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Décisions

CA Chambéry, ch. civ. sect. 1, 4 septembre 2012, n° 12-00355

CHAMBÉRY

Arrêt

PARTIES

Demandeur :

Auto Propulsion (Sté)

Défendeur :

Aixam Mega (Sté)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Billy

Conseillers :

MM. Leclercq, Morel

Avocats :

Mes Anxionnaz, Dereymez, Selarl Deraine, SCP legi Consultants

T. com. Chambéry, du 1er févr. 2012

1 février 2012

OBJET DU CONTREDIT

Le 23 janvier 2003 la société Auto Propulsion qui exerce le commerce de véhicules automobiles et la société Aixam Mega qui construit des véhicules automobiles ont signé un contrat d'importation exclusive à durée indéterminée, selon lequel Aixam Mega concédait à Auto Propulsion le droit de vendre à titre exclusif en Guadeloupe et en Martinique les véhicules neufs de sa marque.

Par courrier du 11 juin 2009, la société Aixam Mega a résilié ce contrat sans préavis en se prévalant de manquements qu'elle imputait à Auto Propulsion.

La société Auto Propulsion, soutenant que cette rupture était abusive, a, par acte du 7 juillet 2011, assigné la société Aixam Mega devant le Tribunal de commerce de Chambéry aux fins qu'elle soit condamnée à lui payer diverses sommes à titre de dommages et intérêts.

La société Aixam Mega a demandé au tribunal de se déclarer territorialement incompétent au profit du Tribunal de commerce de Lyon en se prévalant de ce que, la société Auto Propulsion visait dans son assignation l'article L. 442-6 I 5° du Code de commerce qui, en matière de rupture brutale fixait la compétence exclusive de certains tribunaux, en l'occurrence, compte tenu de son siège social situé à Aix-les-Bains, du Tribunal de commerce de Lyon.

Par jugement du premier février 2012, le tribunal s'est déclaré incompétent au profit du Tribunal de commerce de Lyon et condamné la société Auto Propulsion à payer à la société Aixam Mega la somme de 500 euro en application de l'article 700 du Code de procédure civile.

Le 14 février 2012, la société Auto Propulsion a déposé un contredit de compétence motivé au greffe du Tribunal de commerce de Chambéry à l'encontre de ce jugement.

La société Auto Propulsion demande à la cour :

- de dire que le Tribunal de commerce de Chambéry est compétent pour se prononcer sur sa demande,

- de faire droit à son contredit de compétence,

- de renvoyer l'affaire au Tribunal de commerce de Chambéry pour qu'il statue sur la demande.

Elle fait valoir :

- qu'elle n'a nullement assigné la société Aixam sur le fondement des dispositions de l'article L. 442-6 I 5° du Code de commerce qui sanctionne uniquement la rupture brutale de relations commerciales mais sur celui des articles 1134, 1135 et 1149 du Code civil, en se prévalant d'une rupture, non point brutale, mais abusive,

- que par conséquent, l'article L. 442-6 I 5° ne s'appliquant pas, il y a lieu de faire application de la clause insérée dans le contrat donnant compétence aux tribunaux du ressort du siège social du constructeur, en l'occurrence, le Tribunal de commerce de Chambéry puisqu'elle a son siège à Aix-les-Bains.

La société Aixam Mega demande à la cour :

- de dire que le Tribunal de commerce de Lyon est territorialement compétent pour connaître de la présente affaire,

- de débouter la société Auto Propulsion de ses demandes,

- de réformer le jugement en ce qu'il ne pouvait considérer que la rupture avait eu lieu brutalement et sans préavis sans porter une appréciation sur le fond du dossier qui n'avait pas été débattu et dont il n'était pas saisi,

- de lui donner acte de ce qu'elle entend conclure sur le fond de l'affaire,

- de condamner la société Auto Propulsion à lui payer la somme de 2 000 euro en application de l'article 700 du Code de procédure civile.

Elle fait valoir :

- que la société Auto Propulsion a visé l'article L. 442-6 I 5° du Code de commerce comme fondement unique dans son assignation, n'ayant modifié ce fondement au profit des articles 1134 et 1135 du Code civil que dans son contredit,

- qu'elle sollicite l'indemnisation de son préjudice en invoquant le caractère brutal de la rupture, le fondement de l'indemnisation reposant dès lors sur l'article L. 442-6 I 5° et non sur les dispositions du Code civil,

- que par conséquent seul l'article L. 442-6 I 5°, qui est d'ordre public a vocation à s'appliquer, ce texte renvoyant à l'article D. 442-3 qui donne compétence territoriale au Tribunal de commerce de Lyon.

MOTIFS

Attendu que l'article 19 du contrat d'importation exclusive signé par les parties le 23 janvier 2003 dispose qu'en cas de contestations, il est fait attribution de compétence aux tribunaux du ressort du siège social de l'entreprise du constructeur, étant précisé que s'il est demandeur le constructeur peut également, à son choix, saisir le tribunal compétent du ressort du siège social de l'entreprise de l'importateur ;

Qu'en l'occurrence, l'application de cette clause conduit à désigner le Tribunal de commerce de Chambéry, dans le ressort duquel se trouve le siège social de la société défenderesse Aixam Mega, comme territorialement compétent ;

Attendu que le litige résulte de la rupture par Aixam Mega du contrat d'importation exclusif qui liait les parties et se rapporte aux conditions dans lesquelles il y a été mis fin et aux conséquences en ayant résulté pour la société Auto Propulsion ;

Que la clause attributive de juridiction demeure applicable dès lors que la demande, même si elle pourrait, le cas échéant, être examinée au regard des dispositions de l'article L. 442-6 I 5° du Code de commerce, présente un lien avec le contrat et se fonde sur son inexécution au regard des obligations imposées en matière contractuelle par les articles 1134 et 1135 du Code civil ;

Attendu, par conséquent, qu'il y a lieu de dire que le Tribunal de commerce de Chambéry est territorialement compétent pour statuer sur le litige et de lui renvoyer l'affaire ;

Attendu que le dispositif de la décision contredite ne se prononce pas sur le fond du dossier ;

Que la demande de réformation formée de ce chef par la société Aixam Mega ne peut donc prospérer ;

Attendu qu'il n'y a pas lieu de faire application des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile, tant en première instance que devant la cour ;

Par ces motifs : LA COUR, statuant publiquement et contradictoirement, Dit le contredit recevable et fondé, Dit que le Tribunal de commerce de Chambéry est territorialement compétent pour statuer sur le litige, Renvoie l'affaire devant le Tribunal de commerce de Chambéry, Rejette les demandes formées au titre de l'article 700 du Code de procédure civile, tant devant le Tribunal de commerce de Chambéry que devant la cour, Rejette toute autre demande, Condamne la société Aixam Mega aux dépens de première instance et aux dépens du contredit, Rappelle que le greffier de la cour doit procéder conformément aux dispositions de l'article 87 du Code de procédure civile.