CA Amiens, 1re ch. sect. 1, 6 septembre 2012, n° 10-00392
AMIENS
Arrêt
Confirmation
PARTIES
Demandeur :
Miquel (ès qual.), Detroit VDA (SAS), Espace Detroit Automobiles (Sté), Lafarge (ès qual.)
Défendeur :
Chrysler France (SAS)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
Mme Belfort
Conseillers :
Mmes Piet, Dubaele
Avocats :
SCP Tetelin-Marguet, De Surirey, Mes Vynckier, Simoneau, Cavedon, Milhaud, Ponsard, Monteran
Décision :
Vu les appels interjetés le 22 janvier 2010 par Me Dominique Miquel en qualité de liquidateur de la SAS Detroit VDA, ainsi que Me Eric Rouvroy et Me Sophie Lafarge en qualités d'administrateur et de mandataire judiciaire de la SA EDA ;
Vu leurs conclusions déposées le 23 mars 2012 ;
Vu les conclusions déposées le 7 mars 2012 par la SAS Chrysler France ;
Vu l'ordonnance de clôture en date du 4 avril 2012 ;
Le 16 septembre 2002, la société Daimler Chrysler France (aux droits de laquelle vient la SAS Chrysler France) a conclu avec la SA Espace Detroit Automobile (EDA) dont le siège social est situé à Rivery (80) un contrat de distribution à durée indéterminée de véhicules neufs de marque Chrysler, Dodge et Jeep.
Le 29 novembre 2007, la SAS Chrysler France a conclu un contrat de distribution identique avec la SAS Detroit VDA, dont le gérant est le même que celui de la SA EDA, M. Eric Douart, et dont le siège social est situé à Villeneuve d'Ascq 59.
La SAS Chrysler France a par ailleurs conclu avec la SA EDA et la SAS Detroit VDA des contrats de services, en vertu desquels la première fournissait aux autres des pièces détachées des véhicules de ces marques en leur qualité de réparateurs agréés.
A l'occasion de contrôles effectués les 3, 15 et 16 décembre 2008, il a été constaté l'absence sur les sites de la SA EDA et de la SAS Detroit VDA de plusieurs véhicules qui leur avaient été livrés par la SAS Chrysler France mais qu'elles n'avaient pas payés.
Après avoir mis en demeure la SA EDA et la SAS Detroit VDA d'avoir à régler le prix des véhicules livrés impayés outre des pénalités contractuelles, par lettres recommandées avec avis de réception du 19 décembre 2008, la SAS Chrysler France leur a signifié par lettres recommandées avec avis de réception datées du 21 janvier 2009 la résiliation des contrats de distribution invoquant le non-paiement de ses créances et la disparition des véhicules, alors que des discussions avaient été engagées entre les parties sous l'égide de Me Rouvroy, mandataire ad hoc, jusqu'à une réunion tenue le 20 janvier.
Par ailleurs, la SAS Chrysler France a fait procéder à des saisies conservatoires de fonds et a revendiqué des véhicules livrés par elle ainsi que le prix de revente de certains des véhicules entre les mains de la SA EDA et de la SAS Detroit VDA.
Le 29 janvier 2009, elle a également assigné la SA EDA et la SAS Detroit VDA devant le juge des référés du Tribunal de commerce de Versailles afin d'obtenir le paiement de ses créances provisionnelles.
Toutefois, par un jugement du 13 février 2009, le Tribunal de commerce d'Amiens ouvrait une procédure de redressement judiciaire à l'égard de la SA EDA, puis par un jugement du 10 septembre 2010 arrêtait le plan de redressement de cette société et désignait Me Sophie Lafarge en qualité de commissaire chargée de l'exécution du plan,
Par un jugement du 10 février 2009, le Tribunal de commerce de Dunkerque ouvrait une procédure de liquidation judiciaire à l'égard de la SAS Detroit VDA désignant Me Dominique Miquel en qualité de liquidateur.
Saisi par une assignation délivrée le 9 février 2009 à la SAS Chrysler France, par la SAS Detroit VDA et par la SA EDA de demandes d'indemnisation des conséquences de rupture brutale ou de la rupture abusive des contrats de distribution, fondées sur l'article L. 442-6 du Code de commerce et les articles 1134 et suivants du Code civil, le Tribunal de commerce d'Amiens a, par un jugement rendu le 29 décembre 2009 :
- débouté la SA EDA, Me Eric Rouvroy et Me Sophie Lafarge es qualités d'administrateur et de mandataire judiciaire de cette société, et Me Dominique Miquel es qualité de liquidateur de la liquidation judiciaire de la SAS Detroit VDA de toutes leurs fins et conclusions à l'égard de la SAS Chrysler France,
- condamné Me Dominique Miquel es qualité de liquidateur de la SAS Detroit VDA à payer à la SAS Chrysler France la somme de 1 500euro au titre de l'article 700 du Code de procédure civile,
- condamné Me Eric Rouvroy en qualité d'administrateur et Me Sophie Lafarge en qualité de mandataire de la SA EDA à payer à la SAS Chrysler France la somme de 2 000euro au titre de l'article 700 du Code de procédure civile,
-condamné les défendeurs, es qualités, aux dépens.
Au visa des articles 74 et suivants du Code de procédure civile, D. 442-3 du Code de commerce, R311-3 du Code de l'organisation judiciaire et L626-25 du Code de commerce, les appelants demandent à la cour :
- de déclarer leurs appels recevables, de retenir sa compétence et à titre subsidiaire de renvoyer l'affaire devant la Cour d'appel de Paris,
-de reconnaître la qualité à agir de Me Sophie Lafarge en qualité de commissaire à l'exécution du plan,
-de constater que Me Eric Rouvroy en qualité d'administrateur n'intervient plus depuis le jugement arrêtant le plan de redressement de la SA EDA.
Sur le fond, invoquant les articles 1134, 1135, 1689 et 1690 du Code civil, ainsi que l'article L. 442-6 du Code de commerce, et poursuivant l'infirmation du jugement critiqué, les appelants demandent à la cour de :
- juger abusive la résiliation unilatérale et sans préavis par la SAS Chrysler France signifiée par une lettre du 21 janvier 2009, des contrats de distribution conclus le 16 septembre 2002 avec la SA EDA et le 29 novembre 2007 avec la SAS Detroit SAS Detroit VDA,
- subsidiairement de qualifier de brutale la résiliation unilatérale et sans préavis par la SAS Chrysler France signifiée par une lettre du 21 janvier 2009 des contrats de distribution conclus le 16 septembre 2002 avec la SA EDA et le 29 novembre 2007 avec la SAS Detroit SAS Detroit VDA,
- de condamner en conséquence la SAS Chrysler France à payer à la SA EDA la somme de 8 342 696,82euro en réparation de son préjudice matériel et celle de 150 000euro en réparation de son préjudice moral,
- de condamner en conséquence la SAS Chrysler France à payer à Me Dominique Miquel en qualité de liquidateur de la SAS Detroit VDA, la somme de 6 411 529,66euro en réparation du préjudice matériel de la société et celle de 150 000euro en réparation de son préjudice moral.
Subsidiairement, tout en sollicitant l'organisation d'une mesure d'expertise destinée à déterminer l'importance des préjudices matériels consécutifs à la rupture brutale et abusive des relations commerciales, les appelants demandent à la cour de condamner la SAS Chrysler France à payer
- à la SA EDA une provision de 3 000 000 euro à valoir sur son préjudice matériel,
- à Me Dominique Miquel en qualité de liquidateur de la SAS Detroit VDA une provision de 2 000 000 euro à valoir sur son préjudice matériel.
En tout état de cause, les appelants sollicitent la condamnation de l'intimée à payer la somme de 50 000 euro au titre de l'article 700 du Code de procédure civile à chacune des deux sociétés, outre sa condamnation aux dépens.
Les appelants reprochent à la SAS Chrysler France d'avoir résilié, sans préavis, unilatéralement, abusivement, ou brutalement, les contrats de distribution conclus avec la SAS Detroit VDA et la SA EDA, malgré l'ancienneté de leurs relations commerciales remontant à l'année 1994 et sa satisfaction exprimée au début de l'année 2008 de travailler avec M. Eric Douart, gérant des deux sociétés, en prenant prétexte de l'absence de certains véhicules constatée lors de contrôles, qualifiée abusivement de faute grave, ainsi que d'un prétendu défaut de paiement de créances en réalité cédées à un tiers, pour justifier la résiliation sans préavis des contrats, alors qu'en raison d'un contexte économique qui lui était défavorable, la SAS Chrysler France n'entendait plus en réalité poursuivre de relations avec deux de ses distributeurs, à qui elle n'avait pas réglé leurs primes pour l'année 2008.
Ils reprochent également à la SAS Chrysler France d'avoir elle-même failli à ses obligations contractuelles de loyauté et de coopération dans l'exécution du contrat de distribution, notamment en s'abstenant de leur régler les primes d'objectifs dues pour l'année 2008, et en s'abstenant de les aider en leur permettant de pratiquer des prix concurrentiels, alors que le marché automobile et notamment celui des gros véhicules fournis par elle subissait les contrecoups de la crise économique et financière de 2008 et une fiscalité environnementale dissuasive pour le consommateur.
Ils ajoutent que les saisies conservatoires mises en œuvre par l'intimée immédiatement après la résiliation unilatérale brutale et abusive des contrats, alors que les parties étaient en pourparlers, les ont conduits à une situation de cessation des paiements, la créance de la SAS Chrysler France représentant 82% du passif de la SA EDA.
In limine litis, la SAS Chrysler France conclut à l'irrecevabilité des appels interjetés par la SA EDA et la SAS Detroit VDA au motif que seule la Cour d'appel de Paris est désormais exclusivement compétente pour connaître de l'appel des décisions tranchant des litiges relevant de l'article L. 442-6 du Code de commerce, comme en l'espèce, ce qui constitue une fin de non -recevoir permettant son examen par la cour.
Sur le fond, l'intimée fait valoir que l'article L. 442-6-1 5°du Code de commerce invoqué par les appelantes au soutien de leurs demandes d'indemnisation, s'il stigmatise la rupture brutale d'une relation commerciale, n'interdit pas pour autant la possibilité de résilier le contrat sans préavis en cas d'inexécution de ses obligations par l'une des parties, comme en l'espèce le non-paiement des véhicules livrés par elle.
Elle ajoute que la disparition des véhicules vendus par elle et non payés par les appelantes et leurs explications mensongères pour cacher des ventes réalisées à son insu dont elles avaient conservé le prix, constituent des fautes graves justifiant la résiliation sans préavis des contrats, qui n'est donc nullement abusive au sens de l'article 1134 du Code civil.
Dès lors qu'il ne peut lui être imputé une résiliation brutale ou abusive des contrats de distribution conclus avec la SA EDA et la SAS Detroit VDA, la SAS Chrysler France en déduit que sa responsabilité ne saurait être engagée, et conclut au débouté des demandes dirigées contre elle par la SA EDA et la SAS Detroit VDA, poursuivant ainsi la confirmation du jugement critiqué.
Elle sollicite la condamnation de chacune des deux appelantes à lui payer la somme de 50 000 euro au titre de l'article 700 du Code de procédure civile.
Motifs de la décision
1. Sur la recevabilité des appels :
Saisi d'un incident par la SAS Chrysler France qui concluait à l'irrecevabilité des appels interjetés devant la Cour d'appel d'Amiens, au visa de l'article 8 du décret du 11 novembre 2009 instituant des juridictions spécialisées en matière de pratiques restrictives de concurrence et attribuant une compétence exclusive à la Cour d'appel de Paris pour connaître de leurs décisions, le conseiller de la mise en état a, par une ordonnance du 19 octobre 2010 rejeté l'exception d'incompétence, ainsi que l'irrecevabilité des appels allégués par la SAS Chrysler France.
La SAS Chrysler France rappelle avoir indiqué dans les actes de signification du jugement critiqué que l'appel devait être interjeté devant le Cour d'appel de Paris conformément aux termes du décret du 11 novembre 2009.
Au motif que le décret du 11 novembre 2009 entré en vigueur le 1er décembre 2009, dérogeant à l'article R. 311-3 du Code de l'organisation judiciaire, attribue une compétence exclusive à des juridictions spécialisées pour connaître des litiges relevant de l'article L. 442-6 du Code de commerce, visé par ses adversaires dans leur assignation, et à la Cour d'appel de Paris pour connaître des appels à l'encontre des décisions rendues par ces juridictions, la SAS Chrysler France conclut de nouveau à l'irrecevabilité des appels interjetés le 22 janvier 2010 par les appelants devant la Cour d'appel d'Amiens, soutenant qu'il s'agit non pas d'une exception de procédure, mais d'une fin de non-recevoir, qu'elle peut soumettre à l'examen de la cour, l'article 123 du Code de procédure civile disposant que les fins de non-recevoir peuvent être proposées en tout état de cause.
Les appelants rétorquent, mais à tort, que l'intimée n'est plus fondée à évoquer devant la cour une exception de compétence visée par l'article 93 du Code de procédure civile qui a été tranchée définitivement par l'ordonnance rendue par le conseiller de la mise en état.
L' article 122 du Code de procédure civile rappelé par l'intimée définit en effet la fin de non -recevoir comme tout moyen qui tend à faire déclarer l'adversaire irrecevable en sa demande, sans examen au fond, pour défaut du droit d'agir, tel le défaut de qualité, le défaut d'intérêt, la prescription, le délai préfix et la chose jugée.
Or ce texte n'énumère pas de manière exhaustive les causes qui privent une partie de son droit d'agir, et la SAS Chrysler France ne discute pas la qualité ou de l'intérêt à agir des appelants, contrairement à ce que développent les appelants, mais soutient que l'appel interjeté devant une cour d'appel incompétente, tenue de vérifier la régularité de sa saisine, est irrecevable eu égard aux dispositions d'ordre public organisant les compétences d'attribution respectives des cours d'appel, de sorte que l'appelant est privé de son droit de poursuivre son action, ce qui constitue bien une fin de non-recevoir, que la cour est tenue d'examiner.
L' article L. 442-6 -III du Code de commerce visant les pratiques restrictives de concurrence dans sa rédaction issue de la loi du 4 août 2008 dispose que tous les litiges relatifs à son application sont attribués aux juridictions dont le siège et le ressort ont été fixés depuis lors par l'article D. 442-3 du Code de commerce issu du décret n° 2009-1384 du 11 novembre 2009 entré en vigueur le 1er décembre 2009.
Ce texte dispose que, pour l'application des dispositions de l'article L. 442-6, le siège et le ressort des juridictions commerciales compétentes en métropole et dans les départements d'outre-mer (dont ne fait pas partie le Tribunal de commerce d'Amiens) sont fixés conformément au tableau de l'annexe 4-2-1 du présent livre, et que la cour d'appel compétente pour connaître des décisions rendues par ces juridictions est celle de Paris.
Tel n'est pas le cas du jugement critiqué qui a été rendu par le Tribunal de commerce d'Amiens.
Cependant, la SAS Chrysler France objecte qu'il est de principe que les lois de procédure, organisant les voies de recours sont d'application immédiate, et qu'à la date de l'entrée en vigueur du décret, le 1er décembre 2009, la Cour d'appel d'Amiens n'était pas encore saisie.
Mais si l'article 8 du décret déroge à ce principe en précisant que la juridiction primitivement saisie (tribunal de commerce ou une cour d'appel autre que celle de Paris) demeure compétente pour statuer sur les procédures introduites antérieurement au 1er décembre 2009, force est de constater qu'il ne précise pas la cour compétente pour connaître des appels des décisions rendues en matière de pratiques restrictives de concurrence par les tribunaux de commerce, qui n'ont pas été depuis lors institués juridictions spécialisées par le décret susvisé.
Par conséquent, dès lors qu'en vertu des dispositions d'ordre public de l'article R 331-3 du Code de l'organisation judiciaire, sauf dispositions particulières qui font défaut en l'espèce, la cour d'appel connaît de l'appel des jugements des juridictions situées dans son ressort, la Cour d'appel d'Amiens est régulièrement saisi par les appels interjetés contre le jugement déféré rendu par le Tribunal de commerce d'Amiens, juridiction de son ressort, de sorte que ceux-ci sont recevables, ainsi que l'a pertinemment relevé le conseiller de la mise en état.
2. Sur la rupture abusive ou brutale des contrats de distribution :
Selon l'article 1134 du Code civil, les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites, ne peuvent être révoquées que de leur consentement mutuel.
Elles doivent être exécutées de bonne foi.
Par une lettre recommandée avec avis de réception datée du 21 janvier 2009, la SAS Chrysler France informait la SA EDA que, conformément à l'article 15.3 du contrat de distribution, elle résiliait avec effet immédiat le contrat de distribution conclu entre elles, en raison d'un défaut de paiement d'une créance de 2 326 205,55 euro d'une part, et d'autre part de "l'absence d'explications sur des véhicules manquants".
Par une lettre recommandée avec avis de réception du même jour elle résiliait le contrat de distribution conclu avec la SAS Detroit VDA en faisant état des mêmes griefs, la dette de la SAS Detroit VDA s'élevant à la somme de 455 540,94 euro.
Les appelants soutiennent que l'intimée a abusé de son droit de résiliation en s'abstenant, en violation des stipulations contractuelles, de les mettre préalablement en demeure de remédier aux manquements contractuels allégués à l'appui de la décision unilatérale de résiliation, alors que de surcroît les parties s'étaient réunies le 20 janvier sous l'égide de Me Eric Rouvroy désigné en octobre 2008, à leur demande, en qualité de mandataire ad hoc, afin de rechercher une solution amiable.
Toutefois, la SAS Chrysler France est fondée à leur objecter qu'elle n'était pas tenue d'acquiescer à leurs demandes exprimées lors de cette réunion tenue plus d'un mois après ses mises en demeure, si elle estimait insuffisantes leurs propositions de règlement
Les appelants contestent le bien-fondé des motifs allégués par la SAS Chrysler France à l'appui de sa décision, aux motifs que celle-ci n'était pas propriétaire des créances dont elle réclamait le paiement, puisqu'elle les avait cédées à la SA MBFS, et qu'eux-mêmes avaient fourni spontanément des explications sur l'absence des véhicules.
Il a été convenu entre les parties que, conclus pour une durée indéterminée les contrats de distribution pouvaient être résiliés par l'une ou l'autre des parties moyennant le respect d'un préavis de 24 mois.
Toutefois il est stipulé à la clause 15.3 "Résiliation avec effet immédiat" les dispositions suivantes :
' L'une ou l'autre des parties peut résilier le présent contrat sans préavis pour motif grave.
Constitue notamment un motif grave le fait pour l'une des parties de manquer à l'une de ses obligations essentielles ou le manquement par l'une des parties à toute autre obligation contractuelle, s'il n'y a pas été dûment remédié après mise en demeure ayant constaté ledit manquement.'
a. Sur l'absence de véhicules sur les sites des distributeurs :
Il résulte d'un rapport d'audit daté du 17 décembre 2008 réalisé par la SA Auxiga sur les stocks des sociétés appelantes au 3 décembre 2008 qu'a été constatée l'absence de 55 véhicules sur les 106 figurant à l'inventaire du stock de la SA EDA que celle-ci a expliqué avoir prêtés à des clients, ainsi que l'absence de 11 véhicules sur les 28 figurant à l'inventaire de la SAS Detroit VDA pour laquelle la même explication a été fournie.
Les sociétés EDA et Detroit VDA ont fourni 66 'fiches de prêt clients' à partir desquelles l'auditeur a opéré des vérifications.
Les 15 personnes qui ont pu être contactées ont contesté avoir jamais eu à leur disposition un véhicule prêté par les distributeurs.
Les autres personnes n'ont pu être contactées, soit parce que leurs adresses et leurs numéros de téléphone étaient erronés, soit parce que certaines ne figuraient pas dans l'annuaire, soit parce qu'elles n'ont pas répondu.
A l'occasion de nouveaux contrôles des stocks réalisés les 15 et 16 décembre 2008, la SA Auxiga a constaté l'absence de 78 véhicules sur les 96 figurant à l'inventaire de la SA EDA dont 58 avaient été "livrés au client", ainsi que l'absence de 21 véhicules dont 11 déclarés "livrés au client" sur les 26 figurant à l'inventaire de la SAS Detroit VDA.
D'autres véhicules avaient donc disparu depuis le premier contrôle du 3 décembre.
Le gérant, M. Eric Douart, et le directeur financier des deux sociétés ont alors expliqué que les véhicules censés avoir été prêtés et pour lesquels des contrats de prêt avaient été fournis avaient en réalité été vendus, M. Eric Douart qualifiant dans une lettre adressée le 23 décembre 2008 à l'intimée "d'erreur administrative" les explications mensongères confortées par des dizaines de faux justificatifs, et les appelants se targuant d'avoir corrigé "spontanément" cette erreur, ce qui interdisait, soutiennent-ils, à la SAS Chrysler France de leur reprocher un défaut d'explications sur l'absence des véhicules pour résilier unilatéralement et sans préavis les contrats de distribution.
Il sera rappelé qu'en vertu de l'avenant à l'annexe 5 des conditions générales de vente, si le véhicule livré et facturé par la SAS Chrysler France n'était pas vendu dans les 30 jours suivant la date de facture, le distributeur bénéficiait pour régler la facture d'un crédit de 180 à 260 jours suivant la facture, selon le type de véhicules, et au plus tard dans ce délai 'jusqu'à la date de livraison du véhicule au client final'.
Il est donc établi que les sociétés appelantes ont délibérément dissimulé à la SAS Chrysler France les ventes aux consommateurs de véhicules livrés par elle dont elles ne contestent pas ne pas avoir payé le prix, qu'elles n'ont ensuite pas réglé malgré les mises en demeure adressées à chacune d'elles par lettres recommandées avec avis de réception par la SAS Chrysler France le 19 décembre 2008, conformément à l'avenant à l'annexe 5 du contrat qui lui permettait d'exiger le paiement sous 48 heures, si un contrôle devait révéler "un écart entre les produits financés et les produits présents."
En outre des saisies conservatoires de véhicules mises en œuvre les 5 et 12 janvier 2009 par la SAS Chrysler France révélaient que d'autres véhicules avaient disparu depuis les audits.
b. Sur la contestation des créances de la SAS Chrysler France :
Alors qu'à la réception des mises en demeure, notamment dans leur lettre du 23 décembre 2008 elles ne contestaient pas la qualité de créancière de la SAS Chrysler France, les appelantes par des conclusions déposées le 18 janvier 2011 soutiennent que la SAS Chrysler France n'était pas fondée à résilier sans préavis les contrats de distribution, au prétexte du non-paiement de créances qu'elle avait cédées à la SA MBFS, laquelle leur avait accordé des délais de paiement pour s'acquitter de leurs dettes, la SAS Chrysler France répliquant que ces créances lui avaient été rétrocédées par la SA MBFS à la suite des audits conformément à leur convention.
Contrairement à ce que prétend la SAS Chrysler France, il ne s'agit pas là d'une prétention nouvelle qui serait irrecevable en appel, mais d'un moyen nouveau spécialement autorisé par l'article 563 du Code de procédure civile.
Dans la mesure où le 17 octobre 2008 elle mettait en demeure la SA EDA de lui présenter des modalités de règlement de sa dette de 1 648 979,81 euro dans un délai expirant au 30 juin 2009 et exigeait un 1er paiement immédiat, la SA MBFS ne pouvait être satisfaite par la réponse du gérant de la SA EDA du 6 novembre suivant, qui sollicitait la suspension des actions en recouvrement et proposait 'un moratoire dans des conditions à déterminer en fonction des performances de son entreprise.'
Dès lors, la SA EDA ne démontre pas la réalité des prétendus délais de paiement jusqu'au 30 juin 2009 que lui aurait accordés la SA MBFS parce que celle-ci n'avait pas répondu à sa lettre du 6 novembre.
Les appelantes font valoir que la SAS Chrysler France ne rapporte pas la preuve de la rétrocession, qui obéit au formalisme prévu par le contrat de cession de créances, ainsi que par les articles 1689 et 1690 du Code civil, la rétrocession de créances n'étant pas autre chose qu'une cession de créances.
Elles se prévalent des décisions du juge commissaire puis du Tribunal de commerce de Dunkerque qui, à l'occasion d'une action en revendication engagée par l'intimée dans le cadre de la procédure de liquidation judiciaire de la SAS Detroit VDA, ont jugé que la rétrocession alléguée n'était pas établie, la SAS Chrysler France faisant état, à l'inverse, de décisions rendues dans le sens contraire dans le cadre de la procédure de redressement judiciaire de la SA EDA par le tribunal de commerce, puis la Cour d'appel d'Amiens, le pourvoi des appelantes contre l'arrêt de la cour d'appel ayant été rejeté par un arrêt de la Cour de cassation du 21 février 2012.
Elles ajoutent que la seule preuve indubitable de la rétrocession alléguée serait constituée par la production de ses pièces comptables de l'époque, notamment celles utilisées par son commissaire aux comptes, la société KPMG, seules propres à démontrer le paiement de la rétrocession par la SAS Chrysler France, que celle-ci, qui a la charge de la preuve, a refusé, et pour cause, de communiquer dans la présente instance, de même qu'à l'occasion des actions en revendication de véhicules assortis d'une clause de réserve de pro
Eu égard à l'étroitesse des liens qui unissent la SAS Chrysler France à la SA MBFS (Mercedes Benz Finacial Services) qui serait une filiale de son principal actionnaire, la société Mercedes Benz, les sociétés appelantes soutiennent que les attestations datées des 10 et 17 février 2009 émanant de la société MBFS, qui ne répondent pas aux exigences de l'article 202 du Code de procédure civile, sont dépourvues de toute force probante.
Elles prétendent encore que la société MBFS n'avait pas rétrocédé les créances litigieuses à la SAS Chrysler France mais au contraire, avait donné mandat à celle-ci de les recouvrer, aux termes, affirme-t-elle, d'une lettre que l'établissement de crédit adressait le 10 décembre 2008 à l'intimée.
Enfin, les appelantes affirment que l'assignation en paiement devant le juge des référés de Versailles que lui a délivrée le 28 janvier 2009 la SAS Chrysler France ne vaut pas la notification de cession prévue par l'article 1690 du Code civil, et que la SAS Chrysler France est incapable de prouver la date à laquelle la rétrocession alléguée par elle est intervenue, et qui doit être antérieure à la résiliation unilatérale des contrats.
De l'absence de rétrocession des créances impayées, les appelantes déduisent que la SAS Chrysler France n'était pas leur créancière et qu'elle n'était donc pas fondée à se targuer d'un défaut de paiement à l'appui de sa décision de rupture.
Précisant qu'elle n'appartient plus depuis octobre 2007 au même groupe que la société MBFS, la SAS Chrysler France répond que la convention de cession de créances est de nature consensuelle et n'obéit à aucun formalisme, les formalités prévues par les articles 1689 et 1690 du Code civil conditionnant l'obligation de délivrance de la créance cédée et l'opposabilité de la cession au débiteur cédé.
Elle affirme qu'en vertu de la convention de cession de créances professionnelles conclue avec la société MBFS prévoyant en cas d'impayé la rétrocession automatique de la créance litigieuse, la cessionnaire lui a rétrocédé les créances impayées de la SAS EDA lorsqu'elle a constaté l'absence des véhicules livrés par elle, mais non payés, dans les locaux de la SAS EDA.
Enfin, elle fait valoir d'une part que la rétrocession de créances a été reconnue par Me Rouvroy, administrateur judiciaire de la SA EDA qui l'a autorisée à reprendre des véhicules, et que d'autre part que la SA MBFS n'a pas déclaré cette créance au passif du redressement judiciaire de la SA EDA.
Aux termes de la clause 5.2-2 "rétrocession de créances et ajustements financiers" de la convention cadre de cessions de créances professionnelles et de partage de risques conclue entre la SAS Daimler Chrysler France devenue la SAS Chrysler France et la SA Daimler- Chrysler Services France, aux droits de laquelle vient la SA Mercedes Benz Financial Services, il est stipulé que :
" les parties conviennent d'ores et déjà, que dans tous les cas d'impayés, le cessionnaire rétrocédera au cédant les créances cédées afin de lui permettre d'exercer toute action en recouvrement ou en revendication.
La rétrocession des dites créances interviendra au prix nominal des créances ainsi cédées."
Du verbe rétrocéder employé au futur de l'indicatif, les appelantes déduisent pertinemment que la rétrocession envisagée n'est pas automatique dès la constatation d'un impayé, contrairement à ce que prétend la SAS Chrysler France.
Elles ajoutent en revanche aux stipulations du contrat de cession en soutenant que les modalités contractuelles de cession s'appliquent nécessairement à la rétrocession, ce qui ne résulte pas de la convention à laquelle elles ne sont pas parties.
Dans sa lettre adressée le 10 décembre 2008 à la SAS Chrysler France, la SA MBFS rappelle à celle-ci qu'elle supporte les risques de la disparition des véhicules vendus, objets des créances cédées, dont elle transmet la liste, ainsi que "leur revente en dehors des procédures et délais convenus" et lui rappelle qu'il lui "appartient désormais de réclamer au distributeur le paiement correspondant au prix des véhicules manquants ainsi que la pénalité de 50 euro TTC par véhicule manquant", ce rappel des dispositions de la convention de cession ne constituant pas, à l'évidence, un mandat de recouvrer les créances litigieuses, comme le prétend à tort la SA EDA.
En effet, après avoir adressé le 17 octobre 2008 à la SA EDA une mise en demeure restée infructueuse, la SA MBFS, alors titulaire des créances cédées, avait fait procéder, "aux contrôles physiques des stocks de véhicules" dans les locaux de la SA EDA et de la SAS Detroit VDA qui devaient révéler l'absence des véhicules déjà évoquée.
Comme le relèvent pertinemment les appelantes, la SAS Chrysler France ne peut soutenir en réponse à leur objection selon laquelle ces contrôles ont été commandés par la SA BMFS, qu'elle avait donné mandat à celle-ci de faire procéder à ces audits, alors qu'elle avait cédé les créances.
La cour constate cependant que les deux rapports datés du 17 décembre 2008 rédigés par la société Auxiga, auditeur, évoquent l'un, un contrôle physique effectué le 3 décembre précédent, l'autre un second contrôle après des vérifications des explications données entre temps par les sociétés appelantes effectuées les 15 et 16 décembre 2008, de sorte que ces deux rapports concernent une même opération commandée par la SA MBFS, alors cessionnaire des créances, qu'elle a ensuite rétrocédées à sa cédante, précisément parce que les véhicules avaient disparu des sites des distributeurs sans lui avoir été payés.
Il ressort clairement de sa lettre adressée le 10 décembre 2008 à la SAS Chrysler France que la SA MBFS entend rétrocéder à la deuxième les créances cédées par elle, et lui rappelle que leur recouvrement est désormais son affaire, ce qu'elle a confirmé dans deux "attestations" datées du 10 février et du 18 février 2009, dont la sincérité ne peut être mise en doute au prétexte que les deux sociétés entretiennent des liens commerciaux étroits, comme le fait valoir l'appelante, et parce qu'elles ne seraient pas conformes aux exigences de l'article 202 du Code de procédure civile, alors qu'il s'agit d'échanges écrits entre deux sociétés et que l'identité de leur auteur est incontestable.
Il ne s'agit donc pas à l'évidence d'un mandat confié par la SA MBFS à la SAS Chrysler France comme le soutient la SA EDA.
Cette rétrocession est également confirmée par un "rapport de constats" établi le 19 octobre 2010 par le commissaire aux comptes de la SAS Chrysler France, la société KPMG, laquelle conclut avoir vérifié la réalité de la rétrocession alléguée et le remboursement à la SA MBFS par la SAS Chrysler France de la somme de 2 364 557,60 euro correspondant aux factures impayées de la SAS EDA, peu important les précautions d'usage superflues utilisées par le rédacteur, mises en exergue par cette dernière.
C'est parce que les créances litigieuses lui avaient été rétrocédées par la SA MBFS que la SAS Chrysler France a mis en demeure les sociétés appelantes de lui payer les prix des véhicules fournis par elle par une lettre recommandée en date du 19 décembre 2008, sans que ces dernières contestent alors le bien-fondé de ces créance, puis les a assignées en paiement.
La SAS Chrysler France a ainsi assigné le 29 janvier 2009 la SA EDA en paiement de la somme de 2 536 251,36 euro et la SAS Detroit VDA en paiement de la somme de 455 540,94 euro devant le juge des référés du Tribunal de commerce de Versailles qui a fait droit à ces demandes par une ordonnance rendue postérieurement à la décision d'ouverture de la procédure de redressement judiciaire.
Si l'article 1689 du Code civil invoqué par les appelantes prévoit en effet que dans le transport d'une action ou d'un droit sur un tiers, comme en l'espèce, la délivrance s'opère entre le cédant et le cessionnaire par la remise du titre, il n'en demeure pas moins que la cession de créances est un contrat consensuel, valablement formé dès l'échange des volontés du cédant et du cessionnaire (qui n'est pas la SA EDA) à qui le texte susvisé permet d'exiger du cédant l'exécution de son obligation de délivrance, c'est-à-dire la remise du titre de créance.
De même, la signification du transport de créance faite au débiteur prévue par l'article 1690 du Code civil dont se prévaut l'appelante n'est pas une condition de la validité de la convention de cession, mais seulement de son opposabilité aux tiers, notamment au débiteur cédé, et en l'occurrence cette signification est constituée par les mises en demeure du 19 décembre 2008 et les assignations en paiement délivrées le 29 janvier 2009 qui permettaient aux débitrices d'identifier les créances rétrocédées.
Dès lors que la rétrocession de créances est un contrat consensuel formé dès l'échange de volontés des parties, la SAS Chrysler France était devenue propriétaire des créances rétrocédées dès la formation du contrat, peu important, comme le fait valoir la SA EDA, la date à laquelle est intervenu le paiement de cette rétrocession, soit le 17 février 2009, ainsi qu'il ressort du relevé de compte BNP Paribas du même jour annexé au rapport de la société KPMG du 19 octobre 2010.
La cour relève par ailleurs que les sociétés appelantes ne prétendent pas avoir réglé ces créances entre les mains de la SA MBFS, ou avoir fait des propositions de paiement à cette dernière, laquelle n'a pas déclaré les créances rétrocédées, c'est-à-dire le prix impayé des véhicules vendus aux passifs des procédures collectives ouvertes au profit des appelantes mais seulement une créance d'intérêts, seule la valeur nominale des créances étant contractuellement rétrocédée par la SA MBFS.
Par conséquent, contrairement à ce que soutiennent les appelantes, il est établi que la SA MBFS avait rétrocédé à la SAS Chrysler France les créances correspondant aux véhicules livrés par elle aux distributeurs de sorte que la SAS Chrysler France était fondé à invoquer le défaut de paiement de ses créances au soutien de sa décision de résiliation.
Enfin, pour justifier leurs défaillances contractuelles, les appelantes ne sauraient imputer à la SAS Chrysler France ses propres difficultés économiques, la crise générale des constructeurs automobiles, la crise financière et économique de 2008, ainsi que l'inadaptation de ses véhicules (4x4 et picks up de marque Jeep, Doodge et Chrysler) au marché européen, notamment parce qu'ils faisaient en France l'objet d'une fiscalité environnementale dissuasive, étant rappelé qu'elles avaient fait le choix vendre ce type de véhicules.
S'il est établi en revanche que, malgré ses dénégations dans cette instance, la SAS Chrysler France n'avait pas réglé ses primes d'objectifs pour l'année 2008 à la SA EDA, (qui n'en demande pas le paiement) soit 194 294,05 euro selon la créancière, ou 172 112,12 euro selon les écritures de la SAS Chrysler France dans une autre instance en vérification de créance, cette dettes de l'intimée, sans commune mesure avec celle de la SA EDA supérieure à 2 000 000 euro ne peut justifier les graves défaillances contractuelles de la SA EDA.
Dès lors que le paiement des véhicules qui lui ont été livrés par le constructeur est une obligation essentielle des distributeurs, et que la bonne foi qui préside à l'exécution des conventions imposait aux distributeurs d'informer la SAS Chrysler France des ventes des véhicules aux consommateurs et leur interdisait de fournir des explications mensongères accompagnées de faux à leur cocontractante, cette dernière était fondée, de bonne foi, à résilier unilatéralement et sans préavis les contrats de distribution eu égard à la gravité de ces manquements contractuels et ce en application des dispositions contractuelles rappelées précédemment.
Selon l'article L. 442-6 I.5° du Code de commerce invoqué par les appelants au soutien de leurs demandes d'indemnisation, mais à titre subsidiaire en appel, "Engage la responsabilité de son auteur et l'oblige à réparer le préjudice causé, le fait par tout producteur, commerçant, industriel de rompre brutalement, même partiellement, une relation commerciale établie, sans préavis écrit tenant compte de la durée de la relation commerciale et respectant la durée minimale de préavis déterminée en référence aux usages du commerce, par des accords interprofessionnels."
Ces dispositions ne font pas obstacle, précise cependant le texte "à la faculté de résiliation sans préavis, en cas d'inexécution de ses obligations par l'autre partie ou en cas de force majeure."
Par conséquent, dès lors qu'il est acquis qu'elles ont gravement failli à leurs obligations contractuelles, les sociétés appelantes ne sont pas fondées à se plaindre d'une rupture brutale des relations commerciales établies imposée par la SAS Chrysler France, quelque soit l'ancienneté de leurs relations commerciales avec cette société.
En définitive, dès lors qu'elle était fondée sur des défaillances contractuelles graves imputables aux sociétés appelantes, la résiliation unilatérale par la SAS Chrysler France des contrats de distribution conclus avec elles n'est ni abusive au sens de l'article 1134 du Code civil, ni brutale au sens de l'article L. 442-6 1.5) du Code de commerce, de sorte qu'il convient de rejeter les demandes d'indemnisation formées par la SA EDA, ainsi que par la SAS Detroit VDA et son liquidateur, le jugement critiqué étant ainsi confirmé.
Parce qu'elles succombent les appelantes seront condamnés au paiement des dépens d'appel, ainsi qu'au paiement, chacune, de la somme de 10 000 euro au titre de l'article 700 du Code de procédure civile, leurs propres demandes fondées sur ce texte étant rejetées.
Par ces motifs : LA COUR, statuant après débats publics, par arrêt contradictoire rendu en dernier ressort et mis à disposition du public au greffe, Constate que Me Eric Rouvroy n'intervient plus à l'instance depuis le jugement du Tribunal de commerce d'Amiens du 10 septembre 2010 arrêtant le plan de redressement de la SA EDA et désignant Me Sophie Lafarge en qualité de commissaire chargée de veiller à l'exécution de ce plan, Déclare recevables les appels interjetés le 22 janvier 2010 par la SA EDA et son administrateur Me Eric Rouvroy, et par la SAS Detroit VDA et son liquidateur Me Dominique Miquel, à l'encontre du jugement rendu le 29 décembre 2009 par le Tribunal de commerce d'Amiens, Dit que la résiliation unilatérale le 21 janvier 2009 par la SAS Chrysler France des contrats de distribution conclus le 16 septembre 2002 avec la SA EDA et le 29 novembre 2007 avec la SAS Detroit VDA n'est ni abusive au sens de l'article 1134 du Code civil, ni brutale au sens de l'article L. 442-6.1 5° du Code de commerce, Confirme le jugement rendu entre les mêmes parties le 29 décembre 2009 par le Tribunal de commerce d'Amiens, y ajoutant, Condamne la SA EDA et Me Dominique Miquel en qualité de liquidateur de la SAS Detroit VDA aux dépens de l'appel, Condamne la SA EDA à payer à la SAS Chrysler France la somme de 10 000 euro au titre de l'article 700 du Code de procédure civile, Condamne Me Dominique Miquel en qualité de liquidateur de la SAS Detroit VDA à payer à la SAS Chrysler France la somme de 10 000 euro au titre de l'article 700 du Code de procédure civile, Rejette les demandes fondées sur l'article 700 du Code de procédure civile présentées par la SA EDA et par Me Dominique Miquel es qualité de liquidateur de la SAS Detroit VDA.