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Décisions

CA Montpellier, 1re ch. A, 10 mai 2012, n° 11-00353

MONTPELLIER

Arrêt

Confirmation

PARTIES

Demandeur :

Perlot

Défendeur :

Jully

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Besson

Conseillers :

M. Sarrazin, Mme Castanie

Avocats :

SCP Gilles Argellies, SCP Capdevila, Vedel Salles, Mes Watremet, De Rinaldo, Lambert, Deloffre

TGI Carcassonne, du 7 janv. 2010

7 janvier 2010

Faits et procédure

Propriétaire d'un haras sis à Sougraine, Mme Jully a vendu en mai 2007 à Mme Perlot, son ancienne salariée, un cheval dénommé "Petit Gundor" né le 21.5.2003 pour le prix de 14 000 euro à régler en plusieurs fois ; Mme Perlot a versé 7 000 euro mais elle ne s'est jamais acquittée du solde.

Mme Perlot a sollicité le remboursement de la somme de 7 000 euro au motif que le cheval ne correspondait pas à l'usage prévu de reproducteur et ne disposait pas d'origine ni de résultat aux compétitions justifiant son prix de vente.

Mme Perlot a assigné le 26 février 2009 Mme Jully en nullité de la vente sur le fondement du dol.

Par jugement du 7 janvier 2010, le Tribunal de grande instance de Carcassonne a :

- débouté Mme Perlot de ses demandes

- Condamné Mme Perlot à verser à Mme Jully la somme de 7 000 euro au titre du solde du prix du cheval outre celle de 69,40 euro à titre de dommages et intérêts et de 750 euro au titre de l'article 700 du Code de procédure civile.

Mme Perlot a relevé régulièrement appel du jugement le 17 janvier.

Dans ses dernières conclusions du 2 mai 2011, elle sollicite la nullité de la vente intervenue sur le fondement du dol. Elle fait valoir que le comportement de Mme Jully constitue une réticence dolosive puisqu'elle connaissait son intention d'acheter un cheval de race "Trakehner" et qu'elle a vendu l'animal comme étant de race "trakehner". Mme Perlot allègue que le seul document concernant cette vente est un certificat de versement d'acompte comportant la mention "étalon de race Trakehner". Si ce certificat n'est pas considéré comme un contrat de vente, il doit être considéré comme un commencement de preuve par écrit.

A titre subsidiaire, l'appelante demande la nullité du contrat sur le fondement d'une erreur sur une qualité substantielle de la chose objet du contrat au motif que le prix convenu correspond à celui d'un cheval de race Trakehner et non au prix d'un cheval d'origine.

Mme Jully, dans ses conclusions du 3 juin 2011 fait valoir que Mme Perlot ne rapporte la preuve ni des manœuvres dolosives ni que l'élément déterminant de son consentement était la pure race du cheval. Cette dernière connaissait parfaitement le cheval puisqu'elle avait l'habitude de s'entraîner avec et de s'en occuper.

Mme Jully allègue également le fait que le certificat du versement de l'acompte mentionnant "Etalon Origine Trakehner" a été établi postérieurement à la vente. Par conséquent, cette mention ne peut être contractuelle.

A titre de demande reconventionnelle, Mme Jully demande que Mme Perlot soit condamnée à lui verser la somme de 7 000 euro au titre du solde du prix du cheval. De plus, elle demande l'infirmation du jugement sur le remboursement des frais de pension.

Vu l'ordonnance de clôture en date du 13 mars 2012.

Motivation

Sur l'incident de communication de conclusions

Conformément aux articles 15, 16 et 135 du Code de procédure civile, les parties doivent communiquer leurs pièces dans un temps utile pour permettre à la partie adverse de conclure avant l'ordonnance de clôture.

Les conclusions contenant des moyens nouveaux sur l'origine du cheval et la vente de ce dernier, déposées le 12 mars 2012 par Madame Perlot alors que la clôture de l'instruction a été prononcée par ordonnance le 13 mars 2012, sont tardives et plaçaient l'adversaire dans l'impossibilité d'y répondre. Par conséquent, les conclusions de Madame Perlot déposées le 12 mars 2012 sont rejetées.

La demande principale en nullité pour vice du consentement

- Sur le dol

En application de l'article 1116 du Code civil, le dol est une cause de nullité de la convention lorsque les manœuvres pratiquées par l'une des parties sont telles, qu'il est évident que, sans ces manœuvres, l'autre partie n'aurait pas contracté. Il ne se présume pas, et doit être prouvé.

Mme Perlot ne rapporte aucun élément qui établit d'une part que l'objet du contrat portait sur la vente d'un cheval de race "Trakehner" ; et d'autre part qu'elle a procédé à des démarches pour obtenir un agrément auprès des haras nationaux en vue d'en faire un étalon reproducteur.

Mme Perlot n'a pas été trompée sur la race du cheval puisque d'une part, antérieurement à la conclusion du contrat, cette dernière avait une parfaite connaissance du cheval pour l'avoir débourré et monté en compétition. Et d'autre part, le vétérinaire atteste que le 15 janvier 2007 lors du signalement graphique du cheval et le 11 mai 2007 pour les rappels annuels des vaccins, Mme Perlot était en possession du document d'accompagnement. Par conséquent, Mme Perlot ne pouvait ignorer l'origine exacte du cheval avant la conclusion du contrat.

Les manœuvres frauduleuses doivent avoir déterminé le partenaire à s'engager et sont donc nécessairement antérieures à la conclusion du contrat.

Le justificatif du versement d'un acompte mentionnant "cheval Etalon Origine Trakehner" ne suffit pas en conséquence à caractériser la réticence ou les manœuvres dolosives de Mme Jully, dans la mesure où il a été délivré postérieurement à la conclusion du contrat.

La preuve des manœuvres frauduleuses prétendument exercées par Mme Jully n'est pas rapportée. Aucune manœuvre dolosive n'est caractérisée, il y a lieu de confirmer la décision du tribunal.

- Sur l'erreur sur la substance

Au terme de l'article 1110 du Code civil, l'erreur est cause de nullité de la convention lorsqu'elle tombe sur la substance même de la chose qui en est l'objet.

Mme Perlot qui connaissait parfaitement le cheval, pour l'avoir entretenu et monté lorsqu'elle était employée aux haras de Mme Jully, n'est pas fondée à soutenir qu'elle a donné son consentement par erreur.

La décision de la cour commande le rejet de la demande d'indemnisation formée par Mme perlot.

Les demandes reconventionnelles

- Sur le paiement de la somme restant due

Conformément à l'article 1650 du Code civil, la principale obligation de l'acheteur est de payer le prix au jour et au lieu réglés par la vente.

Le prix du cheval convenu par les parties est de 14 000 euro. Mme Perlot n'a réglé que la somme de 7 000 euro. Madame Perlot est condamnée, en conséquence, à payer la somme de 7 000 euro au titre du solde restant dû, pour satisfaire à son obligation contractuelle. Le jugement sera confirmé de ce chef.

- Sur le remboursement des frais de pension

Mme Jully allègue que des frais d'un montant de 4 389,40 euro ont été engagés pour l'entretien du cheval.

A l'appui de sa demande, Mme Jully ne produit aucun justificatif concernant les frais de pension. Elle n'a jamais mis en demeure Mme Perlot de retirer son cheval des haras, ni ne l'a mise en demeure de payer les frais de pensions. La demande de ce chef est rejetée.

Concernant, les frais de maréchal ferrant, Mme Jully fournit une facture de 69,40 euro. Les frais exposés pour l'entretien du cheval sont à la charge de sa propriétaire. Mme Perlot est condamnée à rembourser à Mme Jully la somme de 69,40 euro.

Par ces motifs : LA COUR, Déclare irrecevables les conclusions de Mme Perlot déposées le 12 mars 2012, Confirme le jugement entrepris dans toutes ses dispositions. Condamne, Mme Perlot à verser à Mme Jully la somme de 1 000 euro au titre de l'article 700 du code de procédure civile, Condamne Mme Perlot aux dépens d'appel avec application aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.