Cass. com., 23 octobre 2012, n° 11-24.775
COUR DE CASSATION
Arrêt
Cassation
PARTIES
Demandeur :
Sapa building system (SAS)
Défendeur :
Arcal Antilles (SARL)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Espel
Rapporteur :
Mme Mouillard
Avocat général :
M. Mollard
Avocats :
SCP Fabiani, Luc-Thaler
LA COUR : - Attendu, selon l'arrêt attaqué, que depuis 2000, la société Arcal Antilles (la société Arcal) était, sans contrat écrit, le distributeur exclusif dans le département de La Guadeloupe de profilés en aluminium, joints et accessoires fournis par la société Sapa building system (la société Sapa) ; qu'invoquant une rupture brutale de la relation commerciale, intervenue en juin 2007, la société Arcal a assigné la société Sapa en paiement de dommages-intérêts ;
Sur le premier moyen, pris en sa première branche : - Attendu que la société Sapa fait grief à l'arrêt de dire qu'elle a rompu brutalement sans préavis écrit la relation commerciale établie avec la société Arcal et de la condamner à payer à cette dernière une indemnité alors, selon le moyen, qu'engage sa responsabilité l'auteur d'une rupture brutale de relations commerciales établies ; que ne constitue pas une rupture brutale la simple modification du circuit de commercialisation, impliquant dorénavant un intermédiaire ; qu'en retenant le contraire, après avoir constaté que la société Arcal a pu continuer à s'approvisionner en "séries froides" de la même marque Intexalu auprès de Sompal, ce dont il résultait qu'aucune rupture brutale n'était intervenue, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences qui s'évinçaient de ses propres constatations et, partant, a violé l'article L. 442-6, I, 5°, du Code de commerce par fausse application ;
Mais attendu que l'arrêt relève que la société Arcal n'a été informée que le 18 juin 2007 de ce que, à partir de la fin du mois de juillet 2007, la société Sapa ne commercialiserait plus directement les "séries froides" et qu'il lui faudrait désormais se fournir auprès d'une société tierce, laquelle ne lui a pas consenti les mêmes conditions tarifaires ; qu'en l'état de ces constatations, dont il résulte que la société Sapa avait rompu partiellement la relation commerciale établie, c'est sans méconnaître les dispositions invoquées que la cour d'appel a statué comme elle a fait ; que le moyen n'est pas fondé ;
Mais sur le même moyen, pris en sa deuxième branche : - Vu l'article L. 442-6, I, 5° du Code de commerce ; - Attendu que pour retenir la responsabilité de la société Sapa pour rupture totale de la relation commerciale et la condamner à verser une indemnité à la société Arcal, l'arrêt retient que ce n'est que le 18 juin 2007 que cette dernière a été informée d'une modification des conditions tarifaires et de vente qui devait prendre effet le 1er juillet suivant et qui, en ce qu'elle lui imposait d'adapter son organisation, notamment financière, aurait justifié un préavis de six mois qui n'a pas été respecté ;
Attendu qu'en se déterminant ainsi, sans constater que la relation commerciale avait pris fin, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision ;
Et sur le second moyen, pris en sa quatrième branche : - Vu l'article L. 442-6, I, 5° du Code de commerce, ensemble l'article 1382 du Code civil ; - Attendu que, pour allouer à la société Arcal une indemnité au titre de la totalité du préavis qui aurait dû être respecté, l'arrêt retient que la société Arcal avait besoin d'un préavis de six mois pour adapter son organisation, notamment financière, aux nouvelles conditions imposées par la société Sapa ;
Attendu qu'en statuant ainsi, alors qu'elle avait relevé que la notification des modifications contractuelles était intervenue le 18 juin 2007 pour une entrée en application le 1er juillet suivant s'agissant des tarifs et des conditions de vente, et le 30 juillet s'agissant du circuit de distribution des séries, ce dont il résultait que la société Sapa avait fait courir un préavis dont la durée devait s'imputer sur celle du préavis jugé nécessaire, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations, a violé les textes susvisés ;
Par ces motifs, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs : Casse et annule, mais seulement en ce qu'il dit que la société Sapa building system a rompu brutalement sans préavis écrit les relations commerciales établies avec la société Arcal Antilles, la condamne à payer à cette dernière une somme de 245 000 euro à titre de dommages-intérêts et ordonne la compensation judiciaire, l'arrêt rendu le 23 juin 2011, entre les parties, par la Cour d'appel d'Aix-en-Provence ; remet, en conséquence, sur ces points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la Cour d'appel d'Aix-en-Provence, autrement composée.