'agit d'exploitations de poulaillers contenant plusieurs milliers de poules par poulailler (de 3 000 pour l'éleveur S à 7 500 pour l'éleveur P) avec un mode de ramassage automatique des oeufs ;

Attendu que X, Y, la SARL A prise en la personne de son représentant légal et la SARL C prise en la personne de son représentant légal font valoir que le terme "fermier" n'était pas réglementairement défini puisque ce ne sont que le décret n° 2009-247 du 2 mars 2009 et l'arrêté du 25 mars 2009 qui ont défini les conditions d'utilisation de ce terme en application de la loi d'orientation agricole n° 99-574 du 9 juillet 1999 (reprise à l'article L. 641-19 du Code rural) et qu'il a donc existé durant un période de près de dix ans un vide juridique ;

Mais attendu qu'indépendamment de l'existence ou non d'une définition réglementaire du terme "Fermier", il convient de rechercher s'il a été fait, par les prévenus, une utilisation abusive de ce terme pour des oeufs qui ne sauraient y prétendre;

Attendu en premier lieu que la référence au terme "fermier" implique dans l'esprit du consommateur moyen qu'il s'agit d'oeufs provenant de poules élevées selon un mode rural traditionnel ;

Attendu qu'il convient à cette fin de se référer au seul document administratif alors existant, à savoir le cahier des charges "oeufs sous label" établi par la Direction générale de l'alimentation et validé par la commission nationale des labels le 16 avril 1999 ;

Attendu que ce document précise notamment que l'exploitation doit être de type familial non spécialisée, dans laquelle la production d'oeufs contribue au revenu, que le nombre de poules est limité à 6 000 par exploitation, qu'elles doivent disposer en permanence d'un parcours herbeux et ombragé et que le ramassage des oeufs doit se faire manuellement (soit dans les nids, soit après leur évacuation directe des nids) ;

Attendu qu'en l'espèce il a été constaté, sans être sérieusement contredit par X, Y, la SARL A prise en la personne de son représentant légal et la SARL C prise en la personne de son représentant légal, que les élevages S, P et L ne sont pas des exploitations familiales non spécialisées mais au contraire des élevages industriels à grande échelle, que l'exploitation S comprend trois poulaillers contenant de 3 000 à 5 300 poules par poulailler (dont bien au-delà du maximum de 6 000 poules par exploitation), que l'exploitation P comprend 7 500 poules, qu'enfin le mode de ramassage des oeufs est automatique dans chacune de ces exploitations ;

Attendu que l'utilisation répétée et importante du terme "fermier" par X, Y, la SARL A et la SARL C pour des oeufs dont la qualité ne peut correspondre à une telle appellation ne saurait être assimilée à une simple erreur ou négligence mais ressort d'une volonté délibérée de tromper le consommateur sur les qualités substantielles de la marchandise, ce qui constitue l'infraction prévue par l'article L. 213-1 du Code de la consommation et que, parallèlement à ce délit, le fait d'avoir présenté à la vente, mis en vente et vendu à l'aide du qualificatif "fermier" des produits ne pouvant en aucun cas se prévaloir de cette dénomination constitue également l'infraction de publicité fausse ou de nature à induire en erreur prévue par l'article L. 121-1 réprimant tout moyen d'information destiné à permettre à un client potentiel de se faire une opinion sur la qualité du produit qui lui est proposé à la vente et comportant, sous quelque forme que ce soit, des allégations, indications ou présentations de nature à induire en erreur un consommateur moyen ;

Attendu que c'est donc à juste titre que les premiers juges ont retenu la culpabilité de X, de Y, de la SARL A prise en la personne de son représentant légal et de la SARL C prise en la personne de son représentant légal à ce titre ;

Les allégations relatives à la maîtrise de la qualité de nature à induire en erreur :

Attendu qu'il a été constaté sur les emballages des oeufs B, 1, 2 et 3 des mentions telles que reprises précédemment relatives au "contrôle et la traçabilité de ce produit à tous les stades de son élaboration", à leur "traçabilité totale", à "une démarche qualité Certifiée", à "un cahier des charges rigoureux", à "des organismes certificateurs rigoureux" et à une "ferme agréée sélectionnée", ces mentions se retrouvant également sur les emballages mis en vente dans les supermarchés du département de l'Hérault ;

Attendu que si dans leurs conclusions X, Y, la SARL A prise en la personne de son représentant légal et la SARL C prise en la personne de son représentant légal contestent les allégations relatives à l'absence de traçabilité et au défaut de marquage des oeufs, il convient de rappeler que leur appel cantonné n'a pas visé ces chefs de poursuites pour lesquels ils ont été déclarés coupables par le jugement déféré dont les dispositions sur ces points sont désormais définitives ;

Attendu en conséquence que les allégations relatives au contrôle et à la traçabilité totale des oeufs commercialisés par les prévenus sont fausses et de nature à induire en erreur le consommateur moyen ;

Attendu d'autre part que la référence à une démarche de qualité certifiée, à un cahier des charges rigoureux, à des organismes certificateurs rigoureux et à des fermes sélectionnées laisse entendre qu'il s'agit de structures définies dans le cadre d'une procédure d'accréditation par un organisme externe aux sociétés en cause, du type label et que les oeufs ainsi mis en vente proviennent d'élevage bénéficiant d'un signe de qualité distinctif et contrôlés par des organismes certificateurs ;

Attendu que X, Y, la SARL A prise en la personne de son représentant légal et la SARL C prise en la personne de son représentant légal allèguent que la sélection des fermes se fait bien sous le contrôle d'organismes certificateurs, faisant expressément allusion aux fermes produisant des oeufs "Label Rouge" ou "Bio" ;

Mais attendu que tel n'est pas le cas en l'espèce, les éleveurs correspondant à ces emballages étant des éleveurs d'oeufs plein air classique non soumis à une quelconque procédure de contrôle par un organisme certificateur externe comme c'est effectivement le cas dans les produits certifiés, sous label ou les productions issues de l'agriculture biologique ;

Attendu que la répétition et l'importance de ces allégations ne sauraient être assimilées à une simple erreur ou négligence mais ressortent d'une volonté délibérée d'induire en erreur le consommateur moyen sur la qualité des élevages d'où proviennent les oeufs ainsi mis en vente, que, contrairement à ce que soutiennent les prévenus, ces allégations mensongères de nature à induire en erreur sont bien constitutives du délit de publicité fausse ou de nature à induire en erreur prévue par l'article L. 121-1 du Code de la consommation réprimant tout moyen d'information destiné à permettre à un client potentiel de se faire une opinion sur la qualité du produit qui lui est proposé à la vente et comportant, sous quelque forme que ce soit, des allégations, indications ou présentations de nature à induire en erreur un consommateur moyen ;

Attendu enfin que, parallèlement au délit de publicité fausse ou de nature à induire en erreur, le fait d'avoir présenté à la vente, mis en vente et vendu à l'aide d'indications mensongères des produis ne pouvant en aucun cas se prévaloir de ces dénominations constitue également le délit de tromperie sur les qualités substantielles de la marchandise prévu par l'article L. 213-1 dudit Code;

Attendu que c'est donc à juste titre que les premiers juges ont retenu la culpabilité de X, de Y, de la SARL A prise en la personne de son représentant légal et de la SARL C prise en la personne de son représentant légal à ce titre ;

La référence indue au caractère " naturel " de l'alimentation et des oeufs :

Attendu qu'il a été constaté, ainsi qu'analysé précédemment, que les emballages des oeufs Oméga 3 mentionnent l'information selon laquelle ces oeufs sont produits par des poules nourries " avec un aliment entièrement naturel ", que les oeufs commercialisés sous la marque B portent sur l'emballage la mention " L'oeuf au naturel " parfois suivie d'une signature "naturellement votre...", que ces emballages portant ces mentions ont également été constatées dans les différents supermarchés du département de l'Hérault commercialisant ces produits ;

Attendu que selon l'Administration ces oeufs étaient issus de poules nourries avec des aliments génétiquement modifiés ;

Attendu que X, Y, la SARL A prise en la personne de son représentant légal et la SARL C prise en la personne de son représentant légal indiquent d'une part qu'il ne pourrait exister à ce titre aucune infraction qualifiable et d'autre part que la question de la présence d'organismes génétiquement modifiés dans les aliments destinés aux poules ne se pose que pour l'élevage de Montbazin spécialisé dans l'élevage industriel et ne produisant pas d'oeufs "Bio" et qu'au contraire pour les élevages dépendant de la société B les poules sont nourries avec une alimentation composée de 60 à 70 % de céréales produites dans la région (donc dépourvues d'organismes génétiquement modifiés), de 20 % de soja "H" exempt d'organismes génétiquement modifiés, de 8 à 10 % de carbonate de calcium et d'oligo-éléments et vitamines ;

Mais attendu que X, Y, la SARL A et la SARL C ne se réfèrent qu'aux oeufs "Bio" qui ne sont pas concernés en l'espèce puisque ces références au caractère "naturel" de l'alimentation des poules et des oeufs concernent les oeufs de poules plein air Oméga 3, les oeufs de poules plein air "Coque gourmand(r)", "La 1(r)", "Les Fermiers de nos Provinces(r)", "3", "2" et les oeufs de poule en cages "Maxi Coque(r)", "Les oeufs du pays de l'Hérault", "Les oeufs du pays de Provence" et "Les Géants du pays de Provence" essentiellement produits sur l'élevage de Montbazin ;

Attendu qu'il est établi, et non sérieusement contesté, que les poules de l'élevage de Montbazin étaient nourries notamment avec des tourteaux de soja identifiés comme étant génétiquement modifiés dans les cinq types d'aliments destinés respectivement aux poules cages, aux poules "1", aux poules "Oméga 3", aux poules "Label Rouge" et aux poules plein air, dans une proportion variant de 15,6 % à 26,8 % ;

Attendu que les attestations de deux fournisseurs d'alimentation animale (établissements B et établissements A) produites par X, Y, la SARL A et la SARL C n'ont été établies qu'en septembre 2009 et ne précisent nullement que pour la période visée par la prévention (de janvier à septembre 2005) leur alimentation n'aurait contenu aucun organisme génétiquement modifié alors qu'au contraire l'enquête de l'Administration et en particulier l'audition le 13 décembre 2005 de Mme G, P-DG des établissements A, a bien établi qu'en 2005 le soja entrant dans la composition des aliments était d'origine génétiquement modifiée ;

Attendu enfin que les documents d'achat de tourteaux de soja au cours de la période de janvier à septembre 2005 démontrent systématiquement un approvisionnement en graines d'organismes génétiquement modifiés, ce que les prévenus ne pouvaient ignorer ;

Attendu que si la réglementation relative aux organismes génétiquement modifiés (règlement CE 1829-2003) n'impose pas que figure la présence d'organismes génétiquement modifiés sur l'étiquetage des produits issus d'animaux nourris avec de tels organismes, en revanche toute mention relative au caractère "naturel" de l'oeuf ou de l'alimentation des poules ne saurait être compatible avec l'usage d'aliments ayant fait l'objet d'une manipulation génétique et qui, de ce fait, n'ont rien de naturel ;

Attendu en effet que seul peut être qualifié de naturel le produit issu directement de la nature et qui n'a subi aucune transformation de la main de l'homme ; que ce terme ne peut donc être employé que pour qualifier un produit que l'on trouve dans la nature ou aussi proche que possible de son milieu d'origine, non traité et ne comportant que des constituants normaux, sans additifs ni résidus de corps étrangers ;

Attendu qu'il en résulte que la présence d'ingrédients issus d'organismes génétiquement modifiés est incompatible avec ce que le consommateur est en droit d'attendre d'un aliment naturel ou d'un oeuf naturel ;

Attendu que la répétition systématique de cette référence au caractère naturel de l'alimentation et des oeufs ne saurait être assimilée à une simple erreur ou négligence mais ressort d'une volonté délibérée d'induire en erreur le consommateur moyen sur la qualité des oeufs ainsi mis en vente, que, contrairement à ce que soutiennent les prévenus, ces allégations mensongères de nature à induire en erreur sont bien pénalement qualifiables et constitutives du délit de publicité fausse ou de nature à induire en erreur prévue par l'article L. 121-1 du Code de la consommation réprimant tout moyen d'information destiné à permettre à un client potentiel de se faire une opinion sur la qualité du produit qui lui est proposé à la vente et comportant, sous quelque forme que ce soit, des allégations, indications ou présentations de nature à induire en erreur un consommateur moyen ;

Attendu enfin que, parallèlement au délit de publicité fausse ou de nature à induire en erreur, le fait d'avoir présenté à la vente, mis en vente et vendu à l'aide d'indications mensongères sur leur caractère prétendument naturel des produis ne pouvant en aucun cas se prévaloir de cette qualification constitue également le délit de tromperie sur les qualités substantielles de la marchandise prévu par l'article L. 213-1 dudit Code;

Attendu que c'est donc à juste titre que les premiers juges ont retenu la culpabilité de X, de Y, de la SARL A prise en la personne de son représentant légal et de la SARL C prise en la personne de son représentant légal à ce titre ;

Attendu dès lors que le jugement déféré sera confirmé en ce qu'il a retenu la culpabilité de X, de Y, de la SARL A prise en la personne de son représentant légal et de la SARL C prise en la personne de son représentant légal pour l'ensemble des faits qui leur sont reprochés et faisant l'objet du présent appel cantonné ;

Sur les peines

Attendu que compte tenu du grand nombre d'infractions constatées et établies aboutissant à commercialiser des produits alimentaires (en l'espèce des oeufs) non pas en fonction de la véritable qualité et origine de ces produits mais en fonction des besoins et de la demande des clients en retirant un intérêt économique évident, notamment par la vente d'oeufs bénéficiant frauduleusement d'un signe de qualité justifiant un prix nettement supérieur à celui d'oeufs non certifiés, il apparaît que les premiers juges ont prononcé à l'encontre de X, de Y, de la SARL A prise en la personne de son représentant légal et de la SARL C prise en la personne de son représentant légal des peines d'amendes délictuelles et contraventionnelles justifiées et proportionnées;

Attendu que ces faits, relatifs à la consommation alimentaire, touchent une large proportion de citoyens consommateurs qui ont le droit à une information quant à la répression de telles pratiques, qu'ainsi c'est également à juste titre que les premiers juges ont prononcé, à titre de peine complémentaire pour chacun des condamnés, la publication par extrait du jugement dans le journal "Midi Libre" à leurs frais ;

Attendu en conséquence que le jugement déféré sera également confirmé en ce qui concerne les peines prononcées ;

Attendu que la mesure de publication d'extraits de sa décision ordonnée par les premiers juges constitue une publicité suffisante de cette décision, qu'il n'y a dès lors pas lieu à y ajouter la peine complémentaire d'affichage du présent arrêt ;

Attendu enfin que compte tenu de l'âge de X (73 ans), il n'apparaît pas nécessaire d'y ajouter, à son encontre, une interdiction de gérer toute société ayant un rapport avec une activité avicole.

Par ces motifs : LA COUR, Statuant publiquement, contradictoirement, en matière correctionnelle, après en avoir délibéré conformément à la loi, En la forme : Déclare irrecevable, pour défaut d'intérêt, l'appel de la SARL B prise en la personne de son représentant légal. Reçoit les appels des autres prévenus dans les limites de l'effet dévolutif de l'appel cantonné des prévenus aux dispositions civiles et pénales du jugement déféré relatives aux seules infractions de vente sous le signe de qualité Label Rouge, d'utilisation du terme fermier, d'allégations relatives à la maîtrise de la qualité de nature à induire en erreur et de référence indue au caractère naturel de l'alimentation et des oeufs. Reçoit l'appel du Ministère public. Au fond : Sur la culpabilité, Déclare irrecevables les conclusions de Y, de X, de la SARL A prise en la personne de son représentant légal et de la SARL C prise en la personne de son représentant légal tendant à l'infirmation des chefs du dispositif du jugement déféré non expressément visés dans leur appel cantonné, à savoir le non-respect des règles assurant la traçabilité des produits, l'absence de marquage de certains oeufs, la vente sous la dénomination "Bio" de produits ne pouvant se prévaloir de cette dénomination et la référence indue et à l'utilisation abusive du logo "Visez Santé - Fondation des maladies du coeur". Confirme en toutes ses dispositions le jugement attaqué en ce qu'il a déclaré M. Y, Mme X, la SARL A prise en la personne de son représentant légal et la SARL C prise en la personne de son représentant légal, coupables des faits qui leur sont reprochés tels qu'expressément visés à leur appel cantonné. Sur les peines : Confirme en toutes ses dispositions le jugement attaqué. Dit n'y avoir lieu à prononcer d'autres peines complémentaires. Informe les condamnés par le présent arrêt que le montant de l'amende sera diminué de 20 %, sans que cette diminution puisse excéder 1 500 euro, s'il s'en acquitte dans le délai d'un mois à compter du prononcé du présent arrêt. Dit que les condamnés seront soumis au paiement du droit fixe d'un montant de cent vingt (120) euros prévu par l'article 1018 A du Code général des impôts. Informe les condamnés que le montant du droit fixe de procédure sera diminué de vingt pour cent (20 %) s'ils s'en acquittent dans le délai d'un mois à compter du prononcé du présent arrêt. Le tout conformément aux articles visés au jugement et au présent arrêt et aux articles 512 et suivants du Code de procédure pénale.