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Décisions

CA Chambéry, ch. civ. sect. 1, 13 mars 2012, n° 11-00142

CHAMBÉRY

Arrêt

Confirmation

PARTIES

Demandeur :

Société des anciens Etablissements Maurin (SA)

Défendeur :

DCO Eurodatacar (SA)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Billy

Conseillers :

MM. Leclercq, Morel

Avocats :

SCP Fillard Cochet-Barbuat, Selarl Vailly & Associés, SCP Dormeval-Puig, SCP Bignon Lebray & Associés

T. com. Annecy, du 14 déc. 2010

14 décembre 2010

Attendu que la SA des anciens établissements Maurin, distribuant des véhicules automobiles par l'intermédiaire de nombreuses sociétés et points de vente du quart sud-est de la France, a conclu avec la SA DCO Eurodatacar le 21 février 2008, avec effet au 1er mars suivant, et pour une durée de deux ans, deux contrats pour le marquage antivol des véhicules vendus dans le réseau, l'un pour les véhicules neufs, l'autre pour les véhicules d'occasion, étant précisé un prix unitaire par voiture vendue ainsi qu'une réduction globale sur ce tarif ;

Que, dans les deux cas il était prévu une facturation provisionnelle sur la base des volumes annuels de ventes estimés ;

Que la SA des anciens établissements Maurin a résilié "à titre conservatoire" les contrats le 19 novembre 2009 pour le terme du 28 février 2010 et que la SA DCO Eurodatacar lui a demandé les chiffres exacts de ventes des véhicules neufs et d'occasion afin d'établir la facturation définitive des deux exercices ;

Qu'un désaccord est apparu concernant les véhicules dits "de flotte" neufs que la SA des anciens établissements Maurin souhaite exclure de la facturation au motif qu'ils étaient exclus par son contrat antérieur avec la société Fichauto et sur la valeur des véhicules "marchands" exclus de la facturation ;

Que le Tribunal de grande instance d'Annecy, statuant comme tribunal de commerce, par jugement du 14 décembre 2010, a condamné la SA des anciens établissements Maurin à payer à la SA DCO Eurodatacar les sommes demandées de 184 602,60 euro de solde sur les véhicules neufs vendus sur la période du 1er mars 2008 au 28 février 2009 et 184 602,60 euro de solde pour la période du 1er mars 2009 au 28 février 2010, avec les intérêts légaux à compter du 20 mars 2010, a débouté la SA CDO Eurodatacar de sa demande de provision sur les véhicules d'occasion, enjoint à la SA des anciens établissements Maurin de fournir sous astreinte une attestation du commissaire aux comptes certifiant le nombre exact des véhicules neufs vendus la deuxième année et celui des véhicules d'occasion vendus hors marchands spécialisé pour les deux années, sursis à statuer sur ces points, débouté la SA des anciens établissements Maurin de sa prétention au titre de l'allocation sponsoring et l'a condamnée à payer 5 000 euro à la demanderesse par application de l'article 700 du Code de procédure civile, ordonnant l'exécution provisoire à hauteur de la moitié des condamnations prononcées en principal ;

Que la SA des anciens établissements Maurin en a interjeté appel par déclaration du 19 janvier 2011 ;

Attendu que, expliquant qu'elle avait conclu un contrat de service et gravage personnalisé avec la société Fichauto, après que la société Eurodatacar, qui exécutait pour elle un gravage classique, eût refusé cette prestation, que la SA Eurodatacar a pris le contrôle de Fichauto et a voulu régulariser de nouveaux contrats, qu'elle-même lui a indiqué qu'elle souhaitait des prestations et garanties identiques à celles de Fichauto, que, à la suite de la résiliation Eurodatacar a établi des factures intégrant les ventes de véhicules neufs (flottes) et d'occasion (ventes aux marchands) qui ne devaient pas être comptabilisées, que, par courrier du 20 septembre 2007, le PDG de Eurodatacar a émis une offre portant sur des prestations identiques et des conditions contractuelles identiques à celles proposées par l'ancien fournisseur, que cette offre ne peut pas avoir été rendue caduque par l'avenant signé le 22 novembre 2007 prévoyant la reconduction pour un an du contrat Fichauto, que celle-ci ne l'a pas signé et qu'il n'a pas été retourné à Maurin, que l'accord-cadre du 21 février 2008 est présenté comme venant consacrer une reprise à l'identique du produit souscrit auprès de Fichauto depuis 2005 avec seulement des mises en conformité avec le Code de la consommation, que Fichauto a continué d'émettre les factures jusqu'en avril 2008, que Eurodatacar n'est pas de bonne foi, qu'elle contestait en première instance le contrôle de Fichauto, qu'il n'a jamais été d'usage d'inclure les flottes dans l'assiette de calcul des redevances, que le gravage de ces véhicules et l'octroi des garanties qui s'y attachent ne présentent aucune utilité ou intérêt pour leur détenteur, que certains particuliers ne souhaitent pas bénéficier des garanties du contrat privilège, ce qui est l'attitude des propriétaires de flottes, que Eurodatacar, qui a l'obligation d'inscrire tous les véhicules gravés sur un fichier Argos, ne justifie pas y avoir inscrit un nombre de véhicules comprenant celui dépendant des flottes, que le marquage des véhicules d'occasion ne peut concerner que ceux vendus aux particuliers, que les contrats Fichauto excluent ceux revendus aux marchands, qu'elle a satisfait à l'injonction du tribunal, que la redevance véhicules neufs première année porte sur 12 847 véhicules hors flotte soit un dû de 314 751,50 euro HT et 5 110 véhicules d'occasion soit 85 680 euro pour la première année et 15 345 véhicules neufs hors flotte et 5 704 véhicules d'occasion soit 375 952,50 euro et 95 827,20 euro HT la seconde année, qu'elle a payé 184 602,60 euro et 154 350 euro HT d'acomptes et l'exécution provisoire, alors qu'elle ne devait que 872 379,20 euro HT, que le président d'Eurodatacar s'est engagé par le courriel du 20 septembre 2007 à lui verser une allocation de sponsoring de 18 % du chiffre d'affaires annuel qui a été payée la première année, la SA des anciens établissements Maurin demande de réformer le jugement, de débouter la SA DCO Eurodatacar, de la condamner à lui payer 23 270,80 euro de trop perçu et 84 920 euro HT d'allocation sponsoring pour la période du 1er mars 2009 au 28 février 2010 avec les intérêts légaux à compter de l'arrêt, ainsi que 7 500 euro par application de l'article 700 du Code de procédure civile ;

Attendu que, soutenant que le contrat entre Maurin et Fichauto n'était pas conforme au Code des assurances et au Code de la consommation, que le prix du contrat est fonction du nombre de véhicules vendus par le concessionnaire et que tous les véhicules vendus donnent lieu au paiement de la prestation de gravage, que le contrat est clair, qu'elle n'a aucun moyen de savoir, lors de la saisie d'un véhicule sur le fichier Argos, s'il s'agit d'un véhicule flotte ou non, qu'elle a l'obligation de saisir sur le fichier Argos l'ensemble des fiches transmises par le groupe Maurin, que le mail de monsieur Demoustier, président d'Eurodatacar, du 20 septembre 2007 est devenu caduc par la signature de l'avenant avec Fichauto, que Fichauto n'a pas signé l'avenant comme cela se fait couramment mais l'a conservé, que l'avenant entre Fichauto et Maurin a été suivi d'effets et de factures jusqu'en mars 2008, qu'elle est devenue société mère de Fichauto suite à une cession du 31 octobre 2007, qu'elles sont restées sociétés distinctes, qu'il n'y a pas eu de volonté commune d'exclure les véhicules flottes, qu'il n'est pas démontré un usage sur ce point, qu'elle a tatoué plus de 16 656 véhicules pour Maurin qui n'en a payé que 11 757, que le courriel du 20 septembre 2007 n'a pas valeur contractuelle, que la proposition n'a pas été suivie d'effet, qu'elle a versé 100 000 et 20 000 euro HT en 2008 et 2009 pour un sponsoring pour le véhicule de course engagé par le groupe Maurin, que les 100 000 euro convenus et le pourcentage n'étaient pas cumulatifs, que le montant réel payé est de 895 650 euro, la SA DCO Eurodatacar conclut à la condamnation de la SA des Anciens établissements Maurin à lui payer le solde de 211 272,44 euro TTC, après déduction des sommes versées au titre de l'exécution provisoire, outre intérêts au taux légal à compter de l'arrêt, ainsi que 8 000 euro au titre de l'article 700 du Code de procédure civile , et à la constatation qu'elle-même ne doit rien au titre du sponsoring ;

Attendu que la cour ne peut que confirmer le jugement en ce qui concerne le contrat véhicules neufs en en adoptant les motifs ;

Qu'en effet les termes clairs de ce contrat ne peuvent être déformés par respect pour un accord cadre qui se borne à parler de 'reprise à l'identique des garanties du produit "Groupe Maurin privilège", d'où il ne peut pas être tiré de conclusion quant aux véhicules exclus de la facturation des marquages, ou des courriers précontractuels qui, faisant seulement état de discussions, ont trouvé leur aboutissement dans les contrats dont les termes sont ici contestés ;

Attendu que, par ailleurs, le premier juge a exactement retenu que l'existence d'un usage ne pouvait être démontré par la seule production d'une attestation d'une personne, ancien salarié d'une société du groupe Eurodatacar qui avait personnellement bénéficié d'attestation d'un dirigeant des anciens établissements Maurin, ni par le contrat conclu par celle-ci avec la société Identicar, ensuite de la résiliation litigieuse ;

Que, d'ailleurs, l'exclusion des flottes dans le contrat Fichauto résultait d'une mention manuscrite ajoutée, et qu'elle n'était pas non plus prévue dans le contrat préimprimé Eurodatacar alors qu'y était prévue l'exclusion des véhicules d'occasion 'marchands' ;

Qu'il sera donc fait droit à la demande d'Eurodatacar d'un solde de 211 272,44 euro TTC ;

Attendu que, dans un courriel du 20 septembre 2007, monsieur Demoustier, dirigeant d'Eurodatacar écrivait à "j.b.maurin" : "je vous propose également, si cette proposition vous convient, une convention de sponsoring pour un montant correspondant à 18 % du CA annuel qu'Eurodatacar réalisera avec votre groupe. Si je m'en tiens aux chiffres d'achat évoqués lors de la fin de notre réunion par monsieur Hiard, le montant du sponsoring devrait se situer entre 60 000 et 80 000 euros" ;

Que l'intimée conteste toute valeur contractuelle à cette proposition mais indique avoir versé à l'appelante 100 000 euro HT en 2008 et 20 000 euro HT en 2009 pour un sponsoring, plus précisément selon factures Maurin du 25 juin 2008 pour 119 600 euro, payée le 2 juillet, et du 9 décembre 2009 de 23 920 euro TTC ;

Que la société Maurin demande de ce chef une somme de 84 920 euro représentant 18 % du chiffre d'affaires réalisé du 1er mars 2009 au 28 février 2010 ;

Attendu que, s'il est incontestable que le courriel du 20 septembre 2007 n'est pas un contrat, il n'en reste pas moins que, sur le point litigieux, il faisait une offre dans le seul intérêt de son destinataire et que cette offre a reçu exécution totale en 2008 et partielle en 2009, et d'une manière qui ne laisse pas de doute sur l'acceptation de la société Maurin puisqu'elle a établi des factures correspondantes qui ont été payées par Eurodatacar ;

Que la demande de l'appelante est donc justifiée sur ce point ;

Que, toutefois, en ce qui concerne le montant dû, la somme de 23 920 euro doit être déduite de celle demandée, en sorte qu'il reste dû (84 920 - 23 920=) 61 000 euro ;

Par ces motifs : Statuant publiquement et contradictoirement, Réformant, Condamne la SA DCO Eurodatacar à payer à la SA des Anciens établissements Maurin la somme de 61 000 euro (soixante et un mille euros) TTC au titre du contrat de sponsoring, Confirme le jugement pour le surplus, Condamne la SA des Anciens établissements Maurin à payer à la SA DCO Eurodatacar un solde à ce jour de 211 272,44 euro (deux cent onze mille deux cent soixante-douze euros quarante-quatre) TTC au titre du contrat véhicules neuf, Y ajoutant, Ordonne la compensation entre les deux créances et dit que la SA des Anciens établissements Maurin doit payer le solde, soit 150 272,44 euro (cent cinquante mille deux cent soixante-douze euros quarante-quatre) avec les intérêts au taux légal à compter de ce jour, Déboute les parties de leurs prétentions au titre des frais irrépétibles, Condamne la SA des Anciens établissements Maurin aux dépens avec application de l'article 699 du Code de procédure civile au profit de la SCP Dormeval Puig.