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Décisions

CA Paris, Pôle 5 ch. 4, 3 octobre 2012, n° 11-05299

PARIS

Arrêt

Confirmation

PARTIES

Demandeur :

Baud, Guerin (ès qual.)

Défendeur :

Ucar Location (SA)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Roche

Conseillers :

Mme Luc, M. Vert

Avocats :

Mes Bernabe, Benoit, Fourgoux, SCP Fisselier - Chiloux - Boulay

T. com. Paris, du 14 févr. 2011

14 février 2011

Vu le jugement rendu le 14 février 2011 par le Tribunal de commerce de Paris ;

Vu l'appel de M Patrick Baud et de Maitre Dominique Guerin es qualité de liquidateur judicaire de la société Minotaure Développement et leurs conclusions du 6 avril 2012 ;

Vu les conclusions de la société Ucar Location du 10 avril 2012 ;

SUR CE

Considérant qu'il ressort des pièces versées aux débats que le groupe Ucar exploite un concept de location longue durée de véhicules de tourisme et utilitaires légers ainsi qu'une activité de location courte durée chez les concessionnaires automobiles pour fournir à leurs clients des véhicules de remplacement (corners) ; que ce groupe a décidé de créer un réseau d'agences spécialisées dans la location courte durée de véhicules, en recourant au système de la franchise, sous l'enseigne "Ucar Location "; que le 2 octobre 2003, Monsieur Patrick Baud et la société Ucar Location ont signé un contrat de réservation ayant pour objet de permettre au candidat franchisé de bénéficier d'une option sur la zone Bayonne, Anglet et Biarritz pendant une période déterminée en échange de la somme de 6 871,02 euro TTC ; que par la suite Monsieur Patrick Baud a accepté l'aménagement de la clause d'exclusivité pour la voir transformer en clause d'option prioritaire en cas de création d'une nouvelle agence, en contrepartie de quoi Monsieur Baud s'est vu consentir des conditions financières plus avantageuses ; que le 14 mai 2004, la société Minotaure Développement, constituée par Monsieur Patrick Baud, a conclu un contrat de franchise Ucar Location pour une durée de cinq ans avec la société Ucar Location ; que La société Minotaure Développement a par la suite fait l'objet d'un jugement de liquidation judiciaire prononcé par le Tribunal de commerce de Bayonne le 16 janvier 2006 ;

Considérant que c'est dans ces conditions que la présente instance a été introduite ;

Sur la demande en nullité du contrat de franchise formée par les appelants :

Considérant qu'il ressort des dispositions de l'article L. 330-3 du Code de commerce que :

- Toute personne qui met à la disposition d'une autre personne un nom commercial, une marque ou une enseigne, en exigeant d'elle un engagement d'exclusivité ou de quasi-exclusivité pour l'exercice de son activité, est tenue, préalablement à la signature de tout contrat conclu dans l'intérêt commun des deux parties, de fournir à l'autre partie un document donnant des informations sincères, qui lui permette de s'engager en connaissance de cause.

Ce document, dont le contenu est fixé par décret, précise notamment, l'ancienneté et l'expérience de l'entreprise, l'état et les perspectives de développement du marché concerné, l'importance du réseau d'exploitants, la durée, les conditions de renouvellement, de résiliation et de cession du contrat ainsi que le champ des exclusivités. (...).

Le document prévu au premier alinéa ainsi que le projet de contrat sont communiqués vingt jours minimum avant la signature du contrat, ou, le cas échéant, avant le versement de la somme mentionnée à l'alinéa précédent ;

Considérant que si aucune disposition légale ne prévoit expressément de sanction civile en cas de manquement à l'obligation d'information rappelée ci-dessus, ce défaut d'information est néanmoins susceptible d'entraîner la nullité du contrat de franchise dès lors qu'il est démontré que l'omission de cette formalité a vicié le consentement du franchisé ;

Considérant que les appelants excipent, notamment, au soutien de cette demande en nullité, de la "communication d'une étude de marché incomplète et trompeuse et de comptes d'exploitation prévisionnels grossièrement erronés";

Mais considérant qu'il sera préliminairement rappelé que si les dispositions susvisées mettent à la charge du franchiseur la communication d'un état et des perspectives du marché concerné, la loi ne met pas à la charge de celui-ci une étude du marché local , appartenant au seul franchisé de procéder lui-même à une analyse d'implantation précise ; qu'il sera en premier lieu relevé, que le document précontractuel remis à la société Minotaure Développement mentionnait la liste des principales enseignes présentes sur la zone et comportait des informations économiques concernant cette zone ; qu'en second lieu, les appelants n'établissent pas un manque de sincérité ou un caractère irréaliste des éléments fournis par le franchiseur en vue de l'établissement des comptes prévisionnels, notamment au regard des chiffres mentionnés dans ces éléments et de l'évolution effective de l'activité concernée, étant au surplus souligné que le contrat conclu ,qui fait la loi des parties, comporte la clause suivante : "l'évolution récente du réseau ne permet pas la communication de chiffres significatifs par les agences spécialisées de location et doit conduire les parties à une prudence particulière dans l'analyse des potentialités du marché"; qu'il s'ensuit que le franchisé n'établit pas le caractère trompeur et grossièrement erroné des chiffres d'activité figurant dans le document précontractuel ;

Considérant que les appelants, au soutien de cette demande en nullité, excipent également d'une "tromperie sur l'étendue du réseau", invoquant notamment le fait que la société Ucar Location a qualifié de franchisés les "corners", pouvant laisser ainsi faire croire à la société Minotaure Développement qu'elle possédait une solide expérience en matière de franchise ;

Mais considérant qu'il sera relevé à la lecture du document précontractuel que ces "corners" ont bien été présentés comme des succursales de la filiale "U.TOP "et non comme des agences indépendantes ; que les éléments versés aux débats ne permettent pas ainsi de caractériser une quelconque tromperie sur l'étendue du réseau, la société Ucar Location ayant indiqué exactement le nombre de franchisés dans le document précontractuel ;

Considérant que les appelants excipent enfin, à l'appui de cette demande en nullité, du non-respect du délai de 20 jours lors de la communication du document précontractuel ;

Mais considérant que si ce document a été remis le 16 septembre 2003, soit moins de 20 jours avant la signature du protocole de réservation signé le 2 octobre 2003, il n'est pas établi que ce non-respect du délai susmentionné ait vicié le consentement de la société Minotaure Développement lors de la conclusion du contrat de franchise, dès lors qu'elle a eu effectivement le temps de prendre connaissance des éléments figurant dans ce document et d'en apprécier toute la portée en procédant aux vérifications nécessaires, étant relevé que le contrat de franchise n'a été conclu que sept mois après la communication du document précontractuel ;

Considérant qu'au regard de l'ensemble de ces éléments, et des motifs pertinents et non contraires des premiers juges que la cour adopte, il y a lieu de confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a débouté les appelants de leur demande en nullité du contrat de franchise ;

Sur la demande en résiliation du contrat de franchise formée par les appelants :

Considérant que les appelants reprochent, au soutien de cette demande, à la société Ucar Location d'avoir violé plusieurs de ses obligations contractuelles de nature à justifier le prononcé de la résiliation dudit contrat ; Considérant que les appelants reprochent en premier lieu à la société Ucar Location "d'avoir manqué à son obligation de transmettre un savoir faire préalablement expérimenté" en ne lui ayant pas permis de suivre la formation initiale en intégralité, en n'ayant pas préalablement expérimenté le concept et en excipant des lacunes et défauts du savoir-faire ;

Mais considérant qu'il ressort des pièces versées aux débats que la société Ucar Location a bien assuré une formation initiale telle que prévue au contrat et que si M. Braud n'a pas assisté à l'intégralité de cette formation, ce n'est nullement en raison d'un fait imputable à la société Ucar Location, étant précisé qu'il est également établi que celui-ci a reçu les manuels d'exploitation matérialisant les éléments du savoir-faire ; que les appelants sont ainsi mal fondés à invoquer le grief susvisé à l'encontre de la société Ucar Location ; que par ailleurs , il ressort des pièces versées aux débats que la société Ucar Location, qui avait acquis, au moment de la signature du contrat de franchise et de la remise du document précontractuel, les agences du réseau Athlon, justifie ainsi avoir développé à ces dates un concept de location courte durée dans 65 "corners" ; que deux de ses franchisés avaient, en effet, à ces dates, déjà exploité le concept, notamment la société U Top qui a géré 44 agences spécialisées pendant une durée d'un an et demi ; que le grief tiré de l'absence préalable d'expérimentation du concept est ainsi mal fondé ; que par ailleurs la société Ucar Location justifie, au vu des pièces versées aux débats, de l'existence d'une centrale d'achat à la disposition de la société Minotaure Développement lors de l'exécution du contrat, celle-ci ayant pu ainsi bénéficier d'un parc de véhicule conforme aux stipulations contractuelles ; qu'il est établi en outre que des véhicule du parc de la société Minotaure Développement ont été financés par les établissement partenaires de la société Ucar Location ; qu'enfin il est également établi au vu des pièces versées aux débats qu'une centrale de réservation était à la disposition du franchisé, l'efficacité de cette centrale étant prouvée au regard du chiffre d'affaires généré par cette centrale ; qu'il convient de dire au regard des éléments susvisés que les appelants ne rapportent la preuve d'aucune lacune ou défaut dans la mise en œuvre du savoir-faire du franchiseur ;

Considérant en second lieu que les appelants reprochent à la société Ucar Location d'avoir failli dans son obligation de conseil et d'assistance ; qu'ils reprochent notamment à la société Ucar Location de n'avoir apporté aucune aide à M Baud dans sa recherche de son futur local ; mais considérant qu'il convient de relever qu'aucune clause contractuelle ne mettait à la charge de la société Ucar Location une obligation d'assistance dans la recherche d'un local qui relevait ainsi de la seule responsabilité du franchisé ; que ce grief est par conséquent mal fondé ; que par ailleurs il ressort des pièces versées aux débats que la société Ucar Location a fourni à la société Minotaure Développement les éléments de comptabilité nécessaires pour procéder à l'élaboration des comptes prévisionnels ; que la société Ucar Location justifie également avoir aidé la société Minotaure Développement dans le financement de son parc réalisé par des partenaires financiers du franchiseur, n'étant nullement établi que le franchiseur ait donné des prévisions de loyers nettement supérieurs à ceux effectivement payés ; que la société Ucar Location justifie en outre avoir respecté son obligation d'assistance par les nombreux courriers électroniques versés aux débats adressés à la société Minotaure Développement qui démontrent qu'elle a renseigné efficacement cette dernière sur de nombreux aspects pratiques de l'exploitation : assurance, liaison informatique, centrale de réservation, utilisation du logiciel, aspects commerciaux ; que la société Ucar Location justifie également avoir visité le 17 aout également été proposé le 16 février 2005 à la société Minotaure Développement les outils nécessaires à la prospection commerciale ; que les courriers électroniques échangés entre les parties établissent par ailleurs la réalité des démarches engagées par la société Ucar Location en matière publicitaire et de communication ; que les appelants reprochent également à la société Ucar Location un caractère tardif des prix de vente ; mais considérant que les prix n'étaient nullement fixés par le franchiseur, la fixation des prix relevant de la seule responsabilité de la société Minotaure Développement qui n'établit l'existence d'aucun préjudice du chef de ce grief ;

Considérant enfin sur les griefs relatifs au retard de paiement et à l'absence de réaction approprié du franchiseur au regard des difficultés de la société Minotaure Développement, qu'il sera relevé que la société Minotaure Développement, en tant qu'entrepreneur indépendant, porte seule la responsabilité de ses choix dans l'exploitation de son agence, les appelants ne rapportant la preuve d'aucune faute ou négligence de la société Ucar Location dans les retards de paiement invoqués ou dans ses obligations contractuelles au moment où la société Minotaure Développement a connu ses premières difficultés économiques ;

Considérant qu'au regard de ces éléments et des motifs non contraires et pertinents des premiers juges, que la cour adopte, il y a lieu de dire qu'il n'est rapporté la preuve d'aucun manquement contractuel du franchiseur de nature à justifier le prononcé de la résiliation judiciaire du contrat de franchise ; que le jugement entrepris sera donc confirmé en ce qu'il a débouté les appelants de leur demande en résiliation du contrat litigieux ;

Par ces motifs : - Confirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions. - Rejette toutes demandes plus amples ou contraires. - Condamne les appelants au paiement des dépens avec recouvrement conformément à l'article - Dit n'y avoir lieu à l'application de l'article 700 du Code de procédure civile en cause d'appel.