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Décisions

CA Paris, Pôle 5 ch. 10, 16 mai 2012, n° 10-22008

PARIS

Arrêt

PARTIES

Demandeur :

Couderc (Epoux)

Défendeur :

Jean Redele Melun (Sté), Groupe Diac Reca Assurances, London General Insurance Company Limited (Sté), Environnement Automobiles (Sté)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Jacomet

Conseillers :

Mme Saint-Schroeder, M. Schneider

Avocats :

SCP Blin, Me Langagne, Dejaille, SCP Bolling - Durand - Lallement, Me Bolling, Brizon, SCP Lagourgue - Olivier, SCP Menard - Scelle Millet, Stasi-Chatainx Associés

TGI Melun, du 21 sept. 2010

21 septembre 2010

La cour est saisie de l'appel déclaré le 15 novembre 2010 par Sylvain Couderc et Marie-Noëlle Couderc née David contre le jugement rendu le 21 septembre 2010 par le Tribunal de grande instance de Melun.

Le 28 juillet 2004 les époux Couderc ont acquis auprès de la SA Jean Redele Melun un véhicule de marque Renault, immatriculé 485DK77, mis en circulation depuis le 8 novembre 2002 le prix de 30 119 euro, a été réglé au moyen d'un prêt souscrit auprès de la Diac.

Les époux Couderc ont adhéré à la police d'assurance Présence proposée par l'organisme préteur.

En janvier 2009, ils ont confié leur véhicule, dont le moteur faisait un bruit inquiétant, à la SA Jean Redele Melun. Il a été constaté une avarie motrice nécessitant son remplacement.

Le véhicule a été examiné par un cabinet d'expertise.

L'assureur a refusé de prendre en charge la réparation, s'appuyant sur les conclusions de l'expert, mettant en évidence un défaut d'entretien, en l'espèce, un défaut de lubrification de l'arbre de transmission causé par un niveau insuffisant d'huile moteur.

Estimant ce défaut d'entretien imputable au garage Redele, les époux Couderc ont, par acte des 23 et 27 avril 2009, fait assigner devant le Tribunal de grande instance de Melun la SA Jean Redele Melun et la société Diac.

Le 5 octobre 2009, par conclusions, la London General Insurance Company Limited est volontairement intervenue à l'instance. Elle a indiqué que la Diac assure la diffusion des garanties qu'elle propose.

Par assignation du 24 novembre 2009, la SA Jean Redele Melun a appelé en garantie l'EURL Environnement Automobile, précisant que c'est ce garage qui a procédé à l'entretien du véhicule litigieux depuis mai 2006.

Les deux procédures ont été jointes.

Le 21 septembre 2010, par le jugement dont appel, le Tribunal de grande instance de Melun a :

-débouté les époux Couderc de leurs demandes,

-condamné les époux Couderc à payer à : la SA Jean Redele Melun, à la Diac et la London General Insurance Company Limited, chacune, la somme de 2 000 euro sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile,

-condamné la SA Jean Redele Melun à payer à l'EURL Environnement Automobile la somme de 2 000 euro sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile,

-condamné les époux Couderc aux entiers dépens.

Par dernières conclusions signifiées le 14 février 2012, M. Sylvain Couderc et Mme Marie-Noëlle Couderc née David, appelants, demandent à la cour de :

A titre principal :

-dire que la responsabilité de la concession Jean Redele Melun, de l'EURL Environnement Automobile, du groupe Diac et de la société London General est engagée au titre de l'inexécution contractuelle,

-condamner in solidum la société Jean Redele Melun, l'EURL Environnement Automobile, le groupe Diac et la société London General Insurance Company Limited, en raison de l'inexécution de leurs obligations dans le cadre du contrat de garantie Présence à remettre le véhicule en état de marche, en procédant à leur charge à un 'échange standard constructeur' du moteur et des pièces défectueuses,

-condamner in solidum la société Jean Redele Melun, l'EURL Environnement Automobile, le groupe Diac et la société London General Insurance Company Limited, à leur payer la somme de 5 370 euro et ce en réparation de tous les préjudices subis,

-condamner in solidum la concession Redele et le groupe Diac à leur payer la somme de 3 500 euro sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile,

-condamner in solidum la société Jean Redele Melun, l'EURL Environnement Automobile, le groupe Diac et la société London General Insurance Company Limited, aux entiers dépens.

A titre subsidiaire :

-dire que la responsabilité du concessionnaire Jean Redele Melun est engagée au titre de la garantie légale des vices cachés,

-prononcer la résolution de la vente du véhicule Renault Espace immatriculé 785 DKY 77,

-condamner la concession Redele à leur rembourser la somme de 30 119 euro avec intérêts au taux légal à compter du 18 février 2009, en contrepartie de la restitution du véhicule,

En cas de condamnation du garage Redele à la réparation du véhicule :

-condamner la société Jean Redele à leurs verser la somme de 11 670,70 euro au titre des réparations du véhicule,

Dans tous les cas :

-condamner la société Jean Redele à leur payer la somme de 5 370 euro à titre de dommages intérêts tous préjudices confondus,

-condamner la société Jean Redele à leur verser la somme de 3 500 euro au titre de l'article 700 du Code de procédure civile,

-condamner in solidum l'ensemble des défendeurs au entiers dépens.

Par dernières conclusions signifiées le 9 janvier 2012 la SAS Jean Redele Melun demande à la cour de :

-dire et juger les consorts Couderc recevables mais mal fondés en leur appel,

-les en débouter,

-confirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions à l'exception de la condamnation au titre de l'article 700 du Code de procédure civile mise à sa charge,

-débouter les époux Couderc de l'ensemble de leurs demandes,

-débouter tous contestants de l'ensemble de leurs demandes, plus amples ou contraires,

En tout état de cause :

Y ajoutant :

-condamner les époux Couderc à lui payer la somme de 2 000 euro au titre de l'article 700 du Code de procédure civile en cause d'appel,

-condamner M et Mme Couderc aux entiers dépens.

Par dernières conclusions signifiées le 14 juin 2011, la société Groupe Diac Reca Assurances et la société London General Insurance Company LTD demandent à la cour de :

-confirmer le jugement qui déboute M et Mme Couderc de l'ensemble de leurs demandes,

-condamner M et Mme Couderc à la somme de 2 500 euro au titre de l'article 700 du Code de procédure civile à leur profit,

-condamner M et Mme Couderc en tous dépens de première instance et d'appel.

L'Eurl Environnement Automobile qui s'est constituée, n'a pas conclu.

SUR CE

Considérant que Sylvain Couderc et Marie-Noëlle Couderc née David, appelants, prétendent que:

-aucune faute résultant d'un défaut d'entretien ne peut leur être reprochée; l'origine du désordre ne peut leur être imputée ; le véhicule a été entretenu normalement, conformément aux recommandations du constructeur Renault, la garantie à laquelle ils ont souscrit devait donc s'appliquer ;

-ils ne pouvaient avoir connaissance du manque d'huile dans le moteur puisque l'indicateur du tableau de bord ne le signalait pas ; l'avarie est survenue du fait de la défaillance du système électrique de niveau d'huile qui aurait dû alerter l'utilisateur du véhicule au moyen du voyant lumineux situé sur le tableau de bord ; or le niveau d'huile du moteur inférieur au minimum sur la jauge apparaissait correct sur l'indicateur du tableau de bord ; ils n'ont donc à aucun moment ajouté de l'huile moteur car ils n'avaient pas connaissance de l'insuffisance de la quantité d'huile ;

-ils ont procédé à l'entretien de leur véhicule tous les 30 000 kilomètres comme cela est préconisé par le constructeur ; ils ont fait procéder à la vérification du niveau d'huile et ont fait effectuer la vidange de l'huile moteur du véhicule tous les ans; l'utilisation normale de leur véhicule dans le cadre de leur vie quotidienne ne justifiait pas de plus amples précautions que celles auxquelles ils se sont soumis et seuls les garages Jean Redele et l'EURL Environnement Automobiles en tant que professionnels avertis ont procédé aux différents entretiens ; les désordres constatés résultent donc uniquement du fait de ces derniers ;

-la cause de la panne ne pouvant leur être imputée, la garantie Présence à laquelle ils ont souscrit devait donc s'appliquer et le groupe Diac qui a refusé de prendre en charge le remplacement du moteur a manqué à son obligation contractuelle ;

-ils ont subi un trouble en termes de préjudice de jouissance puisqu'ils n'ont pu utiliser pendant plusieurs mois le véhicule Espace, toujours immobilisé ; ce véhicule leur est nécessaire pour transporter cinq enfants tout au long de la semaine ; le garage Redele ne leur a prêté que pour 24 heures une Twingo ; au cours de cette période ils ont continué à payer la cotisation de leur assurance et ont dû louer une voiture ;

-le véhicule dont le moteur " claque " au niveau du bas moteur et chauffe, sans que cela puisse être imputé à la conduite ou à un défaut d'entretien, est affecté d'un vice caché qui le rend impropre à son usage et la responsabilité du concessionnaire Jean Redele Melun est engagée au titre de la garantie légale des vices cachés ;

Considérant que la SAS Jean Redele Melun réplique que :

-les dommages survenus au véhicule sont dus à une mauvaise lubrification du moteur résultant du niveau d'huile inférieur à la jauge et l'ajout d'huile auquel il a été procédé a été fait trop tardivement et n'a donc pas permis d'éviter les désordres ; la vérification du niveau d'huile relève de l'entretien du véhicule et ce défaut d'entretien est directement de la responsabilité des propriétaires M et Mme Couderc ;

-le dernier entretien du véhicule auquel elle a procédé date du 15 mai 2006 ; c'est l'EURL Environnement Automobile qui est intervenue dans le dernier état ; les consorts Couderc ont donc mal initié la procédure et doivent en supporter les conséquences ;

-la voiture objet du litige est un véhicule d'occasion ; ses acquéreurs devaient supporter l'aléa normal et les inconvénients liés à l'utilisation d'un tel véhicule d'occasion; les époux Couderc n'apportent pas la preuve de l'existence d'un vice caché, ni de l'impropriété du véhicule à son usage, dés lors qu'ils ont parcouru 131 802 km à son volant et que sa valeur vénale n'est plus que de 9 600 euro ;

Considérant que la société Groupe Diac Reca Assurances et la société London General Insurance Company LTD répliquent que :

-elles étaient parfaitement fondées à refuser leur garantie au titre du contrat Garantie Présence et ne sauraient se voir reprocher une inexécution de leurs obligations contractuelles ;

-la détérioration du moteur du véhicule, dont M et Mme Couderc sollicitent la prise en charge, résulte sans contestation possible d'un défaut d'entretien consistant en une quantité insuffisante de l'huile dans le moteur ayant provoqué une usure anormale de certaines pièces du moteur, sans qu'un rajout d'huile postérieurement ait pu empêcher une détérioration de ce dernier ;

-le véhicule assuré n'a pas fait l'objet d'un entretien conforme aux recommandations du constructeur Renault telles qu'elles figurent dans le guide d'entretien remis aux époux Couderc ; ce guide insiste notamment sur la nécessité de contrôler régulièrement le niveau d'huile à la jauge plutôt qu'au niveau du tableau de bord ; il attire par ailleurs l'attention sur la nécessité de réaliser une vidange d'huile moteur une fois par an, en cas d'utilisation du véhicule dans des conditions difficiles, à savoir une utilisation à majorité urbaine ou pour des petits trajets répétés ; c'était précisément l'utilisation faite de leur véhicule par les époux Couderc qui n'établissent pas avoir respecté les préconisations du constructeur, ne produisant qu'une facture d'entretien de 2007 ;

-les clauses du contrat de la Garantie Présence sont claires ; elles ne s'appliquent pas dés lors que le véhicule n'a pas été correctement entretenu sans qu'il y ait lieu de distinguer si l'auteur du défaut d'entretien est le propriétaire du véhicule, le professionnel chargé de son entretien ou un tiers ;

-le contrat d'assurance Garantie Présence n'ayant pas pour objet de se substituer à la garantie légale des vices cachés, si la responsabilité du garage Jean Redele était retenue à ce titre, elles devraient être mises hors de cause ;

Considérant qu'il n'est pas contredit que la panne de moteur est survenue à la suite d'une mauvaise lubrification du moteur résultant d'un niveau d'huile inférieur au minimum de la jauge et que l'ajout d'huile fait tardivement n'a pas permis d'éviter les désordres, ;

Considérant que le véhicule a été soumis normalement aux révisions préconisées par le constructeur tous les 30 000 kilomètres ce qui conduisait à vérifier le niveau d'huile et à le compléter éventuellement, que lors du dernier entretien, le 19 août 2008 l'EURL Environnement Automobile a procédé à un remplacement d'huile et des filtres, que la panne n'est survenue qu'en janvier 2009, qu'il résulte de ces circonstances et de ces dates, que cette société démontre son absence de faute lors de son intervention ;

Considérant que la société Jean Redele Melun dont la dernière intervention remonte en mai 2006 démontre également son absence de faute, la date de cette dernière intervention excluant que le manque d'huile puisse lui être imputée ;

Considérant que le tribunal a exactement relevé que la vérification du niveau d'huile ressort de l'entretien du véhicule auquel est astreint le conducteur ce que rappelle le guide du constructeur qui détaille les précautions à prendre et les recommandations à suivre, en procédant à un contrôle régulier du niveau entre deux révisions et en faisant l'appoint si nécessaire, qu'il importe peu dès lors que l'indicateur du tableau de bord n'ait pas signalé ce manque d'huile puisque le conducteur devait effectuer ce contrôle effectif et manuel au moyen de la jauge installée dans le réservoir;

Considérant que ce contrôle effectif s'imposait d'autant plus s'agissant d'un véhicule d'occasion mis en circulation depuis sept ans et ayant parcouru lors de la dernière révision 122 386 kilomètres ;

Considérant que c'est encore avec raison que le tribunal a indiqué que la responsabilité de la société Jean Redele Melun qui avait vendu le véhicule ne pouvait plus être recherchée à raison d'un vice caché,

Considérant en toute occurrence, qu'à raison de la seule cause de la panne du moteur relevée qui se rattache à un défaut d'entretien, un tel vice n'a pas été caractérisé;

Considérant que le défaut d'entretien étant imputable aux seuls époux Couderc, le tribunal a avec raison écarté le bénéfice de la garantie souscrite auprès de l'assureur en retenant que, selon la police, celle-ci ne s'applique pas 'aux dommages lorsque le véhicule n'a pas été entretenu selon les recommandations figurant au carnet de garantie ou d'entretien et que les époux Couderc s'étaient dispensés des vérifications élémentaires rappelées par le carnet d'entretien ;

Considérant que par ces motifs le jugement est confirmé ;

Considérant que l'équité commande de condamner les époux Couderc à payer à la société Jean Redele Melun d'une part, à la société Groupe Diac Reca Assurances et à la société London General Insurances Company LTD prises ensemble, d'autre part, chacune une somme de 2 000 euro au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ;

Considérant que les époux Couderc sont condamnés aux dépens d'appel, le jugement étant confirmé en ses dispositions relatives aux dépens.

Par ces motifs, LA COUR, Confirme le jugement, Y ajoutant, Condamne les époux Couderc à payer à la société Jean Redele Melun d'une part, à la société Groupe Diac Reca Assurances et à la société London General Insurances Company LTD prises ensemble, d'autre part, chacune une somme de 2 000 euro au titre de l'article 700 du Code de procédure civile, Condamne les époux Couderc aux dépens d'appel qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile.