Cass. com., 8 avril 2014, n° 13-15.410
COUR DE CASSATION
Arrêt
Cassation
PARTIES
Demandeur :
Dalvard industrie (SA)
Défendeur :
Sallei
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Espel
Rapporteur :
Mme Mouillard
Avocat général :
M. Debacq
Avocats :
SCP Piwnica, Molinié
LA COUR : - Attendu, selon l'arrêt attaqué (Besançon, 23 janvier 2013), que la société Dalvard industrie (la société Dalvard), ayant pour activité la déformation du métal et la fabrique de pièces sur plan, entretenait avec M. Sallei des relations commerciales en tant qu'agent d'affaires lorsque celui-ci, en janvier 2008, l'a interrogé sur le calcul de ses commissions, en revendiquant le statut d'agent commercial ; que n'ayant pas obtenu de réponse satisfaisante de la société Dalvard, M. Sallei l'a fait assigner en paiement de diverses indemnités, notamment de rupture ; qu'imputant la fin de la relation à M. Sallei, la société Dalvard a formé une demande de dommages-intérêts reconventionnelle ;
Sur le moyen unique, pris en sa première branche : - Attendu que la société Dalvard fait grief à l'arrêt de sa condamnation envers M. Sallei au titre de la rupture du mandat d'intérêt commun ayant lié les parties et du rejet de ses prétentions alors, selon le moyen, que les parties ne peuvent soumettre à la cour d'appel des prétentions nouvelles qui ne tendent pas aux mêmes fins et n'obéissent pas aux mêmes conditions que celles soumises au premier juge ; qu'en première instance, M. Sallei s'était borné à demander paiement d'une indemnité compensatrice de préavis et d'une indemnité de fin de contrat, avec des dommages et intérêts, par application des dispositions spéciales relatives au statut d'agent commercial, cette qualité étant la seule dont M. Sallei se prévalait alors ; qu'en jugeant dès lors recevable la demande d'appel de M. Sallei visant à obtenir réparation d'une rupture brutale des relations commerciales dans le cadre d'un mandat d'intérêt commun, là où une telle demande, présentée à titre subsidiaire, n'obéissait pas aux mêmes conditions et ne tendait pas aux mêmes fins que celles soumises au premier juge, la cour d'appel a violé les articles 564 et 565 du Code de procédure civile ;
Mais attendu que la cour d'appel, qui a retenu que la demande de dommages-intérêts pour rupture brutale d'un mandat d'intérêt commun, formée par M. Sallei en cause d'appel, tendait aux mêmes fins que celle qu'il avait présentée en première instance au titre d'un contrat d'agent commercial, à savoir la réparation des conséquences de la rupture des relations contractuelles des parties, encore que les fondements juridiques invoqués soient différents, a fait l'exacte application des textes visés au moyen en déclarant cette demande recevable ; que le moyen n'est pas fondé ;
Mais sur le moyen, pris en sa troisième branche : - Vu l'article L. 442-6, I, 5° du Code de commerce ; - Attendu qu'il résulte de ce texte que le délai du préavis suffisant s'apprécie en tenant compte de la durée de la relation commerciale et des autres circonstances au moment de la notification de la rupture et qu'en cas d'insuffisance du préavis, le préjudice en résultant est évalué en fonction de la durée du préavis jugée nécessaire ;
Attendu qu'après avoir jugé la société Dalvard fautive pour avoir rompu sans préavis la relation commerciale qui l'unissait à M. Sallei, l'arrêt se borne à retenir que, compte tenu de la durée du préavis raisonnablement exigible et du préjudice né des circonstances de la rupture, la somme de 58 379 euros mise en compte par M. Sallei apparaît adaptée ;
Attendu qu'en se déterminant ainsi, sans préciser la durée du préavis qu'elle jugeait suffisant au regard de la durée de la relation commerciale et des autres circonstances au moment de la rupture, la cour d'appel a privé sa décision de base légale ;
Par ces motifs, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs : Casse et annule, mais seulement en ce que, infirmant le jugement, il condamne la société Dalvard industrie à payer à M. Sallei la somme de 58 379 euros au titre de la rupture du contrat d'intérêt commun ayant lié les parties, l'arrêt rendu le 23 janvier 2013, entre les parties, par la Cour d'appel de Besançon ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la Cour d'appel de Paris.