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Décisions

Cass. 1re civ., 5 février 2014, n° 12-25.748

COUR DE CASSATION

Arrêt

Cassation

PARTIES

Demandeur :

Lenovo France (Sté)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Charruault

Rapporteur :

M. Vitse

Avocat général :

M. Cailliau

Avocats :

SCP Piwnica, Molinié, SCP Nicolaÿ, Molinié

Jur. prox. Aix-en-Provence, du 9 janv. 2…

9 janvier 2012

LA COUR : - Attendu, selon le jugement attaqué, que le 6 décembre 2007, M. X a acquis dans un magasin d'informatique un ordinateur portable de marque Lenovo équipé de logiciels préinstallés ; que faisant valoir que le contrat de licence d'utilisateur final ne permettait que le remboursement intégral de l'ordinateur équipé de logiciels qu'il ne souhaitait pas conserver, M. X a assigné la société Lenovo France en remboursement du prix des logiciels ; qu'un arrêt du 15 novembre 2010 (1re Civ., pourvoi n° 09-11.161) a cassé le jugement ayant rejeté cette demande ;

Sur le premier moyen, pris en ses deux premières branches : - Attendu que la société Lenovo France fait grief au jugement d'accueillir la demande de remboursement du prix des logiciels et de retenir ainsi l'existence d'une pratique commerciale déloyale alors, selon le moyen : 1°) que la vente d'un produit composite, nonobstant la dissociabilité matérielle ou juridique des éléments qui le composent, ne constitue pas une pratique commerciale au sens de l'article 2 d) de la Directive n° 2005-29-CE du Parlement européen et du Conseil 11 mai 2005 relative aux pratiques commerciales déloyales des entreprises vis-à-vis des consommateurs dans le marché intérieur ; qu'en retenant, pour affirmer que la vente d'un ordinateur prêt à l'emploi constituait une pratique commerciale déloyale, que l'ordinateur et les logiciels, dont elle constatait par ailleurs qu'ils étaient individuellement "inexploitables", étaient dissociables et obéissaient à des régimes juridiques distincts, sans rechercher si l'ordinateur prêt à l'emploi ne constituait pas un produit composite mais unique, la juridiction de proximité a privé sa décision de base légale au regard de la disposition précitée et de l'article L. 122-1 du Code de la consommation, dans sa rédaction applicable en la cause, interprété à la lumière du texte communautaire ; 2°) que seules les pratiques commerciales mises en œuvre vis-à-vis des consommateurs entrent dans les prévisions de la Directive n° 2005-29-CE du 11 mai 2005 ; qu'ayant constaté que le modèle d'ordinateur en litige était destiné à une clientèle de petites et moyennes entreprises et de professionnels indépendants, la juridiction de proximité, qui a retenu, pour imputer à la société Lenovo France une pratique commerciale déloyale au sens du texte communautaire, que le modèle litigieux était offert à la vente dans une surface commerciale ouverte au grand public, a statué par un motif inopérant, en violation de l'article 2 a) et d) de la Directive n° 2005-29-CE du 11 mai 2005 et de l'article L. 122-1 du Code de la consommation, dans sa rédaction applicable en la cause, interprété à la lumière du texte communautaire ;

Mais attendu qu'après avoir relevé qu'un ordinateur prêt à l'emploi se composait de deux éléments intrinsèquement distincts, une partie proprement matérielle et un logiciel destiné à le faire fonctionner selon les besoins de l'utilisateur, la juridiction de proximité a constaté que le bien litigieux était vendu dans une surface commerciale ouverte au grand public, ce dont il résultait qu'il était proposé aux consommateurs ; qu'aucun des griefs ne peut être accueilli ;

Mais sur le premier moyen, pris en sa troisième branche : - Vu l'article 5,5 et le point 29 de l'annexe I de la Directive 2005-29-CE du 11 mai 2005 relative aux pratiques commerciales déloyales des entreprises vis-à-vis des consommateurs dans le marché intérieur ; - Attendu que pour accueillir la demande de remboursement du prix des logiciels préinstallés et retenir ainsi l'existence d'une pratique commerciale déloyale, le jugement considère que la société Lenovo France a exigé le paiement immédiat ou différé de produits fournis à M. X sans que celui-ci les ait demandés ;

Qu'en statuant ainsi, alors que M. X avait délibérément acquis l'ordinateur litigieux avant de solliciter le remboursement du prix des logiciels dont il connaissait l'installation préalable, la juridiction de proximité a violé, par fausse application, les textes susvisés ;

Sur le premier moyen, pris en ses quatrième et cinquième branches : - Vu l'article L. 122-1 du Code de la consommation, interprété à la lumière de la Directive précitée ; - Attendu que pour accueillir la demande de remboursement du prix des logiciels préinstallés et retenir ainsi l'existence d'une pratique commerciale déloyale, le jugement retient qu'un ordinateur prêt à l'emploi se compose de deux éléments intrinsèquement distincts, une partie proprement matérielle et un logiciel destiné à le faire fonctionner selon les besoins de l'utilisateur, qu'il ne pouvait être imposé à M. X d'adjoindre obligatoirement un logiciel préinstallé à un type d'ordinateur dont les spécifications propres mais uniquement matérielles avaient dicté son choix ;

Qu'en se déterminant ainsi, sans constater l'impossibilité pour M. X de se procurer, après information relative aux conditions d'utilisation des logiciels, un ordinateur "nu" identique auprès de la société Lenovo France, la juridiction de proximité a privé sa décision de base légale au regard du texte susvisé ;

Et sur le second moyen : - Vu l'article 1382 du Code civil ; - Attendu que pour accueillir la demande de dommages-intérêts formée par M. X, le jugement retient que ce dernier a dû entreprendre de fastidieuses démarches et subi d'inutiles tracas pour faire reconnaître ses droits ;

Qu'en se déterminant ainsi, sans caractériser la faute de la société Lenovo France, la juridiction de proximité a privé sa décision de base légale au regard du texte susvisé ;

Par ces motifs : Casse et annule, dans toutes ses dispositions, le jugement rendu le 9 janvier 2012, entre les parties, par la juridiction de proximité d'Aix-en-Provence ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit jugement et, pour être fait droit, les renvoie devant la juridiction de proximité de Salon-de-Provence.