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Décisions

CA Aix-en-Provence, 8e ch. A, 8 mars 2012, n° 10-16308

AIX-EN-PROVENCE

Arrêt

Confirmation

PARTIES

Demandeur :

Automobiles du Littoral (SARL)

Défendeur :

Alix

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Schmitt

Conseillers :

Mmes Verdeaux, Durand

Avocats :

SCP Magnan, SCP Ermeneux-Champly-Levaique

CA Aix-en-Provence n° 10-16308

8 mars 2012

Monsieur Alix a acquis un véhicule d'occasion de marque Peugeot type cabriolet de près de 8 ans d'âge auprès de la SARL Automobiles du Littoral le 4 octobre 2008.

Se plaignant de fuites au niveau du toit escamotable constituant un vice caché rendant le véhicule impropre à sa destination, Monsieur Alix a fait assigner son vendeur par exploit du 13 octobre 2009 devant le Tribunal de commerce de Cannes en résolution de la vente et en restitution du prix de vente soit de la somme de 7 800 euro, outre celle de 5 000 euro à titre de dommages et intérêts et celle de 2 000 euro par application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Par jugement du 8 juillet 2010, le Tribunal a :

Vu les articles 1644 et 1645 du code civil,

Débouté Monsieur Alix de sa demande de résolution de la vente,

Condamné la SARL Automobiles du Littoral au paiement de la somme de 147,69 euro outre celle de 1 075,02 euro,

Débouté Monsieur Alix de ses autres demandes,

Ordonné l'exécution provisoire du jugement,

Condamné la défenderesse au paiement d'une somme de 2 000 euro par application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.

Les premiers juges ont retenu l'existence d'une garantie de 6 mois et que le vendeur a été informé dans ce délai des désordres révélés pendant cette période, que le garagiste ne démontrait pas qu'ils soient exclus de la garantie et l'ont condamné à payer le coût de la réparation du toit-ouvrant, ainsi que celui du remplacement d'un pneumatique.

Par acte du 6 septembre 2010 la SARL Automobiles du Littoral a interjeté appel du jugement.

Par conclusions récapitulatives déposées et notifiées le 5 janvier 2012 l'appelante demande à la Cour de :

Vu les articles 1134 et suivants et 1641 et suivants du code civil,

Vu les articles 4 et suivants du code de procédure civile,

La recevoir en son appel,

Constater que les premiers juges ont statué ultra petita en la condamnant à des sommes non demandées,

Constater qu'ils ont violé le principe du contradictoire,

Constater qu'ils ont fait application de la garantie contractuelle alors même qu'elle n'était pas invoquée par le demandeur et que sa mise en œuvre n'était pas possible pour le poste du toit escamotable non inclus dans la garantie,

Constater que le vendeur d'un véhicule d'occasion ne saurait être tenu de la garantie des défauts causés par la vétusté,

Constater que Monsieur Alix a revendu le véhicule le 28 septembre 2010 sans avoir changé les joints d'étanchéité en cause,

Constater qu'il abandonne sa demande de résolution en l'état de cette cession dont on ne connaît pas le prix,

Constater que les défauts reprochés ne constituent pas un vice caché en l'absence de preuve de l'antériorité du vice caché à la vente et de ce qu'ils rendent le véhicule impropre à sa destination,

Constater que l'éventuelle défaillance des joints serait une usure normale liée à l'âge du véhicule,

Constater que l'usure avancée du pneu avant droit ne peut constituer un vice caché dès lors que Monsieur Alix a continué à circuler parcourant 7 000 km après le contrôle technique ayant préconisé son changement,

Constater que Monsieur Alix n'a fait état d'un défaut que plusieurs mois après la vente alors que le véhicule avait parcouru 8 000 km,

Constater l'absence de preuve légalement admissible de l'existence d'un vice caché en l'état du seul rapport d'expertise amiable sollicité par Monsieur Alix,

Constater que le mauvais usage du véhicule par Monsieur Alix pourrait être à l'origine des défauts qu'il allègue,

Constater que la cause de ce défaut, sur un véhicule de 8 ans d'âge, serait en tout état de cause un vice apparent et par ailleurs réparable,

Constater que le vendeur n'est tenu d'aucune garantie des vices cachés pour un défaut causé par la vétusté,

Constater que de manière générale les griefs adressés résultent d'une usure normale et de la vétusté liée à l'âge,

Constater que les demandes présentées en cause d'appel se heurtent à l'irrecevabilité des demandes nouvelles en appel prohibée par le code de procédure civile,

En conséquence,

Annuler le jugement en ce qu'il a statué ultra petita,

Le confirmer en ce qu'il a débouté Monsieur Alix de sa demande visant à faire reconnaître l'existence d'un vice caché, en résolution de la vente et en paiement de dommages et intérêts en application de l'article 1645 du code civil,

Le réformer pour le surplus,

Débouter Monsieur Alix de ses demandes, fins et conclusions,

Le condamner au paiement d'une somme de 3 500 euro par application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens

Par conclusions récapitulatives déposées et notifiées le 9 janvier 2012, Monsieur Alix demande à la Cour de :

Confirmer le jugement attaqué en ce qu'il a condamné la SARL Automobiles du Littoral au paiement des sommes de 147,69 euro outre celle de 1 075,02 euro,

Le réformer en ce qu'il l'a débouté de sa demande de dommages et intérêts,

Débouter la SARL Automobiles du Littoral de ses demandes, fins et conclusions,

Le recevoir en son appel incident,

Condamner la société appelante au paiement de la somme de 5 000 euro à titre de dommages et intérêts ainsi que celle de 3 500 euro par application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens.

Ayant revendu le véhicule litigieux le 28 septembre 2010 il ne maintient plus sa demande en résolution de la vente mais demande réparation du préjudice subi et fait valoir avoir été victime du non-respect de ses obligations et devoirs de conseil et d'information par le garagiste professionnel.

Il conteste que les premiers juges aient statué ultra petita.

L'affaire a été clôturée en l'état le 26 janvier 2012.

MOTIFS

Sur la nullité du jugement :

Attendu que Monsieur Alix a demandé en première instance tant la résolution de la vente que la condamnation du vendeur du véhicule au paiement de la somme de 5 000 euro à titre de dommages et intérêts en réparation de divers préjudices qu'il détaillait dans ses écritures, consistant notamment en un préjudice de jouissance, des frais de réparation du toit-ouvrant et de changement de pneu ;

Attendu qu'il a fondé expressément ces demandes sur les articles 1641, 1644 et 1645 du code civil, donc sur l'existence des vices cachés ;

Attendu qu'il est constant que les premiers juges ont dit que l'existence d'un vice caché antérieur à la vente n'était pas démontrée, que le défaut d'étanchéité du toit ouvrant sur un véhicule de 8 ans d'âge était un défaut mineur ne rendant pas le véhicule impropre à sa destination et ont débouté Monsieur Alix de sa demande en résolution de la vente ;

Attendu qu'ils ont toutefois condamné la société Automobiles Littoral à lui payer les sommes de 147,69 euro outre celle de 1 075,02 euro à titre de dommages et intérêts ;

Attendu que si les premiers juges n'ont pas statué ultra petita dès lors que ces demandes leur avaient été présentées par Monsieur Alix qui avait détaillé les divers préjudices qu'il disait subir pour prononcer ces condamnations ils ont retenu l'existence d'une garantie contractuelle du vendeur de 6 mois et dit que celui-ci ne démontrait pas que ce défaut affectant le toit-ouvrant, soit exclu de cette garantie ;

Attendu qu'en statuant de la sorte alors que le demandeur avait expressément circonscrit ses demandes au vice caché et visé les seuls articles 1641, 1644 et 1645 du code civil à l'appui de ses demandes, et qu'il ne résulte pas de la rédaction du jugement que le moyen tiré de l'application de la garantie contractuelle du vendeur ait été dans le litige, les premiers juges ont méconnu le principe de la contradiction ;

Attendu que la violation du principe de la contradiction n'étant pas un excès de pouvoir, la nullité du jugement ne saurait être encourue ;

Attendu en conséquence que le jugement sera réformé en ce qu'il a condamné la société Automobiles du Littoral au paiement des sommes de 147,69 euro outre celle de 1 075,02 euro à titre de dommages et intérêts ;

Sur les vices cachés :

Attendu que l'acquéreur d'un bien qui invoque l'existence de vices cachés a le choix, en application de l'article 1644 du code civil, entre l'action rédhibitoire et l'action estimatoire ;

Attendu qu'ayant vendu le véhicule litigieux le 28 septembre 2010 à un prix non précisé, Monsieur Alix, qui a renoncé de ce fait à poursuivre la résolution de la vente, est recevable en cause d'appel à exercer la seule action estimatoire qui vise également à la réparation du préjudice résultant des vices cachés ;

Attendu qu'il est constant que Monsieur Alix a acquis le 14 octobre 2008 le véhicule Peugeot 206 d'occasion, dont la première mise en circulation datait du 24 avril 2001et dont le compteur affichait 45.800 kilomètres, au prix de 7 800 euro ;

Attendu que par courrier du 30 décembre 2008 l'assureur " protection juridique " de l'acquéreur a mis en jeu la responsabilité du vendeur au titre des vices cachés en raison de fuites constatées au niveau de la capote du toit-ouvrant entrainant des dégradations de la sellerie de l'habitacle ;

Attendu que l'accedit tenu par la société BCA Expertise le 18 mars 2009, au contradictoire de l'assureur de la société Automobiles du Littoral, a mis à évidence tant l'existence de ces infiltrations par temps de pluie, que leur cause, à savoir " une usure avancée des joints du toit " qui, secs, n'assuraient plus leur étanchéité ;

Attendu que ces défauts n'empêchent pas l'utilisation du véhicule par temps sec, comme le démontrent tant les 8.371 kilomètres parcourus par Monsieur Alix au 18 février 2009 depuis la vente, que les 18 565 km effectués au 4 juin 2009, soit 8 mois après ; (CF la facture de la société G.C.A Maurel datée du 4 juin 2009 versée aux débats par Monsieur Alix) ;

Attendu qu'ils ne rendent donc pas le véhicule impropre à sa destination mais en réduisent l'usage par temps de pluie ;

Attendu que l'état avancé d'usure des joints du toit escamotable pouvait être relevé par Monsieur Alix lors des vérifications élémentaires qu'il devait effectuer alors qu'il se portait acquéreur d'un véhicule de plus de 8 ans d'âge, comportant un toit ouvrant, et dont les conditions antérieures de stationnement étaient ignorées ;

Attendu qu'il s'ensuit que Monsieur Alix qui n'établit pas le caractère caché des défauts affectant les joints du véhicule, sera débouté de ses demandes en dommages et intérêts fondées sur les articles 1641, 1644 et 1645 du code civil ;

Sur la garantie contractuelle :

Attendu qu'en vertu de l'article 565 du code de procédure civile les prétentions ne sont pas nouvelles dès lors qu'elles tendent aux mêmes fins que celles soumises au premier juge, même si leur fondement juridique est différent ;

Attendu dès lors que Monsieur Alix est recevable à solliciter en cause d'appel la condamnation de la société Automobiles du Littoral au paiement des dommages intérêts déjà réclamés en première instance ;

Attendu en premier lieu que le vendeur avait accepté devant l'expert d'assurance de prendre en charge le remplacement du pneu avant droit présentant un état d'usure avancée ;

Attendu qu'il sera donc condamné au paiement de la somme de 147,69 euro, outre intérêts au taux légal à compter de l'assignation ;

Attendu en second lieu que la garantie contractuelle consentie par le vendeur, était une 'garantie BVMP agir international 6 mois', limitée à la boîte à vitesse, au moteur et au pont ;

Attendu qu'elle ne s'appliquait pas aux pannes affectant les autres organes, donc aux joints litigieux ;

Attendu que Monsieur Alix ne peut utilement s'en prévaloir pour solliciter la réparation du préjudice qu'il impute aux infiltrations survenues du fait de l'état d'usure des joints du toit escamotable ;

Attendu qu'en tout état de cause il convient de relever qu'il ne donne aucun renseignement sur le prix de cession du véhicule litigieux, ni sur le kilométrage affiché au compteur au 28 septembre 2010 et précise n'avoir pas changé le joint du toit avant la vente ;

Attendu qu'il ne justifie donc pas du quantum du préjudice dont il demande réparation ;

Attendu qu'il sera en conséquence débouté du surplus de ses demandes, fins et conclusions ;

Attendu qu'il n'y a pas lieu de faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

Attendu que chacune des parties succombant pour partie, chacune supportera la charge de ses dépens ;

Par ces motifs - LA COUR statuant par mise à disposition au greffe, contradictoirement, - Dit que les premiers juges n'ont pas statué ultra petita mais en méconnaissance du principe de la contradiction, Dit n'y avoir lieu à prononcer la nullité du jugement en l'absence d'excès de pouvoir, - Réforme en conséquence le jugement en ce qu'il a condamné la SARL Automobiles du Littoral au paiement de la somme de 147,69 euro outre celle de 1 075,02 euro, - Statuant à nouveau, - Ecarte la fin de non-recevoir tirée de l'irrecevabilité des demandes nouvelles en cause d'appel, - Condamne la SARL Automobiles du Littoral à payer à Monsieur Alix la somme de 147,69 euro, - Dit que les intérêts au taux légal seront dus à compter du 13 octobre 2009 date de l'assignation en application de l'article 1153-1 du code civil, - Déboute Monsieur Alix du surplus de ses demandes, fins et conclusions, - Confirme le jugement attaqué pour le surplus.