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Décisions

CA Paris, Pôle 5 ch. 10, 16 mai 2012, n° 10-19883

PARIS

Arrêt

Confirmation

PARTIES

Demandeur :

Anfasocaf

Défendeur :

Thermor Pacific

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Jacomet

Conseillers :

Mmes Saint Schroeder, Reghi

Avocats :

SCP Galland-Vignes, Mes Thiant, Teytaud, Redon

TGI Paris, du 26 mai 2005

26 mai 2005

Vu le jugement prononcé le 26 mai 2005 par le Tribunal de grande instance de Paris qui a condamné l'association nationale et fédérale d'anciens sous-officiers de carrière de l'Armée française-Anfasocaf à restituer à la SAS Compagnie européenne électro-thermique-CEET la somme de 80 000 euro avec intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure du 30 avril 2003, dit qu'il sera fait application de l'article 1154 du Code civil, déclaré irrecevable l'appel en garantie dirigé contre la société RPA laquelle n'était plus in bonis, rejeté toutes autres demandes plus amples ou contraires, ordonné l'exécution provisoire, dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du Code de procédure civile et condamné l'Anfasocaf aux dépens,

Vu l'arrêt du 4 mai 2007 de cette cour qui, statuant sur l'appel interjeté par l'Anfasocaf, a confirmé dans les rapports entre l'Anfasocaf et la SAS CEET devenue Thermor Pacific le jugement déféré, rejeté toutes autres demandes et condamné l'Anfasocaf aux dépens,

Vu l'arrêt du 27 novembre 2008 de la Cour de cassation qui a cassé l'arrêt du 4 mai 2007 au motif que l'audience de plaidoiries s'est déroulée le 1er février 2007 en présence de l'avocat de la société Thermor Pacific mais en l'absence de celui de l'Anfasocaf sans que la cour ait constaté que celle-ci avait été avisée du renvoi de l'affaire à l'audience du 1er février 2007,

Vu les dernières conclusions du 13 décembre 2011 de l'Anfasocaf qui demande à la cour d'infirmer le jugement, de dire qu'elle n'a pas reçu la somme de 80 000 euro de la part de RPA pour les exercices 2003 et 2004 et la mettre hors de cause, de rejeter les demandes de la société Thermor Pacific et de condamner celle-ci à lui payer la somme de 5 000 euro par application de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens,

Vu les dernières écritures signifiées le 26 juillet 2011 par la société Thermor Pacific, anciennement dénommée Compagnie européenne électro-thermique-CEET, qui conclut, au visa des articles L. 227-6 du Code de commerce, 20 de la loi du 29 janvier 1993, 1984 et suivants du Code civil, à la confirmation de la décision déférée en toutes ses dispositions et en conséquence à la nullité des ordres d'insertion des 3 et 14 février 2003 et à la condamnation de l'Anfasocaf à lui payer la somme de 80 000 euro avec intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure du 30 avril 2003, à titre subsidiaire à la résiliation des contrats d'insertions publicitaires et au payement de ladite somme et à la condamnation de l'Anfasocaf à lui payer la somme de 5 000 euro en application de l'article 700 du Code de procédure civile et aux dépens de première instance et d'appel.

Sur ce

Considérant que CEET, aujourd'hui dénommée Thermor Pacific, a été démarchée par l'agence de publicité RPA qui avait été mandatée par l'Anfasocaf, suivant mandat du 17 septembre 2002, pour faire paraître des publicités dans 'La revue des sous-officiers' appartenant à l'association ; qu'elle a signé deux ordres d'insertion les 3 et 14 février 2003 et versé les sommes de 50 000 euro et 30 000 euro à RPA ; qu'ayant constaté que ces deux ordres d'insertion étaient entachés de nullité, le président de CEET a écrit à celle-ci aux fins d'obtenir le remboursement de ces sommes mais en vain malgré une mise en demeure du 17 avril 2003 ; qu'elle a alors fait assigner RPA et l'Anfasocaf en payement de la somme de 80 000 euro devant le Tribunal de grande instance de Paris qui a statué dans les termes précités, le Tribunal de commerce de Paris ayant prononcé la liquidation judiciaire de RPA le 3 mai 2004 ;

Considérant que l'Anfasocaf fait valoir, d'une part, que contrairement à ce que soutient Thermor Pacific, le directeur commercial de CEET qui a signé les ordres d'insertion avait qualité, vis à vis des tiers, pour engager sa société dans le cadre d'une action commerciale en vertu de la théorie de l'apparence et, d'autre part, en réponse à l'argumentation de l'intimée sur la violation de la loi 'Sapin', que les documents signés et les versements faits à RPA étaient de nature contractuelle ; qu'elle ajoute qu'il a été convenu entre elle et RPA que cette société assurerait seule la responsabilité de ses actes ; qu'elle dément avoir reçu la somme de 80 000 euro de la part de RPA ;

Considérant que Thermor Pacific objecte que son directeur commercial n'avait pas le pouvoir de signer les deux bons à tirer que la comptabilité a payés sans vérifier que ce dernier avait qualité pour engager la société qui n'est engagée que par son président et que les deux ordres d'insertion sont donc nuls ; qu'elle excipe de la violation de l'article 20 de la loi du 29 janvier 1993 dite 'loi Sapin' et de la nullité des ordres d'insertion pour ce second motif ; qu'en application du contrat de mandat signé par l'Anfasocaf et RPA, la seconde n'a fait que représenter la première qui est donc réputée avoir accompli personnellement les actes conclus par RPA avec les tiers ;

Considérant, cela exposé, que le mandant peut être engagé sur le fondement d'un mandat apparent, même en l'absence d'une faute susceptible de lui être reprochée, si la croyance du tiers à l'étendue des pouvoirs du mandataire prétendu est légitime, ce caractère supposant que les circonstances autorisaient le tiers à ne pas vérifier les limites exactes de ces pouvoirs ; qu'en l'espèce, le signataire des deux ordres d'insertion publicitaire litigieux a indiqué qu'il était directeur commercial et a apposé le cachet de la société alors dénommée Compagnie européenne électro-thermique au bas de ces ordres d'insertion ; que compte tenu de ces circonstances, RPA pouvait croire de façon légitime que le signataire, M. Geig, avait le pouvoir de signer les ordres d'insertion, lesquels ne sont donc pas entachés de nullité ;

Considérant que l'article 20 de la loi n° 93-122 du 29 janvier 1993 stipule que 'tout achat d'espace publicitaire ou de prestation ayant pour objet l'édition ou la distribution d'imprimés publicitaires ne peut être réalisé par un intermédiaire que pour le compte d'un annonceur et dans le cadre d'un contrat écrit de mandat. Ce contrat fixe les conditions de la rémunération du mandataire en détaillant, s'il y a lieu, les diverses prestations qui seront effectuées dans le cadre de ce contrat de mandat et le montant de leur rémunération respective. (...)' ;

Considérant que les deux ordres d'insertion publicitaire de même que les courriers adressés par RPA à CEET sont à en-tête de la 'Revue des sous-officiers Association nationale et fédérale d'anciens sous-officiers de carrière de l'Armée française' et précise que le règlement sera fait à l'ordre de RPA ; qu'il est constant qu'aucun mandat n'a été donné par l'annonceur à RPA qui est intervenue en qualité d'intermédiaire au sens de l'article 20 susvisé ; que les deux ordres d'insertion des 3 et 14 février 2003 sont donc irréguliers comme l'a jugé le tribunal ; qu'eu égard au mandat donné à RPA par l'Anfasocaf, celle-ci est tenue d'exécuter les engagements contractés par le mandataire, ce dernier fût-il en liquidation judiciaire ; que CEET ayant versé la somme de 80 000 euro à RPA agissant en sa qualité de mandataire de l'appelante, celle-ci est tenue de payer à Thermor Pacific, anciennement dénommée CEET, une somme de même montant, les clauses du contrat signé le 17 septembre 2002 et de son avenant du 14 avril 2003 désignant RPA comme seule responsable vis à vis des tiers annonceurs concernant la parution dans les revues et vis à vis des commerciaux n'étant pas opposables aux tiers ; que le jugement sera donc confirmé ;

Et considérant qu'il n'y a pas lieu de faire application de l'article 700 du Code de procédure civile au profit de l'une ou l'autre des parties, l'Anfasocaf étant condamnée aux dépens d'appel ;

Par ces motifs : Confirme le jugement, Rejette les demandes fondées sur l'article 700 du Code de procédure civile, Condamne l'Association nationale et fédérale d'anciens sous-officiers de carrière de l'armée française aux dépens d'appel qui pourront être recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile.