CA Paris, Pôle 5 ch. 2, 10 janvier 2014, n° 11-21456
PARIS
Arrêt
PARTIES
Demandeur :
SFS Intec Holding AG (Sté), SFS Intec (SAS)
Défendeur :
Visserie Service (SA)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
Mme Aimar
Conseillers :
Mmes Nerot, Renard
Avocats :
Mes Grappotte-Benetreau, Bouvier Ravon, Eyraud
La société de droit suisse SFS Intec Holding AG est titulaire d'un brevet français FR 01 13654 déposé le 23 octobre 2011 sous priorité d'un brevet allemand du 27 octobre 2000 et publié le 3 mai 2002 sous le numéro 2 816 014, ayant pour titre "Vis pour entrer un profil creux dans une infrastructure".
La société SFS Intec SAS, filiale de la société SFS Intec Holding AG, a pour activité la fabrication de vis et boulons. Elle expose être le leader sur le marché des vis pour la fabrication et la pose de portes et fenêtres, notamment en aluminium et en PVC, et exploiter à Valence une usine de fabrication de telles vis.
Elle bénéficie d'une licence exclusive d'exploitation du brevet FR 01 13654 inscrite au Registre national des brevets le 10 novembre 2009 sous le n° 174289, et indique mettre en œuvre le dispositif breveté sous la référence SPTR-A.
Estimant que la société Visserie Service commercialisait des vis mettant en œuvre les revendications du brevet FR 0113654, la société SFS Intec Holding, dûment autorisée par ordonnance rendue sur requête par Monsieur le Président du Tribunal de Grande Instance de Paris le 20 octobre 2009, a fait procéder le 27 octobre 2009 à des opérations de saisie contrefaçon dans les locaux de la société Visserie Service.
Ayant découvert à l'issue de ces opérations que la société Visserie Service importait, présentait à la vente et commercialisait des vis référencées 2708607048 qu'elles estiment être la contrefaçon des revendications 1, 2, 3, 5 et 7 à 14 du brevet FR 01 13654, et que ces vis étaient fabriquées par une société chinoise Chite Entreprises Co LTD à partir d'un plan n° 270860748 établi par la société Visserie Service, la société SFS Intec Holding AG et la société SFS Intec SAS, ci-après les sociétés SFS Intec, ont alors fait assigner, par actes d'huissier respectifs du 25 novembre et du 15 décembre 2009, la société Visserie Service puis la société Chite Entreprise Co LTD devant le Tribunal de grande instance de Paris en contrefaçon des revendications n° 1, 2, 3, 5, et 7 à 13 du brevet FR 0113654 et en concurrence déloyale.
Par exploit en date du 24 décembre 2009, elles ont également fait assigner ces mêmes sociétés en référé devant le Président du Tribunal de grande instance de PARIS, afin d'obtenir des mesures d'interdiction provisoire.
Par ordonnance de référé rendue le 12 février 2010, le Président du Tribunal de grande instance de Paris a fait interdiction à la société Visserie Service de détenir ou de commercialiser des vis du type de celles ayant fait l'objet du procès-verbal de saisie-contrefaçon du 27 octobre 2009.
Suivant ordonnance du 16 février 2010, le juge de la mise en état a ordonné la jonction des affaires, déclaré parfait le désistement d'action et d'instance des sociétés SFS Intec de l'ensemble de leurs demandes à l'encontre de la société Chite ENTREPRISE CO LTD et a constaté l'extinction de l'instance à l'égard de cette société et le dessaisissement du tribunal de ce chef.
Par jugement contradictoire du 3 mai 2011 non assorti de l'exécution provisoire, le Tribunal de grande instance a :
- dit n'y avoir lieu de faire droit à la demande de donner acte des sociétés SFS Intec Holding et SFS Intec SAS,
- déclaré valable le procès-verbal de saisie-contrefaçon dressé le 27 octobre 2009 dans les locaux de la société Visserie Service,
- déclaré nulles pour défaut d'activité inventive les revendications 1 à 3, 5 et 7 à 14 du brevet français déposé le 23 octobre 2001, sous priorité allemande du 27 octobre 2000, enregistré sous le n° 01.13654 et publié sous le n° 2.816.014, dont la société SFS Intec Holding AG est titulaire,
- dit que la décision, une fois définitive, sera, à l'initiative de la partie la plus diligente, transmise à l'Institut National de la Propriété Industrielle pour être portée au Registre National des Brevets,
- déclaré en conséquence les sociétés SFS Intec Holding et SFS Intec SAS irrecevables en leurs demandes fondées sur la contrefaçon de ce brevet français,
- débouté la société SFS Intec SAS de ses demandes au titre de la concurrence déloyale,
- débouté les sociétés SFS Intec Holding et SFS Intec SAS de leurs demandes de publication judiciaire,
- condamné solidairement les sociétés SFS Intec Holding et SFS Intec SAS à payer à la société Visserie Service la somme de 10 000 euro au titre de l'article 700 du Code de procédure civile,
- condamné solidairement les sociétés SFS Intec Holding et SFS Intec SAS aux entiers dépens.
Les sociétés SFS Intec ont relevé appel de ce jugement par déclaration au greffe du 1er décembre 2011.
Par dernières écritures signifiées le 13 juillet 2012, les sociétés SFS Intec, appelantes, demandent à la cour de confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a déclaré valable le procès-verbal de saisie contrefaçon dressé le 27 octobre 2009 dans les locaux de la société Visserie Service, et, au visa des articles L. 611-1 et suivants du Code de la propriété intellectuelle et des articles 1382 et suivants du Code civil, de l'infirmer pour le surplus et en particulier, de :
- infirmer le jugement en ce qu'il a annulé les revendications n° 1, 2, 3, 5 et 7 à 14 du brevet français déposé le 23 octobre 2001 sous priorité allemande du 27 octobre 2000 enregistré sous le numéro 01 13654 et publié sous la numéro 2 816 014 dont la société SFS Intec Holding AG est propriétaire,
- dire qu'en important, en présentant à la vente, et en commercialisant des "vis litigieuses référencées 2708607048", la société Visserie Service s'est rendue coupable de contrefaçon des revendications n° 1, 2, 3, 5 et 7 à 14 du brevet numéro 0113 654-2 816 014 dont la société SFS Intec Holding est propriétaire,
- dire qu'en reproduisant les caractéristiques particulières de la visse SPTR'A commercialisée par la société SFS Intec SAS, la société Visserie Service s'est rendue coupable de concurrence loyale au préjudice de la société SFS Intec SAS,
- interdire à la société Visserie Service la fabrication, l'importation, la détention, la mise dans le commerce, la présentation, de vis constituant la contrefaçon des revendications 1, 2, 3, 5 et 7 à 14 du brevet numéro 01-13654 - 2 816 014, et ce sous astreinte définitive de 100 euro par infraction constatée et par jour de retard à compter de la signification de l'arrêt à intervenir,
- condamner la société Visserie Service à verser à la société SFS Intec Holding AG la somme de 70 000 euro à titre de dommages et intérêts,
- condamner la société Visserie Service à verser à la société SFS Intec SAS la somme de 61 607 euro à titre de dommages et intérêts,
- débouter la société Visserie Service de son appel incident,
- condamner la société Visserie Service à verser aux sociétés SFS Intec Holding AG et SFS Intec SAS la somme de 20 000 euro en application de l'article 700 du Code de procédure civile,
- condamner la société Visserie Service en tous les dépens, lesquels comprendront les frais de saisie contrefaçon diligentée par Maître Barnier le 27 octobre 2009, dont distraction au profit de leur conseil.
Par dernières conclusions signifiées le 14 mai 2012, la société Visserie Service, intimée, prie la cour de :
- lui donner acte qu'elle ne conteste plus la validité des revendications 1, 2, 3, 5, 7, 8, 9, 10, 11, 12, 13 et 14 du brevet français n° 01 13654 de la société SFS Intec Holding AG,
- dire et juger mal fondées les sociétés SFS Intec Holding AG et SFS Intec SAS en toutes leurs demandes, les en débouter,
- condamner conjointement et solidairement les sociétés SFS Intec Holding AG et SFS Intec SAS à lui payer la somme de 20 000 euro au titre de l'article 700 du Code de procédure civile,
- condamner les sociétés SFS Intec Holding AG et SFS Intec SAS aux entiers dépens de cette instance.
L'ordonnance de clôture a été prononcée le 24 octobre 2013.
SUR CE,
Sur la portée du brevet n° FR01 13654
Considérant que l'invention a pour but de développer une vis pour ancrer un profil creux dans une infrastructure, cette vis comportant une tige dont la zone de vissage est munie d'un filetage et dont l'autre extrémité comporte une tête avec une prise pour un outil ;
Que la partie descriptive expose que de telles vis s'utilisent notamment pour accrocher ou ancrer des châssis de fenêtre formés de profils creux sur une infrastructure, et ainsi au niveau d'une ouverture de mur, mais que l'on rencontre parfois une difficulté car en général, il n'y a pratiquement pas de possibilité de réglage, et lorsqu'on installe un châssis de fenêtre ou un châssis de porte dans une ouverture de mur, il est avantageux de pouvoir régler après avoir vissé les vis pour pouvoir placer exactement le châssis ;
Qu'il est ajouté que l'on connaît un moyen d'ancrage de fixation pour un élément de construction (DE U 29508741) ayant plusieurs zones filetées, distantes axialement les unes des autres sur la tige de la vis, et entre les zones filetées, des segments sans filetages, mais que pour réaliser avec un tel dispositif d'ancrage de fixation, un réglage de l'élément de construction (châssis), il faut dévisser le dispositif sur plusieurs tours jusqu'à ce que les zones filetées de la tige ne soient plus en prise avec les parois du profil formant l'élément de construction mais qu'on ne pourra fixer cet élément sur l'infrastructure que lorsque les zones filetées seront de nouveau en prise dans l'élément de construction ; que c'est pourquoi pour un réglage fin, il faut desserrer plusieurs fois l'induit de fixation sur plusieurs tours et visser de nouveau sur plusieurs tours jusqu'à obtenir le réglage définitif de l'élément de construction ;
Qu'il est précisé que l'invention a pour but de développer une vis pour permettre de fixer un profilé creux parfaitement par rapport à un mur ou un autre support, et de régler, une fois les vis déjà placées, directement et sans intermédiaire, le châssis par rapport à l'infrastructure ;
Qu'à cet effet la vis comporte :
- une tige dont la zone de vissage est munie d'un filetage et dont l'autre extrémité comporte une tête avec une prise pour un outil,
- une collerette de butée, prévue à une distance de la face inférieure de la tête de vis correspondant au moins sensiblement à l'épaisseur d'une paroi de profil à recevoir du profilé creux,
- dans la zone entre le tronc de cône de la tige munie du filetage et la collerette de butée, plusieurs nervures en forme de collerettes, distantes axialement les unes derrière les autres.
Qu'il est indiqué que la vis est vissée dans l'infrastructure et est prise de manière bloquée axialement avec les parois du profil creux, qu'il est possible de tourner la vis par rapport au profil creux pour l'enfoncer dans l'infrastructure ou l'en dégager afin de régler précisément le châssis par rapport à l'infrastructure, et ce même plusieurs fois car la vis est maintenue dans au moins deux parois successives du profil creux.
Que la partie descriptive développe les modes de réalisation de l'invention ;
Considérant que le brevet se compose à cette fin de 14 revendications dont seules les revendications 1, 2, 3, 5 et 7 à 14 sont opposées dans le cadre du présent litige, et dont la teneur suit :
1. Vis pour ancrer un profil creux dans une infrastructure, cette vis comportant une tige dont la zone de vissage est munie d'un filetage et dont l'autre extrémité comporte une tête avec une prise pour un outil, caractérisée par : une collerette de butée, prévue à la distance de la face inférieure de la tête de vis, la distance correspondant au moins sensiblement à l'épaisseur d'une paroi de profil à recevoir le profil creux, et dans la zone entre le tronc de cône de la tige munie du filetage et la collerette de butée, il y a plusieurs nervures en forme de collerettes, distantes axialement les unes derrière les autres.
2. Vis selon la revendication 1 caractérisée en ce que la collerette de butée est formée d'au moins deux troncs de cône, le tronc de cône tourné en direction de la tête de vis ayant un angle supérieur à 90° et le tronc de cône qui va en diminuant en direction de l'extrémité de la vis a un angle inférieur à 90°.
3. Vis selon la revendication 2 caractérisée en ce que le tronc de cône de la collerette de butée tourné en direction de la tête de vis forme un angle d'environ 120° et le tronc de cône de la collerette de butée qui diminue en direction de l'extrémité de la vis, a un angle d'environ 70°.
5. Vis selon la revendication 1 et/ou selon l'une quelconque des revendications 2 à 4 caractérisée en ce que dans la zone transitoire enter la tige munie du filetage et les nervures en forme de collerettes prévues sur la tige, il est prévu un organe d'élargissement en forme de double tronc de cône, qui fait un angle d'environ 70° pour la partie en angle aigu tournée vers le filetage et dans la direction des nervures en forme de collerettes, il forme un angle obtus de préférence un angle d'environ 120°.
7. Vis selon la revendication 5 ou 6 caractérisée en ce que le plus grand diamètre de l'organe d'élargissement est supérieur au diamètre de base de la tige au niveau du filetage mais inférieur au diamètre extérieur du filetage réalisé sur la tige.
8. Vis selon la revendication 1 caractérisée en ce que les nervures en forme de collerettes mesurées dans la zone de l'un de leurs troncs de cône ont leur plus grand diamètre supérieur au diamètre extérieur du filetage et ainsi supérieur au diamètre de l'organe d'élargissement, et leur plus petit diamètre est légèrement inférieur au diamètre extérieur du filetage .
9. Vis selon la revendication 1 caractérisée en ce que la collerette de butée est plus grande dans sa zone de plus grand diamètre que le diamètre de l'organe d'élargissement et que le diamètre de la nervure en forme de collerette.
10. Vis selon la revendication 1 caractérisée en ce que la distance de la collerette de butée par rapport à la tête de la vis est égale ou légèrement inférieure à l'épaisseur d'une paroi de profil à recevoir.
11. Vis selon la revendication 1 caractérisée en ce que la distance entre les nervures en forme de collerettes qui se suivent est inférieure à la distance de la collerette de butée par rapport à la tête de la vis.
12. Vis selon la revendication 1 caractérisée en ce que la distance axiale de la nervure en forme de collerette correspond au moins approximativement au pas du filetage.
13. Vis selon la revendication 1 caractérisée en ce que la longueur axiale d'une nervure en forme de collerette est supérieure à la distance entre deux nervures en forme de collerettes.
14. Vis selon la revendication 1 caractérisée en ce qu'à l'état mis en place, elle reçoit entre la collerette de butée et la tête une paroi d'un profil et par ses nervures en forme de collerettes, elle coopère avec la paroi directement suivante d'un profil.
Sur la validité du brevet n° FR01 13654
Considérant que dans ses dernières écritures du 22 mai 2005, la société Visserie Service ne conteste plus la validité du brevet n° FR01-13654 et notamment celle des revendications 1 à 3, 5 et 7 à 14 invoquées par les appelantes;
Qu'en conséquence, de par cette seule renonciation à la demande reconventionnelle, et étant précisé qu'il n'appartient dès lors plus à la cour de rechercher si les revendications opposées sont porteuses ou non d'activité inventive, il y a lieu de considérer comme valable le brevet FR 01 13654 déposé le 23 octobre 2011 ;
Sur la validité du procès-verbal de saisie contrefaçon :
Considérant que les appelantes poursuivent la confirmation du jugement déféré en ce qu'il a reconnu valable le procès-verbal dressé à l'issue des opérations de saisie-contrefaçon du 27 octobre 2009 et que l'intimé, dans ses dernières écritures du 22 mai 2005, ne conteste pas la validité de ce même procès-verbal mais au contraire en fait état comme moyen de preuve relatif à l'étendue de la contrefaçon reprochée ;
Qu'en conséquence, il convient de confirmer le jugement entrepris sur ce point.
Sur la contrefaçon :
Considérant que les appelants font valoir que la vis et le plan n° 2708607048 saisis lors des opérations du 22 mars 2007 révèlent que l'intimée a reproduit les caractéristiques des revendications n° 1, 2, 3, 5, 7, 8, 9, 10, 11, 12, 13 et 14 du brevet n° FR01-13654 ;
Que la société intimée, dans ses dernières écritures, ne conteste pas la matérialité de la contrefaçon qui lui est reprochée, sa réplique se limitant aux mesures de réparation réclamées ;
Qu'en conséquence, il y a lieu de dire que la contrefaçon est caractérisée ;
Sur la concurrence déloyale :
Considérant que les appelants exposent que l'examen de la vis de réglage TCLB 6 lobes filet bois 6X70-35 saisie au sein de la société Visserie Service démontre le caractère servile ou à tout le moins quasi-servile de la reproduction de la vis brevetée, par la reprise de l'ensemble de ses caractéristiques ;
Qu'elles font valoir que cette reproduction servile a engendré un risque de confusion dans l'esprit de la clientèle, qui reconnaît sa propre vis à sa forme particulière et que ce risque de confusion est outre aggravé par la renommée de la vis SPTR-A dans le secteur concerné, et estiment qu'en reproduisant cette vis, la société intimée a volontairement et manifestement cherché à bénéficier des de leurs importants investissement pour ce produit, qui représente 19 % de leur chiffre d'affaires et soutiennent enfin que, selon différents tests auxquels elles ont fait procéder, les vis produites par la société Visserie Service seraient de mauvaise qualité, altérant ainsi leur image de marque ;
Considérant que la société intimée met en exergue, en se référant à un document de comparaison, les différences entre les vis litigieuses et celles opposées, tenant notamment à leur taille pour en conclure que le public concerné par ces produits, constitué de professionnels de la menuiserie, ne pourra les confondre ;
Qu'elle indique en outre que ne peut lui être reprochée la reproduction de formes purement fonctionnelles au titre de la concurrence déloyale ; que la couleur blanche étant banale, il est peu probable que les consommateurs se réfèrent à cette couleur afin d'identifier le modèle de vis des sociétés appelantes, et conteste enfin la valeur probante des tests opposés aux motifs qu'ils n'ont pas été réalisés contradictoirement, et que leurs résultats sont contredits par d'autres tests effectués par elle qui confirment la conformité des vis aux normes en vigueur ;
Considérant ceci exposé, que l'examen des vis objets de la saisie-contrefaçon du 27 octobre 2009 révèlent que celles-ci présentent l'ensemble des caractéristiques de la vis SFS SPTR-A, qui ne relèvent d'aucune nécessité technique, à savoir un bombage particulier de la tête combiné à une empreinte en forme d'étoile, le laquage blanc de la tête, lequel est peu banal dans le domaine concerné, la forme de la partie sous la tête plate, se prolongeant par un segment lisse, puis par un collet dont le diamètre est supérieur au segment lisse mais inférieur à celui de la tête, et ce alors que la société Intec justifie que la vis SPTR-A qu'elle commercialise a obtenu un trophée d'or récompensant les innovations techniques et esthétiques des professionnels de la menuiserie PVC et du succès de son produit ;
Que l'importation, l'offre en vente et la vente de telles vis ne procèdent pas de l'exercice de la libre concurrence mais traduisent au contraire la volonté délibérée de la société intimée d'entretenir la confusion dans l'esprit du public concerné entre les produits en cause malgré les quelques différences relevées tenant notamment aux dimensions des vis, et constituent dès lors des actes de concurrence déloyale ;
Qu'en revanche la dangerosité des produits incriminés est insuffisamment démontrée par les analyses effectuées par les appelantes dès lors que la société Visserie Service a elle-même fait procéder à des tests de ses produits qui concluent que ceux-ci sont conformes au grade 3 de la norme NF-EN 1670 ;
Sur les mesures réparatrices
Considérant qu'il y a lieu de faire droit à la mesure d'interdiction sollicitée dans les termes définis au dispositif de la présente décision ;
Considérant qu'indiquant que la saisie contrefaçon pratiquée a permis de révéler que la société Visserie Service a reçu livraison d'environ 140 000 vis contrefaisantes, dont au moins 20 000 ont été commercialisées, la société SFS Intec Holding AG sollicite une indemnisation forfaitaire à hauteur de 50 centimes par vis, calculée sur l'ensemble des produits contrefaisants, soit la somme de 70 000 euro ; que la société SFS Intec SAS allègue quant à elle un préjudice commercial de 60 011 euro tenant principalement à la hausse du prix de l'acier de 7 % durant la période de commercialisation des vis litigieuses, hausse qu'elle n'aurait pas pu répercuter sur sa clientèle, ainsi qu' à sa marge commerciale perdue ;
Que la société Visserie Service soutient n'avoir commandé qu'un seul lot de vis de 121 000 pièces dont seules 15.600 ont été commercialisées pour un chiffre d'affaires de 981,82 euro et conteste en outre la hausse alléguée du prix de l'acier ;
Qu'elle expose que, depuis les opérations de saisie contrefaçon, elle s'est abstenue par précaution de tout nouvel approvisionnement ou de toute commercialisation des vis litigieuses et qu'elle a fait procéder le 11 janvier 2010, par huissier de justice, à la destruction par broyage de son stock ; que ces faits démontrent selon elle que le marché n'a pas été désorganisé et que les demandes indemnitaires des appelantes, dont elle demande le rejet, sont manifestement excessives ;
Considérant qu'eu égard à l'ensemble de ces éléments, le préjudice de la société SFS Intec Holding AG résultant de l'atteinte portée au brevet dont elle est titulaire, sera intégralement réparé par l'octroi de la somme de 40 000 euro à titre de dommages-intérêts du fait des actes de contrefaçon commis à son encontre et le préjudice commercial subi par la société SFS Intec SAS sera quant à lui intégralement réparé par l'octroi de la somme de 20 000 euro à titre de dommages-intérêts du fait des actes de concurrence déloyale commis à son encontre, le surplus des demandes non démontré étant rejeté ;
Sur les autres demandes
Considérant qu'il y a lieu de condamner la société Visserie Service, partie perdante, aux dépens ainsi qu'au remboursement des frais de saisies-contrefaçon du 27 octobre 2009 et qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du Code de Procédure Civile ;
Qu'en outre, elle doit être condamnée à verser aux sociétés SFS Intec, qui ont dû exposer des frais irrépétibles pour faire valoir leurs droits, une indemnité au titre de l'article 700 du Code de procédure civile qu'il est équitable de fixer à la somme totale de 15 000 euro ;
Par ces motifs, Infirme le jugement rendu le 3 mai 2011 par le Tribunal de Grande Instance de PARIS sauf en ce qu'il a déclaré valable le procès-verbal de saisie contrefaçon établi le 27 octobre 2009 dans les locaux de la société Visserie Service. Statuant à nouveau dans cette limite, Donne acte la société Visserie Service de ce qu'elle ne conteste plus la validité des revendications 1, 2, 3, 5, 7, 8, 9, 10, 11, 12, 13 et 14 du brevet français n° 01 13654 dont la société SFS Intec Holding AG est titulaire. Dit qu'en important, en présentant à la vente, et en commercialisant les vis litigieuses référencées 2708607048, la société Visserie Service s'est rendue coupable de contrefaçon des revendications n° 1, 2, 3, 5 et 7 à 14 du brevet numéro 0113 654-2816014 dont la société SFS Intec Holding est titulaire. Dit que la société Visserie Service s'est rendue coupable de concurrence loyale au préjudice de la société SFS Intec SAS. Interdit à la société Visserie Service la poursuite de ces agissements sous astreinte de 100 euro par jour de retard à compter de la signification du présent arrêt. Condamne la société Visserie Service à verser à la société SFS Intec Holding AG la somme de 40 000 euro à titre de dommages et intérêts en réparation des actes de contrefaçon commis à son encontre. Condamne la société Visserie Service à verser à la société SFS Intec SAS la somme de 20 000 euro à titre de dommages et intérêts en réparation des actes de concurrence déloyale commis à son encontre. Condamne la société Visserie Service à verser aux sociétés SFS Intec Holding AG et SFS Intec SAS la somme totale de 15 000 euro en application de l'article 700 du Code de procédure civile. Rejette toutes demandes plus amples ou contraires. Condamne la société Visserie Service en tous les dépens, lesquels comprendront les frais de saisie contrefaçon diligentée par Maître Barnier le 27 octobre 2009, et qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du Code de Procédure Civile.