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Décisions

Cass. crim., 5 septembre 1981, n° 80-94.792

COUR DE CASSATION

Arrêt

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Pucheus

Rapporteur :

M. Monzein

Avocat général :

M. de Sablet

Avocat :

Me Ancel

Rouen, ch. corr., du 13 nov. 1980

13 novembre 1980

LA COUR : - Statuant sur le pourvoi de X, contre un arrêt de la Cour d'appel de Rouen, chambre correctionnelle, du 13 novembre 1980, qui, pour publicité de nature à induire en erreur, l'a condamné à 5 000 francs d'amende ainsi qu'à des dommages-intérêts envers une partie civile ; - Vu le mémoire produit ;

Sur le moyen unique de cassation pris de la violation des articles 44 de la loi du 27 décembre 1973 et 1er de la loi du 19 août 1905, ensemble de l'article 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs et manque de base légale,

"en ce que l'arrêt attaqué a condamné le prévenu du chef de publicité mensongère,

"aux motifs que l'acheteur était en droit d'exiger les accessoires prévus par la marque et non ceux d'une autre marque ainsi qu'il est arrivé à M. Y, client trompé par l'offre fallacieuse ; qu'il appartenait au prévenu de mentionner les accessoires comme étant d'origines diverses ; que le non-lieu dont a bénéficié le prévenu du chef de tromperie sur la qualité, supposant l'existence d'un contrat et la mauvaise foi, ne lui permet pas d'obtenir la relaxe du chef de publicité mensongère, l'incrimination de la loi du 19 août 1905 étant différente de celle de l'article 44 de la loi du 27 décembre 1973 ; que ce dernier texte n'exige pas que la publicité qu'il prévoit et réprime ait été faite de mauvaise foi, mais concerne les allégations, indications ou présentations fausses ou de nature à induire en erreur,

"alors, d'une part, que les juges d'appel ne pouvaient, sans contradiction, relever tout à la fois que le client avait été trompé, pour retenir le délit de publicité mensongère et constater ensuite que le prévenu avait bénéficié d'une ordonnance de non-lieu sur le délit de tromperie sur la qualité,

"alors, d'autre part, que la cour, qui constatait l'exclusion du délit de tromperie sur la qualité de l'objet vendu par la seule voie publicitaire, ne pouvait dès lors décider que la publicité, source du contrat, portant sur les mêmes qualités substantielles de cet objet, comportait des indications ou présentations fausses ou de nature à induire en erreur ; qu'ainsi, en l'espèce, la constatation du non-lieu intervenu sur le délit de tromperie sur la qualité inférait l'absence d'élément matériel du délit de publicité mensongère portant sur les qualités substantielles, partant la relaxe sur cette seconde infraction ;

Attendu qu'il appert de l'arrêt attaqué et du jugement qu'il confirme après en avoir adopté les motifs non contraires, que X a été poursuivi pour avoir, en sa qualité de président du conseil d'administration des établissements Z, fait paraitre dans deux catalogues, distribués au public, en octobre 1977 et en octobre 1978, des annonces proposant aux clients des perceuses de marque Black et Decker, avec tous leurs accessoires alors que, si les perceuses mises en vente étaient bien de la marque indiquée, les accessoires qui les accompagnaient étaient d'une marque différente ;

Attendu que, pour tenter d'échapper à la condamnation du chef de publicité de nature à induire en erreur, qui lui était reprochée, le prévenu a, dans des conclusions déposées à l'audience de la cour d'appel, soutenu que, ayant bénéficié d'une ordonnance de non-lieu du chef de tromperie sur les qualités substantielles de la marchandise mise en vente ou vendue, il ne pouvait plus être déclaré coupable de l'infraction prévue par l'article 44 de la loi du 27 décembre 1973 qui lui était imputée ;

Attendu que, pour écarter ce moyen de défense, les juges du second degré ont observé que les éléments constitutifs des deux délits en question étaient différents et notamment que l'un d'eux supposait une tromperie réalisée ou en voie de réalisation, alors que l'autre reposait sur la simple possibilité d'induire le client éventuel en erreur ; que, si l'un exigeait la mauvaise foi de la part de son auteur, l'autre en était indépendant ; que la cour d'appel en a déduit que le fait que l'une des deux infractions avait été écartée ne faisait pas nécessairement disparaitre la seconde, qui pouvait être caractérisée indépendamment de la première ;

Attendu en l'espèce que l'arrêt, après avoir décrit la publicité servant de base à la poursuite, a relevé que tout dans les annonces laissait à penser au consommateur moyennement avisé qu'il se trouvait en présence d'un ensemble de marchandises de la marque indiquée et que, par suite, celui-ci pouvait se méprendre sur l'origine des accessoires et l'identité de leur fabricant ;

Attendu que, par ces énonciations, exemptes d'insuffisance et de contradiction, qui réunissent tous les éléments du délit prévu par la loi précitée, les juges, loin de violer les textes visés au moyen, en ont fait l'exacte application ; qu'ainsi le moyen ne peut être accueilli ;

Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;

Rejette le pourvoi.