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Décisions

CA Montpellier, 1re ch. a sect. 1, 13 février 2014, n° 11-07130

MONTPELLIER

Arrêt

Confirmation

PARTIES

Demandeur :

Metivier

Défendeur :

Auriach Automobiles (SARL)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Besson

Conseillers :

Mme Chiclet, M. Andrieux

Avocats :

Mes Vedel-Salles, Knoepffler, Senmartin, Greciano, Capelet

TGI Perpignan, du 25 août 2011

25 août 2011

FAITS ET PROCEDURE :

Le 18 juillet 2005, Monsieur Metivier a vendu à la SARL Auriach Automobiles son véhicule de marque BMW modèle 320 D en faisant état d'un kilométrage de 91 800 km Ce véhicule a été revendu le 18 août 2005 à Monsieur Bertin, lequel s'est vu indiquer lors de réparations effectuées chez un concessionnaire BMW que le véhicule avait parcouru plus de 300 000 km au 28 février 2007. La SARL Auriach a alors repris le véhicule à ses frais.

Elle a alors fait assigner Pascal Metivier en résolution de la vente et en restitution du prix.

Par jugement rendu le 25 août 2011, le Tribunal de grande instance de Perpignan a prononcé la résolution de la vente, le tribunal ayant considéré que si le dol n'était pas démontré, le contrat de vente était affecté d'une erreur sur les qualités substantielles de le chose vendue.

Appel a été interjeté par Pascal Metivier selon déclaration en date du 18 octobre 2011,

Par conclusions notifiées le 28 octobre 2013, l'appelant demande de requalifier le fondement juridique de l'action en action en garantie des vices cachés, de déclarer l'action prescrite, en toute hypothèse de débouter la SARL de sa demande tenant son erreur inexcusable, en tout état de cause de la condamner à lui payer la somme de 3 000 euros par application de l'article 700 du Code de procédure civile.

Par conclusions en date du 20 mars 2012, la société intimée demande de prononcer la nullité de la vente sur le fondement de l'article 1116 du Code civil, subsidiairement de confirmer le jugement par adoption de motifs, sauf sur la restitution du prix de vente en condamnant M. Metivier à payer la différence entre le prix de vente et celui auquel elle-même l'a revendu soit 8 000 euros, en tout état de cause le condamner à lui payer la somme de 1 500 euros à titre de dommages et intérêts et celle de 1 500 euros par application de l'article 700 du Code de procédure civile.

L'ordonnance de clôture est en date du 28 octobre 2013.

SUR QUOI :

Sur l'application de l'article 1116 du Code civil :

La SARL Auriach fonde sa demande de résolution de la vente au principal sur l'existence d'un dol. Il lui appartient donc de démontrer que Monsieur Metivier est à l'origine de la falsification du compteur kilométrique ayant permis d'annoncer un kilométrage de 91 800 km au lieu du kilométrage réel de 300 000 km, tel que résultant des indications électroniques fournies par le constructeur par l'intermédiaire de la clef de contact du véhicule.

Or il est constant que Pascal Metivier n'était pas le premier propriétaire du véhicule pour l'avoir acquis à la concession BMW à Figueras en début 2005 (immatriculation en février 2005). Les documents produits aux débats relatifs au carnet d'entretien entre 2003 et 2005 sont totalement illisibles et ne permettent pas de vérifier le kilométrage affiché par le véhicule litigieux avant son acquisition en Espagne par Monsieur Metivier, précision faite que dans sa demande d'identification du véhicule fourni à la DRIRE, ce dernier avait mentionné un kilométrage de 81 000 km Seule une recherche auprès des concessionnaires BMW en Espagne aurait permis de vérifier la fiabilité des chiffres annoncés mais elle n'a pas été faite. En l'état de ces éléments rien ne permet d'imputer à M. Metivier une modification frauduleuse du kilométrage de ce véhicule.

Le jugement sera confirmé en ce qu'il a rejeté la demande de nullité du contrat de vente pour dol.

Sur le vice caché et l'erreur sur la qualité substantielle :

L'intimée, demanderesse initiale à l'instance, fait siens les motifs du premier juge en ce qu'il a considéré qu'il n'y avait pas lieu de requalifier la demande en nullité fondée sur l'erreur en demande en garantie pour vice caché.

Il n'apparaît pas en effet que la demande en nullité du contrat pour erreur puisse être interprétée comme une demande en nullité pour vice caché, dès lors que la SARL ne fait nullement état d'un vice caché qui rendrait le véhicule impropre à l'usage auquel il est destiné mais invoque l'erreur sur les qualités substantielles de la chose vendue constitué par la différence de kilométrage, qui ne s'analyse pas en une défectuosité intrinsèque, dans la mesure où l'usage du véhicule est resté normal.

L'erreur est une cause de nullité de la convention quand elle porte sur la substance même de la chose.

Lors de la vente d'un véhicule, l'importance du kilométrage est une donnée substantielle dans la mesure où elle conditionne sa durée prévisible d'usage, qui est fonction de l'état d'usure de ses principaux organes, la durée d'utilisation restante étant plus ou moins importante suivant que le véhicule a ou non beaucoup roulé.

En l'espèce le véhicule était présenté comme ayant parcouru 91 822 km alors qu'il en avait parcouru 300 000 soit plus du triple, ce que la SARL Auriach, bien que professionnelle, ne pouvait appréhender dans la mesure où aucun élément particulier n'était susceptible d'attirer son attention sur le kilométrage du véhicule, précision apportée que le contrôle technique réalisé le 18 août 2005 n'a pas remis en cause le kilométrage affiché de 91 822 km et que seul le système informatique interne de BMW a permis à ce constructeur de lire les données techniques conservées par la clef de contact. A l'évidence un véhicule équipé d'un moteur de deux litres de cylindrée présentant 300 000 km est proche de la fin d'utilisation, ce qui n'est pas le cas d'un même véhicule comptabilisant 91 822 km, d'où des possibilités de revente très différentes.

C'est donc à bon droit que le premier juge, au regard de ces différents éléments, a considéré que la vente du 18 juillet entre les parties était effectivement affectée d'une erreur sur une qualité substantielle et a prononcé la nullité du contrat, entraînant les restitutions réciproques du véhicule et du prix.

Les parties ne contestent pas que la restitution du véhicule est désormais impossible puisque la SARL Auriach a vendu le véhicule en l'état pour la somme de 3 000 euros, ce qui n'est pas contesté par l'appelant. Il reste que l'impossibilité de restituer le véhicule et donc le prix de vente initial n'est pas exclusif de la possibilité pour l'acquéreur de demander une indemnité correspondant à la différence entre le prix obtenu lors de la vente en l'état (3 000 euros) qui doit être considéré comme la valeur de restitution, et son prix d'acquisition initial (11 000 euros) soit la somme de 8 000 euros que M. Metivier sera condamné à payer.

L'absence de proposition d'une solution transactionnelle ne suffit pas à caractériser la résistance abusive du vendeur. La demande de la SARL de ce chef sera rejetée, le jugement étant confirmé.

L'équité commande par contre de faire application de l'article 700 du Code de procédure civile en allouant à la SAL la somme de 1 200 euros de ce chef.

Par ces motifs : LA COUR, statuant publiquement par arrêt contradictoire et en dernier ressort, Confirme le jugement sur la nullité du contrat de vente du 18 juillet 2005, sur le débouté de la demande à titre de dommages et intérêts de la SARL Auriach pour résistance abusive, sur l'application de l'article 700 du CPC et les dépens, Le réforme pour le surplus, Constate que la restitution du véhicule et du prix de vente s'avère impossible, Condamne Pascal Metivier à verser à la SARL Auriach Automobiles la somme de 8 000 euros à titre de dommages et intérêts, Condamne Pascal Metivier à verser à la SARL Auriach Automobiles la somme de 1 200 euros par application de l'article 700 du Code de procédure civile, Condamne Pascal Metivier aux dépens, qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile.