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Décisions

CA Bordeaux, 2e ch. civ., 25 janvier 2012, n° 10-04696

BORDEAUX

Arrêt

PARTIES

Demandeur :

FJB Construction (Sarl)

Défendeur :

Sovia (SAS)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Bancal

Conseillers :

Mmes Rouger, Faure

Avoués :

SCP Labory - Moussie - Andouard, SCP Puybaraud, SCP Fournier, SCP Rivel - Combeaud

Avocats :

Me Maysounabe, Lacaze, Demange, Delavallade

T. com. Bordeaux, du 23 juil. 2010

23 juillet 2010

Le 15 novembre 2006 la société FJB Construction a signé avec la société Sovia un bon de commande portant sur l'achat d'un camion de marque Nissan modèle Atleon équipé d'une benne avec bras articulé, neuf, pour un prix de 40 000 euro HT.

Le véhicule a été livré et réglé le 2 février 2007.

Diverses pannes ont affecté le véhicule dés le 7 février 2007.

Par acte du 4 avril 2007 la société FJB Construction a assigné la société Sovia devant le Tribunal de commerce de Bordeaux aux fins de voir prononcer à titre principal la résolution de la vente outre dommages et intérêts, et, à titre subsidiaire de voir ordonner une expertise.

Par acte du 24 juillet 2007 la société Sovia a appelé en intervention forcée et garantie la société Nissan France.

La SAS Nissan West Europe est quant à elle intervenue volontairement à l'instance, venant aux droits et obligations de la société Nissan France.

Par jugement avant dire droit du 20 novembre 2007, le Tribunal de commerce de Bordeaux a ordonné une expertise confiée à M. Rodiere.

Cette mesure d'instruction a été étendue d'une part à la société Nissan West Europe le 17 juin 2008, d'autre part à la société Bennes Dalby le 18 septembre 2008 et enfin à la société nouvelle Bennes Calvet par ordonnance de référé du 17 février 2009.

L'expert a déposé son rapport définitif le 23 juin 2009.

Après expertise la société FJB Construction par conclusions du 4 janvier 2010 a demandé au tribunal de constater l'existence de vices cachés ayant rendu le véhicule impropre à son utilisation pendant plus de deux ans, de dire que la garantie du constructeur sera prolongée et prendra effet à compter du 24 avril 2009, de condamner la société Sovia à lui payer la somme de 32 000 euro correspondant à la perte de valeur du véhicule ainsi que diverses indemnités au titre du préjudice de jouissance et du préjudice financier.

Par acte du 6 janvier 2010 la société Sovia a appelé en intervention forcée et garantie la société nouvelle Bennes Calvet, fournisseur du caisson.

Par jugement du 28 juin 2010, le Tribunal de commerce de Bordeaux a ordonné la jonction des instances, débouté la société FJB Constructions de l'ensemble de ses demandes et l'a condamnée à payer à la société Sovia la somme de 1 500 euro sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.

La Sarl FJB Construction a interjeté appel de cette décision le 23 juillet 2010, intimant uniquement la SAS Sovia.

Par actes des 6 et 7 juin 2011 la SAS Sovia a délivré acte d'appel provoqué et assigné devant la Cour tant la SAS Nissan West Europe que la Sarl société Nouvelle Bennes Calvet en garantie.

Vu les dernières écritures signifiées le 14 octobre 2011 par la Sarl FJB Construction, appelante, aux termes desquelles elle demande à la Cour de la juger bien fondée en son appel et de :

- constater l'existence de vices cachés ayant rendu le véhicule impropre à son utilisation pendant plus de deux ans

- dire que la garantie du constructeur sera prolongée et prendra effet à compter du 24 avril 2009 date de sa reprise

- condamner la société Sovia à lui payer :

*la somme de 32 000 euro correspondant à la perte de valeur du véhicule

*la somme de 40 145,07 euro au titre du préjudice de jouissance matérialisé par les frais de location de camion pour la période du 19 mars 2007 au 31 mars 2009

*la somme de 4 423,16 euro en réparation du préjudice financier

*la somme de 120 euro au titre de l'achat des cartes d'entreprises selon le règlement du ministère des transports

*la somme de 4 000 euro sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile

- de condamner la société Sovia aux entiers dépens, en ce compris les frais d'expertise, avec distraction au profit de son avoué constitué,

Vu les dernières écritures signifiées le 19 mai 2011, par la société Sud-Ouest Véhicules Industriels Automobile (Sovia), intimée, aux termes desquelles elle sollicite :

A titre principal, la confirmation du jugement entrepris et le débouté de l'appel,

A titre subsidiaire, le débouté des demandes d'indemnisation

A titre infiniment subsidiaire, la condamnation de la société Nissan West Europe à la relever indemne de toutes condamnations prononcée à son encontre et la condamnation de la société Bennes Calvet à la relever de toute condamnation au titre du préjudice de jouissance pour la période postérieure au 29 janvier 2009

En tout état de cause, la condamnation de la société FJB Construction à lui payer une somme de 3 000 euro sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile ainsi que sa condamnation aux entiers dépens avec distraction au profit de son avoué constitué,

Vu les dernières écritures signifiées le 21 juillet 2011 par la société Nissan West Europe, intimée, aux termes desquelles elle sollicite à titre principal, la confirmation du jugement entrepris en ce qu'il a :

- considéré que les désordres mineurs, réparables et réparés, survenus sur le véhicule en cause ne constituaient pas des défauts cachés de nature à le rendre impropre à son utilisation

- considéré que la société FJB Construction s'est créé un préjudice à elle-même

- considéré que l'ensemble des autres prétendus préjudices ne présentaient aucun lien de causalité direct et immédiat avec les désordres allégués

et que la cour, statuant à nouveau :

- déclare irrecevable l'action de la société FJB Construction en ce qu'elle n'est pas prévue dans le strict cadre de la garantie légale des vices cachés des articles 1641 et suivants du Code civil

- déboute la société FJB Construction de l'ensemble de ses demandes

- déboute la société Sovia de l'ensemble de ses demandes dirigées à son encontre

A titre subsidiaire, que la cour:

- considère que le nouveau fondement de l'obligation de délivrance d'une chose conforme invoqué par la société Sovia à son encontre est inopérant en l'espèce, le véhicule livré correspondant contractuellement en tous points au véhicule commandé

- déboute la société FJB ConstructionS de l'ensemble de ses demandes et par voie de conséquence déboute la société Sovia ou de toute autre partie de toute demande formée à son encontre

- considère que les conditions tirées de la garantie des vices cachés ne sont pas réunies en l'espèce

- déclare mal fondée la société FJB Construction, la déboute de toutes ses prétentions , et par voie de conséquence déboute la société Sovia ou toute autre partie de toute prétention à son encontre

A titre infiniment subsidiaire, que la cour:

- juge que la société FJB Construction ne rapporte pas la preuve de la réalité de préjudices invoqués et/ou qu'il n'existe aucun lien de causalité direct et immédiat entre l'immobilisation du véhicule et les divers postes de préjudices invoqués

- juge que la société FJB Construction est seule responsable des préjudices qu'elle invoque

- déboute la société FJB Construction de l'ensemble de ses demandes et par voie de conséquence déboute la société Sovia ou toute autre partie de toute prétention à son encontre

En toute hypothèse, que la cour condamne tout succombant à lui payer la somme de 4 000 euro au titre des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens avec distraction au profit de son avoué constitué,

Vu les dernières écritures signifiées le 1er août 2011 par la Sarl Société Nouvelle Bennes Calvet, intimée, aux termes desquelles elle sollicite que la cour :

A titre principal, confirme le jugement entrepris, déboute la société FJB Construction de toutes ses demandes et déboute la société Sovia de son action en garantie

A titre subsidiaire, constate que la société FJB Construction s'est elle-même causé le préjudice de jouissance qu'elle allègue en refusant de reprendre possession de son véhicule le 29 mars 2007 et la déboute de sa demande à ce titre

A titre infiniment subsidiaire, juge que seul le préjudice de jouissance né à compter du 29 janvier 2009 pourrait lui être imputable et qu'elle ne peut être tenue de relever indemne la société Sovia qu'au titre de ce préjudice

En tout état de cause, condamne la société FJB Construction et la société Sovia aux dépens avec distraction au profit de son avoué constitué et condamne la société JFB Construction à lui payer la somme de 3 000 euro sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile,

Vu l'ordonnance de clôture intervenue le 2 novembre 2011,

Sur ce, LA COUR :

1°/ Sur la recevabilité de l'action en garantie des vices cachés de la société JFB Construction

Aux termes de l'article 1644 du Code civil, l'acquéreur a le choix dans le cas des articles 1641 et 1643 de rendre la chose et de se faire restituer le prix, ou de garder la chose et de se faire rendre une partie du prix. Il peut prétendre en outre, en application de l'article 1645 du même Code à l'octroi de dommages et intérêts complémentaires si l'acquéreur connaissait ou est présumé connaître les vices affectant la chose.

L'acheteur qui agit en garantie contre son vendeur en raison des vices cachés de la chose vendue, dispose à son choix des deux actions, rédhibitoire et estimatoire et peut, après avoir intenté l'une d'elles, exercer l'autre tant qu'il n'a pas été statué sur la demande par décision passée en force de chose jugée ou que l'acquéreur n'a pas acquiescé.

En l'espèce la société JFB Construction a opté dans l'assignation délivrée le 4 avril 2007 pour l'action en résolution de la vente outre dommages et intérêts.

Au regard de l'évolution du litige, des suites des réparations réalisées en cours d'instance ayant mis fin à l'impropriété à destination invoquée, elle a, par conclusions additionnelles après expertise, renoncé à demander la résolution de la vente et maintenu uniquement une demande de dommages et intérêts.

Aucune irrecevabilité de l'action en garantie diligentée sur le fondement des articles 1641 et suivants du Code civil ne peut dés lors résulter de l'adaptation des demandes par conclusions additionnelles au regard de l'exécution en nature constatée en cours d'instance.

2°/ Sur l'existence de vices cachés rendant le véhicule acquis impropre à l'usage auquel il était destiné

Engagée sur le fondement des articles 1641 et suivants du Code civil, le bien fondé de la demande subsistante de dommages et intérêts reste subordonné aux règles spéciales de la garantie du vendeur pour vices cachés.

Il appartient dés lors à la société JFB Construction de justifier que l'ensemble " tracteur-bras articulé-benne " acquis de la SAS Sovia le 2 février 2007 était affecté au jour de la vente de vices cachés rendant le véhicule impropre à l'usage auquel il était destiné ou diminuant tellement cet usage qu'elle ne l'aurait pas acquis ou n'en aurait donné qu'un moindre prix si elle les avait connus.

Il résulte des explications des parties, du rapport d'expertise et des compte-rendu d'intervention versés aux débats que l'ensemble routier a fait l'objet très rapidement de divers dysfonctionnements :

- un voyant d'alerte s'est allumé sur le tableau de bord très rapidement après la mise en circulation, signalé par téléphone à la SAS Sovia

- le 7 février 2007, le véhicule a calé et n'a plus pu démarrer ; il a été transporté par dépanneuse dans les locaux de la SAS Sovia, laquelle est intervenue en remplaçant une valve EGR, le véhicule ayant été restitué le jour même à la société JFB Construction

- le 12 février 2007 une panne est intervenue sur le bras articulé Dalby servant à lever la benne

- le 21 février la valve EGR était de nouveau remplacée comme hors service

- le 1er mars 2007, le camion a de nouveau rencontré un problème de démarrage après arrêt du camion sur un chantier ; dés le 2 mars 2007 cette nouvelle panne a été signalée par la société JBF Construction ainsi que d'autres dysfonctionnements

- le 7 mars 2007, suite à un problème de boîte de vitesse le véhicule était pris en charge par dépanneuse et la SAS Sovia dans le cadre de la garantie contractuelle procédait à un changement de la colonne de direction, au réglage d'une gâche de porte, au serrage des bras de rétroviseurs, à la fixation d'essuie-glaces et au remplacement d'un câble BV

Le 23 mars 2007 la société JFB Construction rappelait à la société Sovia que le véhicule était toujours dans ses ateliers et qu'elle n'avait aucune nouvelle des interventions réalisées.

Le 26 mars 2007 la SAS Sovia répondait qu'il avait été satisfait au remplacement de la colonne de direction, des câbles du levier de vitesse et aux divers serrages nécessaires, informant la société JFB Construction qu'elle pouvait récupérer le véhicule. Elle précisait néanmoins que le problème du démarrage n'était pas réglé et qu'une action de rappel allait être effectuée par Nissan.

La société JFB Construction répondait le 29 mars 2007 qu'elle n'irait pas chercher le véhicule dès lors que le problème du démarrage n'était pas réglé, afin de ne pas prendre le risque d'une nouvelle panne désorganisant ses plannings d'interventions sur les chantiers.

Elle assignait le 4 avril 2007 la SAS Sovia en résolution de la vente et dommages et intérêts et subsidiairement aux fins d'expertise. Elle invoquait :

- une anomalie non identifiée entraînant l'affichage d'une alerte sur le tableau de bord

- un dysfonctionnement du bras articulé

- des pannes répétées lors du démarrage du véhicule

- du jeu dans la colonne de direction

- des portes fermant mal

- un essuie-glace sortant du support

- l'absence de roue de secours dans le véhicule

- une panne portant sur le levier de vitesse et le blocage de la direction

Le 6 avril 2007, soit après l'assignation, dans le cadre de l'action de rappel de Nissan, le boîtier intelligent (système anti-démarrage) était remplacé par la SAS Sovia.

Le véhicule était ensuite passé aux Mines à l'initiative de la SAS Sovia le 14 mai 2007.

Il résulte des différents dysfonctionnements, avérés quasiment immédiatement après la mise en circulation de l'ensemble routier acquis neuf, que ce dernier était au jour même de la vente affecté de vices non décelables pour l'acquéreur, le problème affectant le système de démarrage, la colonne de direction et la boîte de vitesse constituant des vices rendant le véhicule impropre à l'usage auquel il était destiné, à savoir des déplacements routiers avec transport de matériaux sur des chantiers de construction, la société JFB Construction étant une entreprise générale de bâtiment, puisque de manière répétée depuis l'acquisition il calait à l'arrivée sur les chantiers et ne pouvait redémarrer.

Il est certain en outre qu'à la date de la délivrance de l'assignation le problème du démarrage du véhicule n'était pas réglé, l'intervention nécessaire n'ayant été réalisée que le 6 avril.

Il est aussi certain que la SAS Sovia n'avait pas précisé dans son courrier du 26 mars 2007 les modalités et délais de la campagne de rappel Nissan concernant le problème de démarrage.

L'acquéreur se trouvait donc fondé en application des dispositions des articles 1641 et suivants du Code civil à agir en résolution de la vente contre son vendeur professionnel, lequel malgré quatre problèmes de démarrage signalés et deux transports par dépanneuse dans ses locaux en à peine un mois de mise en circulation de ce véhicule neuf n'avait pas été en mesure de régler la difficulté.

Il n'est nullement justifié par la SAS Sovia qu'après l'intervention du 6 avril 2007 réglant le problème du démarrage elle ait informé la société JFB Construction de sa réalisation.

Le 25 juillet 2007 la SAS Sovia a adressé à la société JFB Construction une mise en demeure de récupérer le véhicule dans les plus brefs délais, lui rappelant son précédent courrier du 26 mars, sans toutefois lui préciser que le problème du démarrage était réglé.

Et il aura fallu attendre l'expertise judiciaire, alors que la société JBF Construction avait sollicité une expertise amiable dans les locaux de la SA Sovia dés le 2 mars 2007 (pièce 6), pour qu'il soit constaté le 11 juillet 2008 que les problèmes mécaniques étaient réglés et que le véhicule après essais sur route fonctionnait normalement.

Un autre vice affectant le véhicule a été invoqué par la société JFB Construction: celui de la benne et de la difficulté de son levage.

Il a été rappelé ci-dessus que dés le 12 février 2007, a été signalé un problème relatif au bras articulé destiné au levage de la benne.

Dans ses conclusions l'expert judiciaire affirme que suite à cette panne le bras articulé a été réparé par les techniciens de Dalby.

Lors de la première réunion d'expertise du 6 février 2008 M. De Brito représentant la société JFB Construction a pourtant indiqué que le technicien de Dalby avait réparé la connectique mais que lorsque la benne est chargée à plus de 1/m3 le bras articulé ne se levait pas.

L'assignation du 4 avril 2007 précisait expressément que le technicien de Dalby était intervenu mais n'avait pu réparer le véhicule et mentionnait le dysfonctionnement du bras articulé dans les vices invoqués à l'appui de la demande en résolution et subsidiairement d'expertise.

Il ne peut donc être soutenu que le problème de la benne n'ait été invoqué par la société JFB Construction que tardivement, le 11 juillet 2008, alors que l'expert venait de constater le parfait fonctionnement mécanique du véhicule.

L'expert s'est d'abord concentré sur les problèmes mécaniques et c'est le 11 juillet 2008 (3ème réunion d'expertise) que M. De Brito lui a rappelé que le problème du bennage, déjà signalé lors de la première réunion d'expertise, n'était pas réglé. Après plusieurs essais, l'expert a en effet constaté qu'à pleine charge, avec deux gueuzes d'environ 1,2 t chacun, il était impossible de lever la benne, l'intervention de la société Dalby, puis de la société Bennes Calvet ayant été dés lors sollicitée par le conseil de la SAS Sovia.

Il ressort de l'expertise d'une part que l'expert a constaté un léger désaxage du bras de levage Dalby, que par ailleurs après mesurage de la longueur des rails de la benne, il s'est avéré que celle-ci ressortait à 1062 mm et se trouvait donc au-dessus de la norme 1060 mm de la largeur des voies fixées sur le châssis, cette différence expliquant l'impossibilité de lever la benne en charge maximum, le caisson venant s'encastrer dans les voies.

Le 15 avril 2009, en présence de la société Nouvelle Bennes Calvet, appelée à l'expertise, l'expert a proposé, en accord avec les parties, de procéder à l'ajustement du caisson de la benne au moyen d'une meule afin d'enlever l'épaisseur nécessaire pour retrouver le bon écartement de la norme Dalby soit 1 060 mm. Après réalisation de ce meulage, les essais ont démontré que le camion était en état de fonctionner, le bras de levage assurant désormais son office, le léger désaxage constaté n'étant pas à l'origine de l'impossibilité de lever la benne à pleine charge.

Dans sa note de synthèse du 16 avril 2009 l'expert précisait que d'importantes traces de frottement sur les guides témoignaient des difficultés rencontrées. Il a aussi précisé dans son rapport qu'il n'avait pas été réalisé d'essai à pleine charge avant la livraison du véhicule par la SAS Sovia à la société JFB Construction.

Suite à ces opérations de meulage et de vérification du bon fonctionnement du système de levage de la benne à pleine charge, la société JFB Construction a repris possession du véhicule le 29 avril 2009.

Il résulte de l'ensemble de ces éléments:

- que dès le 12 février 2007 le camion-benne acquis par la société JFB Construction auprès de la SA Sovia a rencontré des difficultés au niveau du bras de levage,

-que le dysfonctionnement du bras de levage a été expressément invoqué dans l'acte introductif d'instance,

-qu'il a été constaté par l'expert que le bras articulé était désaxé et qu'il ne pouvait lever la benne à pleine charge

- mais que la cause de cette impossibilité n'a été suspectée en cours d'expertise que lors de la réunion du 2 décembre 2008 et vérifiée et réglée en présence de la société Bennes Calvet lors de la réunion du 15 avril 2009.

L'inadéquation des rails de la benne Calvet au regard de la norme définie (1 060), existante dés la livraison de l'ensemble camion-benne-bras articulé par la société Sovia, caractérise donc un vice caché au jour de la vente rendant le véhicule impropre à sa destination à pleine charge, caractéristique indispensable à l'usage d'un camion benne avec bras articulé destiné au transport de matériaux de construction et donc à leur chargement et déchargement et disposant d'un équipement lui autorisant un chargement de 2 575 kg (certificat de carrossage pièce 12).

Sur ce point aussi la garantie du vendeur, la SAS Sovia qui a livré le véhicule tout monté, était donc susceptible d'être recherchée par l'acquéreur sur le fondement des articles 1641 et suivants du Code civil tels que visés à l'acte introductif d'instance.

Et le fait que tous les vices affectant le véhicule vendu aient été réparés après l'assignation puis en cours d'expertise, caractérisant une réparation en nature justifiant l'absence de résolution, ne prive pas l'acquéreur de solliciter du vendeur professionnel des dommages et intérêts pour le préjudice dont il justifiera de l'existence et du lien de causalité direct avec les vices cachés ayant affectés le véhicule au jour de la vente.

3°/ Sur les préjudices invoqués

La société JFB Constructions ne peut prétendre à se voir indemniser d'une perte de valeur du véhicule au regard de l'évolution de sa cote, laquelle est inhérente à sa mise en circulation et non aux vices cachés l'ayant affecté.

En revanche, il résulte des éléments ci-dessus, que le véhicule n'a été constaté comme étant mécaniquement en état de rouler que le 11 juillet 2008 et en état de remplir son office de transport de matériaux à pleine charge après résolution du problème du levage de la benne, en présence de toutes les parties intéressées que le 16 avril 2009.

La société JFB Construction s'est donc trouvée dans l'impossibilité d'utiliser le véhicule acquis neuf conformément à l'usage auquel il était destiné et a du, pour compenser la privation de ce véhicule dans le cadre de ses chantiers, recourir à la location d'un véhicule de remplacement ,à savoir un camion benne de 3T5, représentant, selon factures acquittées versées aux débats du 19 mars 2007 au 1/04/2009, la somme totale de 40 145,07 euro

Il convient en conséquence, infirmant le jugement entrepris, de condamner la SAS Sovia à payer à la société JFB Construction la somme de 40 145,07 euro à titre de dommages et intérêts en réparation de ce préjudice en lien direct avec les vices ayant affectés le véhicule vendu, sur le fondement de l'article 1645 du Code civil, et ce, outre intérêts au taux légal à compter du présent arrêt en application des dispositions de l'article 1153-1 du Code civil.

Il n'est en revanche nullement justifié que l'achat de deux cartes entreprise et le droit d'usage de carte d'entreprise soit en lien direct avec les vices cachés ayant affecté le véhicule vendu.

Rien ne justifie par ailleurs la prolongation d'une garantie constructeur qui a rempli son office par les différentes opérations prises en charge jusqu'à son échéance contractuelle.

Enfin, le prêt correspondant au financement du camion dont la société JFB Construction est propriétaire et en possession ne peut qu'être à la charge de l'acquéreur.

Le surplus des demandes doit en conséquence être rejeté.

4°/ Sur les appels en garantie

a) A l'encontre de la société Nissan West Europe

La SAS Sovia a acheté le tracteur Atleon auprès de la société Nissan France qu'elle a appelé en garantie.

La Société Nissan West Europe est intervenue volontairement en première instance venant aux droits et obligations de la société Nissan France.

Le vendeur de la société Nissan a systématiquement répondu dans le cadre de la garantie contractuelle aux sollicitations de la SAs Sovia quant aux dysfonctionnements mécaniques du véhicule et pour la dernière fois le 6 avril 2007, le changement du boîtier intelligent dans le cadre de la campagne de rappel ayant mis un terme aux problèmes mécaniques rencontrés par le véhicule depuis son acquisition.

La société Nissan West Europe est étrangère tant aux rapports qui ont pu être entretenus ou non entretenus entre la SAS Sovia et son propre acquéreur après cette intervention, n'ayant été appelée en cause qu'en juillet 2007, qu'au problème de la benne dont elle n'est ni le fournisseur, ni le vendeur et qui a retardé l'issue du litige.

En conséquence, elle ne peut être condamnée à relever et garantir la société Sovia de la condamnation prononcée ci-dessus à son encontre.

b) A l'encontre de la société Nouvelle Bennes Calvet

La société Nouvelle Bennes Calvet n'a fait que vendre à la SAS Sovia la benne laquelle a été fixée par cette dernière sur le châssis et livrée avec l'ensemble camion-benne-bras articulé sans essais préalables à pleine charge.

La société Nouvelle Bennes Calvet n'a été informée d'une difficulté sur la benne vendue qu'à l'occasion de son appel en cause en cours d'expertise selon acte du 29 janvier 2009 et ordonnance d'extension de la mesure d'instruction du 17 février 2009. Elle a été convoquée pour la première fois à l'expertise pour le 15 avril 2009, date à laquelle le problème a été réglé.

Elle ne peut donc être amenée à supporter les conséquences de la carence de la SAS Sovia dans la gestion et l'identification des dysfonctionnements signalés dès le début de l'utilisation du véhicule par la société JFB Construction, seule à l'origine du préjudice financier résultant de la location d'un véhicule de remplacement indemnisé ci-dessus.

La SAS Sovia doit donc être déboutée de l'appel en garantie diligenté contre la société Nouvelle Bennes Calvet.

5°/ Sur les dépens et les frais irrépétibles

La société Sovia qui succombe supportera les dépens de première instance, en ce compris les frais d'expertise ainsi que les dépens d'appel.

Elle se trouve redevable de ce fait envers la société JFB Construction d'une indemnité sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile dans les conditions définies au dispositif de la présente décision.

En revanche, l'équité ne commande pas d'allouer aux sociétés Nissan West Europe et Nouvelle Bennes Calvet une indemnité sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile.

Par ces motifs, LA COUR, après en avoir délibéré conformément à la loi, statuant publiquement et contradictoirement : Infirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions, Statuant à nouveau et y ajoutant, Déclare recevable la société JFB Construction en son action en garantie fondée sur les articles 1641 et suivants du Code civil ; Condamne la société Sovia à payer à la société JFB Construction, avec intérêts au taux légal à compter du présent arrêt, la somme de quarante mille cent quarante cinq Euros et sept centimes (40 145,07 euro) à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice subi des suites des vices cachés ayant affecté le véhicule objet de la vente du 2 février 2007 ; Déboute la société JFB Construction du surplus de ses demandes ; Déboute la société Sovia de ses appels en garantie à l'encontre de la société Nissan West Europe et de la société Nouvelle Bennes Calvet ; Condamne la société Sovia à payer à la société JFB Construction une indemnité de trois mille Euros (3 000 euro) sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile ; Dit n'y avoir lieu à indemnité sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile au profit de la société Nissan West Europe et de la société Nouvelle Bennes Calvet.