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Décisions

Cass. com., 14 janvier 2014, n° 12-28.209

COUR DE CASSATION

Arrêt

Cassation

PARTIES

Demandeur :

Les Aubaines magasins (SAS)

Défendeur :

Selarl Dutour (ès qual.), Flopol (SARL), Meunier (Epoux), Meunier (SCI)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Espel

Rapporteur :

Mme Vallansan

Avocat général :

M. Le Mesle

Avocats :

SCP Nicolaÿ, de Lanouvelle, Hannotin, SCP Bénabent, Jéhannin

Douai, 2e ch. sect. 2, du 30 oct. 2012

30 octobre 2012

LA COUR : - Statuant tant sur le pourvoi principal formé par la société Les Aubaines magasins, que sur le pourvoi incident relevé par la société Jean-Gilles Dutour, liquidateur judiciaire de la société Flopol et M. et Mme Meunier ; - Attendu, selon l'arrêt attaqué, que la société Flopol a conclu en 2006 et 2007 deux contrats de franchise avec la société Les Aubaines magasins (la société Les Aubaines) ; qu'ayant constaté que leur exploitation n'était pas rentable, la société affiliée et ses gérants, M. et Mme Meunier ont assigné le franchiseur en annulation des contrats sur le fondement du dol et en indemnisation de leurs dommages respectifs ; que la société Flopol a été mise en liquidation judiciaire le 11 juillet 2012, le liquidateur intervenant à l'instance ;

Sur le premier moyen du pourvoi principal : - Attendu que la société Les Aubaines reproche à la cour d'appel de l'avoir condamnée à payer à la société Flopol la somme de 1 469 149 euros au titre des pertes enregistrées par celle-ci, alors, selon le moyen, que la condamnation à la réparation d'un préjudice suppose l'existence d'un lien de causalité direct et certain entre la faute invoquée et le préjudice allégué ; que lorsqu'est invoquée une faute précontractuelle ayant conduit à la conclusion d'un contrat, la victime prétendue du dol ne peut obtenir réparation des pertes financières résultant des difficultés d'exécution du contrat que s'il est établi que le contrat conclu ne pouvait être exécuté sans occasionner ces pertes ; qu'au cas présent, la cour d'appel, qui a retenu à l'encontre de la société Les Aubaines magasins une réticence dolosive dans les contrats d'affiliation conclus avec la société Flopol, a condamné la société Les Aubaines magasins à indemniser la société Flopol à hauteur de l'ensemble des pertes qu'elle aurait subies en exécutant lesdits contrats, au seul motif que ces pertes étaient liées à l'exécution des contrats conclus ; qu'en se déterminant ainsi, sans rechercher, comme elle y était pourtant invitée par l'exposante, si les pertes ne résultaient pas des choix de gestion opérés par la société Flopol et non de la teneur des contrats conclus, la cour d'appel, qui s'est arrêtée à l'existence d'un lien entre la réticence dolosive alléguée et la conclusion du contrat, sans établir de lien entre le contrat conclu et les pertes invoquées, n'a pas caractérisé de lien direct et certain entre la faute invoquée et le préjudice allégué et a, partant, privé sa décision de base légale au regard de l'article 1382 du code civil ;

Mais attendu que l'arrêt retient que le préjudice subi au titre des pertes réalisées correspond aux dépenses effectuées pour les travaux et investissements rendus nécessaires pour l'exploitation des fonds en exécution des contrats, ces dépenses trouvant leur cause, fût-ce pour partie dans la signature des contrats de franchise annulés ; qu'ayant ainsi fait ressortir l'existence d'un lien de causalité entre la faute et le préjudice subi, la cour d'appel a légalement justifié sa décision ; que le moyen n'est pas fondé ;

Sur les deuxième et troisième moyens du pourvoi : - Attendu que ces moyens ne seraient pas de nature à permettre l'admission du pourvoi ;

Mais sur le quatrième moyen du pourvoi, pris en sa première branche : - Vu l'article 1304 du Code civil ; - Attendu qu'il résulte de ce texte que l'annulation d'un contrat entraîne pour chacune des parties, un droit à la restitution des prestations fournies à l'autre ;

Attendu que pour débouter la société Les Aubaines de sa demande en paiement de sa créance au titre des marchandises livrées à la société Flopol et non réglées, l'arrêt retient que les marchandises dont s'agit correspondent à des produits livrés à l'occasion des contrats annulés par la cour et que si les contrats n'avaient pas été conclus, aucune commande n'aurait été effectuée ;

Attendu qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;

Et sur le moyen unique du pourvoi incident, pris en sa seconde branche : - Vu l'article 16 du Code de procédure civile ; - Attendu que, pour débouter d'office M. et Mme Meunier de leur demande tendant à obtenir la garantie de la société Les Aubaines au titre des cautionnements qu'ils ont consentis au profit de la société Flopol, l'arrêt retient que les contrats n'étaient pas versés aux débats ;

Attendu qu'en statuant ainsi, en relevant ce moyen d'office, sans inviter les parties à présenter leurs observations sur des cautionnements dont l'existence n'était pas discutée, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;

Par ces motifs, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs : casse et annule, mais seulement en ce qu'il a débouté M. et Mme Meunier de leur demande tendant à obtenir la garantie de la société Les Aubaines magasins au titre de cautionnements qu'ils auraient consentis au profit de la société Flopol et de la SCI Meunier, et débouté la société Les Aubaines magasins de sa demande en fixation de sa créance au titre de marchandises livrées à la société Flopol, l'arrêt rendu le 30 octobre 2012, entre les parties, par la Cour d'appel de Douai ; remet, en conséquence, sur ces points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Douai, autrement composée.