CA Rennes, 8e ch. prud'homale, 7 septembre 2012, n° 12-01268
RENNES
Arrêt
PARTIES
Demandeur :
Papillon
Défendeur :
Mondial Pare-Brise (SAS)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Sabard
Conseillers :
Mmes L'Hénoret, Legeard
Avocats :
Mes Rolland, Feschet, SCP Chatteleyn, George
EXPOSE DES FAITS ET DE LA PROCEDURE :
M. Éric Papillon a signé le 22 janvier 2001 un contrat de franchise ayant fait l'objet d'un avenant le 18 juin 2002 pour l'exploitation de vente et réparation notamment de pare-brise avec la société Mondial Pare-Brise qui le 12 juillet 2010 a mis fin à cette relation contractuelle pour le 21 janvier 2011.
M. Éric Papillon a saisi le Conseil de prud'hommes de Vannes le 3 décembre 2010 pour demander la requalification de son contrat en contrat de travail et la condamnation de la société Mondial Pare-Brise au paiement de dommages et intérêts à hauteur de la somme de 170 000 euro pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et de diverses indemnités à ce titre dont une somme de 21 150 euro pour travail dissimulé.
Par jugement du 23 janvier 2012 le conseil de prud'hommes s'est déclaré incompétent au profit du Tribunal de commerce de Paris et a cru devoir débouter le demandeur de l'ensemble de ses prétentions.
Par déclaration de contredit du 6 février 2012 à l'encontre de ce jugement, M. Éric Papillon a saisi la cour d'appel pour dire que le Conseil de prud'hommes de Vannes est compétent pour se prononcer sur ses demandes.
PRETENTIONS ET MOYENS DES PARTIES :
Le contredisant conclut à l'infirmation du jugement entrepris et à la compétence du Conseil de prud'hommes de Vannes faisant valoir qu'il est fondé à invoquer l'article L. 7321-du Code du travail sur le statut de gérant de succursales dans la mesure où les termes du contrat de franchise et son exécution montrent qu'il était au service exclusif de la société Mondial Pare-Brise qui lui imposait ses conditions de vente et de travail et en contrôler l'application.
Il ajoute que n'ayant pas la qualité de commerçant mais celle d'artisan, il était dans l'obligation de suivre les instructions de cette société et notamment les procédures qui lui étaient prescrites dans le cadre de la politique commerciale qu'elle avait définie.
M. Éric Papillon indique à titre subsidiaire qu'il se trouvait dans un lien de subordination juridique caractérisant l'existence d'un contrat de travail.
La société Mondial Pare-Brise conclut à la confirmation de la décision intervenue et au rejet du contredit de M. Papillon soutenant que les obligations souscrites par les parties de nature commerciale s'inscrivaient dans le cadre d'un contrat de franchise librement consenti exclusif de toute subordination juridique ou technique pouvant le faire bénéficier du statut de gérant de succursales ou caractériser l'existence d'un contrat de travail dès lors que le franchisé restait maître de son activité, qu'il pouvait fixer en toute liberté les prix de vente à la clientèle et en toute indépendance, le franchiseur n'ayant qu'une obligation de conseil et d'assistance dans le cadre du contrat de franchise dans un souci d'harmonisation des pratiques et de préservation de son image de marque et de son savoir-faire.
Elle sollicite la condamnation du contredisant au paiement d'une somme de 5 000 euro au titre de l'article 700 Code de procédure civile outre les dépens d'instance.
Il convient pour un plus ample exposé des prétentions et moyens des parties de se référer expressément à leurs conclusions déposées et développées oralement à l'audience.
MOTIFS DE LA DECISION :
Sur la recevabilité du contredit :
Conformément à l'article 82 du Code de procédure civile, il sera constaté par la cour que le contredit formé dans le délai légal est motivé par des conclusions du 6 février 2012 aux fins d'infirmation du jugement entrepris et de déclarer le Conseil de prud'hommes de Vannes compétent pour se prononcer sur ses demandes
Le contredit de M. Éric Papillon sera déclaré régulier et recevable.
Sur la compétence du conseil de prud'hommes :
L'article L. 7321-2 du Code du travail dans la version applicable au présent contrat, fait bénéficier du statut de gérant de succursales notamment toute personne dont la profession consiste essentiellement soit à vendre des marchandises de toute nature qui leur sont fournies exclusivement ou presque exclusivement par une seule entreprise soit à recueillir les commandes ou à recevoir des marchandises à traiter, manutentionner ou transporter, pour le compte d'une seule entreprise, lorsque ces personnes exercent leur profession dans un local fourni ou agréé par cette entreprise et aux conditions et prix imposés par cette entreprise.
Or il résulte de pièces et des éléments produits par Monsieur Papillon que dans le cadre de son activité de réparation et de vente de pare-brise et de divers autres objets s'y rapportant, il ne pouvait recevoir des commandes et les traiter que pour le compte de la société Mondial Pare-Brise auprès de laquelle il devait exclusivement s'approvisionner et exercer son activité en qualité d'artisan inscrit au registre des métiers et non de commerçant dans un local dont il était certes propriétaire mais agréé par ladite société avec obligation pour lui de respecter le cahier des charges des normes administratives, techniques et comptables de la société et d'appliquer les tarifs de vente fixés par elle, toutes ristournes et rabais ne pouvant être accordées à la clientèle que dans les conditions indiquées par cette société qui en contrôlait strictement et d'une manière constante la mise en œuvre, ce dont il résulte qu'il avait accepté des obligations excédant celles normalement souscrites dans le cadre d'un contrat de franchise en sorte que l'invocation du statut de gérant de succursales tel que défini par l'article susvisé du Code du travail justifie la compétence du conseil de prud'hommes au regard des dispositions du Code du travail applicables en l'espèce.
Le contredit de M. Éric Papillon sera déclaré fondé par la cour et le jugement entrepris réformé sans qu'il y ait lieu de faire droit à la demande de la société Mondial Pare-Brise relative à l'application de dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile, les frais et dépens du contredit étant mis à sa charge.
Par ces motifs : LA COUR, statuant publiquement et contradictoirement après en avoir délibéré conformément à la loi, Déclare le contredit formé par M. Éric Papillon régulier, recevable et fondé. Réforme le jugement entrepris en toutes ses dispositions. Dit le Conseil de prud'hommes de Vannes compétent pour se prononcer sur les demandes de Monsieur Éric Papillon à l'encontre de la société Mondial Pare-Brise. Renvoie la cause et les parties devant le Conseil des prud'hommes de Vannes pour y être statué conformément à la loi. Dit n'y avoir lieu à faire application des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile. Condamne la société Mondial Pare-Brise aux frais et dépens de l'instance sur contredit.