Livv
Décisions

CA Versailles, 3e ch., 10 mai 2012, n° 10-07524

VERSAILLES

Arrêt

Confirmation

PARTIES

Demandeur :

Fitoussi

Défendeur :

Garage Leclerc (SARL)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Valantin

Conseillers :

Mmes de Martel, Bonnet

Avocats :

SCP Lissarrague Dupuis Boccon Gibod, Mes Cohen-Sabban, Jullien, Gelpi, Berleand

TI Colombes, du 20 août 2010

20 août 2010

Par acte sous seing privé du 12 septembre 2008, la SARL Garage Leclerc a cédé à M. Laurent Fitoussi un véhicule d'occasion Renault Clio.

Ayant trouvé dans la boîte à gants du véhicule, une ancienne carte verte espagnole au nom de la SA Avis, M. Laurent Fitoussi en a déduit que le véhicule avait été utilisé par un loueur ce dont il n'avait pas eu connaissance avant la vente.

Considérant que le Garage Leclerc s'était volontairement abstenu de lui indiquer cette circonstance, M. Laurent Fitoussi a assigné, le 19 novembre 2009, la SARL Garage Leclerc aux fins d'obtenir l'annulation de la vente du véhicule et la condamnation du vendeur à lui payer la somme de 9 740 euro correspondant au montant du prix de vente et à celui de la carte grise du véhicule.

Par jugement du 20 août 2010, le Tribunal d'instance de Colombes a :

- rejeté les demandes visant à voir écarter des débats les pièces n° 2 à 5 du demandeur,

- débouté M. Laurent Fitoussi de l'intégralité de ses demandes,

- condamné M. Laurent Fitoussi à payer à la SARL Garage Leclerc la somme de 500 euro sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile.

Par acte du 7 octobre 2010, M. Laurent Fitoussi a interjeté appel du jugement rendu par le Tribunal d'instance de Colombes en date du 20 août 2010.

M. Laurent Fitoussi, dans ses dernières conclusions visées le 10 janvier 2011, demande à la Cour d'infirmer en toutes ses dispositions le jugement rendu le 20 août 2010 par le Tribunal d'instance de Colombes,

- Statuant à nouveau,

- de dire que le Garage Leclerc a manqué à son obligation d'information telle que définie par l'article L. 111-1 du Code de consommation,

- de dire que le consentement de M. Laurent Fitoussi a été surpris par la réticence dolosive du Garage Leclerc,

- en conséquence, de prononcer l'annulation de la vente intervenue le 12 septembre 2008,

- de condamner le Garage Leclerc à payer à M. Laurent Fitoussi la somme de 9 740 euro correspondant aux sommes suivantes :

* 9 500 euro au titre du prix de vente,

* 240 euro au titre du montant de la carte grise.

La SARL Garage Leclerc, dans ses dernières conclusions visées le 25 juillet 2011, demande à la cour :

- A titre liminaire,

- de dire et juger que les pièces n° 2 et n° 6 produites par M. Laurent Fitoussi devront être écartées des débats,

- A titre principal,

- constater que M. Laurent Fitoussi n'apporte pas la preuve de ce que le véhicule aurait été utilisé comme véhicule de location courte durée,

- constater l'absence de faute de la SARL Garage Leclerc,

- confirmer le jugement dont appel sur ces points,

- rejeter l'ensemble des demandes de M. Laurent Fitoussi.

La cour renvoie à ces conclusions déposées et soutenues à l'audience, pour un plus ample exposé des moyens et prétentions des parties, conformément à l'article 455 du Code de procédure civile.

MOTIFS DE LA DECISION

- Sur le rejet des pièces 2 et 6 de M. Laurent Fitoussi

La pièce 2, dont le rejet avait été demandé en première instance, n'avait pas été écartée des débats ; cependant, s'il est possible ainsi que le premier juge l'a relevé, de comprendre que ce document correspond à une attestation d'assurance Allianz espagnole, le détail du texte pouvait être rejeté en l'absence de traduction.

M. Laurent Fitoussi a fait établir ces traductions, tant pour la pièce 2 que pour la pièce 6 intitulée "rapport Avis" dont le rejet est également demandé. Ces deux pièces ne seront pas écartées.

- Sur la réticence dolosive du Garage Leclerc

M. Laurent Fitoussi invoque tout d'abord un vice du consentement, le dol, qu'il lui appartient d'établir, aux conditions posées par l'article 1116 du Code civil.

Or, le dol n'est une cause de nullité de la convention, que si les manœuvres pratiquées par le vendeur (en l'espèce) sont telles qu'il est évident que sans ces manœuvres, M. Laurent Fitoussi n'aurait pas contracté.

S'agissant simplement de ce point, M. Laurent Fitoussi, qui affirme que le garage lui a volontairement caché l'appartenance du véhicule à une flotte de véhicules de location, n'établit nullement que la connaissance de cette circonstance l'aurait fait renoncer à l'achat du véhicule.

Tout d'abord, M. Laurent Fitoussi ne fait valoir aucun préjudice lié à l'utilisation de ce véhicule : aucune usure prématurée, aucune erreur sur le kilométrage réel, aucun élément propre à démontrer que la connaissance par M. Laurent Fitoussi de cette appartenance l'aurait "de manière évidente" déterminé à ne pas contracter.

Le fait d'avoir appartenu à une compagnie de location peut aussi signifier en effet que le véhicule a été soumis à un contrôle régulier ; et la location, selon les pièces produites, ne serait intervenue que quelques mois de janvier à novembre 2007.

M. Laurent Fitoussi ne démontre donc pas, autrement que par des motifs hypothétiques (la conduite peu appropriée des utilisateurs), en quoi la connaissance de cette appartenance l'aurait dissuadé de contracter.

Il ne démontre pas davantage en quoi l'élément découvert par ses soins constituait une qualité substantielle du véhicule. Il aurait fallu, pour en faire une qualité substantielle, qu'il fasse entrer cette exigence précise et inhabituelle dans le champ contractuel. Autrement, le caractère substantiel ne relève pas de la simple évidence.

Ainsi et de ce seul fait, la demande de M. Laurent Fitoussi fondée sur le dol ne peut aboutir.

- Sur l'article L. 111-1 du Code de la consommation

Aux termes de cette disposition, tout professionnel vendeur de biens doit, avant la conclusion du contrat, mettre le consommateur en mesure de connaître les caractéristiques essentielles du bien ; et en cas de litige, il appartient au vendeur de prouver qu'il a exécuté ses obligations.

Il est constant qu'une obligation d'information précontractuelle pèse sur le vendeur professionnel et qu'il appartient au Garage Leclerc, aux termes de cette disposition, de prouver qu'il a exécuté cette obligation portant "sur les caractéristiques essentielles du bien".

Or, d'une part, le Garage Leclerc a acheté le véhicule à la société Renault France et n'a donc pas nécessairement eu connaissance de son ancienne affectation, mais d'autre part, et surtout, le fait que le véhicule ait pu être affecté entre janvier et novembre 2007 à la location ne constitue pas une "caractéristique essentielle du véhicule" soumise au devoir d'information précontractuel du Garage Leclerc.

Ainsi le Garage Leclerc n'a pas manqué à l'obligation prescrite par l'article L. 111-1 du Code de la consommation.

Il convient en conséquence de confirmer le jugement en ce qu'il a débouté M. Laurent Fitoussi de ses demandes et l'a condamné au paiement d'un article 700 du Code de procédure civile.

- Sur les frais irrépétibles

Il est inéquitable de laisser à la charge du Garage Leclerc les frais non compris dans les dépens de l'instance.

M. Laurent Fitoussi sera condamné à lui payer la somme de 1.000 euro par application de l'article 700 du Code de procédure civile.

Par ces motifs : LA COUR, statuant en audience publique, par arrêt contradictoire et en dernier ressort, Rejette la demande tendant à écarter la pièce 6 de M. Laurent Fitoussi, Confirme le jugement rendu par le Tribunal d'instance de Colombes du 20 août 2010 pour le surplus (y compris sur la recevabilité de la pièce 2), Y ajoutant, Condamne M. Laurent Fitoussi à payer au Garage Leclerc la somme de 1 000 euro par application de l'article 700 du Code de procédure civile au titre des frais d'appel, Condamne M. Laurent Fitoussi aux dépens d'appel et autorise Me Jullien de L'AARPI JRF Avocats, avocats, à procéder à leur recouvrement dans les conditions prévues par les dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile.