Livv
Décisions

CA Amiens, ch. économique, 11 octobre 2012, n° 09-03160

AMIENS

Arrêt

Infirmation partielle

PARTIES

Demandeur :

Era (SARL)

Défendeur :

LBD Maison (SAS)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. de Mordant de Massiac

Conseillers :

M. Bougon, Mme Bousquel

Avoués :

SCP Lemal, Guyot, SCP Millon-Plateau

Avocats :

Mes Guyot, Marcovitch, Plateau, Bouttier

T. com. Beauvais, du 27 nov. 2008

27 novembre 2008

Vu le jugement rendu le 27 novembre 2008 par le Tribunal de commerce de Beauvais qui a :

- condamné la société Era à payer à la société LBD Ménage la somme de 35 000 euro à titre de dommages et intérêts pour contrefaçon dans la fabrication et la commercialisation des produits Utilia,

- ordonné à la société Era la restitution du stock de produits de la société LBD Ménage dans le délai de huit jours à compter de sa signification,

- condamné la société LBD Ménage à payer à la société Era la somme de 30 660 euro et celle de 10 000 euro à titre respectivement du stock entreposé en ses locaux, du papier adhésif et des enveloppes en instance de livraison,

- ordonné la compensation de ces condamnations,

- dit n'y avoir lieu à astreinte,

- condamné la société Era à payer à la société LBD Ménage la somme de 2 000 euro en application de l'article 700 du Code de procédure civile,

- dit n'y avoir lieu à exécution provisoire,

- condamné la société Era en tous les dépens ;

Vu les appels de cette décision interjetés par :

- la société Era selon déclaration remise au greffe de la cour le 15 juillet 2009 (instance RG n° 09-3160),

- la société LBD Ménage selon déclaration remise au greffe de la cour le 19 août 2009 (instance RG n° 09-3697) ;

Vu l'ordonnance de jonction des procédures sous la référence RG n° 09-3160 rendue par le magistrat de la mise en état le 9 mars 2010 ;

Vu les conclusions de la société Era du 22 novembre 2011 sollicitant la reformation du jugement entrepris et demandant à la cour, constatant que le contrat du 30 septembre 2003 est rompu du fait des deux parties, de débouter la société LBD Ménage de l'ensemble de ses demandes en raison de la compensation entre les créances de dommages et intérêts respectives des parties qu'elle demande d'arrêter à la somme de 25 000 euro, d'ordonner la destruction du stock de produits Utilia, et de condamner la société LBD Ménage à lui verser 34 066 euro en paiement du stock de produit Utilia, 90 000 euro de dommages et intérêts pour rupture brutale de l'approvisionnement en papier Kraft, 32 195 euro HT pour le papier Kraft commandé et 3 000 euro sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile ;

Vu les écritures de la société LBD Maison, anciennement dénommée LBD Ménage, du 22 mai 2012 sollicitant l'infirmation de la décision déférée sauf en ce qu'elle a condamné la société Era au paiement d'une somme de 2 000 euro au titre de l'article 700 du Code de procédure civile et demandant à la cour, rejetant des débats les pièces de la société Era non traduites, en particulier les pièces n° 47 et n° 84, et retenant que la résiliation anticipée du contrat par ses soins le 31 juillet 2007 est intervenue aux torts exclusifs de la société Era qui avait violé ses obligations au titre du contrat de distribution exclusive et de concession de marque du 30 septembre 2003, de condamner la société Era à lui payer la somme de 60 000 euro à titre de dommages et intérêts au titre de sa responsabilité contractuelle, d'ordonner la livraison ou la destruction des brosses de marque Utilia stockées par la société Era aux frais de cette dernière et ce conformément à la liste de ces produits figurant en annexe 1 du contrat de distribution du 30 septembre 2003 dans les 48 heures du prononcé du présent arrêt ainsi que la restitution et le retour à la charge de la société Era des autres produits tels que listés à l'annexe précitée sous astreinte de 5 000 euro par jour de retard à compter du prononcé du présent arrêt en se réservant de statuer sur l'astreinte définitive en fixant à la somme de 1 euro le prix qu'elle devra payer au titre de ces produits, de faire interdiction à la société Era de commercialiser et de distribuer les stocks de produits lui appartenant, ce sous astreinte de 1 500 euro par infractions constatées à compter du prononcé du présent arrêt en se réservant de statuer sur l'astreinte définitive, d'ordonner la production par la société Era d'un inventaire ou état des stocks effectivement vendus distinguant les produits achetés auprès d'elle et ceux achetés auprès de tiers ainsi que la confiscation ou la destruction de produits à l'origine de violations contractuelles, ce sous astreinte de 500 euro par jour de retard à compter du présent arrêt en se réservant de statuer sur l'astreinte définitive, de dire la société Era mal fondée sur sa demande d'indemnisation pour un montant 90 000 euro et de la condamner à lui verser une indemnité de 16 000 euro sur le fondement des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile ;

Vu l'ordonnance de clôture rendue le 24 mai 2012 ;

SUR CE

Attendu que selon contrat du 30 septembre 2003 la société LBD Ménage a concédé, à la société Era pour une durée de trois ans à compter du 1er octobre 2003 renouvelable par tacite reconduction pour une même durée à défaut de dénonciation par lettre recommandée avec demande d'avis de reception au moins six mois avant le terme convenu, la distribution exclusive, en France métropolitaine et dans quinze pays européens, de produits ménagers et notamment de brosses adhésives de marque "Utilia" moyennant le paiement d'une commission de 3 % du chiffre d'affaires HT "facturé" qu'elle réaliserait et un engagement d'approvisionnement exclusif en produits faisant l'objet du contrat auprès de la société concédante ;

Attendu que la société LBD Ménage, après avoir fait constater par procès-verbal dressé par Me Lebas, huissier de justice, le 24 avril 2007 que la société Era commercialisait, sans autorisation, des brosses adhésives qu'elle ne lui avait pas fournies sous la marque "Utilia" et cette situation ayant été confirmée par une sommation interpellative délivrée le 27 avril suivant à l'un des clients de la société Era, a par lettre recommandée avec demande d'avis de réception du 4 juin 2007 sollicité les explications de la société distributrice qui par courrier du 13 juin 2007 lui a fait parvenir le règlement des commissions dont elle était redevable en s'engageant à ce que les produits litigieux ne portent plus à l'avenir la marque "Utilia" ;

Attendu que la société LBD Ménage a alors, par lettre recommandée avec demande d'avis de réception du 4 juillet 2007 aux termes de laquelle elle se réservait le droit de résilier le contrat du 30 septembre 2003, relevé les manquements commis par la société Era aux stipulations de ce dernier en demandant à celle-ci, d'une part, de cesser la fabrication et la commercialisation de tout produit contrefaisant reproduisant la marque "Utilia" et, d'autre part, de l'indemniser de son préjudice évalué globalement à 50 000 euro, puis, par courrier de même forme du 31 juillet 2007 a notifié à la société Era la résiliation aux torts de celle-ci de la convention liant les parties en la mettant en demeure de cesser immédiatement la distribution des brosses adhésives sous la marque "Utilia", de retirer de l'ensemble de ses documents commerciaux toute mention de sa qualité de distributeur desdits produits, de détruire tous les stocks de brosses adhésives contrefaisantes et de lui retourner les stocks récents et non obsolètes des brosses portant la marque "Utilia" qu'elle lui avait fournis ; que par courrier du 2 août 2007 la société Era, sans contester les faits qui lui étaient reprochés, a pris acte de cette résiliation en demandant à la société LBD Ménage de cesser toute fabrication de brosses avec le papier adhésif qu'elle lui avait fourni et de lui retourner le stock restant de ce produit ;

Attendu que la société Era, nonobstant une réitération de sa demande en date du 25 septembre 2007 et une sommation du 11 octobre suivant, s'abstenant de faire retour du stock subsistant des brosses portant légitimement la marque "Utilia", la société LBD Ménage l'a, par acte extrajudiciaire du 12 octobre 2007, fait assigner devant le juge des référés du Tribunal de commerce de Beauvais, afin d'obtenir cette restitution ; que cette instance en référé a fait l'objet d'une radiation en raison de l'existence de pourparlers en cours entre les parties ;

Attendu que ces derniers n'ayant pu aboutir la société LBD Ménage, invoquant la résiliation aux torts de sa cocontractante de la convention du 30 septembre 2003 et les faits ci-dessus rappelés, a, par acte d'huissier de justice du 29 janvier 2008, fait assigner la société Era devant le Tribunal de commerce de Beauvais auquel elle a demandé, constatant la résiliation du contrat du 30 septembre 2003 aux torts exclusifs de la requise, de condamner cette dernière à lui payer la somme de 50 000 euro à titre de dommages et intérêts, d'ordonner la livraison ou la destruction des brosses de marque "Utilia" stockées par la société Era aux frais de cette dernière ainsi que la restitution et le retour des autres produits tels que listés en annexe 1 du contrat ayant lié les parties à la charge de la société Era sous astreinte de 5 000 euro par jour de retard en fixant à la somme de 1 euro le prix qu'elle avait à payer au titre de ces produits et en faisant interdiction à la société Era de commercialiser et distribuer les stocks de produits de la société LBD Ménage sous astreinte de 1 500 euro par infraction constatée, d'ordonner la production par la requise d'un inventaire ou état des stocks effectivement vendus en distinguant les produits achetés auprès d'elle et ceux achetés auprès de tiers ainsi que la confiscation ou la destruction des produits à l'origine des violations du contrat de distribution sous astreinte de 500 euro par jour de retard et de condamner la société Era à lui verser une indemnité de 10 000 euro en application de l'article 700 du Code de procédure civile ; que la société Era, d'une part, s'est opposée aux demandes formées à son encontre en demandant au tribunal de dire que le contrat du 30 septembre 2003 était rompu aux torts des deux parties dont les préjudices réciproques s'annulaient en lui donnant acte de ce qu'elle s'engageait à restituer le stock au prix de 34 066,69 euro après inventaire contradictoire si nécessaire et, d'autre part, a reconventionnellement sollicité, sous le bénéfice de l'exécution provisoire, la condamnation de la société LBD Ménage à lui payer la somme de 90 000 euro à titre de dommages et intérêts, celle de 32 196 euro HT au titre du papier Kraft outre une indemnité de 1 500 euro sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile en faisant valoir que la société LBD Ménage avait violé l'article 4 du contrat de distribution en lui livrant des produits contrefaisant un brevet en vigueur et en l'exposant ainsi à une action en contrefaçon, qu'elle la livrait en retard ce qui pour satisfaire sa clientèle la contraignait à compléter ses propres livraisons avec des brosses adhésives qu'elle montait elle-même en y apposant la marque "Utilia", qu'aucune atteinte à l'image de cette marque ne résultait de cet agissement ainsi qu'il ressort de l'augmentation du chiffre d'affaires, que la clause contractuelle de reprise du stock était invoquée de mauvaise foi dès lors que la société LBD Ménage avait procédé la veille de la notification de la rupture du contrat à une livraison d'une quantité importante de produits et que la bonne foi aurait consisté à lui permettre de vendre le stock ainsi constitué conformément à la possibilité offerte par le contrat, que sa cocontractante avait usé de manœuvres déloyales et avait brutalement cessé de s'approvisionner auprès d'elle en papier Kraft qu'elle se procurait à l'étranger pour le lui livrer rapidement un stock de 32 195 euro ayant été constitué à cet effet et le chiffre d'affaires annuel généré par cette fourniture s'élevant à 280 000 euro ; que c'est en cet état des prétentions et moyens des parties que le jugement frappé d'appel a été rendu ;

Attendu qu'en cours d'instance d'appel la société LBD Ménage a pris la dénomination LBD Maison ;

Sur la demande de la société LBD Maison en rejet des débats des pièces non traduites en langue française

Attendu que la société LBD Maison conclut au rejet des débats des pièces produites par la société Era rédigées en langue étrangère et non traduites, en particulier les pièces n° 47 et n° 84 ;

Attendu que la pièce n° 84 (lettre de M. Billoet du 20 juin 2009) est rédigée en langue française ; que la demande rejet n'est pas fondée la concernant ;

Attendu que les pièces n° 47 (facture d'achat d'une machine Tilmac du 22 mars 2007), n° 56 (frais de voyage de M. Billoet en Chine du 24 avril 2007) et n° 87 (facture Loparex du 20 juillet 2007) sont rédigées, la première en italien et les deux autres en anglais sans être accompagnées d'une traduction en langue française ; qu'elles doivent être rejetées des débats ;

Sur le fond

Attendu que la société Era en commercialisant des brosses adhésives qu'elle assemblait elle-même en utilisant son propre procédé de découpe et sur lesquelles elle apposait une étiquette "Utilia" a violé son obligation contractuelle d'approvisionnement exclusif auprès de la société LBD Maison en produits faisant l'objet du contrat du 30 septembre 2003 au nombre desquels figuraient les brosses adhésives de marque "Utilia" et mis en circulation des marchandises contrefaisantes ; qu'elle ne peut s'exonérer de ces fautes, lesquelles justifient la résiliation du contrat de distribution exclusive et de redevance de marque conclu avec la société LBD Maison en invoquant des difficultés ou des retards d'approvisionnement imputables à sa cocontractante dont n'est pas démontré qu'elle les ait dénoncés antérieurement à la procédure judiciaire opposant les parties et qui, à les supposer réels, ne l'empêchaient pas le 13 juin 2007 de faire part à la société LBD Maison de son souhait de maintenir "de bonnes relations commerciales", ce qu'elle faisait réitérer par son conseil le 16 juillet suivant ;

Attendu que l'article 4 du contrat du 30 septembre 2003 imposait à la société LBD Maison de fournir des produits conformes à toutes les dispositions communautaires, législatives et réglementaires applicables sur le territoire concédé notamment en matière de sécurité des produits, de fabrication, d'emballage, d'étiquetage et d'information des consommateurs ; que cette énumération, non limitative, faisait obligation à la société LBD Maison de fournir à la société Era des produits ne l'exposant pas à d'éventuels recours de tiers quel que soit le fondement juridique invoqué par ces derniers ; qu'il ressort toutefois des pièces produites aux débats (demande de brevet d'invention numéro de publication FR 2 632 846-lettre de la société Bredema, Conseil en Proprieté Industrielle, du 23 août 2007) que le rouleau dépoussiéreur dont la société LBD Maison concédait la distribution exclusive sous la marque "Utilia" à la société Era faisait l'objet, spécialement quant à son procédé de découpe par fente d'un brevet d'invention au profit de M. Nicholas D. McKay dont la protection courait au moins jusqu'au 31 juillet 2007 sans que la société LBD Maison qui ne revendique aucun droit à l'exploitation de ce brevet et soutient que l'invention en cause appartient au domaine public depuis 1967 établisse ce dernier fait ; qu'il s'ensuit que les brosses adhésives de marque "Utilia" fournies par la société LBD Maison à la société Era avaient un caractère contrefaisant de sorte qu'elles ne satisfaisaient pas à l'obligation édictée par l'article par l'article 4 du contrat liant les parties ; que la faute ainsi commise par la société LBD Maison constitue un cas de résiliation au sens de l'article 17 dudit contrat ;

Attendu qu'il a en conséquence lieu de dire que la résiliation du contrat du 30 septembre 2003 est imputable tant à la société Era qu'à la société LBD Maison ; chacune d'elles pouvant prétendre à l'indemnisation de son préjudice né de la faute de sa cocontractante ;

Attendu que les premiers juges ont, compte tenu du chiffre d'affaire réalisé par la société Era en commercialisant des produits non fournis par sa cocontractante, soit 128 224,43 euro HT, alors que par ailleurs il n'est aucunement démontré que cette infraction aux stipulations du contrat ait affecté l'image de la marque "Utilia" auprès de la clientèle finale, exactement arrêté à la somme de 35 000 euro la réparation du préjudice subi par la société LBD Maison ;

Attendu que la société Era n'établit aucun dommage que lui avait occasionné la société LBD Maison en lui fournissant des produits l'exposant à une éventuelle action du titulaire du brevet précité que celui-ci n'a pas à ce jour exercé ; qu'elle doit être déboutée de sa demande de dommages et intérêts étant observé que la mauvaise foi de la société LBD Maison dans l'exécution du contrat qu'elle invoque ne concerne que le comportement de sa cocontractante concomitant ou postérieur à la rupture du contrat lequel sera examiné ci-après ;

Attendu que selon l'article 18 du contrat du 30 septembre 2003 en cas de résiliation la société LBD Maison était tenue, à son choix, soit de racheter les stocks récents, définis contractuellement comme correspondant aux produits livrés au cours des trois mois précédant la résiliation, invendus et non obsolètes de produits en bon état de présentation et de fonctionnement détenus par la société Era au jour de la résiliation au prix hors taxes auquel cette dernière les aurait acquis, soit de permettre à la société Era de vendre ces produits pendant une période de trois mois ; que la société LBD Maison a, aux termes de son courrier de résiliation du 31 juillet 2007, opté pour la reprise des stocks ;

Attendu que le 30 juillet 2007 la société LBD Maison a livré à la société Era une quantité importante de produits commandés par cette dernière le 6 février 2007 selon la facture émise à cette occasion utilisant le papier adhésif mis à disposition par la société Era et qu'elle incorporait aux brosses fournies ; que la facture de la société LBD Maison a fait l'objet d'un règlement ; que par lettre recommandée avec demande d'avis de réception du 31 juillet 2007, soit le lendemain de cette livraison, la société LBD Maison a notifié à la société Era la résiliation du contrat liant les parties en la mettant en demeure notamment de cesser immédiatement la distribution des brosses adhésives de marque Utilia et de lui retourner tous les stocks récents et non obsolètes des brosses qu'elle fabriquait portant cette marque ;

Attendu qu'en livrant la veille de la notification par ses soins de la résiliation du contrat du 30 septembre 2003 des produits faisant l'objet d'une commande passée depuis près de six mois et dont elle interdirait le lendemain à la société Era de les distribuer, la société LBD Maison a fait preuve d'une particulière mauvaise foi dans l'exécution de la convention des parties ; que ce comportement justifie que soit écartée la méthode de valorisation du stock prévue par l'article 18 du contrat et que soit retenu le prix de reprise proposé par la société Era prenant en compte son prix de vente au public minoré de 10 % ; que la société LBD Maison sera condamnée de ce chef à payer à la société Era la somme de 34 066,69 euro en contrepartie de la restitution par la société Era de l'ensemble du stock qu'elle détient des produits qui lui ont été livrés par la société LBD Maison ;

Attendu que la société LBD Maison est fondée à demander qu'il soit fait interdiction à la société Era de commercialiser et de distribuer les stocks des produits qu'elle lui a livrés ; que cette interdiction doit être assortie d'une astreinte de 500 euro par infraction qui serait constatée sans qu'il lieu pour la cour de se réserver la liquidation de cette astreinte ;

Attendu qu'au regard de l'ancienneté de la rupture des relations contractuelles survenue il y a plus de cinq ans il n'apparaît pas nécessaire d'ordonner la production par la société Era d'un inventaire des stocks vendus ni la confiscation ou la destruction des produits à l'origine de cette rupture alors que la société Era est libre à ce jour de commercialiser des brosses adhésives sous la marque Eralia dont il n'apparaît pas qu'elle constitue une contrefaçon de la marque Utilia et que la société LBD Maison indique avoir cédé cette dernière à la société Oralys de sorte qu'elle est désormais sans aucun droit sur celle-ci ;

Attendu que la société Era fournissait à la société LBD Maison depuis l'année 1999 du papier Kraft 63g qu'elle se procurait en Finlande et en Grande-Bretagne ; Que cette fourniture s'est poursuivie jusqu'en mai 2007 époque à laquelle la société LBD Maison a cessé les commandes de ce produit ; que cette relation commerciale établie au sens de l'article L. 442-6 I 5° du Code de commerce est démontrée par les commandes, factures et documents statistiques produits aux débats et était distincte de celle résultant du contrat du 30 septembre 2003 ainsi que le révèle son antériorité de sorte que le manquement commis par la société Era à ses obligations nées de ce dernier contrat ne peut en justifier la rupture brutale ;

Attendu qu'au cours des trois derniers exercices complets, soit ceux des années 2004, 2005 et 2006 le chiffre d'affaire annuel moyen réalisé par la société Era pour la fourniture à la société LBD Maison de papier Kraft 63g s'est élevé, selon les documents statistiques annexés à sa pièce n° 81, à la somme de 241 009 euro ; que compte tenu de l'ancienneté de la relation commerciale la société LBD Maison ne pouvait mettre un terme à celle-ci sans respecter un préavis de trois mois représentant pour la société Era un chiffre d'affaires de 80 336 euro ; que le préjudice réparable devant correspondre au gain manqué, la cour, à défaut d'indication quant à la marge brute réalisée par la société Era, trouve dans les documents de la cause les éléments suffisants pour fixer à la somme de 25 000 euro la réparation due par la société LBD Maison au titre de la brusque rupture du contrat d'approvisionnement en papier Kraft ;

Attendu que la société Era expose que pour satisfaire sans délai aux commandes de papier Kraft de la société LBD Maison elle était contrainte, compte tenu des délais de livraison de ses propres fournisseurs, de maintenir un stock important de ce produit et indique que sur les trois dernières commandes de la société LBD Maison (n° 14 704 0006 du 2 avril 2007, n° 14 704 0007 du 2 avril 2007 et n° 14 7050 158 du 14 mai 2007), portant ensemble sur 200 000 m² de papier Kraft, 93 076 m² restent à recevoir par la société LBD Maison ; qu'elle sollicite à ce titre la condamnation de cette dernière à lui payer la somme de 32 195 euro ; que cependant la société Era ne démontre pas que l'absence de livraison du solde des commandes précitées est imputable à la société LBD Maison ; qu'elle doit être déboutée de sa demande ;

Attendu que la société LBD Maison qui succombe principalement sera condamnée aux dépens de première instance et d'appel ainsi qu'à payer à la société Era la somme de 3 000 euro en application de l'article 700 du Code de procédure civile ;

Par ces motifs : LA COUR, statuant par arrêt contradictoire ; Reçoit les appels en la forme ; Donne acte à la société LBD Ménage de son changement de dénomination sociale en LBD Maison ; Rejette des débats les pièces produites par la société Era sous les n° 47, 56 et 87 ; Confirme le jugement en qu'il a : - condamné la société Era à payer à la société LBD Maison la somme de 35 000 euro à titre de dommages et intérêts et débouté la société Era de sa propre demande de dommages et intérêts ; L'infirme en ses autres dispositions ; Et statuant à nouveau ; Dit que la résiliation du contrat du 30 septembre 2003 est intervenue aux torts réciproques des parties ; Condamne la société LBD Maison à payer à la société Era : - 34 066,69 euro en contrepartie de la restitution à intervenir par la société Era du stock des produits qu'elle lui a livrés, - 25 000 euro à titre de dommages et intérêts pour brusque rupture de la relation commerciale établie pour la fourniture en papier Kraft 63g ; Déboute la société Era de sa demande en paiement du solde des produits des commandes de la société LBD Maison n° 14 704 0006, n° 14 704 007 et n° 14 705 0158 ; Fait interdiction à la société Era de commercialiser ou distribuer les stocks de produits qui lui ont été livrés par la société LBD Maison, ce sous astreinte de 500 euro par infraction constatée ; Dit n'y avoir lieu pour la cour de se réserver la liquidation de l'astreinte, Dit n'y avoir lieu d'ordonner la production par la société Era d'un inventaire des stocks vendus ni la confiscation ou la destruction des produits à l'origine de la rupture du contrat du 30 septembre 2003 ; Condamne la société LBD Maison aux dépens de première instance et d'appel ; La condamne également à payer à la société Era la somme de 3 000 euro en application de l'article 700 du Code de procédure civile.